par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 7 juillet 2011, 10-19057
Dictionnaire Juridique

site réalisé avec
Baumann Avocats Droit informatique

Cour de cassation, 1ère chambre civile
7 juillet 2011, 10-19.057

Cette décision est visée dans la définition :
Signature




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :

Vu l'article 1326 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de ce texte, dans sa rédaction issue de la loi 2000-230 du 13 mars 2000 "Adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et signature électronique", que si la mention de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres, écrite par la partie même qui s'engage, n'est plus nécessairement manuscrite, elle doit alors résulter, selon la nature du support, d'un des procédés d'identification conforme aux règles qui gouvernent la signature électronique ou de tout autre procédé permettant de s'assurer que le signataire est le scripteur de ladite mention ;

Attendu que la société Guy X... a livré au cours de l'année 2002 des fruits et légumes à la société Jema distribution dont Mme Y... était la gérante, M. Y..., le directeur commercial ; que des factures n'ayant pas été réglées, les époux Y... ont adressé à leur fournisseur, le 27 mars 2003, une lettre recommandée avec avis de réception, au contenu intégralement dactylographié, par laquelle ils reconnaissaient lui devoir la somme de 28 688,40 euros ; que la société Guy X... les a assignés en paiement de cette somme ;

Attendu que, pour débouter la société Guy X... de sa demande, l'arrêt retient qu'aucune mention manuscrite émanant de chacun des époux Y... et concernant le montant de la somme due ne figure sur la reconnaissance ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne les époux Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer à la société Guy X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Guy X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Guy X... de sa demande tendant à la condamnation solidaire des époux Y... à lui payer la somme de 28.688,40 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance jusqu'à parfait règlement ;

AUX MOTIFS QU'il ressort des faits constants de la cause tels qu'ils sont établis par les écritures des parties et les documents versés aux débats qu'au cours de l'année 2000, la société Guy X... a livré des fruits et primeurs à la société Jema distribution dont madame Y... et gérante et monsieur Y..., directeur commercial ; que ces livraisons ont donné lieu à l'établissement de factures pour un montant total de 28.688,40 euros ; que par lettre du 9 décembre 2002, la société Jema distribution a demandé à la société Guy X... d'établir ces factures au nom de la société MCN Traiteur, laquelle n'a pas procédé au règlement ; que par acte du 27 mars 2003, les époux Y... ont reconnu devoir à la société Guy X... la somme de 28.688,40 euros ; que, par un jugement du 16 décembre 2004, la société MCN Traiteur a été condamnée à régler à la société Guy X... la somme de 35.808,01 euros ; que, par une ordonnance du 13 décembre 2006, la société Guy X... a été admise au passif de liquidation de la société MCN Traiteur à hauteur de 38.163,33 euros ; que, par assignation du 30 novembre 2006, la société Guy X... a saisi le tribunal d'une demande en paiement à l'encontre des époux Y... au titre de l'acte du 27 mars 2003 ; qu'au soutien de leur appel, les époux Y... font valoir que l'acte du 27 mars 2003 ne peut être qualifié de reconnaissance de dette mais seulement de cautionnement solidaire auquel cas le document serait nul pour défaut de mention manuscrite ; qu'en réponse, la société Guy X... fait valoir que l'acte du 27 mars 2003 ne peut constituer un cautionnement lequel ne se présume pas mais caractérise l'existence d'une reconnaissance de dette, laquelle est parfaitement causée et que si sa validité formelle peut être contestée, il n'en demeure pas moins qu'il constitue un commencement de preuve par écrit corroboré par des éléments extrinsèques ; que pour solliciter des époux Y... le règlement de la somme de 28 688,40 €, la société X... se fonde exclusivement sur un document dactylographié daté du 27 mars 2003 par lequel les époux Y... reconnaissent devoir à la société Guy X... la somme de 28.688,39 € concernent la fourniture de fruits et légumes à la société Jema distribution, document suivi de deux signatures précédées de la mention manuscrite «lu et approuvé bon pour accord» ; que ce document a été adressé par lettre recommandée du 27 mars 2003 à monsieur Guy X... ainsi libellé : «Pour faire suite à notre dernier entretien du 26 courant, nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint notre reconnaissance de dette signée par nous-mêmes. Nous vous renouvelons nos remerciements pour cette facilité de paiement et vous prions d'agréer, Monsieur, nos salutation distinguées», lettre recommandée signée par madame Y... uniquement ; que si la somme de 28.688,39 € correspond bien aux factures émises par la société Guy X... et qui ne peuvent se confondre avec les factures concernant la société MCN Traiteur, il s'avère néanmoins que l'acte du 27 mars 2003 ne saurait constituer une reconnaissance expresse des époux Y... de leur qualité de débiteurs à titre personnel des sommes dues par la société Jema distribution, la formule selon laquelle les époux Y... remercient la société Guy X... «pour cette facilité de paiement» démontrant qu'ils agissent pour le compte de leur société alors qu'au surplus aucune mention manuscrite émanant de chacun des époux et concernant le montant de la somme due ne figure sur ce document ; que les époux Y... ne peuvent valablement soutenir que cet acte caractériserait un cautionnement alors que ce dernier ne se présumant pas, il ne peut résulter que des mentions mêmes de l'acte, lesquelles sont inexistantes sur ce point ; que, en conséquence, faute pour la société Guy X... de rapporter le preuve que les époux Y... se sont substitués à titre personnel au règlement des sommes dues par leur société, il convient de réformer le jugement déféré et de débouter la société Guy X... de sa demande en paiement ;

1°) ALORS QUE constitue une reconnaissance de dette l'acte par lequel une personne reconnaît devoir une certaine somme à titre personnel ; qu'en déniant cette qualification à l'acte du 27 mars 2003 après avoir pourtant constaté que les époux Y... reconnaissaient par ce document, qui portait leurs signatures précédées de la mention «lu et approuvé, bon pour accord», devoir à la société X... la somme de 28.688,40 euros au titre de la fourniture de marchandises à leur société et que, dans la lettre du même jour accompagnant cet acte, les époux Y... indiquaient à la société X... « nous vous prions de bien vouloir trouver ci-jointe notre reconnaissance de dette signée par nous-mêmes », ce dont il résultait que les époux Y... s'étaient engagés à titre personnel à payer la dette de leur société, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE , subsidiairement, en écartant la reconnaissance de dette dont l'existence était clairement établie par l'acte du 27 mars 2003 et la lettre du même jour des époux Y..., la cour d'appel a dénaturé ces documents, en violation de l'article 1134 du code civil.

3°) ALORS QUE les juges du fond ne doivent pas dénaturé les termes clairs et précis des écrits soumis à leur examen ; qu'en retenant que l'acte du 27 mars 2003 ne constituait pas une reconnaissance de dette par les époux Y... pour la raison que la formule «pour cette facilité de paiement», contenue dans la lettre d'envoi de cet acte, démontrerait qu'ils agissaient pour le compte de leur société quand rien dans cette formule n'indiquait qu'ils avaient établi l'acte litigieux pour le compte de la société Jema distribution et non en leur nom personnel, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'acte portant reconnaissance de dette et a violé l'article 1134 du code civil ;

4°) ALORS QUE l'engagement personnel de payer une somme peut avoir pour objet la dette d'autrui ; qu'en retenant que l'acte du 27 mars 2003 ne constituait pas une reconnaissance de dette, faute pour la société X... de rapporter la preuve que les époux Y... s'étaient substitués à titre personnel au règlement des sommes dues par leur société quand il appartenait aux seuls souscripteurs de l'acte d'établir soit l'erreur qu'ils auraient commise quant à la cause de leur engagement soit l'inexistence de celle-ci ou son caractère illicite, la cour d'appel a violé les articles 1131 et 1132 du code civil ;

5°) ALORS QUE la mention de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres, écrite par la partie même qui s'engage, n'est plus nécessairement manuscrite ; qu'en retenant que l'acte du 27 mars 2003 ne saurait constituer une reconnaissance par les époux Y... de leur qualité de débiteur à titre personnel des sommes dues par la société Jema distribution pour la raison qu'aucune mention manuscrite émanant de chacun des époux et concernant le montant de la somme due ne figurait sur ledit document quand la signature manuscrite du débiteur est seule exigée, la cour d'appel a violé l'article 1326 du code civil.



site réalisé avec
Baumann Avocats Droit des affaires

Cette décision est visée dans la définition :
Signature


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.