par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 12 juillet 2017, 15-22563
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Cour de cassation, chambre commerciale
12 juillet 2017, 15-22.563

Cette décision est visée dans la définition :
Donneur d'ordre




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 mars 2015), rendu en matière de référé, que, le 21 juin 2011, la société Lebas technologies, désormais dénommée Lebas industries, a, par le biais de sa filiale malaisienne, la société Lebas technologies Sdn Bhd, conclu avec une société de droit malaisien Malaysian Bio-Xcell (la société Bio-Xcell) un contrat portant sur la réalisation en Malaisie d'une usine de production de molécules chimiques ; que, dans le cadre de l'exécution de ce contrat, la société Lebas technologies Sdn Bhd a, le 25 juillet 2011, consenti une garantie bancaire au profit de la société Bio-Xcell, souscrite auprès de la société Malayan Banking Berhad pour un montant de 5 346 550 dollars malaisiens ; que cette garantie a fait l'objet d'une contre-garantie bancaire internationale au profit de la société Malayan Banking Berhad par la société KBC Bank ; que, le 23 janvier 2013, la société Lebas technologies a été placée en procédure de sauvegarde ; que, le 15 mars 2013, la société Bio-Xcell a résilié le contrat conclu avec la société Lebas technologies Sdn Bhd et mis en oeuvre la garantie bancaire de premier rang auprès de la société Malayan Banking Berhad ; qu'une procédure d'arbitrage a été mise en oeuvre sur le fond ; que, par ordonnance du 19 mars 2013, faisant droit à la requête de la société Lebas technologies Sdn Bhd, un tribunal civil malaisien a fait interdiction à la société Bio-Xcell de faire appel à la garantie de la société Malayan Banking Berhad et à cette dernière de mettre en oeuvre les droits attachés à cette garantie; que cette ordonnance a été notifiée à ces deux dernières sociétés le 20 mars 2013 ; que, le 21 mars 2013, la société Malayan Banking Berhad a actionné la contre-garantie bancaire auprès de la société KBC Bank ; que, soutenant que la société Malayan Banking Berhad avait frauduleusement et abusivement appelé la contre-garantie, cet appel ayant été effectué en méconnaissance de la décision de la juridiction malaisienne qui lui avait été notifiée la veille, la société française Lebas technologies a, le 27 mars 2013, demandé en référé, pour prévenir un dommage imminent, qu'il soit fait interdiction à la société KBC Bank d'exécuter cette contre-garantie ; qu'une juridiction malaisienne ayant, le 13 juin 2013, autorisé la société Bio-Xcell à ne pas tenir compte de l'ordonnance du 19 mars 2013, la société Malayan Banking Berhad a exécuté sa garantie ; que, par ordonnance du 26 septembre 2013, le juge des référés a dit que la demande en paiement de la société Malayan Banking Berhad à la société KBC Bank du 21 mars 2013 était abusive et a interdit à cette dernière d'exécuter cette contre-garantie ;

Attendu que la société Lebas industries fait grief à l'arrêt de dire que l'obligation à paiement de la société KBC Bank à l'égard de la société Malayan Banking Berhad en exécution de son engagement de contre-garantie n'était pas contestable, condamner la première à exécuter son engagement et rejeter les demandes de la société Lebas technologies alors, selon le moyen :

1°/ que le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ; que peut constituer un dommage imminent pour le donneur d'ordre l'appel potentiellement abusif ou frauduleux d'une garantie ou d'une contre-garantie bancaire à première demande, en raison des conséquences irréversibles de son exécution, autorisant le juge des référés à interdire provisoirement le paiement jusqu'à la survenance d'un événement précis, et sans préjudice de l'intervention d'une décision au fond, dès lors que la condition que l'appel de la garantie soit manifestement abusif ou frauduleux ne peut être exigée qu'en présence d'une action en référé supposant l'absence de contestation sérieuse ; qu'au cas d'espèce, en s'attachant uniquement au point de savoir si l'appel par la banque Malayan de la contre-garantie bancaire donnée par la banque KBC, consécutivement à une décision du juge malaisien qui avait fait interdiction à la société Bio-Xcell, bénéficiaire de la garantie de premier rang donnée par la banque Malayan, d'appeler celle-ci dans l'attente de la sentence arbitrale qui devait être rendue au sujet de la résiliation du contrat liant la société Lebas technologies à la société Bio-Xcell, revêtait un caractère manifestement abusif ou frauduleux, quand il pouvait y avoir dommage imminent pour le donneur d'ordre même en présence d'une contestation sérieuse, et donc même si l'appel de la garantie n'était pas manifestement abusif ou frauduleux, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des critères inopérants, a violé l'article 873 du code de procédure civile ;

2°/ que constitue un appel manifestement abusif ou frauduleux de la contre-garantie celui qui émane d'un garant qui a nécessairement connaissance, à cette date, du caractère abusif ou frauduleux de l'appel de sa propre garantie par le bénéficiaire ; qu'au cas d'espèce, il était constant et constaté par les juges du fond qu'au jour où elle avait appelé la contre-garantie de la banque KBC, soit le 21 mars 2013, la banque Malayan s'était vu notifier la veille l'ordonnance rendue par le juge malaisien qui faisait interdiction à la société Bio-Xcell, bénéficiaire, de mettre en oeuvre la garantie de premier rang ; qu'aussi, peu important que cette décision de justice étrangère ne contînt pas d'injonction directe à l'endroit de la banque Malayan, ou encore qu'elle eût été ultérieurement anéantie, il devait être considéré qu'au jour où il a eu lieu, l'appel de la contre-garantie par la banque Malayan revêtait un caractère manifestement abusif ou frauduleux puisqu'elle savait que l'appel de la garantie de premier rang par le bénéficiaire l'était ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 873 du code de procédure civile, ensemble les articles 2321 et 1134 du code civil ;

3°/ que constitue un appel manifestement abusif ou frauduleux de la contre-garantie celui qui émane d'un garant qui ment délibérément à son contre-garant quant à la situation exacte de la garantie de premier rang, pour le déterminer à payer ; qu'au cas d'espèce, même à supposer que l'ordonnance rendue par le juge malaisien le 19 mars 2013 n'avait pu produire aucun effet substantiel en raison de son anéantissement subséquent par une autre décision, en s'abstenant de rechercher, comme l'avait fait le premier juge et comme l'y invitait la société Lebas technologies, si, à tout le moins, la banque Malayan n'avait pas menti délibérément à la banque KBC en lui affirmant que l'appel de la garantie de premier rang par la société Bio-Xcell (bénéficiaire) était conforme aux termes de celle-ci et en lui dissimulant l'existence de la décision judiciaire malaisienne qui lui avait été notifiée la veille, en sorte que sous ce rapport, l'appel de la garantie pouvait être tenu comme manifestement abusif ou frauduleux, la cour d'appel n'a en tout état de cause pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 873 du code de procédure civile, ensemble les articles 2321 et 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite, au sens de l'article 873 du code de procédure civile, doit être apprécié au jour où le juge statue et lui permet seulement d'ordonner des mesures conservatoires ou de remise en état, l'arrêt relève qu'à supposer qu'il ait pu être retenu que l'appel de la contre-garantie constituait lorsqu'il a été formé un tel dommage ou un tel trouble, la seconde décision judiciaire malaisienne, qui a mis à néant la première décision et ainsi mis fin à l'interdiction faite à la société Bio-Xcell de poursuivre la mise en oeuvre de la garantie de premier rang, a fait disparaître toute notion de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite ; qu'il relève encore que la disparition d'un tel dommage imminent est d'autant plus évidente que la société Malayan Banking Berhad, à la suite de cette seconde décision judiciaire malaisienne intervenue le 13 juin 2013, a payé à la société Bio-Xcell le montant de la garantie à laquelle elle était tenue ; que, par ces motifs, dont il résulte qu'au jour où le juge des référés avait statué, il n'existait plus aucun dommage imminent résultant de l'appel de la contre-garantie formé en dépit de la première décision malaisienne, la cour d'appel a pu retenir qu'aucune mesure conservatoire ou de remise en état ne pouvait être prononcée ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Lebas industries aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour la société Lebas industries, anciennement dénommée Lebas technologies, M. X..., ès qualités et la société Ajjis en la personne de M. Y..., ès qualités

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'obligation à paiement de la société KBC Bank à l'égard de la société Malayan Banking Berhad en exécution de son engagement de contre-garantie n'était pas contestable, d'avoir condamné la société KBC Bank à payer à la société Malayan Banking Berhad la somme de 5 346 550 $ malaisiens, payables en euros selon le taux de change fixé par la banque centrale malaisienne à la date du paiement, et d'avoir rejeté toutes les demandes de la société Lebas Technologies ;

AUX MOTIFS QUE la société Lebas Technologies a conclu le 21 juin 2011, par le biais de sa filiale malaisienne la société Lebas Technologies Sdn Bhd, avec une société de droit malaisien Malaysian Bio-Xcell (la société Bio-Xcell) et en partenariat avec la société Metabolic Explorer un contrat portant sur la réalisation en Malaisie d'une usine de production de molécules chimiques ; que, dans le cadre de l'exécution de ce contrat, la société Lebas Technologies Sdn Bhd a consenti une garantie bancaire le 25 juillet 2011 au profit de la société Bio-Xcell, garantie souscrite auprès de la Malayan Banking Berhad pour un montant de 5 346 550 $ malaisiens ; cette garantie a fait l'objet d'une contre garantie bancaire internationale au profit de Malayan Banking Berhad par la KBC Bank qui est la banque de la société française Lebas Technologies ; que, le 15 mars 2013, la société malaisienne Bio-Xcell a résilié le contrat conclu avec Lebas Technologies Sdn Bhd ; que le même jour, elle a mis en oeuvre la garantie bancaire auprès de Malayan Banking Berhad ; que la société Lebas Technologies Sdn Bhd a saisi une juridiction civile malaisienne sur requête aux fins de voir interdire à la société Bio-Xcell de mettre en oeuvre la garantie bancaire de premier rang ; une procédure d'arbitrage était par ailleurs mise en oeuvre sur le fond ; que dans une ordonnance en date du 19 mars 2013, le tribunal civil malaisien, saisi sur requête, a fait droit à cette demande et a fait interdiction à la société Bio-Xcell de faire appel à la garantie bancaire de premier rang de la Malayan Banking Berhad et à cette banque de mettre en oeuvre les droits attachés à cette garantie ; que cette ordonnance a été notifiée le 20 mars 2013 à la société Bio-Xcell et à la Malayan Banking Berhad ; que toutefois la Malayan Banking Berhad a actionné la contre garantie bancaire auprès de la KBC Bank le 21 mars 2013 ; qu'ultérieurement, le 13 juin 2013, la juridiction de Malaisie a autorisé la société Bio-Xcell à ne pas tenir compte de l'ordonnance du 19 mars 2013 ; que Malayan Banking Berhad a payé à la suite de cette décision la somme de 5 346 550 $ malaisiens au titre de la garantie ; que par acte du 27 mars 2013, la société française Lebas Technologies a assigné en référé KBC Bank devant le président du tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins de voir interdire à KBC Bank de payer toute somme au titre de la contre garantie dans l'attente de l'issue de la procédure arbitrale ; que l'affaire a été renvoyée pour permettre la mise en cause de la Malayan Banking Berhad, une première ordonnance du juge des référés portant interdiction de paiement à l'égard de la société KBC Bank jusqu'au prononcé de la décision qui serait rendue à l'issue de la prochaine audience ; qu'en définitive, le juge de référé rendait la décision déférée le 26 septembre 2013, considérant abusive la demande en paiement de Malayan Banking Berhad à l'égard de KBC Bank et faisant interdiction à celle-ci de procéder au paiement de la somme réclamée ; que la cour observe que l'ensemble des parties conviennent que les documents produits et présentés par eux comme constituant l'une et l'autre des deux décisions judiciaires de la « High court of Malaya at Kuala Lumpur » constituent effectivement les décisions dont ils débattent et ceci bien que ces documents soient intitulés « writ of summons » ; que le juge des référés a été saisi en l'espèce par la société Lebas Technologies aux fins de voir constater l'existence d'un dommage imminent et en conséquence de voir interdire à KBC Bank de payer toute somme au titre de la contre garantie dans l'attente d'une sentence arbitrale ; que l'ordonnance a été rendue au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile ; que, devant la cour, la société Lebas Technologies fonde explicitement ses demandes sur l'article 873 alinéa un du code de procédure civile ; que, aux termes de l'article 873 alinéa un du code de procédure civile : « Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite » ; que, pour que le juge des référés puisse, dans le cadre ainsi défini, faire interdiction à une banque de payer une contre-garantie, il est nécessaire que la mise en oeuvre de cette garantie apparaisse frauduleuse ou abusive et ceci de façon manifeste, faute de quoi il ne saurait y avoir ni dommage imminent ni trouble manifestement illicite ; qu'en l'espèce, il ne peut être retenu de façon manifeste que la mise en oeuvre de la contre garantie présenterait un caractère frauduleux ou abusif ; qu'en effet, la contre garantie donnée par KBC Bank à la demande de Lebas Technologies au bénéfice de Malayan Banking Berhad est une garantie autonome ; qu'une telle contre garantie, comme le rappelle l'article 5 b des Règles uniformes de la Chambre de commerce internationale auxquelles les parties ont entendu se soumettre « est, par sa nature, indépendante de la garantie, de la relation sous-jacente, de la demande et de toute autre contre garantie à laquelle elle se réfère et le contre garant n'est en aucune façon concerné ou engagé par cette relation » ; qu'il est encore précisé : « Le contre garant tenu de payer en vertu de la contre garantie ne peut faire opposer des exceptions découlant d'une quelconque relation autre que la relation entre le contre garant et le garant,.... » ; qu'en ce sens, la demande de Lebas Technologies auprès de la juridiction malaisienne visant à ce que soit suspendue la garantie dans l'attente de l'issue de la procédure arbitrale constitue une négation du mécanisme de la garantie ; qu'il apparaît ainsi qu'au regard des dispositions de l'article 873 alinéa un du code de procédure civile, le caractère frauduleux ou abusif de l'appel en contre garantie ne peut être retenu de façon manifeste ; qu'au surplus l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite au sens de l'article 873 du code de procédure civile doit être apprécié au jour auquel le juge statue et lui permet seulement d'ordonner des mesures conservatoires ou de remise en état ; qu'à l'évidence, à supposer qu'il ait pu être retenu que l'appel en contre garantie constituait un tel dommage ou un tel trouble, force est de constater que la seconde décision judiciaire malaisienne, qui a mis à néant la première décision et ainsi mis fin à l'interdiction faite à la société Bio-Xcell de poursuivre la mise en oeuvre de la garantie, a fait disparaître toute notion de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite; qu'aucune mesure conservatoire ou de remise en état ne peut donc plus se justifier ; qu'ainsi, en toute hypothèse, la survenance de la seconde décision doit entraîner de plein droit la levée de l'interdiction faite à KBC Bank de payer Malayan Banking Berhad au titre de la contre garantie ; que la disparition d'un tel dommage imminent est d'autant plus évidente que Malayan Banking Berhad, à la suite de cette seconde décision judiciaire malaisienne, a payé à la société Bio-Xcell le montant de la garantie à laquelle elle était tenue ; qu'il résulte de l'ensemble de ces observations, d'une part, que le caractère frauduleux ou abusif de la mise en oeuvre de la contre garantie ne peut être retenu comme établi de façon manifeste et que, d'autre part, à supposer que la mise en oeuvre de cette contre garantie ait constitué un trouble manifestement illicite ou un dommage imminent au sens de l'article 873, la survenance de la seconde décision judiciaire malaisienne mettait en toute hypothèse fin à un tel dommage et rendait ainsi illégitime le maintien de l'interdiction faite à KBC Bank ; que dans ces conditions il y a lieu de faire droit à la demande de Malayan Banking Berhad, d'infirmer l'ordonnance déférée et de condamner KBC Bank à lui payer la somme de 5 346 550 $ malaisiens ; que cette somme sera payable en euros selon le taux de change fixé par la Banque centrale malaisienne, applicable à la date de paiement de cette somme ; que la contestation soulevée à ce titre par KBC Bank qui entend voir retenir le taux de la Banque centrale européenne n'est pas fondée dès lors que les stipulations de la contre-garantie elle-même font explicitement référence au taux retenu par la Banque centrale malaisienne (« The claim will be paid in Euro at the prevailing official MYR/EUR exchange fixed by the Central Bank of Malaysia » pièce n° 2 produite par KBC) ;

1/ ALORS QUE le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ; que peut constituer un dommage imminent pour le donneur d'ordre l'appel potentiellement abusif ou frauduleux d'une garantie ou d'une contre-garantie bancaire à première demande, en raison des conséquences irréversibles de son exécution, autorisant le juge des référés à interdire provisoirement le paiement jusqu'à la survenance d'un événement précis, et sans préjudice de l'intervention d'une décision au fond, dès lors que la condition que l'appel de la garantie soit manifestement abusif ou frauduleux ne peut être exigée qu'en présence d'une action en référé supposant l'absence de contestation sérieuse ; qu'au cas d'espèce, en s'attachant uniquement au point de savoir si l'appel par la banque Malayan de la contre-garantie bancaire donnée par la banque KBC, consécutivement à une décision du juge malaisien qui avait fait interdiction à la société Bio-Xcell, bénéficiaire de la garantie de premier rang donnée par la banque Malayan, d'appeler celle-ci dans l'attente de la sentence arbitrale qui devait être rendue au sujet de la résiliation du contrat liant la société Lebas Technologies à la société Bio-Xcell, revêtait un caractère manifestement abusif ou frauduleux, quand il pouvait y avoir dommage imminent pour le donneur d'ordre même en présence d'une contestation sérieuse, et donc même si l'appel de la garantie n'était pas manifestement abusif ou frauduleux, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des critères inopérants, a violé l'article 873 du code de procédure civile ;

2/ ALORS, subsidiairement, QUE constitue un appel manifestement abusif ou frauduleux de la contre-garantie celui qui émane d'un garant qui a nécessairement connaissance, à cette date, du caractère abusif ou frauduleux de l'appel de sa propre garantie par le bénéficiaire ; qu'au cas d'espèce, il était constant et constaté par les juges du fond qu'au jour où elle avait appelé la contre-garantie de la banque KBC, soit le 21 mars 2013, la banque Malayan s'était vu notifier la veille l'ordonnance rendue par le juge malaisien qui faisait interdiction à la société Bio-Xcell, bénéficiaire, de mettre en oeuvre la garantie de premier rang ; qu'aussi, peu important que cette décision de justice étrangère ne contînt pas d'injonction directe à l'endroit de la banque Malayan, ou encore qu'elle eût été ultérieurement anéantie, il devait être considéré qu'au jour où il a eu lieu, l'appel de la contre-garantie par la banque Malayan revêtait un caractère manifestement abusif ou frauduleux puisqu'elle savait que l'appel de la garantie de premier rang par le bénéficiaire l'était ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 873 du code de procédure civile, ensemble les articles 2321 et 1134 du code civil ;


3/ ALORS, plus subsidiairement, QUE constitue un appel manifestement abusif ou frauduleux de la contre-garantie celui qui émane d'un garant qui ment délibérément à son contre-garant quant à la situation exacte de la garantie de premier rang, pour le déterminer à payer ; qu'au cas d'espèce, même à supposer que l'ordonnance rendue par le juge malaisien le 19 mars 2013 n'avait pu produire aucun effet substantiel en raison de son anéantissement subséquent par une autre décision, en s'abstenant de rechercher, comme l'avait fait le premier juge et comme l'y invitait la société Lebas Technologies (conclusions d'appel en date du 15 octobre 2014, p. 6) si, à tout le moins, la banque Malayan n'avait pas menti délibérément à la banque KBC en lui affirmant que l'appel de la garantie de premier rang par la société Bio-Xcell (bénéficiaire) était conforme aux termes de celle-ci et en lui dissimulant l'existence de la décision judiciaire malaisienne qui lui avait été notifiée la veille, en sorte que sous ce rapport, l'appel de la garantie pouvait être tenu comme manifestement abusif ou frauduleux, la cour d'appel n'a en tout état de cause pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 873 du code de procédure civile, ensemble les articles 2321 et 1134 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Donneur d'ordre


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.