par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 20 mai 2009, 08-13018
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
20 mai 2009, 08-13.018

Cette décision est visée dans la définition :
Nullité




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 1304 et 2262 du code civil, ensemble les articles 1131 et 1321-1 du même code ;


Attendu que par acte sous seing privé du 22 avril 1998 la société des Editions X... , actuellement dénommée Santé équilibre performance (SEP), a cédé à la société les Bureaux du patrimoine, aux droits de laquelle se trouve la société Epargne actuelle, son fonds de commerce de courtage d'assurances, constitué par la gestion d'un portefeuille AFER, pour le prix de 1 200 000 francs ; que le même jour les parties ont signé une convention pour régler le sort des commissions versées par l'AFER concernant quatre clients; que la SEP ayant sollicité le paiement de diverses sommes en exécution de la seconde convention, la société Epargne actuelle lui a opposé une exception de nullité de cette convention ;

Attendu que pour faire droit à la demande de la SEP et rejeter l'exception de nullité l'arrêt énonce que les deux conventions signées le même jour sont indivisibles, qu'il résulte de la lettre adressée le 19 février 1999 par le GIE AFER à la SEP que la deuxième convention a reçu un commencement d'exécution et que l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la nullité invoquée était une nullité relative alors que seule une telle qualification la rendait inopposable en cas d'exécution de l'obligation découlant de l'acte, la cour d'appel n' a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Santé équilibre performance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Santé équilibre performance à payer à la société Epargne actuelle la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille neuf.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Carbonnier, avocat aux Conseils pour la société Epargne actuelle

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SARL Epargne actuelle à payer à la Société Santé équilibre performance, la somme de 13.498,38 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2000, et ordonné à la SARL Epargne actuelle de communiquer à la SARL Santé équilibre performance (SEP), anciennement dénommée société Editions Pouvreau, toutes pièces et justificatifs relatifs aux commissions versées par AFER à la Société Les bureaux du patrimoine sur les encours des personnes mentionnées à l'assignation pour les années 1998 à 2004,

AUX MOTIFS QUE "les deux conventions signées le même jour sont indivisibles, la deuxième qui règle le sort des commissions sur encours perçues après le 22 avril 1998 au titre de quatre clients, étant indissociable de l'acte de cession du fonds de commerce ; qu'il résulte de la lettre adressée le 19 février 1999 par le GIE AFER à la société Santé équilibre performance que la deuxième convention a reçu un commencement d'exécution ; que ce commencement d'exécution est admis par la société Epargne actuelle ; que l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté" (arrêt, p. 3), 1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ;

Qu'en l'espèce, si la Société Santé équilibre performance avait incidemment indiqué dans ses conclusions d'appel que la seconde convention du 22 avril 1998 avait reçu un commencement d'exécution, elle n'en avait pour autant tirer aucune conséquence juridique ;

Que pour condamner la SARL Epargne actuelle à payer à la Société Santé équilibre performance, la somme de 13.498,38 euros, la Cour d'appel a relevé d'office « que l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté » ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen de droit qu'elle entendait relever d'office, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés individuelles ;

2°) ALORS QUE les actions en nullité absolue se prescrivent par trente ans ; que celui qui se voir réclamer l'exécution d'une obligation atteint d'une nullité absolue peut se prévaloir de cette nullité pendant le délai de prescription ;

Qu'en l'espèce, la Société Epargne actuelle faisait valoir que la seconde convention du 22 avril 1998 conclue entre la Société Les Editions X..., aux droits de laquelle se trouve la Société Santé équilibre production, et la Société Les bureaux du patrimoine, aux droits de laquelle se trouve la Société Epargne actuelle, était nulle, de nullité absolue, soit pour absence de cause en application de l'article 1131 du Code civil en cas de divisibilité des conventions, soit pour dissimulation de prix conformément aux dispositions de l'article 1321-1 du Code civil en cas d'indivisibilité des conventions ;

Qu'en considérant que la seconde convention avait reçu un commencement d'exécution, de sorte que l'exception de nullité ne pouvait plus être invoquée par la Société Epargne actuelle, alors que celle-ci invoquait une nullité absolue non encore prescrite puisque le contrat litigieux avait été conclu le 22 avril 1998, la Cour d'appel a violé par fausse application l'article 1304 et par refus d'application l'article 2262 du Code civil, ensemble les articles 1131 et 1321-1 de ce même code ;

3°) ALORS QUE l'exception de nullité est perpétuelle ; que si elle n'est pas recevable à l'endroit d'un acte atteint de nullité relative ayant déjà reçu exécution, il n'en va ainsi lorsque la nullité invoquée est absolue ;

Qu'en l'espèce, la Société Epargne actuelle faisait valoir que la seconde convention du 22 avril 1998 conclue entre la Société Les Editions X..., aux droits de laquelle se trouve la Société Santé équilibre production, et la Société Les bureaux du patrimoine, aux droits de laquelle se trouve la Société Epargne actuelle, était nulle, de nullité absolue, soit pour absence de cause en application de l'article 1131 du Code civil en cas de divisibilité des conventions, soit pour dissimulation de prix conformément aux dispositions de l'article 1321-1 du Code civil en cas d'indivisibilité des conventions ;

Qu'en considérant que la seconde convention avait reçu un commencement d'exécution, de sorte que l'exception de nullité ne pouvait plus être invoquée par la Société Epargne actuelle, sans avoir recherché la nature de la nullité invoquée et sans avoir constaté que l'action en nullité était prescrite, la Cour d'appel a privé de base légale sa décision au regard des articles 1304 et 2262 du Code civil, ensemble les articles 1131 et 1321-1 de ce même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SARL Epargne actuelle à payer à la Société Santé équilibre performance, la somme de 13.498,38 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2000, et ordonné à la SARL Epargne actuelle de communiquer à la SARL Santé équilibre performance (SEP), anciennement dénommée société Editions Pouvreau, toutes pièces et justificatifs relatifs aux commissions versées par AFER à la Société Les bureaux du patrimoine sur les encours des personnes mentionnées à l'assignation pour les années 1998 à 2004,


AUX MOTIFS ADOPTES QUE "la deuxième convention du 22 avril, entraînant le partage des commissions éventuelles à venir à compter du 1er avril 1998, implique le transfert et le maintien des contrats des clients précisément désignés, elle n'est donc pas un engagement unilatéral mais une obligation réciproque pour les parties, l'obligation de chacun trouvant sa cause dans l'obligation de l'autre ; quant à la durée, qu'il est précisé dans l'article 1 alinéa 1 de la convention litigieuse que : « les commissions ... seront partagées de moitié... .sans limitation de durée », cette dernière expression impliquant la durée du contrat client lequel pouvant se terminer soit par le décès de celui-ci, soit par le rachat du contrat, et qu'en conséquence, il ne s'agit nullement d'un « engagement perpétuel ; que le Tribunal dira que cette clause n'entraîne donc pas .la nullité de la convention ; que même à considérer les deux conventions du 22 avril 1998, liées l'une à l'autre, la seconde dépendant de la réalité de la première, comme des conventions indivisibles, cela n'amène pas à considérer qu'il y ait dissimulation de prix, compte tenu du caractère aléatoire et incertain des versements à intervenir et du maintien des encours ; le partage des commissions ne peut donc s'analyser comme un supplément de prix, outre le fait que les règlements sont à effectuer par chèque, et les sommes ainsi versées à déclarer par le récipiendaire ; d'autant plus qu'un premier règlement est intervenu entre la société LES BUREAUX du PATRIMOINE, et la société S.E.P. ; ce règlement pouvant se comprendre comme un commencement d'exécution du contrat du 22 avril 1998 (les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites...art 1134 C. Civ.) ; quant au courrier du 30 décembre 1998 dans lequel Monsieur X... écrivait : « il n'a jamais été convenu entre nous de rétrocession de commissions. », il ne fait que mettre en lumière la réalité de la convention, celle-ci ayant été passée entre la Société des Editions X... , représentée par sa gérante, Madame Marie-Christine X..., et la société LES BUREAUX du PATRIMOINE" (jugement, p. 3),

ALORS QUE le juge doit, à peine de nullité de son jugement, répondre à l'ensemble des moyens qui lui sont présentés par les parties dans leurs conclusions d'appel ;

Qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la Société Epargne actuelle faisait valoir que la seconde convention du 22 avril 1998 devait être frappée de nullité absolue pour dissimulation de prix, « la cause de l'engagement de rétrocéder une partie des commissions afférentes à l'activité du fonds déjà cédé étant en fait la cession du fonds », « la rétrocession des commissions devant s'analyser dès lors comme un complément au prix de 1.200.000 F indiqué dans l'acte de cession » ; qu'elle relevait que « la volonté de dissimulation ressort clairement … de l'aveu judiciaire de la Société Santé épargne performance qui a reconnu dans ses écritures : « la convention du 22 avril 1998 a pour contrepartie la signature de la convention du même jour au prix de 1.200.000 F, prix qui aurait été plus élevé si la société défenderesse n'avait pas accepté le partage des commissions » (conclusions en réplique, référés 7//11/03) » ;

Qu'en ne répondant pas à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Nullité


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.