par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 6 avril 2016, 14-13484
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Cour de cassation, chambre sociale
6 avril 2016, 14-13.484

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Mme X... a été engagée par la banque Chaix, le 1er décembre 1984 ; qu'elle a été élue membre suppléant du comité d'entreprise le 6 juillet 2010 ; qu'invoquant notamment des faits de harcèlement moral, la salariée a saisi le 6 janvier 2011 la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude le 8 juin 2012 après autorisation de l'inspecteur du travail ; que, par décision du 13 décembre 2012, le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail en raison d'un vice de procédure ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches, le deuxième et le troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la salariée une somme à titre d'indemnité à la suite de l'annulation de l'autorisation de licenciement, et une certaine somme au titre des congés payés y afférents, alors, selon le moyen, que l'indemnisation d'un préjudice moral n'ouvre pas droit au paiement de congés payés ; qu'en fixant les congés payés en fonction d'une somme qui incluait l'indemnisation d'un préjudice moral, la cour d'appel a violé l'article L. 3141-22 du code du travail, ensemble son article L. 2422-4 ;

Mais attendu que l'indemnité due, en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, au salarié protégé, licencié sur le fondement d'une décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ensuite annulée, a, de par la loi, le caractère d'un complément de salaire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le quatrième moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 2411-1 et L. 2411-8 du code du travail ;

Attendu que pour allouer à la salariée, en sus de l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail en cas d'annulation de l'autorisation de licenciement, une certaine somme au titre de la violation de son statut protecteur, l'arrêt retient que le harcèlement moral est caractérisé, qu'il convient de faire droit à la demande de la salariée, que, dans la mesure où la salariée était titulaire d'un mandat de représentation depuis son élection au comité d'entreprise le 6 juillet 2010, la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur, et que la salariée qui ne demande pas sa réintégration est fondée à réclamer une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'elle aurait perçue depuis la date de son éviction le 8 juin 2012 jusqu'à l'expiration de la période de protection ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la salariée avait été licenciée le 8 juin 2012 après autorisation de l'inspecteur du travail, de sorte que la rupture du 8 juin 2012 n'était pas intervenue en méconnaissance du statut protecteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la sixième branche du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il alloue à Mme X... une indemnité pour violation du statut protecteur, l'arrêt rendu le 7 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Banque Chaix.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame Marie-Madeleine X... les sommes de 7. 452 euros à titre d'indemnité à la suite de l'annulation de l'autorisation de licenciement, de 745, 20 euros au titre des congés payés afférents de l'AVOIR condamné aux dépens ainsi qu'au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'indemnité due à la suite de l'annulation de l'autorisation de licenciement : Il sera immédiatement observé que la Société Banque Chaix ne produit aucun moyen de défense de ce chef de demande. L'article L. 2422-4 du code du travail énonce que lorsque l'annulation de la décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié concerné a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice tant moral que matériel subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration s'il l'a demandée dans le délai de deux mois, ou à l'expiration de ce délai dans le cas contraire. Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à ladite indemnité, qui constitue un complément de salaire. Il revient au juge de déterminer et d'évaluer le préjudice subi lequel doit être apprécié en déduction des sommes que l'intéressé a pu percevoir pendant la période litigieuse. En l'espèce, Madame X..., élue le 6 juillet 2010 en qualité de membre suppléant au Comité d'Entreprise, était licenciée le 8 juin 2012 après autorisation de l'inspection du travail, cette décision étant annulée par décision du Ministre du travail notifiée le 15 décembre 2012 ; faute de recours, la décision du Ministre du travail est devenue définitive. Il en résulte que Madame X... est bien fondée dans sa demande. En réparation de son préjudice matériel, il lui sera allouée une indemnité égale au salaire qui aurait dû lui être versé de la date de son licenciement jusqu'au 15 février 2013 (deux mois après la notification de la décision du Ministre du travail) déduction faite des sommes perçues à d'autres titres. Il sera tenu compte du calcul précis et pertinent de la salariée pour évaluer ainsi le préjudice matériel calculé comme ci-dessus à la somme de 6. 952 euros. En outre, Madame X... a incontestablement subi un préjudice moral lequel ne peut toutefois, contrairement à ses allégations, s'étendre à son placement en invalidité et à sa déclaration d'inaptitude qui ont précédé la mesuré de licenciement, ni même encore aux difficultés rencontrées pour rembourser son crédit immobilier puisqu'il ressort que Madame X... a disposé d'autres voies de financement pour ce faire. Ce dernier préjudice sera réparée par une indemnité de 500 euros. L'indemnité globale à laquelle sera condamnée la société Banque Chaix est ainsi égale à 7. 452 euros qui, de par sa nature de salaire ouvrira également droit au paiement de la somme de 745, 20 euros au titre des congés payés afférents » ;

1. ALORS QUE la somme censée indemniser le salarié en cas d'annulation d'une autorisation de licenciement, telle qu'elle résulte de l'article L. 2422-4 du Code du travail, n'a pas vocation à réparer le préjudice moral ; qu'en incluant dans la somme due en application de l'article L. 2422-4 du Code du travail, la réparation d'un tel préjudice, la Cour d'appel a violé cet article ;

2. ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ;
qu'en affirmant que la société ne « produi rait aucun moyen de défense de ce chef de demande », quand l'exposante avait fait valoir que la salariée ne pouvait réclamer l'indemnisation d'aucun préjudice moral sur le fondement de l'article L. 2422-4 du Code du travail, la Cour d'appel a dénaturé ses conclusions en méconnaissance de l'article 4 du Code de procédure civile ;

3. ALORS QUE tout préjudice doit être caractérisé ; qu'en considérant, pour fixer la somme due à Madame X... en application de l'article L. 2422-4 du Code du travail, qu'elle aurait subi un préjudice moral « incontestable », la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'un tel préjudice, a violé l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article L. 2422-4 du Code du travail ;

4. ALORS QUE les sommes dues en application de l'article L. 2422-4 du Code du travail sont exclusives du paiement de congés payés ; qu'en allouant à la salariée des congés payés afférents à l'indemnité de l'article L. 2422-4, la Cour d'appel a violé cet article, ensemble l'article L. 3142-2 du Code du travail ;

5. ALORS en outre QUE l'indemnisation d'un préjudice moral n'ouvre pas droit au paiement de congés payés ; qu'en fixant les congés payés en fonction d'une somme qui incluait l'indemnisation d'un préjudice moral, la Cour d'appel a violé l'article L. 3142-2 du Code du travail, ensemble son article L. 2422-4 ;

6. ALORS QUE l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du Code du travail, due en cas d'annulation de l'autorisation de licenciement, ne se cumule pas avec celle résultant de la méconnaissance du statut protecteur, due en cas d'absence d'autorisation de licenciement ; qu'en accordant à Madame X... l'une et l'autre, la Cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du Code du travail, ensemble ses article L. 2411-1 et L. 2411-8.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du 8 juin 2012, d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame Marie-Madeleine X... les sommes de 3. 236 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 323 euros au titre des congés payés afférents, de 40. 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 48. 540 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, d'AVOIR dit que les sommes qui sont dues en exécution du contrat de travail (solde de l'indemnité de licenciement, indemnité de préavis, congés payés afférents au préavis) porteront intérêts de droit à compter du 7 janvier 2011, de l'AVOIR condamnée aux dépens ainsi qu'au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « (...) Sur la demande de résiliation judiciaire : Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant de travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée et dans le cas contraire, il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur. Le 6 janvier 2011, Madame X... sollicitait la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que son employeur aurait procédé à la modification unilatérale de son contrat de travail, aurait fait preuve de harcèlement moral et aurait été défaillant dans son obligation de fournir le travail. Ces différents griefs, seuls repris dans les dernières écritures de la salariée seront tour à tour analysés :

1) modifications unilatérales du contrat de travail.

Madame X... fait valoir qu'il lui était successivement confié, sans son accord, les différentes fonctions suivantes :

- au mois de mai 2004 : fonction « gestion des crédits » ;

- au mois d'octobre 2005 : fonction « surveillance des crédits » ;

- au mois de juin 2010 (à l'issue de son congé individuel de formation) fonction « chargée d'accueil » (standardiste) à Saint Remy de Provence ;

- à partir du 30 septembre 2010 : fonction d'archiviste à Avignon ;

Les trois premières modifications sont bien antérieures à la demande de résiliation de sorte qu'il ne peut être utilement allégué qu'elles revêtent pour la salariée un caractère fautif justifiant la rupture de la relation contractuelle ; En outre, la cour remarque que les deux premières fonctions attribuées en mai 2004 et en octobre 2005 n'ont jamais fait l'objet d'une quelconque doléance de la part de la salariée et que l'entreprise a sans délai réaffecté Madame X... au siège social dès réception de son courrier de réclamation du 20 juillet 2010 (pièce 15) ; il ne peut dès lors être reproché un quelconque manquement à l'employeur s'agissant de ces premiers faits. Concernant la dernière modification, il ne peut être contesté la réalité du courrier du 30 septembre 2010 (pièce 10 de l'appelante) portant mutation de la salariée au « sein du services des crédits, en qualité de Technicien des opérations bancaires à compter du 5 octobre 2010 », contresigné par Madame X... sous la mention manuscrite « bon pour accord ». Cette mutation fait suite à la demande de Madame X... qui le 20 juillet 2010 se plaignait de ne pas avoir retrouvé à son retour de congé formation un poste similaire à Avignon et demandait à être réaffectée au siège. Si l'acceptation de Madame X... d'être mutée à Avignon est réelle il ne saurait toutefois pas être déduit de cette acceptation celle des tâches qui lui seront en définitive confiées et dont le détail ne figure pas dans le courrier du 30 septembre et ne sont pas plus explicitées par l'employeur dans ses écritures. Madame X... soutient que le poste qui lui a été en définitive confié avait été « vidé de toute substance » puisqu'elle était désormais cantonnée au rangement des archives. Mme X... verse au débat les éléments suivants :

- un courrier de Monsieur Y..., salarié à la Direction des Risques de Crédits du 7 décembre 2010 (pièce 18) ainsi libellé : « Bonjour Mylène, il y a bien longtemps que je n'ai eu de tes nouvelles, car j'avais appris que tu avais été très fatiguée voire dépressive cet été et je ne savais pas si tu n'étais pas devenue la Responsable des archives en quelque sorte, voire mise au placard. Je te souhaite un bon retour aux affaires progressivement, une meilleure santé et le plaisir de te revoir ».

- le même jour, Madame X... répondait ainsi : « Je te remercie de ton soutien effectivement avec les événements je ne sais pas ce que je vais devenir. Depuis que j'ai quitté la surveillance personne ne me parle je me sens bien seule » ;

- un courriel du 8 février 2011 de Monsieur Z... : « Je t'envoie ce jour ce message car je n'arrive pas à te joindre par téléphone. Je n'ai trouvé aucune ligne interne par laquelle je puisse te joindre directement à ton travail. N'ayant pas de ligne fixe, tu n'as donc pas de bureau attitré, ce qui est vraiment regrettable. J'en conclus donc que l'on t'a muté aux archives du service. Dans l'attente d'avoir de tes nouvelles... »

- un courriel qu'elle adressait le 17 décembre 2010 à Madame A..., Directrice du Service Administratif, avec en copie Madame B..., chef de service (Pièce n° 20) : « Le 10 décembre 2010, j'ai été démis du dossier GAN qui m'avait été confié, dossiers en souffrance depuis de nombreux mois, pour me consacrer aux archives des dossiers de crédits à la demande de Mme A.... Que dois-je faire des nombreux lotus de relance que j'ai du envoyer aux agences durant ces 2 mois ? A qui dois-je faire suivre ces lotus afin d'alléger ma boîte lotus ? »
- un courrier en réponse du même jour de Madame B... avec copie à Madame A... ainsi rédigé : « Mylène, Si comme tu me l'as confirmé, tes lotus de relance ont été imprimés et classés dans chaque dossier, en instance de l'accord GAN et remis à la personne en charge maintenant du GAN, tu peux effectivement les détruire pour alléger ta boîte lotus » ;

La cour constate que la directrice et la chef du service ne contredisent à aucun moment Madame X... concernant le retrait du dossier Gan et son affectation à l'archivage, cet élément confirmant les premiers échanges de courrier relatés ci-avant et dont il ne peut ainsi être contesté le caractère probant. Les attestations des salariés suivantes accréditent également les propos de Madame X... :

- Monsieur C... (Pièce 22) : « Avant son congé CIF en 2009, Mme X... avait un poste à responsabilités à la Direction des crédits au siège de la banque Chaix à Avignon. Elle gérait les comptes de clients en dépassement d'autorisation. A sa reprise, en juin 2010, elle a été mutée à l'agence de Saint Rémy, à un poste de commercial. En octobre 2010, elle a été positionnée à un poste administratif au siège à Avignon, à mi-temps thérapeutique. Elle traitait des dossiers d'assurance en attente d'accord. En décembre 2010, il lui a été imposé la prise en charge des archives du service des crédits, poste qui nécessite la manutention régulière de cartons » ;

- Monsieur D... (Pièce n° 23) : « je passe souvent dans le service des crédits puisque je suis aux moyens généraux et élu du personnel de la banque Chaix. Je suis surpris voire scandalisé de voir ma collègue de travail Mylène X... dévalorisée de ses compétences de la sorte. Elle était à la Direction des risques crédits et du jour au lendemain elle fait des cartons d'archives toute la journée. Elle n'a même plus de bureau pour travailler.
Elle doit se contenter de prendre la place d'un collègue lorsque celui-ci est en congé. Moi-même en conflit avec ma Direction, avec la Halde, pour discrimination, je trouve humiliant et déprimant ce que fait notre Direction à l'égard de Mylène X... » ;

- Madame E... (Pièce n° 24) : « Je suis témoin du changement de situation professionnelle de Madame X... qui est passée directement de la Direction des risques crédits au placard d'archivistes, sans bureau fixe, sans téléphone, sans informatique, injoignable et isolée à faire des cartons d'archives toute la journée). Il résulte de tout ce qui précède que Madame X..., recrutée le ter décembre 1984 et après avoir exercé pendant plusieurs années les différentes fonctions de guichetière, de secrétaire et de standardiste se retrouvait dès le mois d'octobre 2010 à n'effectuer que des tâches de classement et d'archivage dont la technicité, inhérente pourtant à la fonction de Technicien qui lui était confiée et nonobstant l'absence de définition conventionnelle, est loin d'être avérée. Il est également établi que bien que retravaillant depuis le mois de juin 2010, le nom de la salariée avait disparu du listing téléphonique de l'entreprise et n'était jamais réinscrit comme en témoigne Monsieur Z... dans son courriel du 8 février 2011 ;

S'agissant enfin du bureau qui n'aurait pas été attribué à la salariée, l'employeur ne discute pas ce fait mais se défend simplement en faisant observer, sans toutefois en rapporter la preuve, qu'aucun membre du service n'est titulaire d'aucun bureau ; ce moyen de défense est inopérant. Ce grief est entièrement fondé, toutefois il ne pourra pas être reproché à l'employeur un manquement à son obligation de sécurité pour ne pas avoir respecté les prescriptions du médecin du travail qui, le 10 février 2011, contre indiquait les tâches de manutention lourde puisque l'affectation à l'archivage est antérieure aux recommandations du médecin et que la salariée était en arrêt de travail depuis le 9 février 2011,

2) Sur les faits de harcèlement

L'article L 1152-1 du code du travail définit le harcèlement moral comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou de compromettre son avenir professionnel ; le harcèlement moral se caractérise donc par la dégradation des conditions de travail engendrée par des actes répétés susceptibles d'avoir des conséquences dommageables sur le plan professionnel ou sur la santé du salarié ;

Selon l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article précédent le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant, selon lui, un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Madame X... fait valoir que sa mise à l'écart à la suite de la modification de ses fonctions ont eu des conséquences dramatiques sur son état de santé, l'altération de celui-ci étant avéré par les nombreuses pièces médicales produites et qui toutes confirment l'existence d'un syndrome dépressif aigu réactionnel à des problèmes professionnels (pièces 26, 27, 28, 29, 55).

Les faits allégués et examinés au titre de la modification du contrat de travail sont entièrement établis en ce qui concerne l'affectation de la salariée à un poste d'archivage et la suppression des outils de travail (bureau et téléphone) ; ils ont sans contestation possible contribué à aggraver l'état de santé de Madame X... déjà fragilisé puisqu'elle était de nouveau en arrêt de travail à compter du 9 février 2011, jusqu'à son licenciement pour inaptitude.

Les documents généraux produits aux débats qui font état de difficultés au sein de la société Chaix ne seront pas retenus à l'appui de la demande de la salariée puisqu'ils ne décrivent aucun fait précis à l'encontre de Madame X....

Par conséquent, il y a lieu de constater que Madame X... établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; il incombe, dès lors, à l'employeur de prouver que ces faits ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il a été précédemment statué sur l'absence de pertinence des moyens opposés par l'employeur à la prétention de la salariée sur la modification unilatérale de ses fonctions ; au titre du harcèlement, l'employeur ne rapporte aucun autre élément, se bornant à constater que la brièveté de la période d'activité de la salariée rendait impossible les actes de harcèlement, un tel argument étant inopérant.

Le harcèlement est caractérisé.

Il convient donc, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs invoqués par la salariée au soutien de sa demande, d'y faire droit et de réformer de ce chef le jugement entrepris.

Dans la mesure où Madame X... était titulaire d'un mandat de représentation depuis son élection au comité d'entreprise le 6 juillet 2010, la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur.

Compte tenu de son statut de salarié protégé, Madame X... qui ne demande pas sa réintégration est fondée à réclamer :

- une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de salaire, soit 3. 236 euros (1618 x 2), outre 323 euros au titre des congés payés afférents ; la cour précise que cette demande n'est pas reprise dans le dispositif de la salariée mais figure dans le corps de ses conclusions ce qui justifie son examen ;

- des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, lesquels compte tenu de l'ancienneté de la salariée, soit 27 ans, de son âge, 50 ans à la date de la rupture, de son salaire mensuel (1. 618 euros) et des justificatifs attestant de sa situation de demandeur d'emploi à la date du 6 août 2012, seront fixés à 40. 000 euros, en application de l'article L1235-3 du Code du travail

-une indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'aurait perçue la salariée depuis la date de son éviction (8 juin 2012) jusqu'à l'expiration de la période de protection en cours (4 ans et 6 mois à compter du 6 juillet 2011) ramenée à la somme réclamée par Madame X...

(30 mois de rémunération), non contestée subsidiairement par l'employeur, soit 48. 450 euros (1 618X30).

Bien que le licenciement prononcé en l'espèce produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse concernant les conséquences financières, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un licenciement nul, lequel ne peut entraîner l'application des dispositions de l'article L 1235-4 du code du travail. La salariée réclame paiement d'une indemnité spécifique au motif que l'employeur aurait dû lui faire connaître par écrit les motifs qui s'opposaient à son licenciement ; cette demande entrera en voie de rejet en ce que les dispositions invoquées visées à l'article L 1226-12 du code du travail ne sont applicables qu'en matière de licenciement pour inaptitude prononcée à la suite d'un accident du travail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce » ;

1. ALORS QUE seuls des manquements suffisamment graves de l'employeur, empêchant la poursuite du contrat de travail, sont de nature à justifier d'une résiliation judiciaire du contrat ; qu'en l'espèce, pour dire la demande de résiliation judiciaire justifiée, la Cour d'appel a retenu d'une part que la salariée avait successivement exercé les fonctions de guichetière, de secrétaire et de standardiste, avant d'être affectée à l'archivage au mois d'octobre 2010, d'autre part que l'intéressée aurait « disparu de listing téléphonique » à compter de juin 2010, et de dernière part qu'il ne lui aurait pas été attribué de bureau privatif ; qu'en statuant ainsi, quand il ne résultait pas de telles constatations l'existence de manquements suffisamment graves empêchant la poursuite du contrat de travail, la Cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1231-1 et L. 1232-1, et L. 1235-1 du Code du Travail ;

2. ALORS QUE la modification des tâches du salarié, dès lors qu'elle n'a pas d'incidence sur sa qualification ou sur la nature de ses fonctions, ne modifie pas le contrat de travail ; qu'à supposer qu'en retenant que la salariée avait successivement occupé les fonctions de guichetière, de secrétaire et de standardiste, avant d'être affectée à l'archivage et au classement, la Cour d'appel ait considéré que le contrat de travail s'en serait trouvé modifié, elle aurait, en s'abstenant de rechercher si une ce changement d'affectation modifiait la qualification et/ ou la nature des fonctions de l'intéressée, privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1231-1 et L. 1232-1, et L. 1235-1 du Code du Travail ;

3. ALORS QUE c'est au salarié qui forme une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, d'établir les faits invoqués au soutien de ladite demande ; qu'en considérant, pour dire la demande de résiliation justifiée, que l'employeur ne justifiait pas de ce que, comme il prétendait, aucun des salariés du service ne disposait d'un bureau personnel, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ;

4. ALORS QUE c'est au salarié qui forme une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, d'établir les faits invoqués au soutien de ladite demande ; que lorsqu'il invoque, à ce titre, des agissements de harcèlement, c'est à lui qu'il revient de les établir ; qu'en considérant, pour dire la demande de résiliation judiciaire justifiée, que la salariée avait été victime d'agissements des harcèlement, agissements que la Cour d'appel a déduit de ce que ce que l'employeur prouvait pas que les éléments invoqués par la salariée, qui laissaient présumer le harcèlement, étaient étrangers à ce dernier, la Cour d'appel a violé les articles 1315 du Code civil, et L. 1154-1 du Code du travail ;

5. ALORS QUE les juges doivent motiver leur décision ; qu'en retenant que la salariée aurait été « mise à l'écart », sans préciser en quoi une telle mise à l'écart aurait consisté, ni de quelle pièce elle la déduisait, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

6. ALORS QUE les juges doivent motiver leur décision ; qu'en retenant que la salariée se serait vue priver de ses « outils de travail », sans préciser ni en quoi le fait de figurer sur un listing téléphonique et de disposer d'un bureau privatif auraient été nécessaires à l'exercice de ses fonctions, ni en quoi la salariée aurait été « privée », la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame Marie-Madeleine X... la somme de 3. 000 euros pour harcèlement moral et exécution fautive du contrat de travail, d'AVOIR condamné l'exposante aux dépens ainsi qu'au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « (...) Sur la demande de résiliation judiciaire : Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant de travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée et dans le cas contraire, il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur. Le 6 janvier 2011, Madame X... sollicitait la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que son employeur aurait procédé à la modification unilatérale de son contrat de travail, aurait fait preuve de harcèlement moral et aurait été défaillant dans son obligation de fournir le travail. Ces différents griefs, seuls repris dans les dernières écritures de la salariée seront tour à tour analysés :

1) modifications unilatérales du contrat de travail.

Madame X... fait valoir qu'il lui était successivement confié, sans son accord, les différentes fonctions suivantes :

- au mois de mai 2004 : fonction « gestion des crédits » ;

- au mois d'octobre 2005 : fonction « surveillance des crédits » ;

- au mois de juin 2010 (à l'issue de son congé individuel de formation) fonction « chargée d'accueil » (standardiste) à Saint Remy de Provence ;

- à partir du 30 septembre 2010 : fonction d'archiviste à Avignon ;

Les trois premières modifications sont bien antérieures à la demande de résiliation de sorte qu'il ne peut être utilement allégué qu'elles revêtent pour la salariée un caractère fautif justifiant la rupture de la relation contractuelle ; En outre, la cour remarque que les deux premières fonctions attribuées en mai 2004 et en octobre 2005 n'ont jamais fait l'objet d'une quelconque doléance de la part de la salariée et que l'entreprise a sans délai réaffecté Madame X... au siège social dès réception de son courrier de réclamation du 20 juillet 2010 (pièce 15) ; il ne peut dès lors être reproché un quelconque manquement à l'employeur s'agissant de ces premiers faits. Concernant la dernière modification, il ne peut être contesté la réalité du courrier du 30 septembre 2010 (pièce 10 de l'appelante) portant mutation de la salariée au « sein du services des crédits, en qualité de Technicien des opérations bancaires à compter du 5 octobre 2010 », contresigné par Madame X... sous la mention manuscrite « bon pour accord ». Cette mutation fait suite à la demande de Madame X... qui le 20 juillet 2010 se plaignait de ne pas avoir retrouvé à son retour de congé formation un poste similaire à Avignon et demandait à être réaffectée au siège. Si l'acceptation de Madame X... d'être mutée à Avignon est réelle il ne saurait toutefois pas être déduit de cette acceptation celle des tâches qui lui seront en définitive confiées et dont le détail ne figure pas dans le courrier du 30 septembre et ne sont pas plus explicitées par l'employeur dans ses écritures. Madame X... soutient que le poste qui lui a été en définitive confié avait été « vidé de toute substance » puisqu'elle était désormais cantonnée au rangement des archives. Mme X... verse au débat les éléments suivants :

- un courrier de Monsieur Y..., salarié à la Direction des Risques de Crédits du 7 décembre 2010 (pièce 18) ainsi libellé : « Bonjour Mylene, il y a bien longtemps que je n'ai eu de tes nouvelles, car j'avais appris que tu avais été très fatiguée voire dépressive cet été et je ne savais pas si tu n'étais pas devenue la Responsable des archives en quelque sorte, voire mise au placard. Je te souhaite un bon retour aux affaires progressivement, une meilleure santé et le plaisir de te revoir ».

- le même jour, Madame X... répondait ainsi : « Je te remercie de ton soutien effectivement avec les événements je ne sais pas ce que je vais devenir. Depuis que j'ai quitté la surveillance personne ne me parle je me sens bien seule » ;

- un courriel du 8 février 2011 de Monsieur Z... : « Je t'envoie ce jour ce message car je n'arrive pas à te joindre par téléphone. Je n'ai trouvé aucune ligne interne par laquelle je puisse te joindre directement à ton travail. N'ayant pas de ligne fixe, tu n'as donc pas de bureau attitré, ce qui est vraiment regrettable. J'en conclus donc que l'on t'a muté aux archives du service. Dans l'attente d'avoir de tes nouvelles... »

- un courriel qu'elle adressait le 17 décembre 2010 à Madame A..., Directrice du Service Administratif, avec en copie Madame B..., chef de service (Pièce n° 20) : « Le 10 décembre 2010, j'ai été démis du dossier GAN qui m'avait été confié, dossiers en souffrance depuis de nombreux mois, pour me consacrer aux archives des dossiers de crédits à la demande de Mme A.... Que dois-je faire des nombreux lotus de relance que j'ai du envoyer aux agences durant ces 2 mois ? A qui dois-je faire suivre ces lotus afin d'alléger ma boîte lotus ? »

- un courrier en réponse du même jour de Madame B... avec copie à Madame A... ainsi rédigé : « Mylène, Si comme tu me l'as confirmé, tes lotus de relance ont été imprimés et classés dans chaque dossier, en instance de l'accord GAN et remis à la personne en charge maintenant du GAN, tu peux effectivement les détruire pour alléger ta boîte lotus » ;

La cour constate que la directrice et la chef du service ne contredisent à aucun moment Madame X... concernant le retrait du dossier Gan et son affectation à l'archivage, cet élément confirmant les premiers échanges de courrier relatés ci-avant et dont il ne peut ainsi être contesté le caractère probant. Les attestations des salariés suivantes accréditent également les propos de Madame X... :

- Monsieur C... (Pièce 22) : « Avant son congé CIF en 2009, Mme X... avait un poste à responsabilités à la Direction des crédits au siège de la banque Chaix à Avignon. Elle gérait les comptes de clients en dépassement d'autorisation. A sa reprise, en juin 2010, elle a été mutée à l'agence de Saint Rémy, à un poste de commercial. En octobre 2010, elle a été positionnée à un poste administratif au siège à Avignon, à mi-temps thérapeutique. Elle traitait des dossiers d'assurance en attente d'accord. En décembre 2010, il lui a été imposé la prise en charge des archives du service des crédits, poste qui nécessite la manutention régulière de cartons » ;

- Monsieur D... (Pièce n° 23) : u je passe souvent dans le service des crédits puisque je suis aux moyens généraux et élu du personnel de la banque Chaix. Je suis surpris voire scandalisé de voir ma collègue de travail Mylène X... dévalorisée de ses compétences de la sorte. Elle était à la Direction des risques crédits et du jour au lendemain elle fait des cartons d'archives toute la journée. Elle n'a même plus de bureau pour travailler. Elle doit se contenter de prendre la place d'un collègue lorsque celui-ci est en congé. Moi-même en conflit avec ma Direction, avec la Halde, pour discrimination, je trouve humiliant et déprimant ce que fait notre Direction à l'égard de Mylène X... » ;

- Madame E... (Pièce n° 24) : « Je suis témoin du changement de situation professionnelle de Madame X... qui est passée directement de la Direction des risques crédits au placard d'archivistes, sans bureau fixe, sans téléphone, sans informatique, injoignable et isolée à faire des cartons d'archives toute la journée).

Il résulte de tout ce qui précède que Madame X..., recrutée le ter décembre 1984 et après avoir exercé pendant plusieurs années les différentes fonctions de guichetière, de secrétaire et de standardiste se retrouvait dès le mois d'octobre 2010 à n'effectuer que des tâches de classement et d'archivage dont la technicité, inhérente pourtant à la fonction de Technicien qui lui était confiée et nonobstant l'absence de définition conventionnelle, est loin d'être avérée. Il est également établi que bien que retravaillant depuis le mois de juin 2010, le nom de la salariée avait disparu du listing téléphonique de l'entreprise et n'était jamais réinscrit comme en témoigne Monsieur Z... dans son courriel du 8 février 2011 ;

S'agissant enfin du bureau qui n'aurait pas été attribué à la salariée, l'employeur ne discute pas ce fait mais se défend simplement en faisant observer, sans toutefois en rapporter la preuve, qu'aucun membre du service n'est titulaire d'aucun bureau ; ce moyen de défense est inopérant. Ce grief est entièrement fondé, toutefois il ne pourra pas être reproché à l'employeur un manquement à son obligation de sécurité pour ne pas avoir respecté les prescriptions du médecin du travail qui, le 10 février 2011, contre indiquait les tâches de manutention lourde puisque l'affectation à l'archivage est antérieure aux recommandations du médecin et que la salariée était en arrêt de travail depuis le 9 février 2011, 2) Sur les faits de harcèlement L'article L 1152-1 du code du travail définit le harcèlement moral comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou de compromettre son avenir professionnel ; le harcèlement moral se caractérise donc par la dégradation des conditions de travail engendrée par des actes répétés susceptibles d'avoir des conséquences dommageables sur le plan professionnel ou sur la santé du salarié ;

Selon l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article précédent le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant, selon lui, un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Madame X... fait valoir que sa mise à l'écart à la suite de la modification de ses fonctions ont eu des conséquences dramatiques sur son état de santé, l'altération de celui-ci étant avéré par les nombreuses pièces médicales produites et qui toutes confirment l'existence d'un syndrome dépressif aigu réactionnel à des problèmes professionnels (pièces 26, 27, 28, 29, 55).

Les faits allégués et examinés au titre de la modification du contrat de travail sont entièrement établis en ce qui concerne l'affectation de la salariée à un poste d'archivage et la suppression des outils de travail (bureau et téléphone) ; ils ont sans contestation possible contribué à aggraver l'état de santé de Madame X... déjà fragilisé puisqu'elle était de nouveau en arrêt de travail à compter du 9 février 2011, jusqu'à son licenciement pour inaptitude.

Les documents généraux produits aux débats qui font état de difficultés au sein de la société Chaix ne seront pas retenus à l'appui de la demande de la salariée puisqu'ils ne décrivent aucun fait précis à l'encontre de Madame X....

Par conséquent, il y a lieu de constater que Madame X... établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; il incombe, dès lors, à l'employeur de prouver que ces faits ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il a été précédemment statué sur l'absence de pertinence des moyens opposés par l'employeur à la prétention de la salariée sur la modification unilatérale de ses fonctions ; au titre du harcèlement, l'employeur ne rapporte aucun autre élément, se bornant à constater que la brièveté de la période d'activité de la salariée rendait impossible les actes de harcèlement, un tel argument étant inopérant.

Le harcèlement est caractérisé.

(...) Sur les dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail et pour harcèlement moral : Les mêmes faits ayant été retenus au titre de l'inexécution du contrat de travail et du harcèlement moral, les demandes indemnitaires de la salariée procèdent de la même cause, de sorte qu'il ne sera alloué de ce chef qu'une indemnité supplémentaire laquelle sera évaluée, compte tenu de la brièveté de la période incriminée, du mois d'octobre 2010 au mois de février 2011, à la somme de 3000 euros » ;

1. ALORS QUE la Cour d'appel s'étant fondée, pour retenir l'existence d'un harcèlement moral et dire la demande de résiliation judiciaire justifiée, sur d'identiques agissements, la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen de cassation entraînera celle du chef de dispositif attaqué par le présent moyen, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2. ALORS subsidiairement QU'il appartient au salarié qui invoque un harcèlement moral, d'établir les faits le laissant présumer ; que pour retenir l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel a considéré que l'employeur ne justifiait pas de ce que, comme il prétendait, aucun des salariés du service ne disposait d'un bureau personnel ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 1154-1 du Code du travail ;

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame Marie-Madeleine X... les sommes de 7. 452 euros à titre d'indemnité à la suite de l'annulation de l'autorisation de licenciement, de 745, 20 euros au titre des congés payés afférents, de 48540 euros au titre de la violation du statut protecteur, de l'AVOIR condamnée aux dépens ainsi qu'au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'indemnité due à la suite de l'annulation de l'autorisation de licenciement : Il sera immédiatement observé que la Société Banque Chaix ne produit aucun moyen de défense de ce chef de demande. L'article L. 2422-4 du code du travail énonce que lorsque l'annulation de la décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié concerné a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice tant moral que matériel subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration s'il l'a demandée dans le délai de deux mois, ou à l'expiration de ce délai dans le cas contraire. Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à ladite indemnité, qui constitue un complément de salaire. Il revient au juge de déterminer et d'évaluer le préjudice subi lequel doit être apprécié en déduction des sommes que l'intéressé a pu percevoir pendant la période litigieuse. En l'espèce, Madame X..., élue le 6 juillet 2010 en qualité de membre suppléant au Comité d'Entreprise, était licenciée le 8 juin 2012 après autorisation de l'inspection du travail, cette décision étant annulée par décision du Ministre du travail notifiée le 15 décembre 2012 ; faute de recours, la décision du Ministre du travail est devenue définitive. Il en résulte que Madame X... est bien fondée dans sa demande. En réparation de son préjudice matériel, il lui sera allouée une indemnité égale au salaire qui aurait dû lui être versé de la date de son licenciement jusqu'au 15 février 2013 (deux mois après la notification de la décision du Ministre du travail) déduction faite des sommes perçues à d'autres titres. Il sera tenu compte du calcul précis et pertinent de la salariée pour évaluer ainsi le préjudice matériel calculé comme ci-dessus à la somme de 6. 952 euros. En outre, Madame X... a incontestablement subi un préjudice moral lequel ne peut toutefois, contrairement à ses allégations, s'étendre à son placement en invalidité et à sa déclaration d'inaptitude qui ont précédé la mesuré de licenciement, ni même encore aux difficultés rencontrées pour rembourser son crédit immobilier puisqu'il ressort que Madame X... a disposé d'autres voies de financement pour ce faire. Ce dernier préjudice sera réparée par une indemnité de 500 euros. L'indemnité globale à laquelle sera condamnée la société Banque Chaix est ainsi égale à 7. 452 euros qui, de par sa nature de salaire ouvrira également droit au paiement de la somme de 745, 20 euros au titre des congés payés afférents (...)

Dans la mesure où Madame X... était titulaire d'un mandat de représentation depuis son élection au comité d'entreprise le 6 juillet 2010, la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur.

Compte tenu de son statut de salarié protégé, Madame X... qui ne demande pas sa réintégration est fondée à réclamer :

(...)

- une indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'aurait perçue la salariée depuis la date de son éviction (8 juin 2012) jusqu'à l'expiration de la période de protection en cours (4 ans et 6 mois à compter du 6 juillet 2011) ramenée à la somme réclamée par Madame X... (30 mois de rémunération), non contestée subsidiairement par l'employeur, soit 48. 450 euros (1 618X30).

1. ALORS QUE l'indemnité pour méconnaissance du statut protecteur n'est due que si le licenciement intervient en l'absence ou malgré un refus d'autorisation de licenciement ; qu'en l'espèce, comme le faisait valoir l'employeur, le licenciement avait été accordé après que l'autorisation de licenciement a été accordée, même si cette autorisation avait, par la suite, été annulée par le Ministre ; qu'en allouant néanmoins une telle indemnité à la salariée, la Cour d'appel a violé les articles L. 2411-1 et L. 2411-8 du Code du travail ;

2. ALORS QUE l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du Code du travail, due en cas d'annulation de l'autorisation de licenciement, ne se cumule pas avec celle résultant de la méconnaissance du statut protecteur, due en cas d'absence d'autorisation de licenciement ; qu'en accordant à Madame X... l'une et l'autre, la Cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du Code du travail, ensemble ses article L. 2411-1 et L. 2411-8.



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Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement


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