par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 25 novembre 2009, 08-19791
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
25 novembre 2009, 08-19.791

Cette décision est visée dans la définition :
Compensation




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses diverses branches :

Vu l'article 1291 du code civil ;

Attendu qu'en présence de créances réciproques connexes, l'effet extinctif de la compensation judiciairement ordonnée est réputé s'être produit au jour de l'exigibilité de la première créance ;

Attendu que Mme X..., leur ancienne salariée, a été condamnée pour détournement de fonds, par un arrêt du 11 décembre 1997, à verser à ses employeurs, les sociétés ICSO et ISOCRATE, certaines sommes avec intérêts à compter de l'assignation ; que, par un arrêt du 19 mai 2005, la même juridiction a fixé la créance de Mme X... à l'égard de ces sociétés, au titre de la participation, de l'intéressement et du capital à une certaine somme et ordonné la compensation ;

Attendu que pour retenir que la compensation judiciaire ne prenait pas effet au 11 décembre 1997, mais au 19 mai 2005, l'arrêt relève que si la créance de Mme X... existait en son principe antérieurement à l'arrêt du 11 décembre 1997, elle n'était pas liquide puisque c'est la cour d'appel qui, dans son arrêt du 19 mai 2005, en a arrêté le montant après expertise ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que s'agissant de dettes réciproques connexes, l'effet extinctif de la compensation judiciairement ordonnée est réputé s'être produit au jour de l'exigibilité de la première créance, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé les créances résiduelles des sociétés ICSO et ISOCRATE à 27 671,51 et 114 147,27 euros outre intérêts légaux postérieurs, l'arrêt rendu le 5 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne les sociétés ICSO et ISOCRATE aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour les époux X...,

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé la date de la compensation entre les créances respectives des exposants et des sociétés ICSO et ISOCRATE au 19 mai 2005, date de la décision qui l'a ordonnée, et d'AVOIR, en conséquence, jugé qu'après compensation ordonnée judiciairement le 19 mai 2005, les créances résiduelles des sociétés ICSO et ISOCRATE s'élèvent aux montants respectifs de 27.671,51 et 111.147,27 euros, outre intérêts légaux postérieurs ;

AUX MOTIFS QUE les sociétés ICSO et ISOCRATE poursuivent l'exécution d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de céans le 11 décembre 1997 par lequel Madame X..., leur ancienne salariée, a été condamnée à payer, en raison de détournements de fonds : - à la société ICSO 173.067,19 francs, soit 26.383,92 euros, - à la société ISOCRATE 646.668,36 francs soit 98.583,96 euros, lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit à compter du 3 mars 1994 ; que par arrêt rendu le 19 mai 2005, la même Cour a - fixé la créance de Madame X... au titre de la participation, l'intéressement et du capital, à 10.982,19 euros à l'égard de la société ICSO et 26.586,81 euros à l'égard de la société ISOCRATE – ordonné la compensation entre ces sommes et celles dont Madame X... est redevable envers ses sociétés ; que la compensation légale entre deux dettes connexes nécessite que les deux dettes soient liquides ; qu'elle ne joue pas si l'une des dettes est contestée jusqu'à ce qu'elle ait été reconnue par un jugement ; que si la créance de Madame X... existait en son principe antérieurement à l'arrêt du 11 novembre 1997, elle n'était pas liquide puisque c'est la Cour, dans son arrêt du 19 mai 2005, qui a arrêté son montant après expertise ; que c'est donc à juste titre que le premier juge a retenu que la compensation ne prenait pas effet au 11 novembre 1997 mais au 19 mai 2005, de sorte que la créance des sociétés ICSO et ISOCRATE incluait, outre le capital, les intérêts dus depuis le 3 mars 1994 jusqu'au 19 mai 2005, date à laquelle jouait la compensation, ramenant ainsi à cette date à 50.315,13 euros la créance d'ICSO et à 183.192,13 euros celle de la société ISOCRATE ; qu'il a ensuite déduit les sommes estimées devant leur revenir au titre de l'adjudication du 23 octobre 1998, fixant leur créance résiduelle à 38.653,70 euros pour la société ICSO et à 140.734,08 pour la société ISOCRATE ; que le premier juge a défalqué des créances résiduelles, les sommes revenant à Madame X... au titre de l'arrêt du 19 mai 2005, chiffrant en définitive à 27.671,51 euros la créance de la société ICSO et à 114.147,27 euros celle de la société ISOCRATE ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'une controverse oppose cette fois les parties sur le fond et plus particulièrement sur le mode de calcul de la créance résiduelle des sociétés ICSO et ISOCRATE après compensation judiciaire ; que sur ces points, les comptes sont à purger à partir de deux décisions de justice fixant les créances réciproques ; que d'une part, l'arrêt de la Cour de RENNES du 11 décembre 1997 tirant les conséquences des détournements opérés par Marie Paule Y... épouse X... la condamne à payer les sommes de 173.067,19 francs à la SARL ICSO et 646.668,36 francs à la société ISOCRATE avec prise en compte des intérêts légaux à compter de l'assignation du 3 mars 1994 ; que d'autre part, à l'issue de l'instance prud'homale, la Cour d'appel de RENNES rend un arrêt le 19 mai 2005 pour écarter la demande de Marie-Paule X... en dommages et intérêts (…) et pour fixer sa créance en intéressement de participation au capital aux deux montants de 10.982,19 euros à l'égard de la société ICSO et 26.586,81 euros à l'égard de la société ISOCRATE ; qu'en outre cette seconde décision « ordonne la compensation judiciaire entre ces deux sommes et celles dont Madame X... est redevable envers ces deux sociétés » ; que c'est ici que les parties divergent profondément dans le calcul puisque Marie Paule X... soutient être en droit de compenser directement en capital ans abstraction faite des intérêts postérieurs à la précédente adjudication tandis que les deux sociétés ICSO et ISOCRATE totalisent leurs propres créances en principal et intérêts échus avant d'en déduire les sommes dues à Marie Paule X... dès lors qu'à ce jour elles n'ont encore perçu aucune somme en provenance du prix d'adjudication de 35.000 francs du 23 octobre 1998 ; qu'en réalité retenir la méthode suggérée par la débitrice saisie reviendrait à transgresser frontalement l'autorité de la chose jugée ; qu'en effet le dispositif de l'arrêt du 11 décembre 1997 fixe très clairement à la date de l'assignation du 3 mars 1994 le point de départ des intérêts légaux générés par les deux créances ICSO et ISOCRATE ; que ces intérêts issus d'un titre sont incontestablement dus sans être anéantis par une adjudication dont le prix n'a pas été payé à ce jour, même partiellement ; que dès lors la compensation avec la créance constituée huit ans plus tard au profit de Marie Paule X... par un nouvel arrêt du 19 mai 2005 doit intégrer les sommes dont celle-ci est redevable à cette dernière date ; que si cet arrêt est constitutif d'une créance contractuelle de Marie Paule X... au titre de l'intéressement, sa dette à l'égard d'ICSO et ISOCRATE est déjà constituée depuis huit ans en vertu de la décision du 11 décembre 1997 ; qu'à ce stade de l'analyse, les deux créances évaluées à 51.703,42 euros et 189.017,41 euros doivent subir deux correctifs sur la période d'intérêts ; que la prise en compte de ceux-ci doit en effet être interrompue à la fin du mois de mai 2005, qui marque la date de mise en ..uvre de la compensation judiciaire au lieu d'être poursuivie jusqu'en février 2006 avant déduction de la créance compensatrice ;

1° ALORS QU'est judiciaire et non légale la compensation ordonnée par le juge entre deux créances réciproques qu'il a lui-même liquidées ; qu'en jugeant que la compensation entre les créances réciproques de Madame X... et des sociétés ICSO et ISOCRATE ne pouvait produire effet avant l'arrêt du 19 mai 2005 au motif que les conditions de la compensation légale n'étaient pas réunies, quand elle avait constaté que la compensation avait été ordonnée par l'arrêt du 19 mai 2005 qui avait liquidé la créance de Madame X..., la Cour d'appel a méconnu les dispositions des articles 1290 et 1291 du Code civil ;

2° ALORS QUE la compensation judiciaire produit effet dès la date à laquelle les créances réciproques ont coexisté, même si l'une d'elles ne remplissait pas les conditions de la compensation légale ; qu'en jugeant que la compensation judiciaire intervenue entre les créances réciproques de Madame X... et des sociétés ICSO et ISOCRATE ne pouvait produire effet avant l'arrêt du 19 mai 2005 qui l'avait ordonnée, quand, ordonnée judiciairement, elle pouvait produire effet dès la date à laquelle les créances réciproques avaient coexisté, alors même que la créance de Madame X... n'aurait pas été, à cette date, liquide, la Cour d'appel a méconnu les dispositions des articles 1290 et 1291 du Code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Compensation


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.