par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 17 mai 2011, 09-43003
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Cour de cassation, chambre sociale
17 mai 2011, 09-43.003

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er juillet 1996 par la société Logitud et occupait les fonctions de directeur des recherches et du développement des nouvelles technologies, lorsqu'en cours d'année 2004, cette société a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ; que par jugement du 19 janvier 2005, le tribunal de grande instance de Mulhouse a arrêté le plan de cession de l'entreprise à la société Logitud solutions à laquelle les contrats de travail des salariés ont été transférés en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que M. X... a été licencié pour faute grave le 25 janvier 2006 ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à ce que la société Logitud solutions soit condamnée à lui verser la somme de 52 800 euros au titre de la clause de garantie d'emploi, alors, selon le moyen :

1°/ que le tribunal qui arrête un plan de cession d'actifs d'une entreprise en redressement judiciaire retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé ; que le jugement qui arrête le plan rend opposable à tous les engagements souscrits par le repreneur en matière d'emploi ; que tel est le cas du nouvel employeur qui a souscrit un engagement, repris par le jugement d'arrêté du plan de cession d'actifs, de poursuivre, pendant une durée de deux ans, sous peine de dommages-intérêts, les contrats de travail qui lui ont été transférés en application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; qu'un employeur ne peut revenir sur un engagement à durée déterminée ; qu'il doit exécuter de bonne foi son engagement de garantir la poursuite des contrats de travail pendant une période déterminée ; qu'un licenciement prononcé en méconnaissance d'un tel engagement entraîne, pour le salarié licencié qui le demande, la réparation de son préjudice sous la forme de dommages-intérêts correspondants aux salaires qui auraient dû être réglés jusqu'à la fin de la période de garantie d'emploi, indépendamment du paiement, s'il y a lieu, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il importe peu que le nom des salariés dont le contrat de travail doit être transféré et poursuivi ne soit pas indiqué dans le jugement de cession alors que ces salariés sont identifiables ; qu'en considérant que la clause du jugement d'arrêté de cession selon laquelle "le cessionnaire devra exploiter l'activité durant au moins deux ans à compter de la cession, avec les salariés y attachés à peine de dommages-intérêts" ne visait qu'à garantir la pérennité de l'activité et le niveau des effectifs au profit du cédant et qu'en conséquence, le salarié licencié ne bénéficiait pas d'un droit individuel à réparation de son préjudice sous la forme du paiement des salaires restant dus en cas de méconnaissance de cette clause, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 1351 et 1147 du code civil, ensemble les dispositions de l'article L. 642-5, alinéas 1 et 3 du code de commerce ;

2°/ que le juge ne peut méconnaître le sens et la portée d'un jugement arrêtant un plan de cession et homologuant l'engagement du nouvel employeur de conserver pendant une durée déterminée les contrats de travail qui lui ont été transférés ; qu'en relevant que le jugement de cession avait été respecté du seul fait que le niveau des effectifs de 27 salariés avait été maintenu, peu important par conséquent que l'un de ces salariés ait été licencié, et que sa méconnaissance n'engendrait pas de droit à indemnisation pour ce salarié, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des dispositions du jugement du tribunal de grande instance de Mulhouse qui prévoit, non seulement que le cessionnaire reprend dans les conditions de l'article L. 122-12 du code du travail 27 salariés, mais aussi qu'il "devra exploiter l'activité durant au moins deux ans à compter de ce jour sur le site d'ALSACE avec les salariés y attachés à peine de dommages-intérêts" ; que la cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée, violant ainsi, par fausse interprétation, les dispositions des articles 1351 du code civil et L. 642-5, alinéa 3 du code de commerce ;

Mais attendu que la clause obligeant le cessionnaire à exploiter l'activité durant au moins deux ans avec les salariés attachés à l'entité cédée, à peine de dommages-intérêts, n'a pas pour effet de priver l'employeur du pouvoir de prononcer des licenciements pour motif disciplinaire ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 4 et 12 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à ce que la société Logitud solutions soit condamnée à lui verser la somme de 10 002,62 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et décider de lui allouer seulement une indemnité légale de licenciement d'un montant de 3 801 euros, l'arrêt énonce que l'employeur conteste le quantum de l'indemnité de licenciement et que M. X... ne justifie pas du mode de calcul de l'indemnité de licenciement qu'il chiffre à 10 002,62 euros ; que, dans ces conditions et faute de justifier de ce montant, il y a lieu de retenir le mode de calcul prévu par les dispositions de l'article R. 1234-2 du code du travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de travail du salarié prévoyait en son article 1er qu'il était régi par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, sociétés de conseils, la cour d'appel, à qui il appartenait de trancher le litige conformément à la règle de droit conventionnelle applicable au litige et qui ne pouvait refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance de justification par le salarié du mode de calcul de l'indemnité conventionnelle qu'il sollicitait, a méconnu son office et violé les articles susvisés ;

PAR CES MOTIFS

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement de la somme de 10 002,62 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt rendu, entre les parties, le 25 juin 2009, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne la société Logitud solutions aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Logitud solutions à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... (salarié) de sa demande tendant à ce que la société LOGITUD SOLUTIONS (employeur) soit condamnée à lui verser la somme de 10.002, 62 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, et de lui avoir seulement alloué une indemnité légale de licenciement d'un montant de 3.801 € ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... a été embauché le 1er juillet 1996 par la société LOGITUD en qualité d'analyste programmeur ; qu'il était en dernier lieu directeur des recherches et du développement des nouvelles technologies ; qu'au cours de l'année 2004, la société a fait l'objet d'un redressement judiciaire et par jugement du 19 janvier 2005, le Tribunal de grande instance de MULHOUSE a arrêté le plan de cession de l'entreprise à la société LOGITUD SOLUTIONS, les contrats de travail étant transférés à cette société en application des dispositions de l'article L.1224-1 du Code du travail ; que l'employeur a convoqué Monsieur X... à un entretien préalable avec mise à pied conservatoire par lettre du 5 janvier 2006 ; qu'il l'a licencié pour faute grave par lettre du 25 janvier 2006 ; que la réalité des griefs tirés, d'une part, de ce que Monsieur X... aurait donné aux salariés sous sa responsabilité des instructions contraires aux intérêts de l'entreprise, et, d'autre part, de ce qu'il aurait ordonné à un salarié d'abandonner le projet « numérisation des timbres amendes » n'est pas démontrée ; que l'indemnité de préavis et les congés payés afférents sont dus au salarié, ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

QU'en revanche, l'employeur conteste le quantum de l'indemnité de licenciement ; que Monsieur X... ne justifie pas du mode de calcul de l'indemnité de licenciement qu'il chiffre à 10.002, 62 € ; que dans ces conditions, et faute de justifier du montant pris en compte, il y a lieu de retenir le mode de calcul prévu par les dispositions de l'article R.1234-2 du Code du travail, soit un dixième de mois de salaire par année d'ancienneté ;
qu'ainsi l'indemnité de licenciement revenant à Monsieur X... s'établit à la somme de : 4.001, 05 € X 9, 5 = 3.801 € et que le jugement déféré doit être infirmé sur ce point ;

ALORS, D'UNE PART, QU'une convention collective s'applique dès le lendemain de son dépôt et ses dispositions plus favorables se substituent de plein droit aux dispositions légales ayant le même objet dans les entreprises relevant de son champ d'application ; que l'indemnité conventionnelle de licenciement se substitue de plein droit à l'indemnité légale de licenciement ; que le contrat de travail de Monsieur X..., régulièrement versé aux débats, prévoit, en son article 1er alinéa 2, qu'il est régi par les dispositions de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, société de conseils, applicable à l'entreprise ; qu'en refusant d'accorder au salarié l'indemnité conventionnelle sollicitée, et en lui allouant à la place une indemnité légale de licenciement, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L.2251-1 et L.2254-1 du Code du travail, ensemble la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseils, et par fausse application, l'article R.1234-2 du même Code ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que, lorsqu'une partie invoque une convention collective, il incombe au juge de se procurer ce texte qui contient la règle de droit éventuellement applicable au litige, au besoin en invitant les parties à lui en faire parvenir un exemplaire ; qu'il appartient au juge de trancher le litige en interprétant lui-même la convention collective et en recherchant lui-même si la demande est fondée ; qu'en substituant l'indemnité légale de licenciement à l'indemnité conventionnelle de licenciement aux motifs que Monsieur X... ne justifiait pas du quantum de sa demande alors qu'elle aurait dû se faire communiquer la convention collective applicable et l'interpréter en recherchant elle-même si la demande était fondée, aux besoins en prononçant la réouverture des débats, la Cour d'appel, qui s'est abstenue par des motifs inopérants d'appliquer la règle de droit appropriée, a violé, par refus d'application, les articles 12 alinéa 1, et 16 alinéa du Code de procédure civile ;

ET ALORS, AU DEMEURANT, QUE qu'en application de l'article 4 du Code civil, le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves fournies ; qu'en refusant de se prononcer sur le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement et en y substituant l'indemnité légale de licenciement, au seul motif que le salarié ne justifiait pas du mode de calcul de l'indemnité de licenciement sollicitée, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 4 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... (salarié) de sa demande tendant à ce que la société LOGITUD SOLUTIONS (employeur) soit condamnée à lui verser la somme de 52.800 € au titre de la clause de garantie d'emploi ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... invoque à son profit les dispositions du jugement du Tribunal de grande instance de MULHOUSE du 19 janvier 2005 arrêtant le plan de cession de la société LOGITUD à la société LOGITUD SOLUTIONS en prévoyant : « Le cessionnaire devra exploiter l'activité durant au moins 2 ans à compter de la cession, avec les salariés y attachés à peine de dommages-intérêts » ; que cette disposition visant à garantir la pérennité de l'activité et le maintien des emplois en termes d'effectifs à été ordonnée par le Tribunal au profit du cédant, et que les pièces produites témoignent de ce que cette obligation a été respectée dès lors que l'activité a été poursuivie au-delà du mois de janvier 2007 et que les effectifs de 27 salariés ont été maintenus voire augmentés ainsi qu'il résulte du registre du personnel ; qu'en revanche cette disposition ne fait naître aucune créance au bénéfice des salariés pris individuellement et se distingue de la clause de garantie d'emploi, qui est une stipulation du contrat de travail par laquelle l'employeur s'interdit de licencier le salarié pendant une période définie sauf à lui verser des dommages-intérêts ; que ne pouvant se prévaloir d'aucune clause de garantie d'emploi et invoquant à tort des décisions de justice qui ne s'appliquent qu'en présence de telles clauses, Monsieur X... ne peut prétendre à aucun indemnité à ce titre, et que le jugement déféré lui ayant alloué une somme de 6.919, 57 € doit être réformé sur ce point ;

ALORS QUE le tribunal qui arrête un plan de cession d'actifs d'une entreprise en redressement judiciaire retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé ; que le jugement qui arrête le plan rend opposable à tous les engagements souscrits par le repreneur en matière d'emploi ; que tel est le cas du nouvel employeur qui a souscrit un engagement, repris par le jugement d'arrêté du plan de cession d'actifs, de poursuivre, pendant une durée de deux ans, sous peine de dommages-intérêts, les contrats de travail qui lui ont été transférés en application de l'article L.1224-1 du Code du travail ; qu'un employeur ne peut revenir sur un engagement à durée déterminée ; qu'il doit exécuter de bonne foi son engagement de garantir la poursuite des contrats de travail pendant une période déterminée ; qu'un licenciement prononcé en méconnaissance d'un tel engagement entraîne, pour le salarié licencié qui le demande, la réparation de son préjudice sous la forme de dommages et intérêts correspondant aux salaires qui auraient dû être réglés jusqu'à la fin de la période de garantie d'emploi, indépendamment du paiement, s'il y a lieu, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il importe peu que le nom des salariés dont le contrat de travail doit être transféré et poursuivi ne soit pas indiqué dans le jugement de cession dès lors que ces salariés sont identifiables ; qu'en considérant que la clause du jugement d'arrêté de cession selon laquelle « Le cessionnaire devra exploiter l'activité durant au moins 2 ans à compter de la cession, avec les salariés y attachés à peine de dommages-intérêts » ne visait qu'à garantir la pérennité de l'activité et le niveau des effectifs au profit du cédant, et qu'en conséquence, le salarié licencié ne bénéficiait pas d'un droit individuel à réparation de son préjudice sous la forme du paiement des salaires restant dûs en cas de méconnaissance de cette clause, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 1351 et 1147 du Code civil, ensemble les dispositions de l'article L.642-5 alinéas 1 et 3 du Code de commerce ;

ET ALORS AU DEMEURANT QUE le juge ne peut méconnaître le sens et la portée d'un jugement arrêtant un plan de cession et homologuant l'engagement du nouvel employeur de conserver pendant une durée déterminée les contrats de travail qui lui ont été transférés ; qu'en relevant que le jugement de cession avait été respecté du seul fait que le niveau des effectifs de 27 salariés avait été maintenu, peu important par conséquent que l'un de ces salariés ait été licencié, et que sa méconnaissance n'engendrait pas de droit à indemnisation pour ce salarié, la Cour d'appel a méconnu le sens et la portée des dispositions du jugement du Tribunal de grande instance de MULHOUSE qui prévoit, non seulement, que le cessionnaire reprend dans les conditions de l'article L.122-12 du Code du travail 27 salariés, mais aussi qu'il « devra exploiter l'activité durant au moins 2 ans à compter de ce jour sur le site d'ILLZACH avec les salariés y attachés à peine de dommages-intérêts » ; que la Cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée, violant ainsi, par fausse interprétation, les dispositions des articles 1351 du Code civil et L.642-5 alinéa 3 du Code de commerce.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.