par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 17 février 2011, 10-30439
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
17 février 2011, 10-30.439

Cette décision est visée dans la définition :
Autorité parentale




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1384, alinéas 1er, 4 et 7, du code civil ;

Attendu que pour que la responsabilité de plein droit des père et mère exerçant l'autorité parentale sur un mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le dommage invoqué par la victime ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur ; que seule la cause étrangère ou la faute de la victime peut exonérer les père et mère de cette responsabilité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué que, participant à une randonnée cycliste sur la piste cyclable aménagée autour de l'hippodrome de Longchamp, M. X..., à l'intersection de cette piste et de la "route des tribunes", plus large, réservée à la fois aux cyclistes et aux piétons, est entré en collision avec l'enfant Arthur Y..., âgé de dix ans, qui se déplaçait en "rollers" sur cette route, a chuté et s'est blessé ; qu'il a assigné en responsabilité et indemnisation de son dommage M. Y... en qualité de civilement responsable de son fils mineur et son assureur la société Médicale de France, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris ;

Attendu que pour débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt énonce qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'accident établi par les services de police que le jeune Arthur Y... "se déplaçait sur la route des Tribunes..., voie fermée et réservée aux cycles et aux piétons" et "qu'il semblerait" que l'enfant se trouvait au milieu de cette route lorsque le cycliste est venu le percuter ; qu'entendus par les policiers, M. X... a déclaré qu'il roulait dans le premier tiers d'un peloton lorsque l'enfant a traversé la route devant lui et le jeune Arthur Y... a indiqué qu'il était "de dos" lorsque le vélo l'a percuté ; que les policiers ont relevé l'identité de deux témoins MM. Z... et A..., tous deux cyclistes au sein du même peloton, lesquels, dans les attestations qu'ils ont délivrées, ont expliqué que l'accident s'est produit à la sortie d'une courbe alors que la piste sur laquelle ils circulaient et qui était exclusivement réservée aux cyclistes, débouchait sur une voie plus large comportant une bande blanche délimitant la piste cyclable, et ont précisé que l'enfant se trouvait : "en bordure de la piste cyclable" pour M. Z... et "trop prés de la piste que les coureurs s'attribuent" pour M. A..., lequel a ajouté qu'à cet endroit le peloton s'élargissait ; qu'il ressort de ces éléments que l'enfant ne se trouvait pas lors de la collision sur la piste cyclable mais "près" de cette piste ou "en bordure" de celle-ci, à un endroit par conséquent réservé tant aux cyclistes qu'aux piétons ainsi que les policiers l'ont noté ; qu'il s'ensuit que l'accident est dû au comportement fautif de M. X... qui, à la sortie d'un virage, a empiété sur la partie de la chaussée qui n'était pas réservée aux seuls cyclistes, à vive allure selon ses écritures, et sans prendre les précautions nécessaires pour éviter les autres usagers de la route ; que cette faute d'imprudence exonère M. Y... de toute responsabilité ;

Qu'en exonérant totalement le père du mineur de sa responsabilité de plein droit, alors qu'elle constatait que la position du mineur en bordure de la partie de la piste attribuée aux seuls cyclistes au moment où y circulait à vive allure le peloton des randonneurs avait été directement la cause du dommage subi par le cycliste qui l'avait heurté, et sans constater que la faute retenue à l'encontre de ce dernier avait été pour le responsable un événement imprévisible et irrésistible, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. Y..., ès qualités, et la société Médicale de France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y..., ès qualités, et de la société Médicale de France ; les condamne, in solidum, à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Jean X... de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QU'« en vertu de l'article 1384 al 4 du code civil, les père et mère exerçant l'autorité parentale sur un mineur habitant avec eux, sont responsables de plein droit du dommage causé par le fait, même non fautif, du mineur et seule la force majeure ou la faut de la victime peut les exonérer de cette responsabilité ; qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'accident établi par les services de police que le jeune Arthur Y... "se déplaçait sur la route des Tribunes..., voie fermée et réservée aux cycles et aux piétons" et qu'"il semblerait" que l'enfant se trouvait au milieu de cette route lorsque le cycliste est venu le percuter ; que, entendus par les policiers, Monsieur Jean X... a déclaré qu'il roulait dans le premier tiers d'un peloton lorsque l'enfant a traversé la route devant lui et le jeune Arthur Y... a indiqué qu'il était "de dos" lorsque le vélo l'a percuté ; que les policiers ont relevé l'identité de deux témoins Mrs Z... Vincent et A... Noël, tous deux cyclistes au sein du même peloton, lesquels dans les attestations qu'ils ont délivrées, ont expliqué que l'accident s'est produit à la sortie d'une courbe alors que la piste sur laquelle ils circulaient et qui était exclusivement réservée aux cyclistes, débouchait sur une voie plus large comportant une bande blanche délimitant la piste cyclable, ils ont précisé que l'enfant se trouvait : "en bordure de la piste cyclable" pour Monsieur Z... et "trop prés de la piste que les coureurs s'attribuent" pour Monsieur A... lequel a ajouté qu'à cet endroit le peloton s'élargissait ; qu'il ressort de ces éléments que l'enfant ne se trouvait pas lors de la collision sur la piste cyclable mais "près" de cette piste ou "en bordure" de celle-ci, à un endroit par conséquent réservé tant aux cyclistes qu'aux piétons ainsi que les policiers l'ont noté ; qu'il s'ensuit que l'accident est dû au comportement fautif de Monsieur Jean X... qui à la sortie d'un virage, a empiété sur la partie de la chaussée qui n'était pas réservée aux seuls cyclistes, à vive allure selon ses écritures, et sans prendre les précautions nécessaires pour éviter les autres usagers de la route ; que cette faute d'imprudence exonère Monsieur Olivier Y... de toute responsabilité » ;

1) ALORS QUE, pour que la responsabilité de plein droit des père et mère exerçant l'autorité parentale sur un enfant mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le dommage invoqué ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur, seule la force majeure ou la faute de la victime pouvant exonérer les père et mère de cette responsabilité ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir que, tout au long de la piste, et précisément à l'endroit où l'accident s'est produit, des panneaux étaient dressés à l'attention des piétons, indiquant à ceux-ci « piétons attention, piste cyclable » ; que la Cour d'appel constate de son côté que Arthur Y... circulait « en bordure de la piste cyclable » et, selon un autre témoin, « trop près de la piste cyclable » ; qu'en exonérant totalement Monsieur Olivier Y... de sa responsabilité de plein droit au motif que le jeune Arthur Y... n'empiétait pas sur la piste réservée aux cyclistes, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, dans les circonstances de l'espèce, sa position n'était pas de nature à gêner le peloton de cyclistes dont il devait connaître et surveiller en permanence l'évolution sur la piste, en sorte que sa présence à cet endroit sans anticipation du danger que constituait l'arrivée du peloton, caractérisait une faute, la Cour d'appel a privé sa décision au regard de article 1384, alinéas 4 et 7, du code civil ;

2) ALORS QUE, EN TOUTE HYPOTHESE, la faute de la victime, à la supposer établie, ne peut exonérer totalement les parents de leur responsabilité de plein droit du fait de leurs enfants mineurs habitant avec eux que s'il est démontré que cette faute a été la cause exclusive du dommage ; qu'en exonérant totalement Monsieur Olivier Y... de toute responsabilité à l'égard de Monsieur Jean X..., au motif que la victime avait commis une faute d'imprudence, sans constater que cette faute était à l'origine exclusive du dommage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéas 4 et 7, du code civil ;

3) ALORS QU'ENFIN ET DE DOUTE FACON, des constatations de l'arrêt, il résulte que Arthur Y... se trouvait en bordure de piste lors de la collision ; qu'en exonérant totalement Monsieur Olivier Y... de sa responsabilité de plein droit à l'égard de Monsieur Jean X... sans rechercher si cette position risquée de l'enfant n'était pas, au moins partiellement, à l'origine de l'accident, de sorte qu'en toute hypothèse, Monsieur Olivier Y... ne pouvait être exonéré que partiellement de sa responsabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéas 4 et 7, du code civil.



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Autorité parentale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.