par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 9 janvier 2013, 11-16433
Dictionnaire Juridique

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Cour de cassation, chambre sociale
9 janvier 2013, 11-16.433

Cette décision est visée dans la définition :
Temps de travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;

Attendu que selon ce texte le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a travaillé pour la société France 3, aux droits de laquelle se trouve la société France télévisions, à compter du 1er juin 1983, en qualité de chef-opérateur du son-vidéo, dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée successifs ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant, notamment, à la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes de requalification de son contrat de travail en un contrat à temps plein et de rappel de salaire consécutifs et limiter le montant des indemnités de requalification et de rupture, l'arrêt retient qu'il ressort des contrats à durée déterminée et des bulletins de salaires produits, dont les mentions à cet égard ne sont pas contestées, que, dans les faits, la durée du travail effectuée par M. X... a été variable et constamment inférieure à la durée légale du travail, de sorte que, pendant la période considérée le salarié a travaillé à temps partiel pour la société France 3 ; que les planifications des personnels nécessaires pour garantir la continuité du service à France 3 étaient généralement réalisées d'une semaine sur l'autre selon un tableau prévisionnel et que les salariés employés à temps partiel pouvaient donc prévoir quel serait leur emploi du temps ; qu'aucune clause d'exclusivité ne les liant à l'entreprise, ils pouvaient refuser les contrats qui leur étaient proposés et n'étaient pas obligés de déférer à un appel de l'employeur pour une intervention ne figurant pas au planning ; que M. X... n'était pas le seul chef opérateur du son-vidéo auquel France 3 avait recours à temps partiel ; que le salarié pouvait donc prévoir à quel rythme il devait travailler ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant constaté que le contrat de travail à temps partiel ne répondait pas aux exigences de l'article L. 3123-14 du code du travail, la cour d'appel, qui ne pouvait écarter la présomption de travail à temps complet qui en résultait sans constater que l'employeur faisait la preuve de la durée de travail exacte, mensuelle ou hebdomadaire, convenue, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein et en paiement d'un rappel de salaire consécutif et limite le montant des indemnités de requalification et de rupture, l'arrêt rendu le 15 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société France télévisions aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société France télévisions à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de requalification de son contrat de travail en un contrat à temps plein assortie d'une demande de rappel de salaire d'un montant de 132.860.80 euros depuis le 1er janvier 2004 (congés payés inclus), et d'avoir limité le montant de l'indemnité de requalification et les indemnités de rupture allouées en conséquence.

AUX MOTIFS QUE selon l'article L.3123-14 et suivants du Code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit comportant des mentions précises définies par ce texte ; qu'il en résulte que l'absence de contrat écrit constatant le temps partiel fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur, qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel, et, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas tenu de se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'il ressort des contrats à durée déterminée et des bulletins de salaire produits, dont les mentions à cet égard ne sont pas contestées, que, dans les faits, la durée du travail effectué par M. X... a été variable et constamment inférieure à la durée légale du travail, de sorte que, pendant la période considérée le salarié a travaillé à temps partiel pour la société France 3 ; qu'il résulte des pièces produites et des débats que les planifications des personnels nécessaires pour garantir la continuité du service à France 3 étaient généralement réalisées d'une semaine sur l'autre par un tableau prévisionnel ; que les salariés employés à temps partiel pouvaient donc prévoir quel serait leur emploi du temps ; qu'aucune clause d'exclusivité ne les liait à l'entreprise, ils pouvaient refuser les contrats qui leur étaient proposés et n'étaient pas obligés de déférer à un appel de l'employeur pour une intervention ne figurant pas au planning ; que M. X... n'était pas le seul chef opérateur du son-vidéo auquel France 3 avait recours à temps partiel ; que le salarié pouvait donc prévoir à quel rythme il devait travailler ; qu'en l'absence de production de ses déclarations de revenus, les pièces du dossier et les circonstances de l'espèce, notamment le fait que son taux d'emploi par la société France 3 par rapport à un temps plein n'a pas excédé 69% depuis 2001 et 58% si on se réfère aux cinq dernières années, indiquent que M. X... a travaillé simultanément pour d'autres employeurs ; que dans ces conditions, il est suffisamment établi que les relations de travail liant M. X... à France 3 étaient à temps partiel.

ALORS QU'il résulte de l'article L.3123-14 du Code du travail que l'absence d'écrit mentionnant la durée hebdomadaire, ou le cas échéant mensuelle, prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois fait présumer que l'emploi est à temps complet et que l'employeur qui conteste cette présomption doit rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, et, d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

1°) QUE, d'une part, s'agissant de la preuve de la durée hebdomadaire ou mensuelle, la Cour d'appel a relevé que la durée du travail effectuée par Monsieur X... était variable et constamment inférieure à la durée légale du travail ; qu'en statuant de la sorte, sans vérifier si l'employeur justifiait de la durée exacte du travail de Monsieur X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3123-14 du Code du travail.

2°) QUE, d'autre part, s'agissant de la preuve de l'impossibilité pour le salarié de prévoir à quel rythme il devait travailler, la Cour d'appel a énoncé que la durée du travail de Monsieur X... avait été variable et que les planifications des personnels nécessaires pour garantir la continuité du service à FRANCE 3 étaient généralement réalisées d'une semaine sur l'autre, de sorte que les salariés à temps partiel pouvaient donc prévoir quel serait leur emploi du temps ; qu'en statuant ainsi, alors même qu'il résultait de telles constatations que le rythme de travail du salarié variait d'une semaine à l'autre, sans possibilité de connaître son emploi du temps définitif à l'avance, de sorte qu'il n'était en mesure de prévoir à quel rythme il devait travailler, la Cour d'appel a pas tiré des conséquences erronées de ses propres constatations et, partant, a violé le texte susvisé.

3°) QU'en tout cas à cet égard, en se dispensant de rechercher si, comme elle y était invitée, le tableau prévisionnel relatif à la planification des personnels n'était pas susceptible de changements de dernière minute rendant le rythme du salarié imprévisible, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.3121-1 du Code du travail.

4°) QU'en outre à cet égard, en déduisant la prévisibilité du travail de Monsieur X... du fait qu'il n'avait pas de clause d'exclusivité et qu'il n'était pas le seul chef opérateur du son-vidéo auquel FRANCE 3 avait recours à temps partiel, la Cour d'appel a statué par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, en violation de l'article L.3123-14 du Code du travail.

5°) ET ALORS enfin à cet égard QU'il résulte ensemble des articles 455 et 563 du Code de procédure civile et 1353 du Code civil que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant qu'en l'absence de production de ses déclarations de revenus, les pièces du dossier et les circonstances de l'espèce indiquaient que Monsieur X... avait travaillé simultanément pour d'autres employeurs, de sorte qu'il était établi qu'il travaillait à temps partiel pour FRANCE 3, alors que celui-ci justifiait que ses déclarations de revenus avaient été régulièrement produites en appel (pièce n° 49 communiquée par Monsieur X...), la Cour d'appel a méconnu les exigences des textes susvisés.



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Temps de travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.