par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 10 janvier 2013, 12-11667
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
10 janvier 2013, 12-11.667

Cette décision est visée dans la définition :
Appel




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que victime d'un accident en mai 2002 et ayant obtenu à ce titre en avril 2008 de l'Association générale interprofessionnelle de prévoyance et d' investissement (l'Agipi) le versement d'une rente invalidité, M. X... a assigné celle-ci devant un tribunal de grande instance afin d'obtenir la réparation de divers préjudices résultant de la prise en charge tardive du sinistre dont il avait été victime ; que la société Axa France vie (la société Axa) est intervenue volontairement à l'instance ; que M. X... a interjeté appel du jugement ayant statué sur ses demandes ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que l'Agipi et la société Axa font grief à l'arrêt de condamner cette dernière à payer à M. X... une rente mensuelle de 1 056,59 euros bruts pour la période du 1er mars 2004 au 31 mars 2007, assortie des intérêts au taux légal sur la totalité des sommes dues à compter du 30 août 2011, alors, selon le moyen qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger des questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; que le tribunal était saisi de demandes de réparation de préjudices résultant de la prise en charge tardive du sinistre et qu'il avait accordé à ces titres les sommes de 1 800 euros et 1 500 euros en réparation de préjudices matériel et moral à M. X... ; que ce dernier avait relevé un appel limité au montant des indemnités ; qu'ainsi, était nouvelle la demande formée par M. X... dans ses dernières conclusions du 30 août 2011 tendant à la condamnation de la société Axa à lui verser les rentes mensuelles de 1 056,59 euros bruts dues de mars 2004 inclus à mars 2008 inclus et qu'en ne relevant pas d'office l'irrecevabilité d'une telle demande, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l'article 564 du code de procédure civile, en sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, ne confère au juge que la simple faculté de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de la nouveauté d'une demande en appel, qui n'est pas d'ordre public ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour condamner la société Axa à payer à M. X... une rente mensuelle de 1 056,59 euros bruts pour la période du 1er mars 2004 au 31 mars 2007 assortie des intérêts au taux légal sur la totalité des sommes dues à compter du 30 août 2011, l'arrêt retient que la garantie d'assurance doit bénéficier à l'assuré dès la reconnaissance du taux d'invalidité qui peut être fixée à la date du 1er mars 2004 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le montant brut mensuel de la rente s'élevait à la somme de 1 056,59 euros, de sorte que le chèque de 46 913,14 euros adressé le 23 avril 2008 à M. X... dont elle relevait l'existence ne pouvait correspondre au montant de la rente pour la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2008, mais comprenait également le service de la rente due au titre de la période antérieure, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la société Axa France vie et à l'Agipi la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boutet, avocat aux Conseils, pour l'association Agipi et la société Axa France vie

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société AXA FRANCE VIE à payer à Monsieur Éric X... une rente mensuelle de 1.056,59 euros bruts sur la période du 1er mars 2004 au 31 mars 2007 assortie des intérêts au taux légal sur la totalité des sommes dues à compter du 30 août 2011 ;

AUX MOTIFS QUE désormais, Monsieur Éric X... bénéficie de la garantie "rente invalidité" puisque l'AGIPI lui a adressé le 23 avril 2008 un chèque tiré sur son compte Crédit Mutuel pour un montant de 46.913,14 euros correspondant à un net à payer au titre des échéances de la rente invalidité limitées sans aucune explication à la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2008 ; qu'en pareil cas, l'AGIPI et la SA AXA FRANCE VIE qui délivre la garantie d'assurance tirent anormalement profit du retard dans lequel est intervenue la révélation d'une invalidité qui devait bénéficier à l'assuré dès la reconnaissance du taux d'invalidité répondant aux critères contractuels qui peut être fixé à la date du 1er mars 2004, date de cessation du versement des prestations "indemnités journalières" ainsi que l'indique la notification du 22 avril 2004 ; qu'en l'occurrence, le versement de la rente invalidité incombe à la SA AXA FRANCE VIE qui devra payer à Monsieur Éric X... une rente mensuelle de 1.056,59 euros bruts depuis le 1er mars 2004 jusqu'au 31 mars 2007 (arrêt, p. 6, alinéas 2 à 4) ;

ET AUX MOTIFS QUE le Tribunal a statué sur l'assignation tendant à obtenir la réparation de divers préjudices résultant de la prise en charge tardive du sinistre et qui, par jugement du 26 avril 2010 a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société AXA FRANCE VIE, condamné l'Association Générale Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Investissement dite AGIPI à payer à Monsieur Éric X... la somme de 1.800 euros en réparation de son préjudice matériel, la somme de 1.500 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, débouté Monsieur Éric X... du surplus de ses demandes et condamné l'AGIPI aux dépens ; que Monsieur Éric X... a relevé appel de cette décision par déclaration du 11 juin 2010 qui en cantonne les effets au montant des indemnités qui ont été allouées ; que dans des écritures signifiées le 10 septembre 2010, Monsieur Éric X... conclut à la confirmation du jugement qui a jugé que la faute de l'AGIPI a retardé son indemnisation et sur le montant du préjudice sollicite la réformation de cette décision et la condamnation in solidum de l'AGIPI et d'AXA FRANCE VIE au paiement de 23.399,90 euros au titre du préjudice matériel, celle de 20.000 euros au titre du préjudice moral et le paiement de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens dont ceux d'appel distraits au profit de la SCP TARDIEU ; qu'aux termes de ses dernières écritures du 30 août 2011, Monsieur Éric X... sollicite la condamnation de la société AXA FRANCE VIE à lui verser, avec intérêts au taux légal à compter de leur date d'échéance, les rentes mensuelles de 1.056,59 euros bruts dues de mars 2004 à mars 2008 inclus, ainsi que les sommes de 12.000 euros en réparation du coût des crédits des frais bancaires mais aussi des conditions d'existence dégradées durant quatre années et de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens dont ceux d'appel distraits au profit de la SCP TARDIEU (arrêt, p. 3) ;

ALORS D'UNE PART QU'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger des questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; que le Tribunal était saisi de demandes de réparation de préjudices résultant de la prise en charge tardive du sinistre et qu'il avait accordé à ces titres les sommes de 1.800 € et 1.500 € en réparation de préjudices matériel et moral à Monsieur X... ; que ce dernier avait relevé un appel limité au montant des indemnités ; qu'ainsi, était nouvelle la demande formée par Monsieur X... dans ses dernières conclusions du 30 août 2011 tendant à la condamnation de la société AXA FRANCE VIE à lui verser les rentes mensuelles de 1.056,59 euros bruts dues de mars 2004 inclus à mars 2008 inclus et qu'en ne relevant pas d'office l'irrecevabilité d'une telle demande, la Cour d'Appel a violé l'article 564 du Code de Procédure Civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; que, dans ses premières conclusions d'appel du 17 septembre 2010 (p. 5), Monsieur X... rappelait qu'à « la suite du dépôt de ce rapport, AGIPI s'est enfin décidée à respecter les termes contractuels souscrits par l'appelant et s'est acquittée de la rente qu'elle devait depuis le 1er mars 2004 jusqu'au mois de mars 2008… ainsi, M. X... a perçu un chèque d'un montant de 46.913,14 euros au mois d'avril 2008 » ; qu'en demandant dès lors dans ses dernières conclusions du 30 août 2011 à la Cour d'Appel de « condamner la société AXA à verser à Monsieur X...… les rentes mensuelles de 1.056,59 € bruts dues de mars 2004 inclus à mars 2008 inclus », Monsieur X... s'est contredit au détriment de la société AXA FRANCE VIE, ce dont il résultait l'irrecevabilité de cette demande que la Cour d'Appel devait relever d'office et qu'en ne le faisant pas elle a violé le principe susvisé.



SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société AXA FRANCE VIE à payer à Monsieur Éric X... une rente mensuelle de 1.056,59 euros bruts sur la période du 1er mars 2004 au 31 mars 2007 assortie des intérêts au taux légal sur la totalité des sommes dues à compter du 30 août 2011 ;

AUX MOTIFS QUE désormais, Monsieur Éric X... bénéficie de la garantie "rente invalidité" puisque l'AGIPI lui a adressé le 23 avril 2008 un chèque tiré sur son compte Crédit Mutuel pour un montant de 46.913,14 euros correspondant à un net à payer au titre des échéances de la rente invalidité limitées sans aucune explication à la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2008 ; qu'en pareil cas, l'AGIPI et la SA AXA FRANCE VIE qui délivre la garantie d'assurance tirent anormalement profit du retard dans lequel est intervenue la révélation d'une invalidité qui devait bénéficier à l'assuré dès la reconnaissance du taux d'invalidité répondant aux critères contractuels qui peut être fixé à la date du 1er mars 2004, date de cessation du versement des prestations "indemnités journalières" ainsi que l'indique la notification du 22 avril 2004 ; qu'en l'occurrence, le versement de la rente invalidité incombe à la SA AXA FRANCE qui devra payer à Monsieur Éric X... une rente mensuelle de 1.056,59 euros bruts depuis le 1er mars 2004 jusqu'au 31 mars 2007 (arrêt, p. 6, alinéas 2 à 4) ;


ALORS QUE le Juge ne peut accorder deux fois l'exécution d'un même contrat ; que la Cour d'Appel a constaté que la rente mensuelle due à Monsieur X... s'élevait à la somme de 1.056,59 euros bruts ; qu'ainsi, le chèque du montant de 46.913,14 adressé le 23 avril 2008 à Monsieur X... ne pouvait correspondre à la rente pour la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2008, d'ailleurs fixée dans la lettre d'envoi pour la période considérée à la somme de 13.094,69 bruts, mais comprenait également le service de la rente due antérieurement et qu'en condamnant néanmoins la société AXA FRANCE VIE à payer une rente mensuelle de 1.056,59 euros bruts sur la période du 1er mars 2004 au 31 mars 2007, la Cour d'Appel a ordonné l'exécution d'une convention déjà exécutée et n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1134 du Code Civil.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.