par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 10 novembre 2010, 09-15937
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
10 novembre 2010, 09-15.937

Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon les arrêts attaqués (Fort-de-France, 27 mars 2009 et 29 mai 2009), que la société Stock Plus a acquis un fonds de commerce exploité dans des locaux appartenant à la SCI Micnat selon bail applicable à compter du 1er février 2000 et comportant une clause de révision triennale du loyer par indexation sur l'indice du coût de la construction ; que le 16 novembre 2005, la bailleresse a informé la locataire du nouveau loyer résultant de la variation de l'indice et exigible à compter du 1er février 2004 ; que le 17 janvier 2005, elle a notifié à la locataire, au visa de la clause résolutoire, un commandement de payer des rappels de loyers résultant de l'indexation, puis l'a assignée aux fins de voir constater la résiliation du bail ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société Stock Plus fait grief à l'arrêt de constater la résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire, alors, selon le moyen, que la clause résolutoire insérée dans un bail doit s'interpréter strictement et seules peuvent être sanctionnées par le jeu de cette clause les infractions expressément visées par le bail ; que dès lors, en déclarant acquise, pour défaut de paiement des arriérés dus en vertu de la clause d'indexation, la clause résolutoire stipulée dans le bail de la société Stock Plus sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ladite clause visait un tel défaut de paiement, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le bail comportait une clause d'échelle mobile stipulant la révision triennale et automatique du loyer par référence à l'indice national du coût de la construction, la cour d'appel en a déduit exactement que le commandement de payer notifié le 17 janvier 2005 au visa de la clause résolutoire du bail visait valablement un rappel de loyers résultant de l'application de la clause d'échelle mobile ;

D'où il suit que le moyen est mal fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour déclarer acquise la clause résolutoire et constater la résiliation du bail, l'arrêt retient qu'à la suite du commandement délivré le 17 janvier 2006 et visant la clause résolutoire, la société Stock Plus n'a pas déféré aux causes du commandement ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme le lui demandait la société Stock Plus qui soutenait que la bailleresse avait entendu faire cesser une exploitation concurrente d'un commerce que cette dernière possédait par ailleurs, si la clause résolutoire n'avait pas été mise en oeuvre de mauvaise foi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mars 2009, rectifié le 29 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;

Condamne la SCI Micnat aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI Micnat à payer à la société Stock Plus la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la SCI Micnat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par de la SCP Boutet, avocat aux conseils pour la société Stock Plus

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré acquise, au bénéfice de la SCI MICNAT, bailleresse, la clause résolutoire incluse dans le bail commercial consenti à la Société STOCK PLUS, d'avoir prononcé l'expulsion de cette dernière et de l'avoir condamnée à payer à la SCI MICNAT, la somme de 5.262 euros au titre de l'augmentation du loyer révisé, le tout sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la Société STOCK PLUS a reconnu dans l'acte de cession du bail, passé en la forme notariée et signé par elle le 23 mai 2001, avoir une parfaite connaissance et parfaite compréhension des diverses charges et conditions du bail initial, tant par la lecture que lui en a faite le notaire que par celle qu'elle en a faite elle-même dès avant le jour de la signature, une copie du bail lui ayant été remise à cet effet ; que dans ces conditions et, en application de l'article 1134 du Code Civil, elle est tenue par les stipulations du bail initial, dans la limite de celles expressément contraires à l'acte de cession du 23 mai 2001 ; que la SCI MICNAT soutient avoir notifié au locataire, la Société STOCK PLUS, sa demande de révision du loyer par courrier recommandé en date du 16 septembre 2005, sur le fondement d'une clause d'échelle mobile stipulée dans l'acte ; que les premiers juges ont justement rappelé que la clause d'échelle mobile est une clause d'indexation automatique du loyer fondée sur la variation d'un indice selon une périodicité déterminée dans le contrat et qu'il faut donc le cumul d'un indice, d'une périodicité et d'une automaticité de la révision ; qu'en l'espèce, compte tenu des stipulations du bail et de la cession, il y a bien cumul d'un indice (indice national du coût de la construction), d'une périodicité (trois ans) et d'une automaticité (le réajustement intervenant tous les trois ans à la date anniversaire du contrat) et que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu l'existence d'une clause d'échelle mobile et rejeté toute l'argumentation de la Société STOCK PLUS qui s'articulait, en droit et en fait, sur la notion de révision légale triennale (prévue par l'article L 145-38 du Code de Commerce) et qu'elle ne maintient plus devant la Cour ; que la clause d'échelle mobile s'applique automatiquement et selon les clauses contractuelles, et ce sans que le bailleur ait à la solliciter ; que de plus, le fait de ne pas solliciter immédiatement le paiement du loyer révisé par le jeu de cette clause, ne saurait correspondre à une renonciation aux loyers révisés ; que la SCI MICNAT réclamait dans son commandement une somme erronée puisqu'en réalité l'arriéré de loyers dus de février 2004 à novembre 2005 est égal à 5.262 euros ; qu'un commandement dont il apparaît que les motifs sont fondés mais faisant état d'un quantum erroné, en l'occurrence pour une somme supérieure, demeure valable à hauteur du montant rectifié ; qu'à la suite de ce commandement délivré le 17 janvier 2006 et visant la clause résolutoire, la Société STOCK PLUS n'a pas déféré aux causes du commandement ; qu'en conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont constaté la résiliation du bail qui était acquise de plein droit au 18 février 2006 ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, dans l'hypothèse de l'application d'une clause d' échelle mobile, celle-ci joue automatiquement par l'effet même du contrat sans que le bailleur n'ait à la demander ou même n'ait à mettre en demeure le locataire de la respecter ; que dans ces conditions, le bailleur est juridiquement fondé à réclamer le paiement d'un arriéré correspondant à la partie du loyer non réglée depuis l'indexation de plein droit ; que le fait de ne pas demander le paiement du loyer révisé dès la mise en oeuvre de la clause d'échelle mobile ne peut valoir renonciation ; que le fait que le bailleur ne réclame le paiement d'un arriéré qu'à compter d'une date ultérieure à cette indexation intervenue de plein droit ne préjudicie pas, par hypothèse au locataire ; qu'il ne peut donc tirer aucune conséquence de droit particulière l'autorisant à s'opposer au paiement de l'arriéré demandé ; que si le commandement visant la clause résolutoire délivré le 17/01/2006 à la Société STOCK PLUS par la SCI MICNAT porte donc sur des montants erronés et excessifs s'agissant tant de l'arriéré de loyer que de la majoration du dépôt de garantie, il convient cependant de constater que les motifs du commandement sont fondés (défaut de paiement du loyer et de l'un de ses accessoires) ;

ALORS D'UNE PART QUE la clause résolutoire insérée dans un bail doit s'interpréter strictement et seules peuvent être sanctionnées par le jeu de cette clause les infractions expressément visées par le bail ; que dès lors, en déclarant acquise, pour défaut de paiement des arriérés dus en vertu de la clause d'indexation, la clause résolutoire stipulée dans le bail de la Société STOCK PLUS sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ladite clause visait un tel défaut de paiement, la Cour d'Appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1134 du Code Civil ;


ALORS D'AUTRE PART QUE l'application de la clause résolutoire est subordonnée aux exigences de la bonne foi ; que dès lors, en déclarant acquise, pour défaut de paiement des arriérés dus en vertu de la clause d'indexation, la clause résolutoire stipulée dans le bail de la Société STOCK PLUS sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le gérant de la SCI MICNAT, qui était propriétaire d'un magasin exerçant la même activité que sa locataire, ne cherchait pas à faire disparaître un concurrent direct, la Cour d'Appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1134 du Code Civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.