par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 13 juillet 2010, 09-13103
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Cour de cassation, chambre commerciale
13 juillet 2010, 09-13.103

Cette décision est visée dans la définition :
Dies a quo, dies ad quem




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 23 janvier 2009), que par jugement du 28 juin 2005, publié au BODACC le 31 juillet 2005, la société Proresto a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné représentant des créanciers ; que, le 14 octobre 2005, la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (la CCIM) a déclaré sa créance ; que, par ordonnance du 19 décembre 2006, le juge-commissaire a admis cette créance aux motifs qu'en application de l'article 66 du décret du 27 décembre 1985, les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine bénéficiaient d'un délai supplémentaire de deux mois ;

Attendu que la CCIM fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que sa déclaration de créance était forclose comme tardive et constaté l'extinction de sa créance, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, applicable à l'espèce, énonce : « Ce dernier délai le délai de deux mois est augmenté de deux mois pour les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine » ; que le texte, qui ne peut être le siège d'aucune interprétation, octroie un délai supplémentaire de deux mois à tout créancier, dont le siège est situé hors la France métropolitaine, sans qu'aucune autre condition ne puisse être imposée ; qu'en décidant que le délai supplémentaire de deux mois suppose que le siège du créancier et le lieu d'ouverture de la procédure ne soient pas situés dans la même sphère géographique, les juges du second degré, qui ont ajouté au texte, ont violé l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ;

2°/ qu'en se référant à l'article R. 622-24 du code de commerce pour éclairer l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 quand les deux textes, relevant de philosophies différentes, posent des règles distinctes et que les deux textes doivent être appliqués dans le temps conformément aux règles régissant les conflits de lois dans le temps, les juges du second degré ont en tout état de cause violé l'article 2 du code civil, ensemble le principe de non-rétroactivité des lois ;

Mais attendu que l'arrêt retient à bon droit que l'allongement du délai de déclaration de créance prévu par l'article 66, alinéa 1er, du décret, qui édicte un régime dont la seule finalité est de compenser au profit du créancier domicilié hors de la France métropolitaine la contrainte résultant de l'éloignement, ne peut être étendu aux créanciers domiciliés dans un département ou territoire d'outre-mer ayant à déclarer leurs créances dans une procédure ouverte dans le même département ou territoire ; que de ce seul motif, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, a exactement déduit que la déclaration de créance de la CCIM, effectuée après l'expiration du délai de deux mois, était tardive et que la créance était éteinte ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (CCIM) aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Proresto la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (CCIM).

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé que la déclaration de créance de la Chambre de commerce et d'industrie de la MARTINIQUE était atteinte par la forclusion comme tardive, et constaté l'extinction de la créance ;

AUX MOTIFS QU' « en application de l'article 190 de la loi du 26 juillet 2005, les modalités de déclaration des créances dans les procédures collectives ouvertes avant l'entrée en vigueur de cette loi, restent soumises aux dispositions antérieures ; qu'en vertu des articles L 621-43 ancien du code du commerce et 66 du décret du 27 décembre 1985 applicables en l'espèce, les créances doivent être déclarées dans le délai de 2 mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC ; qu'en l'espèce, le jugement d'ouverture du 28 juin 2005 a été publié le 31 juillet 2005, et la CCIM a déclaré sa créance une première fois le 14 octobre 2005, puis après rectification le 17 novembre 2005 ; que la CCIM entend bénéficier de la prolongation du délai de 2 mois pour déclarer sa créance prévue par l'article 66 alinéa 1 du décret du 27 décembre 1985 en faveur des créanciers n'ayant pas leur résidence en métropole, ce qui est son cas, son siège étant situé en MARTINIQUE ; que, reprenant la motivation du juge-commissaire, elle soutient que la Cour de cassation ayant jugé que ce texte ne jouait qu'au bénéfice des créanciers non résidents en métropole, et la lettre du texte ne faisant pas la distinction selon le lieu d'ouverture de la procédure, tous les créanciers ayant leur résidence en MARTINIQUE disposent d'un délai de 4 mois pour déclarer leurs créances, y compris dans les procédures collectives ouvertes en MARTINIQUE ; que cependant, l'allongement du délai de déclaration de créance prévu par cet article 66 précité étant dérogatoire du droit commun comme prévoyant une exception au principe du délai de 2 mois, il ne peut être que strictement appliqué ; que ce texte issu du décret du 27 décembre 1985, en prévoyant un régime plus favorable au cas du créancier domicilié hors de la France métropolitaine, avait pour seule finalité de compenser la contrainte résultant de l'éloignement ; qu'il ne peut donc être étendu aux créanciers domiciliés dans un département ou territoire d'outre-mer ayant à déclarer leurs créances dans une procédure ouverte dans le même département ou territoire, la circonstance de l'éloignement faisant alors défaut ; que c'est d'ailleurs la solution qui a été consacrée à l'article R 622-24 du décret du 28 décembre 1985 pris pour l'application de la loi de sauvegarde des entreprises en difficulté et ce, dans le double souci d'une part de soigner la rédaction du texte, et d'autre part, de combler la lacune du texte initial qui n'envisageait pas la situation inverse de l'éloignement du créancier métropolitain devant déclarer sa créance dans une procédure ouverte outre-mer ; que la CCIM ayant déclaré sa créance plus de 2 mois après la publication du jugement d'ouverture au BODACC, elle doit être déclarée forclose ; que sa créance est donc éteinte de plein droit en application des dispositions de l'article L 621-46 ancien du code du commerce (…) » (arrêt, p. 3, antépénultième, avant-dernier et dernier § et p. 4, § 1, 2 et 3) ;

ALORS QUE, premièrement, l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, applicable à l'espèce, énonce : « Ce dernier délai le délai de deux mois est augmenté de deux mois pour les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine » ; que le texte, qui ne peut être le siège d'aucune interprétation, octroie un délai supplémentaire de deux mois à tout créancier dont le siège est situé hors la France métropolitaine, sans qu'aucune autre condition ne puisse être imposée ; qu'en décidant que le délai supplémentaire de deux mois suppose que le siège du créancier et le lieu d'ouverture de la procédure ne soient pas situés dans la même sphère géographique, les juges du second degré, qui ont ajouté au texte, ont violé l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ;

Et ALORS QUE, deuxièmement, en se référant à l'article R. 622-24 du Code du commerce pour éclairer l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 quand les deux textes, relevant de philosophies différentes, posent des règles distinctes et que les deux textes doivent être appliqués dans le temps conformément aux règles régissant les conflits de lois dans le temps, les juges du second degré ont en tout état de cause violé l'article 2 du Code civil, ensemble le principe de non-rétroactivité des lois.



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Cette décision est visée dans la définition :
Dies a quo, dies ad quem


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.