par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 15 janvier 2014, 12-23942
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Cour de cassation, chambre sociale
15 janvier 2014, 12-23.942

Cette décision est visée dans la définition :
Rupture conventionnelle (Travail)




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 31 août 1998 par la société Coignères automobiles en qualité de peintre automobile ; que les parties ont conclu une convention de rupture du contrat de travail, homologuée par l'autorité administrative le 22 décembre 2009 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la requalification de la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse et au paiement de diverses sommes ; que l'union locale CGT de Rambouillet est intervenue à l'instance ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1237-11 du code du travail ;

Attendu que pour faire droit à la demande du salarié de requalification de la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'il existait un différend entre les parties sur l'exécution du contrat de travail, l'employeur ayant infligé au salarié deux avertissements en raison, selon lui, de la mauvaise qualité de son travail six mois et trois mois avant l'établissement de la convention de rupture et ayant formulé de nouveaux reproches à l'encontre du salarié sur l'exécution des tâches qui lui étaient confiées avant de le convoquer à deux entretiens aux fins d'évoquer l'éventualité d'une rupture conventionnelle du contrat de travail et de définir les termes de la convention de rupture ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'existence, au moment de sa conclusion, d'un différend entre les parties au contrat de travail n'affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 2132-3 du code du travail ;

Attendu que pour condamner l'employeur à verser à l'union locale CGT de Rambouillet une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le syndicat, qui n'a pas signé l'accord interprofessionnel du 11 janvier 2008 créant la rupture conventionnelle, est recevable à intervenir pour obtenir réparation du préjudice subi par l'intérêt collectif de la profession qu'il représente en raison de la violation par l'employeur des dispositions du code du travail relatives à ce mode de rupture ;

Attendu cependant que le litige relatif à la rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié ne porte pas en lui-même atteinte à l'intérêt collectif de la profession ;

Qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a accueilli les demandes de M. X... au titre des primes exceptionnelles pour les années 2008 et 2009 et des congés payés y afférents, l'arrêt rendu le 13 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare l'union locale CGT de Rambouillet irrecevable en son intervention volontaire ;

Dit n'y avoir lieu à requalifier la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Rejette les demandes relatives à la rupture formées par M. X... ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Coignères automobiles

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture conventionnelle du contrat de travail de Monsieur X... produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR en conséquence condamné la société COIGNIERES AUTOMOBILES à verser à son salarié les sommes de 5. 289, 64 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 529 € à titre de congés payés y afférents, de 3. 111, 55 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure, de 7. 200 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de 500 € de dommages et intérêts pour non-respect de l'information du droit individuel à la formation, de 30. 000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et des sommes en application de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR dit qu'il y avait lieu d'opérer une compensation, entre ces sommes et les 7500 ¿ d'indemnité perçus par Monsieur X... au titre de la rupture conventionnelle ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur Jean-Jacques X... a été engagé le 31 août 1998 selon un contrat à durée indéterminée par la société Coignières Automobiles, ci-après la société Coignières, en qualité de peintre automobiles.
M. X... a fait l'objet de deux avertissements les 27 janvier et 16 juin 2009.
Le 29 octobre 2009, une première rupture conventionnelle indemnisée à hauteur de 7. 200 € a été signée par les parties, mais elle a été refusée par l'inspecteur du travail.
Une seconde rupture conventionnelle a été homologuée le 22 décembre 2009, pour un montant de 7. 700 €.
Sur la rupture conventionnelle :
La sociétés Coignières conclut à la validité de la rupture conventionnelle du 22 décembre 2009 aux motifs qu'il n'existait pas de situation conflictuelle antérieure, que M. X..., à l'initiative de la rupture conventionnelle, négociée et homologuée, était assisté d'un professionnel des procédures prud'homales, qu'il ne s'est pas rétracté conformément à l'article L. 1237-13 du code du travail et qu'enfin il n'est invoqué aucun vice du consentement lors des entretiens et de la signature de la rupture.
L'article L. 1237-11 du code du travail prévoit que l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie, que cette rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties, et résulte d'une convention signée par les parties au contrat. L'article L. 1237-14 complète ce dispositif en indiquant que le recours juridictionnel contre la convention de rupture conventionnelle doit être formé, à peine d'irrecevabilité dans le délai de douze mois à compter de l'homologation de la convention.
La rupture conventionnelle suppose un consentement donné par le salarié en connaissance de cause et dont l'intégrité doit être assurée. Elle ne peut être imposée par l'employeur pour détourner des garanties accompagnant un licenciement et elle suppose l'absence de litige sur la rupture.
Même si le salarié n'a pas utilisé sa faculté de rétractation, le convention doit respecter ces principes.
En l'espèce, certes M. X... n'a pas utilisé sa faculté de rétractation, mais son recours juridictionnel contre la convention de rupture conventionnelle est recevable dès lors qu'il a saisi le conseil de prud'hommes le 28 janvier 2010.
Il résulte de plusieurs documents produits que, contrairement à ce que soutient l'employeur, un litige existait entre lui et M. X....
Monsieur Y..., président directeur général de la société Coignières, et monsieur Z..., directeur commercial, ne contestent pas avoir eu un entretien le 8 octobre 2009 avec M. X..., assisté de monsieur Bernard A..., conseiller CGT.
Le compte rendu de cet entretien dressé par M. A... et contre lequel la société Coignières n'oppose aucun élément contraire, fait ressortir les critiques émises par messieurs Y... et Z... sur le travail effectué par M. X..., en ces termes :
« M. Y... : ¿ nous avons repris depuis un an l'entreprise, nous avons des obligations, à ce jour votre travail ne correspond pas à nos attentes et celles des clients qui se sont plaints.
Vous avez manqué à votre métier, chargé la peinture ce qui fait une coulée, refait la peinture deux voire trois fois, non satisfait les clients, de voir un côté brillant et un côté mat, cela fait pas la renommée de notre établissement ainsi que les assurances ne nous font plus confiance.
Vous êtes comme une mule vous ne changez pas de comportement, nous vous avons fait des avertissements et rien n'a changé.
nous vous avons payé vos heures supplémentaires, votre paye est plus que correcte et à ce jour nous demandons que votre travail soit propre.
M. Z... : nous ne pouvons continuer un travail qui ne nous satisfait pas ainsi qu'à nos clients, vous êtes un peintre professionnel qui doit faire son travail correctement sans qu'il soit refait plusieurs fois, les couleurs qui ne sont pas dans les teintes adéquates, un licenciement amiable vous est proposé ce jour. Vous êtes courageux mais votre travail n'est pas celui que nous attendons de vous et pour la satisfaction de nos clients.
M. Y... dit qu'il va réfléchir. »
Cet entretien du 8 octobre 2009, faisait suite à deux avertissements en date du 27 janvier 2009 et du 16 juin 2009, notifiés par lettres recommandées à M. X... en raison, selon l'employeur, de la mauvaise qualité de son travail, plusieurs véhicules lui avaient été confiés, nécessitant des retours causés par les malfaçons qu'il avait commises.
A la suite de l'entretien du 8 octobre 2009, M. X... a été convoqué par lettre recommandée en date du 23 octobre 2009 par M. Y..., à un entretien fixé au 29 octobre 2009 pour évoquer l'éventualité de la rupture conventionnelle de son contrat de travail.
Il a été convoqué une seconde fois par lettre recommandée en date du 29 octobre 2009 à un second entretien fixé au 6 novembre 2009 pour évoquer les termes définitifs de la convention de rupture.
Certes au cours des deux entretiens M. X... était assisté de M. A..., mais il ressort des éléments précédemment décrits qu'au jour de la conclusion de la convention de rupture amiable, il existait un différend entre les parties sur l'exécution du contrat de travail par M. X..., caractérisé par les reproches exprimés par l'employeur.
La société Coignières n'oppose pas sérieusement l'absence de contestation de M. X... pour en déduire qu'il n'existait pas de litige, dès lors qu'elle lui a notifié deux avertissements 6 mois et 3 mois avant l'établissement de la convention de rupture, qu'elle a décrit précisément ses reproches au cours de l'entretien du 8 octobre, et qu'elle lui a adressé deux convocations par courriers recommandés.
La rupture s'analyse dans ces conditions en un licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors qu'il n'existe pas de lettre de licenciement. La procédure de licenciement n'a pas été respectée. Le jugement est confirmé de ce chef.
Il convient également de confirmer les sommes allouées à M. X... au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité conventionnelle de licenciement dont les montants ne sont pas critiqués par les parties.
Sur la régularité de la procédure de licenciement, il résulte de l'article L. 1232-2 du code du travail que l'employeur qui envisage de licencier un salarié doit le convoquer, avant toute décision, à un entretien préalable.
En l'espèce, il n'est pas sérieusement contesté par l'employeur que cette convocation n'a pas été faite et qu'en conséquence la procédure est irrégulière.
Cependant, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail ne peut se cumuler avec une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, mais en cas de licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et présentant une irrégularité de procédure, comme en l'espèce, l'ensemble du préjudice subi par le salarié doit être pris en considération.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au moment de la rupture du contrat de travail, monsieur X... avait au moins deux années d'ancienneté et la société Coignières employait habituellement au moins 11 salariés. Selon l'article L. 1235-3, le salarié dont le licenciement est sans cause réelle et sérieuse peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement.
Au regard de l'âge de M. X..., 50 ans, de son ancienneté de plus de 11 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, soit en moyenne 3. 800 ¿ bruts par mois, de ce qu'il justifie avoir été indemnisé jusqu'en août 2010 par Pôle Emploi, et de n'avoir retrouvé qu'un emploi à durée déterminée pour une durée de 7 mois, puis un autre en qualité d'intérimaire, et enfin de l'irrégularité de la procédure, il convient de confirmer le jugement qui a alloué au salarié, en réparation du préjudice matériel et moral qu'il a subi, la somme de 30. 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
... A l'appui de sa demande de rejet des dommages et intérêts réclamés par M. X..., la société Coignières soutient que le droit individuel à la formation est portable et peut être utilisé après la rupture du contrat de travail.
Mais selon l'article L. 6323-19 du code du travail en vigueur, l'employeur doit informer le salarié, s'il y a lieu, dans la lettre de licenciement, de ses droits en matière de droit individuel de formation. Le manquement de la société Coignières à cette obligation, avéré en l'absence de lettre de licenciement, cause nécessairement à M. X... un préjudice qui est justement réparé par l'allocation d'une somme de 500 ¿ » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Monsieur X... a été embauché par contrat écrit du 31 août 1998 par la SAS COIGNIERES AUTOMOBILES en qualité de peintre automobile.
La moyenne des trois derniers mois de travail s'élève à la somme de 3. 111, 55 ¿.
Monsieur X... a fait l'objet de deux avertissements : le premier, le 27 janvier 2009, le deuxième, le 16 juin 2009.
Le 8 octobre 2009, en présence de M. Jean-Pierre Y..., PDG de la société, de M. Z..., Directeur commercial, et de M. A..., conseiller du salarié, un entretien s'est déroulé à l'initiative du conseiller.
Lors de cet entretien, il est noté sur le procès verbal : « un licenciement amiable vous est proposé ce jour » par M. Z....
M. Y... dit « qu'il va réfléchir ».
Le 23 octobre 2009, M. X... est convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception à un entretien pour le 29 octobre 2009, mais refusée par l'Inspection du travail le 2 décembre 2009.
Une seconde rupture conventionnelle était homologuée à compter du 22 décembre 2009, d'un montant de 7 700 €.

¿ SUR LA REQUALIFICATION DE LA RUPTURE CONVENTIONNELLE EN LICENCIEMENT SANS CAUSE REELLE ET SERIEUSE
Selon l'article L 1231-1 du Code du Travail :
« Le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié ou d'un commun accord dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre.
Ces dispositions ne sont applicables pendant la période d'essai ».
Selon l'article L 1231-4 du Code du Travail :
« L'employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles prévues par le présent titre. »
En application de l'article L 1237-11 du Code du Travail :
« L'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties.
Elle résulte d'une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. »
L'article L. 1237-12 du Code du Travail :
« Les parties au contrat conviennent du principe de rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister :
1° soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, qu'il s'agisse d'un salarié titulaire, d'un mandat syndical ou d'un salarié membre d'une institution représentative du personnel ou tout autre salarié ;
2° soit, en l'absence d'institution représentative du personnel dans l'entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. Lors du ou des entretiens, l'employeur a la faculté de se faire assister quand le salarié en fait lui-même usage. Le salarié en informe l'employeur auparavant ; si l'employeur souhaite également se faire assister, il en informe à son tour le salarié.
L'employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, dans les entreprises de moins de 50 salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d'employeurs ou par un autre employeur relevant de la même branche ».
En l'occurrence, le conseil observera que la deuxième rupture conventionnelle est « un copier-coller » de la première (même date : 6 novembre 2009) qui, selon le premier refus de l'homologation du 2 décembre 2009 ne pouvait pas être saisi également au novembre ; elle est donc antidatée et révèle à établir que M. X... n'a pas pu se faire assister à un deuxième entretien ou plus comme le prévoit notamment l'Article L. 1237-12 du Code du Travail et le souligne le conseil de M. X... en ses écritures.
Selon le compte rendu de l'entretien du 8 octobre 2009, il ressort manifestement que l'initiative de la rupture incombe à l'employeur, tant par les griefs invoqué par M. Y... :
« Vous avez manqué à votre métier : charger la peinture, ce qui fait une coulée, refaire la peinture de voir trois fois, ne satisfait pas les clients, ¿.
Vous êtes têtu comme une mule ; vous ne changez pas de comportement, nous vous avons fait des divertissements et rien de changé ¿.
Nous ne pouvons continuer à un travail qui ne nous satisfait pas ainsi qu'à nos clients, vous êtes un peintre professionnel qui doit faire son travail correctement sans qu'il soit refait plusieurs fois, les couleurs qui ne sont pas dans les teintes adéquates, un licenciement amiable vous est proposé à ce jour ¿.
Au regard de ces propos, il est indéniable qu'un litige existait entre M. X... et son employeur,
En l'occurrence, M. X... avait reçu deux avertissements auparavant.
Selon la jurisprudence de la Cour de Cassation concernant les ruptures amiables, la conclusion d'un accord de rupture d'un commun accord du contrat de travail suppose l'absence de litige sur la rupture.
En application de l'article 8 de la Convention n° 158 de l'OIT, le salarié doit avoir le droit de contester le motif du licenciement dont il a fait l'objet :
« Un travailleur qui estime avoir fait l'objet d'une mesure de licenciement injustifiée aura le droit de recourir contre cette mesure devant un organisme impartial tel qu'un Tribunal, un Tribunal du travail, une commission d'arbitrage ou un arbitre ».
Et de son article 3 :
« Aux fins de la présente convention, le terme licenciement signifie la cessation de la relation de travail à l'initiative de l'employeur ».
Il s'avère que la convention 158 de l'OIT rappelle de contrôler qui a pris l'initiative de la rupture et c'est cette initiative qui va permettre de qualifier la rupture du contrat de travail et de déterminer les droits qui y sont attachés.
En l'occurrence, au vu des éléments, le conseil de céans juge que la SAS COIGNIERES AUTOMOBILES a pris l'initiative de la rupture, et la requalifie en licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec les applications du droit du travail et ses répercutions.
SUR LES INDEMNITES COMPENSATRICES DE PREAVIS
Considérant que la date de la rupture conventionnelle a été homologuée le 22 décembre 2009, la date de la rupture du contrat de travail est la même date et une indemnité d'un préavis de deux mois de salaire doit être attribuée à M. X..., soit cinq mille deux cent quatre vingt neuf euros et soixante quatre centimes (5 289, 64 ¿) et cinq cent vingt neuf euros (529 ¿) de congés payés y afférents.
SUR LES DOMMAGES ET INTERETS POUR NON RESPECT DE LA PROCEDURE
Aux termes de l'article L 1232-2 du Code du Travail, l'employeur qui envisage le licenciement d'un salarié doit le convoquer à un entretien préalable.
Aux regards des dispositions du présent article, il est régulier d'accorder à M/ X... une indemnité de trois mille cent onze euros et cinquante cinq centimes (3 111, 55 ¿) correspondant à un mois de salaire.
SUR L'INDEMNITE CONVENTIONNELLE DE LICENCIEMENT
M. X... a droit à une indemnité conventionnelle de licenciement de sept mille deux cent euros (7. 200 ¿) qu'il convient de défalquer au montant de la rupture conventionnelle déjà versée et annulée par le présent jugement.
SUR L'INDEMNITE DE LICENCIEMENT SANS CAUSE REELLE ET SERIEUSE
Monsieur X... selon l'article L 1235-3 du Code du Travail :
«- Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration, du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'Article L1234-9 ».
Au regard de la situation, M. X..., qui n'a pas retrouvé d'emploi, se trouve dans une situation précaire. Il est donc régulier d'accorder à ce titre une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de trente mille euros (30 000 ¿) nets de CSG et CRDS.
SUR LE NON RESPECT DES DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT INDIVIDUEL A LA FORMATION
Aux termes des articles L6323-17, L6323-1, L6323-6, D6332-87 et R6331-9 du Code du Travail (dans les établissements de + de 10 salariés), l'employeur est tenu d'informer le salarié dans la lettre de licenciement de ses droits en matière de droit individuel à la formation et notamment, de la possibilité de demander pendant (le délai de congé à bénéficier d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation.
Attendu que la rupture conventionnelle ne comporte pas ce droit, et compte tenu de l'ancienneté de M. X..., qui dispose de 120 heures de droit individuel à la formation conformément aux articles susvisés, il est donc régulier de l'indemniser de mille quatre vingt dix huit euros (1 098 ¿). » ;

1°) ALORS QUE la conclusion d'une rupture conventionnelle ne suppose pas l'absence de litige ; qu'en affirmant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L. 1237-11 et suivants du Code du travail ;

2°) ALORS (à supposer que la conclusion d'une rupture conventionnelle requiert l'absence de litige) QUE si la conclusion d'un accord de rupture d'un commun accord du contrat de travail suppose l'absence d'un litige sur la rupture du contrat de travail, elle peut valablement intervenir en présence d'un litige portant sur l'exécution du contrat de travail ; qu'en excluant tout caractère amiable à la rupture du contrat de travail du fait de l'existence d'un prétendu litige entre les parties relatif à l'exécution du contrat de travail, la Cour d'appel a violé l'article L 1237-11 du Code du travail ;

3°) ALORS en tout état de cause QUE ne caractérise pas l'existence d'un litige le seul fait pour l'employeur de reprocher au salarié des manquements professionnels que celuici ne conteste pas ; qu'en déduisant l'existence d'un litige des avertissements prononcés les 27 janvier et 16 juin 2009, soit 6 et 3 mois avant la rupture et des reproches sur la qualité du travail du salarié formulés par l'employeur lors d'un entretien du 8 octobre 2009 avant de lui proposer d'entrer en pourparlers en vue d'une rupture conventionnelle de son contrat de travail, sans relever la moindre contestation opposée par le salarié à cette date, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1237-11 du Code du travail ;

4°) ALORS (à supposer adoptés les motifs des premiers juges) QUE lorsque les parties se bornent à corriger et mettre en conformité une rupture conventionnelle à la décision de refus d'homologation de la DDTEFP en raison du montant de l'indemnité de rupture, ces dernières peuvent valablement rédiger en des termes identiques la nouvelle rupture conventionnelle et mentionner la même date de signature et ce, sans qu'il soit besoin d'organiser un nouvel entretien ; qu'en affirmant, après avoir constaté que le montant de l'indemnité de rupture avait été modifié, que la deuxième rupture conventionnelle était « un copier-coller » de la première indiquant la même date et que le salarié n'avait pas pu se faire assister à un deuxième entretien (motifs adoptés p. 4 § 5), pour invalider la rupture conventionnelle, la Cour d'appel a violé les articles L. 1237-11 et suivants du Code du travail ;

5°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, aux termes de la convention de rupture conventionnelle, le salarié avait perçu 7. 700 ¿ d'indemnité de rupture ; qu'en disant que le salarié avait perçu 7. 500 ¿ d'indemnité au titre de la rupture conventionnelle (motifs adoptés p. 6 § 8), la Cour d'appel a dénaturé ce document et violé le principe susvisé ;

6°) ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif de l'arrêt équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du Code du travail ne peut se cumuler avec une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et que la somme de 30. 000 euros accordée à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse réparait notamment l'irrégularité de la procédure, a confirmé dans son dispositif le jugement du conseil de prud'hommes de Rambouillet ayant octroyé en sus de l'indemnité de 30. 000 ¿ pour licenciement sans cause réelle et sérieuse une somme de 3. 111, 55 ¿ à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société COIGNIERES AUTOMOBILES à payer à Monsieur X... les sommes de 2. 592 ¿ de prime exceptionnelle pour l'année 2008, de 2. 592 ¿ de prime exceptionnelle pour l'année 2009, de 518 ¿ de congés payés afférents des deux primes ;

AUX MOTIFS QUE « Sur les autres demandes :
M. X... réclame le paiement de primes exceptionnelles pour les années 2008 et 2009 expliquant les avoir perçues les années précédentes.
Il affirme sans être contredit par l'employeur que les autres salariés de l'entreprise la percevaient également.
Pour s'opposer à cette demande, la société Coignières fait valoir que le paiement de la ^ prime étant lié aux résultats de l'entreprise, elle n'était pas due pour les années réclamées qui ont été déficitaires.
Aucun document conventionnel ni contractuel n'établit les critères d'attribution de la prime, versée chaque année à M. X... depuis 2002 selon ses bulletins de paie.

En effet, cette prime d'un montant de 2. 592 ¿ bruts a été versée en une fois pour les années 2002, 2003 et 2004, puis en deux fois pour l'année 2005, et en trois fois pour les années 2006 et 2007.
Aucune somme n'a été versée au cours des années 2008 et 2009, alors que le contrat de travail de M. X... a été rompu courant décembre 2009.
Ces éléments établissent que la prime présentait un caractère d'usage dès lors qu'elle était fixe, constant et générale. Il est en conséquence justifié de faire droit à la demande en paiement de M. X... et d'infirmer le jugement de ce chef » ;

1°) ALORS QUE l'usage suppose une pratique générale, fixe et constante au sein de l'entreprise ; qu'en retenant en l'espèce l'existence d'un usage consistant pour l'employeur à payer une prime exceptionnelle de 2. 592 ¿ chaque année après avoir seulement relevé que le salarié demandeur avait reçu une prime de 2. 592 ¿ bruts, entre 2002 et 2007, sans caractériser que tous les salariés de l'entreprise, ou à tout le moins certaines catégories de salariés, avaient pu bénéficier d'une telle prime, la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une pratique générale, constante et fixe dans l'entreprise, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, aux termes des bulletins de salaire du salarié, ce dernier avait perçu au titre de la prime exceptionnelle les sommes de 2591, 63 ¿ en 2002 (décembre 2002), de 2592 ¿ en 2003 (décembre 2003) de 2592 ¿ en 2004 (décembre 2004), de 2173, 19 ¿ en 2005 (décembre 2005), de 1677 ¿ en 2006 (762 ¿ en janvier 2006 et 915 ¿ en décembre 2006), de 762 ¿ en 2007 (janvier 2007) et de 2592 ¿ en 2008 (500 ¿ en janvier 2008, 500 ¿ en février 2008, et 1592 ¿ en avril 2008) ; qu'en affirmant que « cette prime d'un montant de 2. 592 ¿ bruts a été versée en une fois pour les années 2002, 2003 et 2004, puis en deux fois pour l'année 2005, et en trois fois pour les années 2006 et 2007 » et qu'« aucune somme n'a été versée au cours » de l'année 2008 (arrêt p. 5 § 7 et 8), la Cour d'appel a dénaturé ces documents et violé le principe susvisé.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société COIGNIERES AUTOMOBILES à payer à l'union locale CGT de Rambouillet la somme de 1. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « L'union locale de Rambouillet qui intervient volontairement à l'instance par application de l'article L. 2132-3 du code du travail, est bien fondée à obtenir réparation du préjudice subi par l'intérêt collectif de la profession qu'il représente en qualité de syndicat professionnel, à cause du non-respect par la société Coignières des règles impératives du code du travail relatives à la rupture conventionnelle du contrat de travail, d'autant plus que le syndicat CGT n'a pas signé l'accord interprofessionnel du 18 janvier 2008 créant ce mode de rupture.

Il est dès lors justifié, en infirmant le jugement, de condamner la société Coignières à lui verser des dommages et intérêts d'un montant de 1. 000 ¿ en réparation de ce préjudice » ;

1°) ALORS QUE l'action en justice des syndicats professionnels est limitée aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; que la violation par l'employeur des règles du droit du travail relatives à la rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié porte atteinte à l'intérêt individuel de ce dernier et non à l'intérêt collectif de la profession, et ce peu important que le syndicat n'ait pas signé l'accord créant ce mode de rupture ; qu'en décidant du contraire pour allouer des dommages et intérêts à l'union locale CGT de Rambouillet, la Cour d'appel a violé l'article L. 2132-3 du Code du travail ;

2°) ALORS en tout état de cause QUE la cassation à intervenir de l'arrêt accordant au salarié des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (critiqué au premier moyen) entraînera l'annulation du chef de l'arrêt ayant jugé que la violation du droit du travail en matière de rupture conventionnelle du contrat de travail portait atteinte à l'intérêt collectif de la profession et justifiait le droit à indemnisation du syndicat, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Rupture conventionnelle (Travail)


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.