par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 22 septembre 2015, 14-17100
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Cour de cassation, chambre commerciale
22 septembre 2015, 14-17.100

Cette décision est visée dans la définition :
Pari passu (Clause)




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 mars 2014), que la société BNP Paribas (la banque) ayant consenti à la société Oxalys deux prêts le 18 mai 2007, M. X..., gérant de celle-ci, s'en est rendu caution par deux actes du même jour, dans les limites de 113 275 euros et 271 050 euros ; qu'après la mise en liquidation judiciaire de la société Oxalys, la banque a assigné en paiement M. X..., qui a opposé la disproportion de ses engagements ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner alors, selon le moyen :

1°/ que la disproportion de l'engagement de la caution, personne physique, telle que prévue par l'article L. 341-4 du code de la consommation, doit être appréciée en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d'autres engagements de caution antérieurs ou concomitants et, notamment, de ceux octroyés à d'autres établissements bancaires dans le cadre du financement de la même opération ; que dès lors en se bornant à énoncer, pour considérer que l'engagement de caution souscrit par M. X... au profit de la BNP Paribas le 18 mai 2007 n'était pas excessif, qu'il avait déclaré percevoir une rémunération mensuelle de 4 500 euros et posséder un patrimoine immobilier compris entre 570 000 euros et 625 000 euros et que les engagements de caution à l'égard des deux autres banques étaient postérieurs à celui conclu au profit de la BNP, sans rechercher si, eu égard au caractère global de l'opération financée d'une part, et à la clause de pari passu figurant dans chacun des prêts et interdisant à l'emprunteur de consentir un avantage à l'une des trois banques au détriment des deux autres, d'autre part, les cautionnements accordés à la Société générale le 14 juin 2007 à hauteur de 399 100 euros et à la BRED, le 30 avril 2007, pour un montant de 310 000 euros, n'étaient pas nécessairement prévus et à tout le moins prévisibles pour la BNP, qui se devait dès lors, en sa qualité de professionnelle du crédit d'en tenir compte pour apprécier l'endettement de la caution, qui s'élevait, au total à la somme de 1 438 650 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation ;

2°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue de manière équitable, ce qui implique, pour chaque partie une possibilité raisonnable de la présenter dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; que la procédure n'est pas équitable lorsque le juge refuse à une partie, actionnée parallèlement par trois banques envers lesquelles elle s'était engagée comme caution, dans le cadre d'une seule et même opération globale, le droit de faire examiner et juger ensemble ces contentieux connexes ; que dès lors en rejetant la demande de M. X... tendant à voir les instances engagées par la Société générale, la BRED et la BNP jointes et en refusant dès lors de tenir compte des engagements de cautions souscrits à l'égard des deux premières pour apprécier le caractère proportionné de l'engagement souscrit au bénéfice de la dernière de sorte que la cour d'appel a retenu tout à la fois que son cautionnement n'était pas disproportionné à l'égard de deux banques, mais qu'il l'était à l'égard de la troisième ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé M. X... du droit de se défendre équitablement et efficacement, en violation des articles 367 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant énoncé à bon droit que, pour apprécier si l'engagement de la caution était, au moment de sa conclusion, disproportionné à ses biens et revenus, il n'y a pas lieu de tenir compte de ses engagements postérieurs, la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer la recherche inopérante, invoquée par la première branche, sur l'existence prévue ou prévisible de cautionnements futurs ;

Et attendu, d'autre part, que la jonction d'instances est, par application de l'article 368 du code de procédure civile, une mesure d'administration judiciaire ; qu'il résulte de l'article 537 du même code, qu'une telle mesure n'est sujette à aucun recours ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS:

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code d eprocédure civile rejette sa demande ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. X....

M. X... fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit n'y avoir lieu à joindre la procédure avec celles engagées par les sociétés BRED et SOCIETE GENERALE, confirmé le jugement du 7 novembre 2011 en ce qu'il l'a notamment condamné à payer à la société BNP PARIBAS la somme de 229 719 ¿, avec intérêts fixés au taux Euribor trois mois majoré de 1,20 % par an, capitalisation des intérêts et à la somme de 1 000 ¿ au titre des frais irrépétibles, et DE L'AVOIR débouté de ses autres demandes;

AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 367 du code de procédure civile, « le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble » ; qu'il résulte du dossier que la cour d'appel de Paris a, par arrêt du 13 septembre 2013, confirmé le jugement ayant fait droit aux demandes de la SOCIETE GENERALE contre M. Eric X... ; qu'en conséquence, la question d'une éventuelle jonction de la présente procédure à d'autres procédures ne se pose qu'en ce qui concerne l'instance opposant M. X... à la société BRED BANQUE POPULAIRE ; que dans le cadre de la présente espèce, la cour aura à dire si la société BNP PARIBAS a manqué à son devoir de conseil à l'égard de M. X... et cette appréciation, qui met en jeu les seules relations entre ces parties, sera portée indépendamment des faits et moyens en cause dans la procédure opposant celui-ci à la société BRED BANQUE POPULAIRE ; qu'elle devra, par ailleurs, déterminer si les engagements de la caution de M. X... étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus et elle dispose, dans le dossier de la procédure, des éléments relatifs à l'ensemble des engagements souscrits par l'intéressé ; qu'enfin, les allégations sur ses engagements de caution que les textes requirent et, d'autre part, l'intimée devait d'abord mettre en jeu de la garantie qui lui a accordée OSEO, seront examinées par la Cour sans qu'elle ait à prendre en considération des éléments issus de la procédure l'opposant à la société BRED BANQUE POPULAIRE ; que dès lors, s'il existe un lien entre la présente procédure et celle opposant M. X... à la société BRED BANQUE POPULAIRE, l'intérêt d'une bonne justice ne commande pas d'en ordonner la jonction ; (¿) ; que l'appelant fait valoir que les engagements de caution qu'il a souscrits à l'égard des trois banques prêteuses s'élèvent à un montant total de 1 438 650 ¿, lequel est manifestement disproportionné par rapport à ses revenus et à son patrimoine qu'il évalue à 300 000 euros ; mais, qu'aux termes mêmes de l'article L. 341-4 du code de la consommation dont l'appelant demande l'application, c'est au moment de la conclusion de l'engagement de caution qu'il convient de vérifier que cet engagement n'est pas manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution ; or il ressort du dossier que M. X... ne s'est pas engagé comme caution à l'égard des autres établissements prêteurs que postérieurement au cautionnement qu'il a accordé à la BNP ; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, de prendre en compte ces engagements ultérieurs pour déterminer si l'engagement souscrit à l'égard de l'intimée était manifestement disproportionné à ses biens et à ses revenus ; que par des actes des 18 mai 2007, M. X... s'est porté caution à l'égard de la société BNP PARIBAS des engagements de la société OXALYS, pour des montants de 113 275 ¿ et 271 050 ¿, soit une somme totale de 384 225 ¿ ; que ses revenus s'établissaient, selon ses déclarations, à 4 500 ¿ par mois ; que la valeur nette de son patrimoine immobilier, déduction faite du passif lié à un emprunt immobilier, était évaluée à un montant compris entre 570 000 ¿ et 625 000 ¿, M. X... prétendant, mais sans le démontrer, que ces biens étaient communs avec son épouse ; qu'il en résulte que l'engagement qu'il avait souscrit à l'égard de la société BNP PARIBAS n'était pas manifestement disproportionné à ses revenus à son patrimoine, quand bien même celui-ci relèverait de la communauté entre époux ; que l'intimée peut donc s'en prévaloir et le jugement sera, dès lors, confirmé ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 341-4 du code de la consommation dispose qu' « Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation » ; qu'il est constant que la disproportion s'apprécie au jour de l'engagement de caution ; qu'en l'espèce, M. Eric X..., lors de ses engagements de caution, a déclaré posséder deux biens évalués respectivement entre 65 000 ¿ et 70 000 ¿ pour le premier et entre 1 100 000 ¿ et 1 150 000 ¿ pour le X..., diminué d'un emprunt sur la résidence principale d'environ 595 000 ¿, soit un patrimoine immobilier compris entre 570 000 ¿ et 625 000 ¿ auquel il faut ajouter les revenus de M. Eric X... de 4 500 ¿ par mois ; que M. Eric X... affirme être marié sous le régime de la séparation de biens mais n'en apporte pas la preuve, ni même la répartition des biens ; que cet argument est donc écarté ; qu'en tout état de cause, au vu des éléments versés aux débats, les contrats de cautionnement consentis par M. Eric X... ne constituent pas, lors de leurs conclusions, des engagements manifestement disproportionnés par rapport à ses revenus et à son patrimoine ;

1./ ALORS QUE la disproportion de l'engagement de la caution, personne physique, telle que prévue par l'article L. 341-4 du code de la consommation, doit être appréciée en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d'autres engagements de caution antérieurs ou concomitants et, notamment, de ceux octroyés à d'autres établissements bancaires dans le cadre du financement de la même opération; que dès lors en se bornant à énoncer, pour considérer que l'engagement de caution souscrit par M. X... au profit de la BNP PARIBAS le 18 mai 2007 n'était pas excessif, qu'il avait déclaré percevoir une rémunération mensuelle de 4 500 ¿ et posséder un patrimoine immobilier compris entre 570 000 ¿ et 625 000 ¿ et que les engagements de caution à l'égard des deux autres banques étaient postérieurs à celui conclu au profit de la BNP, sans rechercher si, eu égard au caractère global de l'opération financée d'une part, et à la clause de pari passu figurant dans chacun des prêts et interdisant à l'emprunteur de consentir un avantage à l'une des trois banques au détriment des deux autres, d'autre part, les cautionnements accordés à la SOCIETE GENERALE le 14 juin 2007 à hauteur de 399 100 ¿ et à la BRED, le 30 avril 2007, pour un montant de 310 000 ¿, n'étaient pas nécessairement prévus et à tout le moins prévisibles pour la BNP, qui se devait dès lors, en sa qualité de professionnelle du crédit d'en tenir compte pour apprécier l'endettement de la caution, qui s'élevait, au total à la somme de 1 438 650 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation ;


2./ ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue de manière équitable, ce qui implique, pour chaque partie une possibilité raisonnable de la présenter dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire; que la procédure n'est pas équitable lorsque le juge refuse à une partie, actionnée parallèlement par trois banques envers lesquelles elle s'était engagée comme caution, dans le cadre d'une seule et même opération globale, le droit de faire examiner et juger ensemble ces contentieux connexes; que dès lors en rejetant la demande de M. X... tendant à voir les instances engagées par la SOCIETE GENERALE, la BRED et la BNP jointes et en refusant dès lors de tenir compte des engagements de cautions souscrits à l'égard des deux premières pour apprécier le caractère proportionné de l'engagement souscrit au bénéfice de la dernière de sorte que la Cour d'appel a retenu tout à la fois que son cautionnement n'était pas disproportionné à l'égard de deux banques, mais qu'il l'était à l'égard de la troisième; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé M. X... du droit de se défendre équitablement et efficacement, en violation des articles 367 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;



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Cette décision est visée dans la définition :
Pari passu (Clause)


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.