par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 25 avril 2007, 06-13872
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
25 avril 2007, 06-13.872

Cette décision est visée dans la définition :
Filiation




Attendu que Mme X... a donné naissance, le 18 janvier 1993, à un enfant prénommé Julien, qu'elle a reconnu le 26 janvier 1993, Franck Y... l'ayant, pour sa part, reconnu deux jours après sa naissance ; que Franck Y... est décédé, le 13 mars 2002, des suites d'un accident de la circulation ; que par acte du 7 août 2002, son père, M. Henri Y..., soutenant que son fils n'était pas le père de Julien, a assigné, sur le fondement de l'article 339 du code civil dans sa rédaction alors applicable, l'enfant, représenté par un administrateur ad hoc, ainsi que sa mère, en contestation de reconnaissance et a sollicité une expertise biologique ;

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu que M. Henri Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 janvier 2006) de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir ordonner une expertise biologique aux fins de déterminer si Franck Y... pouvait être le père biologique de l'enfant Julien, ensemble de sa contestation de la reconnaissance de cet enfant, alors, selon le moyen :

1°/ que l'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder ; qu'un tel motif ne saurait s'évincer du souci de préserver la paix ou la stabilité de la famille, de la prise en compte de l'intérêt de l'enfant, de l'insuffisance des preuves produites par ailleurs au soutien de la contestation, ou encore de l'existence d'une possession d'état conforme à la reconnaissance litigieuse, dès lors que cette possession d'état, faute d'avoir duré dix ans au moins, ne fait naître aucun obstacle à l'action et donc à la manifestation de la vérité biologique ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel viole les articles 339 du code civil et 146 du nouveau code de procédure civile, l'article 3, paragraphe 1, de la Convention internationale du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant et l'article 8, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que si l'impossibilité de procéder à l'expertise biologique constitue un motif légitime de ne pas l'ordonner, il appartient au défendeur, dès lors que l'expertise est de droit en la matière, d'établir cette impossibilité ; qu'en reprochant à M. Henri Y... de ne point rapporter la preuve qu'un échantillon de sang de l'auteur défunt de la reconnaissance contestée avait été conservé, la cour d'appel inverse la charge de la preuve, violant l'article 1315, alinéa 2, du code civil ;

3°/ que si la cour d'appel exprime un doute quant à la conservation d'un échantillon sanguin permettant de faire procéder à un examen comparé des sangs, et si elle fait état de l'opposition de l'enfant Julien à voir procéder à une expertise génétique, postulant l'exhumation du corps du défunt, elle ne constate à aucun moment, par des motifs exempts d'incertitude, que l'expertise biologique se heurte à une impossibilité matérielle susceptible de constituer un motif légitime de rejet de la demande ; qu'à cet égard, l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard des articles 339 du code civil et 146 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé, d'abord, la volonté affirmée et continue de Franck Y..., qui, de son vivant, n'a exercé aucune action en contestation de reconnaissance, d'assumer sa paternité et d'élever Julien comme son fils, puis son attachement profond pour l'enfant dont il a donné le prénom à une nouvelle SCI, la dénommant "SCI Julien", la cour d'appel, constatant que la preuve de la conservation d'un échantillon de sang permettant un examen comparé n'était pas rapportée et que l'administrateur ad hoc de l'enfant s'opposait à une exhumation du corps, a, sans inverser la charge de la preuve, caractérisé l'existence d'un motif légitime rendant impossible l'expertise biologique ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses banches ;

Sur le second moyen, pris en ses diverses branches, tel qu'il figure au mémoire en demande :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à M. Z..., en qualité d'administrateur ad hoc de l'enfant Julien, une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;

Attendu qu'après avoir établi le caractère abusif de l'action en contestation de reconnaissance, poursuivie en appel par M. Henri Y..., qui n'ignorait plus la volonté de son fils d'assumer la paternité de Julien, la cour d'appel, par une décision motivée, a pu retenir sa mauvaise foi et fixer le montant des dommages-intérêts dus pour l'enfant, déjà très choqué par la mort brutale de son père et déstabilisé par la remise en cause de sa filiation par son grand-père ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi  ;

Condamne M. Henri Y... aux dépens ;

Vu les articles 700 du nouveau code de procédure civile et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille sept.



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Cette décision est visée dans la définition :
Filiation


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.