par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 21 juin 2011, 09-67793
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Cour de cassation, chambre commerciale
21 juin 2011, 09-67.793
Cette décision est visée dans la définition :
In abstracto / In concreto
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par une ordonnance du 15 juin 1989, le président du tribunal de grande instance de Draguignan a autorisé le chef de la brigade interrégionale chargée des enquêtes de concurrence de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Languedoc-Roussillon et Corse à procéder à des opérations de visite et de saisie de documents au siège de plusieurs entreprises, dont la société Garnier-Pisan, soupçonnées d'avoir mis en uvre des pratiques d'ententes dans le cadre d'appels d'offres portant sur divers marchés publics ; que ces opérations se sont déroulées le 6 juillet 1989 ; que par une ordonnance du 16 octobre 1996, le même président a déclaré irrecevable le recours en annulation de ces opérations formé par diverses sociétés, notamment la société Colas Midi-Méditerranée ; que cette ordonnance a été cassée par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation par un arrêt du 15 juin 1999 qui a renvoyé les parties devant le tribunal de grande instance de Toulon ; que saisi, à la suite de l'enquête diligentée par le ministre de l'économie et des finances, de pratiques d'ententes sur divers marchés publics dans le département du Var, le Conseil de la concurrence (le Conseil), devenu l'Autorité de la concurrence (l'Autorité), par une décision n° 96-D-65 du 30 octobre 1996, a estimé que plusieurs de ces pratiques, contraires aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 420-1 du code de commerce, étaient établies et a prononcé des sanctions pécuniaires contre quatorze entreprises, dont les sociétés Jean-François et Colas Midi-Méditerranée, la seconde venant désormais aux droits de la première ; que la cour d'appel de Paris saisie d'un recours contre cette décision a, par un arrêt du 21 novembre 1997, sursis à statuer jusqu'à ce qu'il soit justifié d'une décision judiciaire irrévocable au sujet de la régularité des opérations de visite et, ou, de saisie effectuées dans les locaux de la société Garnier-Pisan ; que l'instance ayant été reprise devant la cour d'appel, celle-ci, par un arrêt du 16 novembre 2004, a révoqué le sursis à statuer, annulé la décision déférée et renvoyé au Conseil l'examen des griefs notifiés aux parties ; que la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a, par un arrêt du 31 janvier 2006, censuré cette décision, sauf en ce qu'elle a révoqué le sursis ordonné par arrêt du 21 novembre 1997 et renvoyé l'affaire à la cour d'appel de Paris, autrement composée ; que la société Colas Midi-Méditerranée a saisi la cour d'appel de renvoi et demandé, notamment, sur le fondement de l'article 5 IV, alinéa 2 , de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, l'annulation de l'ordonnance autorisant les visite et saisie de documents, rendue par le président du tribunal de grande instance de Draguignan le 15 juin 1989 et l'annulation des opérations subséquentes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Colas Midi-Méditerranée fait grief à l'arrêt d'avoir pour rejeter son recours, décidé que le représentant de l'Autorité devait être admis à présenter des observations orales à l'audience, alors selon le moyen, qu'aux termes de l'article R. 464-19 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2009-141 du 10 février 2009, «le ministre chargé de l'économie, lorsqu'il n'est pas partie à l'instance, peut présenter des observations orales à l'audience à sa demande ou à la demande du premier président ou de la Cour» ; que, dans sa rédaction ancienne, l'article R. 464-19 du Code de commerce, issu de l'article du décret n° 2005-1667 du 27 décembre 2005 énonçait que le : «le conseil de la concurrence et le ministre chargé de l'économie, lorsqu'il n'est pas partie à l'instance, peuvent présenter des observations orales à l'audience à leur demande ou à la demande du premier président de la Cour» ; qu'il en résulte que l'Autorité de la concurrence n'est plus recevable à présenter des observations orales à l'audience ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 464-19 du code de commerce dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2009-141 du 10 février 2009 ;
Mais attendu que si l'article R. 464-19 du code de commerce dans sa rédaction résultant du décret n° 2009-141 du 10 février 2009 ne fait plus mention de l'Autorité de la concurrence, l'article R. 461-1 du même code précise désormais que le président de cette Autorité a qualité pour présenter en son nom des observations devant toute juridiction, sans qu'il soit exclu que celles-ci soient orales ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel, après avoir relevé que s'agissant des recours prévus par les articles L. 464-7 et L. 464-8 du code de commerce, l'Autorité doit être présente à la procédure dont tous les actes lui sont notifiés, a la faculté de présenter des observations écrites et doit être convoquée à l'audience, a jugé que son représentant devait être admis à présenter des observations orales lors de celle-ci ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Colas Midi-Méditerranée fait grief à l'arrêt d'avoir jugé qu'elle même et la société Jean-François, aux droits de laquelle elle se trouve, ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et de lui avoir infligé des sanctions pécuniaires, alors selon le moyen, que l'annulation de la décision prise par le Conseil de la concurrence à raison de la participation du rapporteur qui a procédé aux investigations utiles pour l'instruction des faits dont le Conseil est saisi, et du rapporteur général sous le contrôle duquel l'instruction a été accomplie, au délibéré entraîne nécessairement celle de l'ensemble de l'instruction, laquelle a nécessairement été aussi entachée d'une méconnaissance du principe de la séparation des fonctions d'instruction et de jugement ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales ;
Mais attendu que la présence du rapporteur ayant instruit l'affaire traitée ainsi que du rapporteur général au délibéré de la décision du Conseil ne saurait entacher l'instruction, antérieure à ce délibéré, d'une méconnaissance du principe de la séparation des fonctions et porter atteinte aux droits de la défense ; que c'est donc à bon droit que l'arrêt retient que l'atteinte au principe d'impartialité du juge entachant le délibéré du Conseil et entraînant l'annulation de sa décision, n'a pas pour conséquence l'irrégularité de la procédure d'instruction qui l'a précédée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Attendu que pour rejeter le recours de la société Colas Midi-Méditerranée contre l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie rendue le 15 juin 1989 par le président du tribunal de grande instance de Draguignan, l'arrêt, relève que l'exigence d'impartialité du juge a pour finalité d'éviter qu'il ne soit habité d'un quelconque préjugé sur l'affaire qui lui est soumise, ce qui implique, notamment, que le même juge ne soit appelé à statuer s'il a dans une précédente intervention pris une position susceptible d'avoir une influence sur la seconde décision et qu'ainsi l'exercice successif par un même juge de fonctions juridictionnelles différentes dans un même litige n'est pas forcément contraire à l'exigence d'impartialité mais doit être apprécié au cas par cas par rapport à la finalité recherchée ; que l'arrêt ajoute que le président du tribunal de grande instance auquel il était demandé d'autoriser une visite domiciliaire était tenu de vérifier au vu des éléments d'information communiqués par l'administration que la demande d'autorisation qui lui était soumise était fondée et qu'à ce stade il se bornait à vérifier l'existence de présomptions d'une pratique anticoncurrentielle prohibée par l'article 7 de l'ordonnance précitée, sans que son autorisation de visite ne préjuge de l'appréciation par la juridiction du fond de la portée des éléments de preuve trouvés ; que l'arrêt en conclut que le contrôle en fait et en droit de la régularité de l'ordonnance de visite et saisie n'impliquera de la part de la Cour aucune appréciation sur le bien fondé des griefs et des sanctions concernant la société Colas Midi-Méditerranée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'examen de l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles autorisant les visite et saisie par la même formation de jugement que celle appelée à statuer sur le bien-fondé des griefs retenus et de la sanction prononcée au titre de ces pratiques est de nature à faire naître un doute raisonnable sur l'impartialité de la juridiction, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Colas Midi-Méditerranée
PREMIER MOYEN DE CASSATION
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR, pour déclarer mal fondé le recours de la société Colas Midi Méditerranée contre l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie rendue le 15 juin 1989 par le Président du Tribunal de grande instance de Draguignan, et en conséquence rejeter ce recours, rejeter comme irrecevables les contestations relatives aux opérations de visite et saisie du 6 juillet 1989 dans les locaux de la société Garnier-Pisan, rejeter l'exception de prescription, juger que la société Colas Midi Méditerranée et la société Jean François aux droits de laquelle se trouve la société Colas Midi-Méditerranée ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et infliger à la société Colas Midi Méditerranée à titre personnel une sanction 350.000 et à la société Colas Midi Méditerranée venant aux droits de la société Jean François une sanction de 45.000 , décidé que le représentant de l'Autorité de la concurrence doit être admis à présenter oralement des observations orales à l'audience ;
AUX MOTIFS QU'«en dépit de l'opposition formulée à l'audience par l'avocat de la société Colas Midi Méditerranée, la Cour a donné la parole au cours des débats au représentant de l'Autorité de la concurrence, sur la demande de celui-ci, et après avoir formulé des réserves sur cette intervention ; qu'un résumé de ses observations écrites a ainsi été exposé oralement par le représentant de l'autorité de la concurrence ; que la société Colas Midi-Méditerranée faisait valoir que s'agissant d'un recours contre une décision du Conseil de la concurrence antérieure au 1er janvier 2006, cette autorité ne pouvait pas bénéficier de la faculté de présenter des observations orales qui lui a été reconnue par l'article 7 du décret n° 2005-1667 du 27 décembre 2005 ayant modifié en ce sens, mais seulement pour l'avenir, l'article 9 du décret n° 87-849 du 19 octobre 1987, devenu ensuite l'article R.464-19 du Code de commerce ; que l'ancien article 9 du décret du 19 octobre 1987 dans sa rédaction antérieure à celle résultant de l'article 7 du décret du 27 décembre 2005 est devenu caduc. qu'en effet le décret n° 2009-141 du février 2009 a modifié plusieurs dispositions de la partie réglementaire du titre VI du livre IV du Code de commerce ; qu'en l'absence de toute précision contraire relative à son entrée en vigueur, les règles nouvelles qu'il édicté sont d'application immédiate y compris aux instances en cours ; que nonobstant la disparition de toute référence à l'autorité de la concurrence dans la nouvelle rédaction de l'article R.464-19 du Code de commerce qui ne concerne plus que le ministre chargé de l'économie, rien ne s'oppose à ce que le représentant de l'autorité de la concurrence formule des observations orales lors des débats devant la Cour d'appel de PARIS saisie d'un recours contre sa décision ; qu'en effet, il résulte des dispositions combinées des nouveaux articles R.461-1 alinéa 2, R.461-2 alinéa 1er, R.464-11, R.464-15 et R.464-18 du Code de commerce que le Président de l'autorité de la concurrence ou son délégué a qualité pour représenter l'autorité en justice et présenter des observations en son nom devant toute juridiction ; que, devant la Cour d'appel de PARIS statuant sur les recours prévus par les articles L.464-7 et L.464-8 du Code de commerce, sans être une partie à l'instance, l'Autorité de la concurrence doit être présente à la procédure dont tous les actes lui sont notifiés, qu'elle a la faculté de présenter des observations écrites et qu'elle est "convoquée" à l'audience ; que son représentant doit donc être admis à présenter oralement des observations à l'audience» ;
ALORS QU'aux termes de l'article R. 464-19 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2009-141 du 10 février 2009, «le Ministre chargé de l'économie, lorsqu'il n'est pas partie à l'instance, peut présenter des observations orales à l'audience à sa demande ou à la demande du premier président ou de la Cour» ; que, dans sa rédaction ancienne, l'article R. 464-19 du Code de commerce, issu de l'article du décret n° 2005-1667 du 27 décembre 2005 énonçait que le : «le conseil de la concurrence et le ministre chargé de l'économie, lorsqu'il n'est pas partie à l'instance, peuvent présenter des observations orales à l'audience à leur demande ou à la demande du premier Président de la Cour» ; qu'il en résulte que l'autorité de la concurrence n'est plus recevable à présenter des observations orales à l'audience ; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel a violé l'article R. 464-19 du Code de commerce dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n°2009-141 du 10 février 2009.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR jugé que la société Colas Midi Méditerranée et la société Jean François aux droits de laquelle se trouve la société Colas Midi-Méditerranée ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et infligé des sanctions pécuniaires à la société Colas Midi-Méditerranée ;
AUX MOTIFS QUE «selon la société Colas Midi-Méditerranée, c'est toute la procédure antérieure à la décision qui serait entachée d'irrégularité pour violation du principe d'impartialité posé par l'article 6-1 de la Convention européenne, en ce que le rapporteur ayant instruit "avait vocation à participer à un organe de jugement" ce qui aurait "affecté les droits des parties" dans leurs relations avec lui ; qu'elle fait valoir que la notification de griefs et le rapport ont été établis en méconnaissance des droits des entreprises poursuivies ; que l'atteinte au principe d'impartialité du juge entachant le délibéré du Conseil de la concurrence et entraînant l'annulation de sa décision, n'a pas nécessairement pour conséquence l'irrégularité de la procédure d'instruction qui l'a précédée ; que la société Colas Midi-Méditerranée n'explique pas concrètement en quoi aurait consisté la méconnaissance de ses droits au stade de l'enquête, de la notification de griefs ou de l'établissement du rapport ; que par conséquent, en application des articles 561 et 562 du Code de procédure civile, il y a lieu de statuer en fait et en droit sur les demandes des parties» ;
ALORS QUE l'annulation de la décision prise par le Conseil de la concurrence à raison de la participation du rapporteur qui a procédé aux investigations utiles pour l'instruction des faits dont le Conseil est saisi, et du rapporteur général sous le contrôle duquel l'instruction a été accomplie au délibéré entraîne nécessairement celle de l'ensemble de l'instruction, laquelle a nécessairement été aussi entachée d'une méconnaissance du principe de la séparation des fonctions d'instruction et de jugement ; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclaré mal fondé le recours de la société Colas Midi-Méditerranée contre l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie rendue le 15 juin 1989 par le Président du Tribunal de grande instance de Draguignan, et en conséquence rejeté ce recours ;
AUX MOTIFS QU'«à l'appui de la demande d'annulation, la société Colas Midi-Méditerranée fait valoir en premier lieu que le nouveau dispositif légal n'instaure pas un recours effectif, au motif que confier à la juridiction saisie du fond le soin de statuer sur la régularité de l'ordonnance serait contraire au principe d'impartialité imposé par l'article 6. §1 de la convention européenne des droits de l'homme ; que l'exigence d'impartialité du juge a pour finalité d'éviter qu'il ne soit habité d'un quelconque préjugé sur l'affaire qui lui est soumise ; que cela implique notamment que le même juge ne soit pas appelé à statuer s'il a dans une précédente intervention pris une position ou émis une appréciation qui apparaît comme susceptible d'avoir une influence sur la seconde décision ; qu'ainsi, l'exercice successif par un même juge de fonctions juridictionnelles différentes dans un même litige n'est pas forcément contraire à l'exigence d'impartialité mais doit être apprécié au cas par cas par rapport à la finalité recherchée ; que dans le cas présent, le président du Tribunal de grande instance auquel il était demandé d'autoriser une visite domiciliaire en application de l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 était tenu de vérifier au vu des éléments d'information communiqués par l'administration que la demande d'autorisation qui lui était soumise était fondée ; qu'à ce stade le juge se bornait à vérifier l'existence de présomptions d'une pratique anticoncurrentielle prohibée par l'article 7 de l'ordonnance précitée ; que son autorisation de visite ne préjugeait pas de l'appréciation par la juridiction du fond de la portée des éléments de preuve trouvés ; que par conséquent le contrôle en fait et en droit de la régularité de l'ordonnance d'autorisation de visite et saisie n'impliquera de la part de la Cour aucune appréciation sur le bien fondé des griefs et des sanctions concernant les sociétés Colas Midi-Méditerranée et Jean François ; que la Cour peut à la fois statuer sur les deux plans du recours de la société Colas Midi-Méditerranée sans que cela constitue une atteinte à l'exigence d'impartialité» ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE, l'instauration par l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du novembre 2008, d'une voie de recours à l'encontre d'une ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, ne répond pas à la condition d'impartialité au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que la même juridiction est amenée à connaître, d'une part, de la régularité de l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, acte de procédure qui a permis de recueillir les éléments sur le fondement desquels reposent les griefs retenus à l'encontre de la personne suspectée de pratiques anticoncurrentielles, et, d'autre part, du bien-fondé de ces mêmes griefs, dans l'exercice de son pouvoir de pleine juridiction ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que le juge qui autorise les opérations de visite et de saisie vérifie l'existence de présomptions d'une pratique anticoncurrentielle ; qu'il s'en déduit que, dans son contrôle de la régularité de l'ordonnance d'autorisation, la Cour d'appel est amenée à se prononcer sur ces présomptions, pour avoir, dans un second temps, si elle devait déclarer régulière l'ordonnance d'autorisation et décider de l'annulation de la décision rendue par le Conseil de la concurrence, à se prononcer sur le bien-fondé des griefs retenus à l'encontre de la personne suspectée de pratiques anticoncurrentielles et donc sur la présomption de pratiques anticoncurrentielles qu'un tel cumul de fonctions exercées par une même juridiction est de nature à faire naître un doute raisonnable sur son impartialité ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a donc violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE , l'instauration par l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du 13 novembre 2008, d'une voie de recours à l'encontre d'une ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, ne répond pas à la condition d'impartialité au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que la même juridiction est amenée à connaître, d'une part, de la régularité de l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, acte de procédure qui a permis de recueillir les éléments sur le fondement desquels reposent les griefs retenus par la décision de condamnation prise par le conseil de la concurrence, et, d'autre part, de l'incidence des éventuelles irrégularités de l'ordonnance sur la décision du conseil de la concurrence ; qu'un tel cumul de fonctions exercées par une même juridiction est de nature à faire naître un doute raisonnable sur son impartialité ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a donc violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ ALORS, encore, QUE , dans ses conclusions complémentaires (p. 12), la société COLAS a fait valoir que l'instauration par l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du 13 novembre 2008, par le législateur d'une voie de recours à l'encontre d'une ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, ne constitue par un recours effectif, en ce qu'il porte sur une décision rendue plus de 20 années avant l'exercice dudit recours, aucun recours effectif n'étant prévu au moment où a été rendue l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, et qu'une décision de condamnation a déjà été prononcée sur le fondement des documents saisis par le conseil de la concurrence, décision dont la Cour d'appel ne peut faire abstraction ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ces chefs de conclusion, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4°/ ALORS, enfin, QUE , dans ses écritures la société COLAS avait fait valoir que l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du 13 novembre 2008 ne prévoit aucune information relative à la voie de recours qui lui est offerte contre l'ordonnance d'autorisation des visites et saisies, en sorte que ledit recours n'était pas effectif au sens de l'article 6 de la Convention EDH ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ces chefs de conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclaré mal fondé le recours de la société Colas Midi-Méditerranée contre l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie rendue le 15 juin 1989 par le Président du Tribunal de grande instance de Draguignan, et en conséquence rejeté ce recours ;
AUX MOTIFS QUE «la société Colas Midi Méditerranée fait valoir l'absence d'un recours effectif en deuxième lieu au motif qu'elle n'a pas eu communication de la requête et des pièces, lesquelles seraient essentielles pour apprécier la validité de l'ordonnance ; qu'il ne peut pas être fait grief au Ministre qui n'est pas partie à l'instance et qui jusqu'au mémoire du 11 février 2009 ne pouvait pas s'attendre à une remise en cause d'une ordonnance ayant force de chose jugée depuis le rejet du pourvoi, c'est-à-dire depuis plus de 18 ans, de ne pas avoir communiqué ces documents ; que de son côté la Cour ne peut pas se dérober, au motif qu'il manquerait des pièces, à sa mission de juger le nouveau recours ouvert par le législateur ; qu'il lui incombera d'apprécier en fait et en droit la régularité de l'ordonnance au vu des éléments du dossier, ce qui constitue un contrôle juridictionnel effectif ; que le grief du caractère ineffectif du recours n'est donc pas fondé» ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE , la partie qui exerce le recours juridictionnel en contestation de l'autorisation de visite que lui ouvre l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du 13 novembre 2008 doit être en mesure d'apprécier les griefs dont l'ordonnance est susceptible et, à cette fin, avoir connaissance des pièces sur lesquels le juge qui a autorisé les opérations de visites et de saisies, s'est fondé ; qu'au cas contraire, le recours exercé n'est pas un recours effectif au sens de l'article 6 de la Convention EDH ; qu'en déniant à la société COLAS le droit de prendre connaissance de la requête et des pièces présentées par l'Administration, aux motifs inopérants que le défaut de communication ne pouvait être imputé au Ministre chargé de l'Economie et qu'elle ne pouvait se dérober à l'exercice de son contrôle de la régularité de l'ordonnance, la Cour d'appel a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, alors applicable, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE , la partie qui exerce le recours juridictionnel en contestation de l'autorisation de visite que lui ouvre l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du 13 novembre 2008 doit être en mesure d'apprécier les griefs dont l'ordonnance est susceptible et, à cette fin, avoir connaissance des pièces sur lesquels le juge qui a autorisé les opérations de visites et de saisies, s'est fondé ; que dans ses écritures (observations complémentaires en réplique, p. 20) la société COLAS MEDITERRANEE avait fait valoir qu'une rupture de l'égalité des armes découlait de ce qu'elle était privée de l'accès à la requête de l'administration, pièce essentielle du dossier, et des pièces annexées ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ces chefs de conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ ALORS, enfin, QUE, la partie qui exerce le recours juridictionnel en contestation de l'autorisation de visite que lui ouvre l'article 5 IV, al. 2 de l'ordonnance du 13 novembre 2008 doit être en mesure d'apprécier les griefs dont l'ordonnance est susceptible et, à cette fin, avoir connaissance des pièces sur lesquelles le juge qui a autorisé les opérations de visites et de saisies, s'est fondé ; que, dans ses écritures (observations complémentaires en réplique, p. 20) la société COLAS MEDITERRANEE avait fait valoir que le principe de la contradiction, découlant de l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, implique la communication des éléments de nature à obtenir du juge une décision, à savoir la requête de l'administration et des pièces annexées ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ces chefs de conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclaré recevable mais mal fondé le recours de la société Colas Midi-Méditerranée contre l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie rendue le 15 juin 1989 par le président du Tribunal de grande instance de Draguignan, et en conséquence rejeté ce recours ;
AUX MOTIFS QUE «s'agissant de la régularité de l'ordonnance, il est inexact de soutenir comme le fait la société Colas Midi-Méditerranée que l'ordonnance doit faire la preuve par elle-même de sa régularité; qu'en effet dans le cadre du recours ouvert par l'article 5 de l'ordonnance du 13 novembre 2008, la Cour d'appel de PARIS, juridiction du fond, donc juge du droit et du fait, comme l'admet la société Colas Midi-Méditerranée dans ses écritures, ne doit pas s'arrêter uniquement aux ternies de l'ordonnance mais peut avoir recours à des éléments extrinsèques pour en vérifier la régularité ; que la société Colas Midi Méditerranée émet une série de critiques, tenant à l'absence des mentions de nature à établir que l'auteur de la requête était régulièrement habilité (a), à l'absence d'indication de l'objet de la demande d'enquête (b), et au défaut de mention précise des documents soumis au juge et de leur origine (c) ; (a) que dans son ordonnance du 15 juin 1989 qui fait foi jusqu'à inscription de faux, le président du Tribunal de grande instance de Draguignan énonce que la requête lui a été présentée par le Chef de la Brigade Interrégionale d'Enquêtes chargée des enquêtes de concurrence pour les régions PACA, Languedoc-Roussillon et Corse; que le ministre et le Conseil de la concurrence ont fait observer sans être contredits que le Chef de brigade était un fonctionnaire de catégorie A de la DGCCRF; que l'arrêté du 31 décembre 1986, alors en vigueur, visant l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence et notamment ses articles 45, 47 et 48, énonçait dans son article 1er: "sont habilités au titre de l'article 45 de l'ordonnance susvisée: les fonctionnaires de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ... "; que dès lors, sans avoir besoin d'une délégation du directeur général de la DGCCRF, l'auteur de la requête était habilité réglementairement à effectuer les enquêtes prévues par l'article 45 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et par conséquent à demander les autorisations de procéder aux visites évoquées par l'article 48 du même texte; (b) que selon l'article 48 de l'ordonnance précitée, les visites doivent se situer dans le cadre de l'enquête en cours; qu'en l'espèce l'enquête en question est celle citée au 4ème visa de l'ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Draguignan, à savoir l'enquête confiée le 17 avril 1989 par le Directeur général de la DGCCRF au chef de sa "Brigade interrégionale d'enquêtes à Marseille"; que les faits énoncés dans l'ordonnance par référence à des documents cités suffisent à établir que l'enquête en cours concernait des pratiques d'ententes dans la réponse aux appels d'offres pour la passation des marchés publics de chaussées, canalisations et terrassement dans le département du Var entre 1986 et 1988; que les visites dans sept entreprises de ce secteur d'activité, reconnues comme ayant soumissionné dans cette période, s'inscrivaient donc bien dans ce cadre; (c) que s'agissant des documents soumis au juge, l'ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Draguignan, dans ses motifs, cite en les analysant les pièces 1, 2 et 3 jointes à la requête de l'administration, ce qui établit, là encore jusqu'à inscription de faux, qu'elles lui ont été soumises; qu'aucun doute n'existe quant à la licéité de l'origine de tels documents afférents à des procédures d'attribution de marchés publics auxquelles la DGCCRF a légalement accès; que par ailleurs, quand bien même l'administration n'aurait joint à sa requête aucune autre pièce pour étayer les faits exposés dans la requête et repris par le magistrat à l'appui de sa décision, les 3 pièces sus visées suffisaient à étayer les soupçons de pratiques anti-concurrentielles prohibées, dans le secteur géographique et professionnel faisant l'objet de l'enquête delà DGCCRF, à l'égard des sept sociétés concernées; qu'en effet le magistrat déduisait justement de ces pièces une similitude de comportement jointe à une absence d'analyse sérieuse de l'appel d'offres, et des présomptions de partage du marché; qu'il résulte de ce qui précède que le président du Tribunal de grande instance de Draguignan pour délivrer son autorisation s'est bien conformé aux prescriptions de l'article 48 alinéa 1er de l'ordonnance du 1er décembre 1986; que par conséquent aucun des griefs formulés par la société Colas Midi Méditerranée contre son ordonnance du 15 juin 1989 n'est fondé» ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE , la Cour d'appel de PARIS, en charge d'effectuer le contrôle juridictionnel de l'ordonnance d'autorisation des opérations de visites et de saisies, par l'effet des dispositions transitoires issues de l'article 5 IV de l'ordonnance 2008-1161 du 13 novembre 2008, doit contrôler en fait et en droit ladite ordonnance sans pouvoir se borner à en vérifier la régularité formelle, pour vérifier, comme le prévoit l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243, si la demande d'autorisation est fondée ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel s'est bornée à énoncer qu'au regard des exigences de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, alors applicable, l'enquête en question est celle citée au 4ème visa de l'ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Draguignan, à savoir l'enquête confiée le 17 avril 1989 par le Directeur général de la DGCCRF au chef de sa "Brigade interrégionale d'enquêtes à Marseille" que les faits énoncés dans l'ordonnance par référence à des documents cités suffisent à établir que l'enquête en cours concernait des pratiques d'ententes dans la réponse aux appels d'offres pour la passation des marchés publics de chaussées, canalisations et terrassement dans le département du Var entre 1986 et 1988 et que les visites dans sept entreprises de ce secteur d'activité, reconnues comme ayant soumissionné dans cette période, s'inscrivaient donc bien dans ce cadre ; qu'en statuant ainsi, se contentant d'un simple contrôle formel de légalité de l'ordonnance litigieuse, sans procéder à son analyse en fait et en droit, ce qui impliquait l'analyse concrète des faits énoncés dans l'ordonnance, ainsi que les documents qui y étaient cités, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 450-4, al. 6 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 1er de l'ordonnance n° 2008-1161 du novembre 2008, ensemble l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.
2°/ ALORS, d'autre part, QUE , la Cour d'appel de PARIS, en charge d'effectuer le contrôle juridictionnel de l'ordonnance d'autorisation des opérations de visites et de saisies, par l'effet des dispositions transitoires issues de l'article 5 IV de l'ordonnance 2008-1161 du 13 novembre 2008 doit contrôler en fait et en droit ladite ordonnance sans pouvoir se borner à en vérifier la régularité formelle, pour vérifier, comme le prévoit l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243, si la demande d'autorisation est fondée ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel s'est bornée à énoncer que les pièces 1, 2 et 3 jointes à la requête de l'administration suffisaient à étayer les soupçons de pratiques anticoncurrentielles prohibées, dans le secteur géographique et professionnel faisant l'objet de l'enquête delà DGCCRF, à l'égard des sept sociétés concernées et qu'en effet le magistrat déduisait justement de ces pièces une similitude de comportement jointe à une absence d'analyse sérieuse de l'appel d'offres, et des présomptions de partage du marché ; qu'en statuant ainsi, sans procéder à l'analyse concrète desdites pièces, en vue de vérifier si elles étaient effectivement de nature à faire naître une présomption de pratique anticoncurrentielle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 450-4, al. 6 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 1er de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, ensemble l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR rejeté comme irrecevables les contestations relatives aux opérations de visite et saisie du 6 juillet 1989 dans les locaux de la société Garnier-Pisan ;
AUX MOTIFS QUE «la société Colas Midi-Méditerranée demande à la Cour d'annuler les opérations de visite et saisie s'étant déroulées, à la suite de l'autorisation ci-dessus examinée, dans les locaux de la société Gamier-Pisan le 6 juillet 1989 ; que le Conseil de la concurrence et le Ministre font justement observer que cette contestation est irrecevable, du fait que la société Colas Midi-Méditerranée n'a pas saisi la juridiction de renvoi après l'arrêt de cassation de l'ordonnance du 16 octobre 1996 ayant déclaré irrecevable son recours contre ces opérations ; qu'en effet, la société Colas Midi-Méditerranée et une autre société visée par l'enquête, avaient, après la notification des griefs les concernant, introduit devant le président du Tribunal de grande instance de Draguignan un recours tendant à l'annulation de la visite domiciliaire relatée dans le procès-verbal du 6 juillet 1989 ; que ces sociétés avaient ensuite formé un pourvoi contre chacune des ordonnances du 16 octobre 1996 ayant déclaré irrecevables comme tardifs leur recours ; que par deux arrêts du 15 juin 1999, la Cour de Cassation a cassé ces ordonnances et renvoyé les causes et les parties devant le président du Tribunal de grande instance de Toulon, lequel n'a jamais été saisi ; que sans que la Cour ait à se prononcer sur l'application des dispositions de l'article 386 ou de l'article 1034 du Code de procédure civile, il suffit pour écarter cette demande de la société Colas Midi-Méditerranée de constater que par l'effet des cassations intervenues, les instances en contestation des opérations de visite et saisie du 6 juillet 1989 ne pouvaient reprendre leur cours que devant le président du Tribunal de grande instance de Toulon, seul investi, par délégation spéciale de la Cour de Cassation, du pouvoir de statuer sur les contestations en question; que c'est vainement que la société Colas Midi-Méditerranée invoque des changements ultérieurs de jurisprudence qui lui auraient interdit de saisir la juridiction de renvoi ; qu'en effet, aucune évolution ni jurisprudentielle, ni législative, ne permet de déroger aux règles du renvoi après cassation ; qu'au surplus, les textes créant de nouveaux recours en cette matière n'ont pas donné à la Cour d'appel de PARIS le pouvoir de statuer sur le déroulement des opérations de saisie ; que toutes les prétentions de la société Colas Midi Méditerranée relatives à la visite et saisie du 6 juillet 1989 doivent dès lors être écartées» ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE , l'interprétation jurisprudentielle d'une même norme à un moment donné ne peut être différente selon l'époque des faits considérés ; que, par arrêt en date du 30 novembre 1999 (Bull. IV, n° 214), la Cour de cassation a, opérant un revirement de jurisprudence, jugé que «selon l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 , le Président chargé de contrôler le déroulement d'une visite domiciliaire désigne à cette fin un ou plusieurs officiers de police judiciaire pour assister aux opérations et le tenir informé de leur déroulement», qu'«il peut se rendre personnellement dans les locaux pendant l'intervention et décider, à tout moment, d'office ou à la requête des parties, la suspension ou l'arrêt de la visite» et qu'«il en résulte que sa mission prend fin avec les opérations, lors de la remise de la copie du procès-verbal et de l'inventaire à l'occupant des lieux ou à son représentant, et qu'il ne peut être saisi a posteriori d'une éventuelle irrégularité entachant ces opérations, une telle contestation relevant du contentieux dont peuvent être saisies les autorités de décision appelées à statuer sur les poursuites éventuellement engagées sur le fondement des documents ainsi appréhendés» ; que ce revirement de jurisprudence, intervenu postérieurement aux deux arrêts de cassation du 15 juin 1999, par lesquels la Cour de cassation avait renvoyé la société COLAS MIDI-MEDITERRANEE devant le Tribunal de grande instance de TOULON pour connaître de la régularité des opérations de visite et de saisie du 6 juillet 1989, s'appliquait nécessairement à la compétence du juge ayant autorisé les opérations de visite et de saisie et donnait compétence aux autorités de décision appelées à statuer sur les poursuites éventuellement engagées sur le fondement des documents ainsi appréhendés, et donc à la Cour d'appel saisie d'un recours de plein contentieux à l'encontre d'une décision du Conseil de la concurrence rendue sur la base de tels documents ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 5 du Code civil, ensemble l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre dans sa rédaction applicable à la cause ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantie le droit d'accès à un Tribunal ; que, par arrêt en date du 30 novembre 1999 (Bull. IV, n° 214), la Cour de cassation a, opérant un revirement de jurisprudence, jugé que «selon l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 , le Président chargé de contrôler le déroulement d'une visite domiciliaire désigne à cette fin un ou plusieurs officiers de police judiciaire pour assister aux opérations et le tenir informé de leur déroulement», qu'«il peut se rendre personnellement dans les locaux pendant l'intervention et décider, à tout moment, d'office ou à la requête des parties, la suspension ou l'arrêt de la visite» et qu'«il en résulte que sa mission prend fin avec les opérations, lors de la remise de la copie du procès-verbal et de l'inventaire à l'occupant des lieux ou à son représentant, et qu'il ne peut être saisi a posteriori d'une éventuelle irrégularité entachant ces opérations, une telle contestation relevant du contentieux dont peuvent être saisies les autorités de décision appelées à statuer sur les poursuites éventuellement engagées sur le fondement des documents ainsi appréhendés» ; que ce revirement de jurisprudence, intervenu postérieurement aux deux arrêts de cassation du 15 juin 1999, par lesquels la Cour de cassation avait renvoyé la société COLAS MIDI-MEDITERRANEE devant le Tribunal de grande instance de TOULON pour connaître de la régularité des opérations de visite et de saisie du 6 juillet 1989, sauf à priver la société COLAS de son droit d'accès à un Tribunal pour connaître de son recours en contestation de la régularité des opérations de visite et de saisie devait s'appliquer immédiatement, sans égard aux effets de la cassation intervenue, opérant renvoi de la société COLAS devant le Tribunal de grande instance de TOULON, lequel se serait nécessairement déclaré incompétent par l'effet de la nouvelle jurisprudence ; qu'en s'en tenant strictement aux effets de la cassation prononcée, la Cour d'appel, qui a privé la société COLAS de son droit d'accès à un Tribunal, a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Cette décision est visée dans la définition :
In abstracto / In concreto
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.