par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 12 mai 2015, 14-11028
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Cour de cassation, chambre commerciale
12 mai 2015, 14-11.028

Cette décision est visée dans la définition :
SARL (Sociétés à Responsabilité Limitée)




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi n° B 13-28. 504 formé par la société civile professionnelle Henri et Serge X... et les sociétés MMA IARD SA et MMA IARD assurances mutuelles que sur le pourvoi incident relevé par la société Clico Investment Bank Limited et joignant ces pourvois au pourvoi n° B 14-11. 028, formé par la Selarl Y..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Caraïbes investissements, la société Batelière investissement, la société d'exploitation de la Batelière, M. Z..., agissant en qualité de liquidateur de cette dernière, MM. Olin, Ralph, Yan et Donald A..., la société Financière de gestion en patrimoine et la société Sofinpar, qui attaquent le même arrêt ;

Donne acte aux parties demanderesses au pourvoi n° B 14-11. 028 du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le comité d'entreprise de l'hôtel Batelière et Mme B... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en 1992, la société anonyme Caraïbes investissements a acquis « l'hôtel La Batelière », situé à Schoelcher (Martinique), tandis que la société à responsabilité limitée Batelière investissement, sa filiale, faisait l'acquisition d'un terrain attenant à l'hôtel ; qu'en 2006, le groupe Fram a cédé les actions représentant le capital de la société Caraïbes investissements à la société d'exploitation de la Batelière (la société SEB), contrôlée par MM. Olin, Ralph, Yan et Donald A... ; que pour le financement de cette opération, la société Clico Investment Bank Ltd (la banque), immatriculée à Trinidad et Tobago, a, par acte du 16 novembre 2006, consenti un prêt d'un montant de 12, 5 millions d'euros à la société Batelière investment Ltd, la société Seb, représentée par M. Ralph A..., figurant comme partie à l'acte de prêt, en tant que « société mère » ; que par acte du 22 novembre 2006, établi par M. Serge X..., notaire, membre de la société civile professionnelle de notaires « Henri et Serge X... » (la SCP X...), les sociétés Caraïbes investissements et Batelière investissement ont, en garantie de la créance de la banque, chacune consenti à celle-ci une hypothèque, la première sur l'hôtel et, la seconde, sur le terrain attenant ; que la société Caraïbes investissements a été mise en redressement judiciaire, la Selarl Y... (la Selarl Y...) étant désignée en qualité d'administrateur, puis de commissaire à l'exécution du plan de redressement ; que l'administrateur du redressement judiciaire de la société Caraïbes investissements et la société Batelière investissement, faisant valoir que les garanties hypothécaires souscrites le 22 novembre 2006 étaient contraires à l'intérêt de ces sociétés, ont assigné la banque afin qu'elles soient déclarées nulles ; que celle-ci a appelé la SCP X... en garantie ; que les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, ses assureurs, sont intervenues à l'instance ; qu'après avoir écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale de l'action en nullité de l'acte du 22 novembre 2006, la cour d'appel a rejeté la demande d'annulation formée par la société Caraïbes investissements, accueilli celle formée par la société Batelière investissement et, retenant que la SCP X... avait manqué à son obligation de conseil à l'égard de la banque, condamné celle-là, solidairement avec ses assureurs, à lui verser une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;

Sur le moyen unique du pourvoi de la Selarl Y..., ès qualités :

Attendu que la selarl Y..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation de l'acte du 22 novembre 2006 à l'égard de la société Batelière investissement, ainsi que sa demande en paiement de dommages-intérêts dirigée contre la banque alors, selon le moyen :

1°/ que l'absence de contestation de la validité d'un contrat par une partie n'établit pas son opposabilité à l'égard de cette dernière ; qu'en écartant le moyen soulevé par la société d'exploitation de la Batelière tiré de la nullité du contrat de prêt en relevant que celui-ci n'avait « pas été contesté » devant les juridictions du pays où il avait été passé, la cour d'appel a statué par un motif impropre à établir sa validité et partant, l'opposabilité d'un tel contrat à l'égard de « l'exposante », violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

2°/ qu'aux termes de la clause attributive de juridiction stipulée à l'article 20 du contrat de prêt litigieux, les parties avaient convenu que « les tribunaux et cours de Trinidad et Tobago seront compétents, de manière non-exclusive, pour juger et trancher (i) les demandes d'octroi de mesures provisoires qui resteront en vigueur jusqu'au débat sur le fond tranché par les arbitres tel que défini par l'article 21, (ii) les demandes de mainlevée ou de changement desdites ordonnances et (iii) les appels » ; que cette clause n'excluait donc pas la possibilité, pour les parties, de contester directement devant les juridictions de Fort-de-France la validité du contrat de prêt ; qu'en écartant cependant le moyen soulevé par la société d'exploitation de la Batelière tiré de la nullité du contrat de prêt litigieux motif pris que ce contrat n'avait pas été contesté « devant les juridictions du pays étranger (Trinidad et Tobago) où il avait été passé », la cour d'appel a méconnu les termes de la clause attributive de juridiction qui réservait une compétence « non-exclusive » des tribunaux et cours de Trinidad et Tobago, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

3°/ que le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à s'en expliquer contradictoirement ; qu'en jugeant que la Société d'Exploitation de la Batelière était mal fondée à soutenir que M. Ralph A... n'avait pas valablement engagé cette société lors de la signature de l'acte de prêt en relevant d'office le moyen tiré de l'existence d'une prétendue ratification, au moins tacite, du mandat donné par le représentant de cette société à M. Ralph A..., sans avoir préalablement rouvert les débats pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°/ qu'une sûreté consentie par une société en garantie d'un prêt contracté par une société tierce est nul dans la mesure où elle est contraire à son intérêt social ; que ni le consentement unanime des associés de la société garante, ni l'existence d'une communauté d'intérêts entre cette dernière et la société emprunteuse ne font échec à cette nullité ; qu'en retenant la validité du cautionnement hypothécaire consenti par la société Caraïbes investissements en relevant qu'elle appartenait au groupe de sociétés bénéficiant du prêt litigieux et que ses actionnaires y avaient unanimement consenti, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du code de commerce ;

5°/ qu'est contraire à l'intérêt social d'une société, et par conséquent non valable, la garantie consentie par cette dernière qui, nonobstant l'existence d'une contrepartie, grève si lourdement son patrimoine qu'elle expose la société, en cas de mise en oeuvre de la garantie, à sa disparition totale ; qu'en retenant la validité du cautionnement hypothécaire consenti par la société Caraïbes investissements en relevant que le prêt garanti constituait la contrepartie de cet engagement, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait pourtant été invitée, si la garantie souscrite ne présentait pas une disproportion telle qu'elle était de nature à compromettre, lors de sa réalisation, l'existence même de cette société caractérisant ainsi sa contrariété à l'intérêt social de cette dernière, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que les motifs critiqués par les trois premières branches, par lesquels la cour d'appel a apprécié le bien-fondé de la demande de la société d'exploitation de la Batelière tendant à ce que l'acte du 16 novembre 2006 soit déclaré nul et en tous cas inopposable à son égard en raison du défaut de pouvoir prétendu de la personne qui y figurait comme son représentant, étant sans incidence sur le rejet, seul critiqué par le moyen, de la demande d'annulation de l'acte du 22 novembre 2006 en tant qu'il contient l'affectation hypothécaire d'un immeuble par la société Caraïbes investissements en garantie de la créance de la banque née du prêt consenti par celle-ci à la société Batelière investment Ltd, ces griefs sont inopérants ;

Et attendu, en second lieu, que, serait-elle établie, la contrariété à l'intérêt social de la sûreté souscrite par une société à responsabilité limitée en garantie de la dette d'un tiers n'est pas, par elle-même, une cause de nullité de cet engagement ; que le moyen qui, en ses deux dernières branches, soutient une thèse contraire, ne peut qu'être rejeté ;

D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses trois premières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le premier moyen du pourvoi de la SCP X... et de ses assureurs :

Attendu que la SCP X... et ses assureurs font grief à l'arrêt de déclarer non prescrite l'action en nullité des garanties hypothécaires souscrites par les sociétés Caraïbes investissements et Batelière investissement alors, selon le moyen, que les actions en nullité des actes conclus par une société se prescrivent par trois ans si la cause de la nullité réside dans une irrégularité de la délibération ayant autorisé sa conclusion ; qu'en retenant pour juger que l'action en nullité des cautionnements conclus par les sociétés Caraïbes investissements et Batelière investissement n'était pas soumise à la prescription abrégée de l'article L. 235-9 du code de commerce, que ces cautionnements « n'éta ient pas un acte de la société mais une convention par cette société » bien que la nullité sollicitée ait reposée sur une irrégularité de la délibération en vertu de laquelle le cautionnement argué de nullité avait été conclu, la cour d'appel a violé l'article L. 235-9 du code de commerce ;

Mais attendu que la demande d'annulation de l'acte du 22 novembre 2006 étant fondée non sur une irrégularité préexistante à cet acte mais sur l'allégation d'un vice intrinsèque à celui-ci, la cour d'appel en a exactement déduit que cette demande n'était pas soumise à la prescription triennale de l'article L. 235-9, alinéa 1er, du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du même pourvoi, pris en sa première branche :

Attendu que la SCP X... et ses assureurs font encore grief à l'arrêt de déclarer la convention du 22 novembre 2006 nulle à l'égard de la société Batelière investissement et de les condamner à payer des dommages-intérêts à la banque alors, selon le moyen, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant adopter les motifs des premiers juges qui auraient retenu que « la garantie hypothécaire souscrite par la société Batelière Investissement était contraire à son objet social », bien que les premiers juges se soient fondés sur la contrariété du cautionnement à l'intérêt social, la cour d'appel qui a entaché sa décision d'une contradiction a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le moyen dénonce une simple erreur matérielle qui a fait écrire à la page vingt de l'arrêt « objet social » au lieu « d'intérêt social » et qu'il y a lieu de réparer conformément aux dispositions de l'article 462 du code de procédure civile ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le même moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article L. 223-18 du code de commerce ;

Attendu qu'il résulte de ces dispositions, lesquelles doivent être mises en oeuvre à la lumière de celles de l'article 10 de la directive 209/ 101/ CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, ayant codifié la première directive 68/ 151/ CEE du Conseil, du 9 mars 1968, que, serait-elle établie, la contrariété à l'intérêt social ne constitue pas, par elle-même, une cause de nullité des engagements souscrits par le gérant d'une société à responsabilité limitée à l'égard des tiers ;

Attendu que pour annuler la garantie hypothécaire constituée par la société Batelière investissement au profit de la banque, l'arrêt relève, par motifs adoptés, que s'il n'est pas contestable que cette société a une communauté d'intérêts avec la société Caraïbes investissements, qui la détient à 100 %, et plus largement, avec le groupe A..., aucune contrepartie directe n'est venue équilibrer son engagement de « caution » ; qu'il ajoute, par motifs adoptés que le terrain donné en garantie constitue son unique actif immobilisé ; qu'il en déduit que cet acte est contraire à l'intérêt de la société Batelière investissement ;

Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi de la société civile professionnelle Henri et Serge X... et de ses assureurs, non plus que sur le pourvoi incident de la société Clico Investment Bank Limited :

Vu l'article 462 du code de procédure civile ;

Dit qu'à la page 20, alinéa 3 et alinéa 4, de l'arrêt attaqué, les termes « objet social » sont remplacés par les termes « intérêt social » ;

Dit qu'il sera fait mention de cette rectification sur la minute et sur les expéditions de l'arrêt rectifié ;

REJETTE le pourvoi n° B 14-11. 028 :

Et sur le pourvoi n° B 13-28. 504 :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la convention passée le 22 novembre 2006 devant M. X..., notaire associé, est nulle à l'égard de la société Batelière investissement, ordonne en conséquence la mainlevée de la garantie hypothécaire souscrite par cette société et condamne solidairement la société civile professionnelle Henri et Serge X... et les sociétés MMA IARD SA et MMA IARD assurances mutuelles à payer, à titre de dommages-intérêts, la somme d'un million d'euros à la société Clico Investment Bank Limited, l'arrêt rendu le 25 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal n° B 13-28. 504 par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société MMA IARD, la société Henri et Serge X... et de la compagnie d'assurances MMA IARD.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit non prescrites l'action en nullité des cautionnements souscrits par les sociétés CARAIBES INVESTISSEMENT et BATELIERE INVESTISSEMENT, d'AVOIR dit que la convention, en date du 22 novembre 2006, passée par devant Monsieur X..., était nulle et de nul effet à l'égard de la SARL BATELIERE INVESTISSEMENT, d'AVOIR ordonné en conséquence la main levée de la garantie hypothécaire consentie par la SARL BATELIERE INVESTISSEMENT sur la parcelle de terre sise à Schoelcher (Martinique), quartier Sud Batelière, cadastrée section N numéro 187, pour une contenance de 92a 00ca et d'AVOIR condamné la SCP X... à verser à la société CLICO INVESTMENT BANK LTD la somme d'un million d'euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice né du manquement à l'obligation de conseil ;

AUX MOTIFS QUE les articles L. 235-9 du Code de commerce et 1844-14 du Code civil disposent, dans les mêmes termes, que les actions en nullité de la société ou d'actes et délibérations postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue ; que la banque Clico Investment se fonde sur l'article L. 235-9 du Code de commerce pour soutenir devant la cour la fin de non-recevoir des actions en nullité engagées par l'administrateur judiciaire de la société Caraïbes Investissements et par la société Batelière Investissements ; que cependant, l'engagement de caution souscrit par une société n'étant pas un acte de la société mais une convention passée par cette société, l'action en nullité de cet engagement n'est pas soumise à la prescription de l'article L. 235-9 du Code de commerce, mais à la prescription de l'article 1304, premier alinéa, du Code civil aux termes duquel dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans ; qu'en l'espèce les engagements de caution dont la nullité est sollicitée ont été souscrits dans des actes notariés reçus le 22 novembre 2006 ; que les actions en nullité de ces engagements ont été engagées en novembre et décembre 2010, de sorte que le délai de prescription de l'action n'était pas expiré ; qu'il en résulte que la fin de non-recevoir soulevée par la banque Clico doit être rejetée ;

ALORS QUE les actions en nullité des actes conclus par une société se prescrivent par trois ans si la cause de la nullité réside dans une irrégularité de la délibération ayant autorisé sa conclusion ; qu'en retenant pour juger que l'action en nullité des cautionnements conclus par les sociétés CARAIBES INVESTISSEMENTS et BATELIERE INVESTISSEMENT n'était pas soumise à la prescription abrégée de l'article L. 235-9 du Code de commerce, que ces cautionnements « n'éta ient pas un acte de la société mais une convention par cette société » (arrêt, p. 19, al. 3) bien que la nullité sollicitée ait reposée sur une irrégularité de la délibération en vertu de laquelle le cautionnement argué de nullité avait été conclu, la Cour d'appel a violé l'article L. 235-9 du Code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la convention, en date du 22 novembre 2006, passée par devant Monsieur X... était nulle et de nul effet à l'égard de la SARL BATELIERE INVESTISSEMENT, d'AVOIR ordonné en conséquence la mainlevée de la garantie hypothécaire souscrite par la SARL BATELIERE INVESTISSEMENT sur la parcelle de terre sise à Schoelcher (Martinique), quartier Sud Batelière, cadastrée section N numéro 187, pour une contenance de 92a 00ca et d'AVOIR condamné la SCP X... à verser à CLICO INVESTMENT BANK LTD la somme d'un million d'euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice né du manquement à l'obligation de conseil ;

AUX MOTIFS QUE par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont exactement retenu que la garantie hypothécaire souscrite par la société Batelière Investissements était contraire à son objet social, en ont justement déduit qu'elle devait être annulée et ont ordonné en conséquence sa mainlevée ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT soutient que dans la mesure où la sûreté réelle apportée en cautionnement du prêt constitue son unique actif et a été donnée sans contrepartie, son engagement serait contraire à son intérêt social et devrait être annulé ; qu'il n'est pas contestable que cette société a nécessairement une communauté d'intérêt avec sa maison mère la SA CARAÏBES INVESTISSEMENTS, qui la détient à 100 %, ainsi que plus largement avec le Groupe A..., auquel elle appartient ; que cependant, contrairement à la SA CARAÏBES INVESTISSEMENTS, aucune contrepartie directe n'est venue équilibrer son engagement de caution ; qu'en effet, l'argument tiré par CLICO INVESTMENT BANK LIMITED de la rentabilité accrue du parking du fait de la reprise d'activité de l'hôtel est inopérant, dès lors que la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT, dont le chiffre d'affaires pour 2005 est nul, n'exploite pas commercialement le terrain litigieux ; que par ailleurs, il est également constant que ce terrain, donné en garantie hypothécaire, constitue l'unique actif immobilisé de la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT ; que dans ces conditions, la seule communauté d'intérêt de groupe avec la SA SACARATBES INVESTISSEMENTS est insuffisante à caractériser l'intérêt social qui doit nécessairement présider à l'apport par une société de son cautionnement hypothécaire au profit d'un tiers, fût-il du même groupe ; que la circonstance que la vente du même bien litigieux puisse être envisagée, le cas échéant, dans le cadre du plan de redressement avalisé par le tribunal mixte de commerce est par ailleurs indifférente, dès lors que les contours précis de cet acte sont par définition encore inconnus et susceptibles d'intégrer d'autres éléments propres à caractériser l'intérêt social de la société devant cette juridiction ; qu'il convient ainsi de constater que la convention du 22 novembre 2006 est contraire à l'intérêt social de la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT ; que dès lors, en application de l'article L. 235-1 al. 2 du Code de commerce, il convient de dire que ladite convention est nulle et de nul effet à l'égard de la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT, et en conséquence d'ordonner la mainlevée des garanties souscrites au bénéfice de CLICO INVESTMENT BANK LIMITED ;

1°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant adopter les motifs des premiers juges qui auraient retenu que « la garantie hypothécaire souscrite par la société Batelière Investissement était contraire à son objet social » (arrêt, p. 20, al. 3, souligné par nous), bien que les premiers juges se soient fondés sur la contrariété du cautionnement à l'intérêt social (jugement, p. 13), la Cour d'appel qui a entaché sa décision d'une contradiction a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le gérant d'une SARL est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société, sous réserve des pouvoirs que la loi attribue expressément aux associés de sorte que la SARL est engagée même par les actes du gérant qui ne relèvent pas de l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer ; qu'en retenant pour prononcer la nullité du cautionnement en garantie de la dette d'un tiers conclu par la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT que cet engagement avait été consenti sans « contrepartie directe venant équilibrer son engagement de caution » de sorte qu'il était contraire à son intérêt social quand de tels motifs étaient impropres à justifier l'annulation d'un cautionnement conclu par une SARL, la Cour d'appel a violé l'article L. 223-18 du Code de commerce ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, est valable le cautionnement hypothécaire consentie par une SARL à moins qu'elle ne prouve qu'il n'entre pas dans l'objet social et que le bénéficiaire le savait ou ne pouvait l'ignorer ; qu'en retenant pour prononcer la nullité du cautionnement accordé par la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT que cet acte avait été consenti sans « contrepartie directe venant équilibrer son engagement de caution » de sorte qu'il était contraire à son intérêt social sans rechercher si cet acte méconnaissait l'objet social de la SARL BATELIERE INVESTISSEMENT et si la société CLICO INVESTMENT avait eu connaissance d'un tel dépassement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du Code de commerce ;

4°) ALORS QU'en toute hypothèse, un cautionnement n'est susceptible d'être contraire à l'intérêt social d'une société que s'il est consenti sans aucune contrepartie présente ou future et qu'il menace son existence ; qu'en retenant pour prononcer la nullité du cautionnement accordé par la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT que cet acte avait été consenti sans « contrepartie directe venant équilibrer son engagement de caution » et qu'il importait peu que cette opération soit susceptible d'accroître la rentabilité du terrain de la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT puisqu'elle ne l'exploitait pas bien que l'existence d'une contrepartie future suffise à établir la conformité de l'acte à l'intérêt social, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article L. 223-18 du Code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SCP X... à verser à CLICO INVESTMENT BANK LTD la somme d'un million d'euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice né du manquement à l'obligation de conseil ;

AUX MOTIFS QUE par des moyens pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont exactement retenu que la société de notaires avait commis une faute en ayant manqué à son devoir de conseil envers la banque Clico Investment ; qu'elle avait ainsi engagé sa responsabilité ; que le préjudice en ayant résulté pour la banque Clico Investment s'analysait en une perte de chance et que sa réparation devait être évaluée à la somme de 2 000 000 euros ; mais que, la banque Clico Investment ayant fait preuve d'une légèreté blâmable en ne vérifiant pas elle-même l'efficacité de la sûreté consentie, elle avait concouru à son propre préjudice et il y avait lieu, en conséquence, d'opérer un partage de responsabilité à hauteur de moitié ; que la réparation du préjudice né de la faute de la société de notaires est indépendante du recours éventuel dont dispose la banque Clico Investment à l'égard d'autres cautions ; qu'il n'y a donc pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de l'instance engagée contre la société SOFINPAR, pendante devant le tribunal mixte de commerce ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il est de principe constant que les notaires doivent, avant de dresser les actes, procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l'utilité et l'efficacité de ces actes ; que plus précisément, les notaires sont professionnellement tenus d'éclairer les parties sur la portée des actes par eux dressés et sur la valeur des garanties qui peuvent y être attachées ; que si le notaire n'est pas tenu d'une obligation de conseil et de mise en garde concernant l'opportunité économique d'une opération en l'absence d'éléments d'appréciation qu'il n'a pas à rechercher, le notaire est, en revanche, tenu d'une telle obligation pour que les droits et obligations réciproques légalement contractés par les parties répondent aux finalités révélées de leur engagement, soient adaptés à leurs capacités ou facultés respectives et soient assortis des stipulations propres à leur conférer leur efficacité, quand bien même leur engagement procéderait d'un accord antérieur, dès lors qu'au moment de l'authentification cet accord n'a pas produit tous ses effets ou ne revêt pas un caractère immuable ; qu'en l'espèce, la SCP X... reconnaît n'avoir délivré aucun conseil à CLICO INVESTMENT BANK LIMITED quant à la faculté de la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT de souscrire le cautionnement litigieux ; que certes, la régularité formelle de l'acte n'est pas en cause, et il ne peut donc être fait grief au notaire d'avoir instrumenté ; que cependant le notaire, professionnel du droit, aurait dû attirer l'attention des parties sur l'absence de contrepartie de la garantie souscrite par la SARL BATELIÈRE INVESTISSEMENT, et partant sur le risque d'inefficacité de l'acte ; que cette analyse, juridique et non financière, ressortissait pleinement à la compétence et à la responsabilité du notaire, peu important que la convention fut élaborée par les parties antérieurement à son authentification ; qu'il faut souligner au surplus qu'une telle analyse n'impliquait aucune recherche ni vérification particulières, mais s'évinçait des énonciations mêmes de l'acte, lequel mentionne expressément l'économie générale du montage financier ; que de même, le notaire ne pouvait se voir déchargé de son devoir de conseil ni par les compétences personnelles de son client ni par la présence d'un conseiller personnel au côté du client ; qu'il est ainsi indifférent, quant au principe de l'obligation du notaire, que CLICO INVESTMENT BANK LIMITED fût un professionnel du crédit ou qu'elle fût assistée d'un avocat pour la préparation de l'acte ; qu'il se déduit de ces éléments que la SCP X..., en manquant à son devoir de conseil, a commis une faute qui engage sa responsabilité ; que sur le préjudice, en l'espèce, l'appréciation de la capacité de la caution à souscrire un engagement hypothécaire était conditionnée non par une règle de forme, mais par une règle de fond, à savoir l'intérêt social à contracter (appréciation ne pouvant ressortir in fine qu'à une décision judiciaire, eventus judicii) ; que dès lors, le degré d'efficacité de l'acte ne pouvait, au moment de sa rédaction, être déterminé de façon certaine, ce pour quoi il ne peut être fait grief au notaire de n'avoir pas refusé d'instrumenter ; qu'il s'ensuit que la faute du notaire n'a entraîné que la disparation de la probabilité d'un événement favorable, à savoir la possibilité pour la banque, par un choix éclairé sur la garantie offerte, de ne point s'engager dans une convention hasardeuse ; qu'un tel préjudice s'analyse donc en la perte d'une chance de refuser de contracter au regard du risque d'inefficacité de l'acte ; que CLICO INVESTMENT BANK LIMITED sollicite la somme de 2. 730. 000 euros, correspondant au montant d'une proposition d'achat du terrain hypothéqué en date du 23 novembre 2010, somme non contestée par la SCP X... ; qu'elle sollicite par ailleurs la condamnation de la SCP X... à lui payer toute somme qui resterait due par l'emprunteur au titre du prêt de 12, 5 millions d'euros ; qu'il sera tenu compte, pour la détermination du montant du préjudice de perte de chance, de l'importance du montant total du prêt (12, 5 M €), ainsi que du caractère très probable de l'inefficacité de l'acte au regard de règles largement établies et diffusées en droit des sociétés ; que cependant, il sera également tenu compte de la somme proposée pour l'achat du bien litigieux (2, 73 M €) ainsi que, par ailleurs, de la validité du premier cautionnement hypothécaire ; qu'au vu de ces éléments, le montant du préjudice sera évalué à la somme de 2. 000. 000 euros ; que sur le lien de causalité, CLICO INVESTMENT BANK LIMITED aurait eu la faculté de ne pas contracter si elle avait été avertie par la SCP X... du risque d'inefficacité du cautionnement hypothécaire souscrit par l'une des cautions ; que son préjudice est donc en lien direct et certain avec la faute de la SCP X... ; que toutefois CLICO INVESTMENT BANK LIMITED, professionnel du financement bancaire, a également fait preuve d'une légèreté blâmable en ne vérifiant pas elle-même, malgré l'importance de la somme prêtée, l'efficacité de la sûreté consentie par son contractant au regard du droit français ; que dans la mesure où la banque a ainsi concouru à son propre préjudice, il y a lieu d'opérer un partage de responsabilité dont le seuil sera fixé à 50 % ; qu'en conséquence la SCP X... sera condamnée à verser à CLICO INVESTMENT BANK LIMITED la somme de 1. 000. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

1°) ALORS QUE les manquements d'un notaire à ses obligations professionnelles doivent s'apprécier au regard du droit positif existant à l'époque de son intervention ; qu'en reprochant à la SCP X... d'avoir manqué à son devoir de conseil en n'avertissant pas les parties du risque d'annulation du cautionnement qui pourrait être jugé contraire à l'intérêt social de la SARL BATELIERE INVESTISSEMENT sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si une telle cause de nullité pouvait être envisagée en l'espèce à la date de l'intervention de la SCP X... le 22 novembre 2006, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, est seul sujet à réparation le préjudice certain ; qu'en affirmant que la perte du cautionnement hypothécaire imputée à la SCP X... avait causé à la société CLICO un préjudice certain, sans caractériser, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions de la SCP X..., p. 27 à 29), l'impossibilité dans laquelle se trouverait la société CLICO de recouvrer le montant de sa créance grâce à la mise en oeuvre des autres sûretés dont elle disposait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable ; qu'en affirmant que la perte du cautionnement hypothécaire imputée à la SCP X... avait fait perdre à la société CLICO une chance « de ne point s'engager dans une convention hasardeuse » (jugement, p. 15, al. 3) bien que tant que n'était pas démontrée l'impossibilité de recouvrer sa créance dans laquelle aurait été placée la société CLICO, la conclusion du contrat ne lui ait pas été préjudiciable, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.

Moyen produit au pourvoi incident n° B 13-28. 504 par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Clico Investment Bank Limited.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SCP Henri et Serge X..., solidairement avec les sociétés MMA Iard Assurances mutuelles et MMA Iard société anonyme, à payer à la banque Clico Investment la somme de 1. 000. 000 d'euros en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS QUE par des moyens pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont exactement retenu que la société de notaires avait commis une faute en ayant manqué à son devoir de conseil envers la banque Clico Investment ; qu'elle avait ainsi engagé sa responsabilité ; que le préjudice en ayant résulté pour la banque Clico Investment s'analysait en une perte de chance et que sa réparation devait être évaluée à la somme de 2. 000. 000 euros ; mais que la banque ayant fait preuve d'une légèreté blâmable en ne vérifiant pas elle-même l'efficacité de la sûreté consentie, elle avait concouru à son propre préjudice et qu'il y avait lieu en conséquence d'opérer un partage de responsabilité à hauteur de moitié ;

ET AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE Clico aurait eu la faculté de ne pas contracter si elle avait été avertie par la SCP X... du risque d'inefficacité du cautionnement hypothécaire souscrit par l'une des cautions ; que son préjudice est donc en lien direct et certain avec la faute de la SCP X... ; que toutefois Clico Investment, professionnel du financement bancaire, a également fait preuve d'une légèreté blâmable en ne vérifiant pas elle-même, malgré l'importance de la somme prêtée, l'efficacité de la sûreté consentie par son cocontractant au regard du droit français ; que dans la mesure où la banque a ainsi concouru à son propre préjudice, il y a lieu d'opérer un partage de responsabilité dont le seuil sera fixé à 50 % ;

1) ALORS QU'il appartient au seul notaire de s'assurer de l'efficacité des actes qu'il dresse ; que la qualité de professionnel de la partie victime d'un manquement du notaire à cette obligation n'exonère pas le notaire, même partiellement, de la responsabilité qu'il encourt de ce chef, notamment lorsque cette partie est étrangère et ignorante en conséquence du droit français ; qu'en énonçant, pour réduire de moitié l'indemnisation du préjudice subi par la société Clico Bank Investment, qu'elle avait fait preuve d'une légèreté blâmable en s'abstenant de vérifier elle-même l'efficacité de la sûreté consentie par son cocontractant au regard du droit français, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2) ET ALORS en tout état de cause, QUE n'est pas fautif le fait pour une banque étrangère de ne pas vérifier la teneur du droit français et de ne pas anticiper son évolution éventuelle en matière de droit des sûretés et de cautionnement hypothécaire, dès lors que l'acte est passé devant un notaire lui-même tenu d'une obligation de résultat quant à l'efficacité de l'acte qu'il établit ; qu'en considérant cependant que la société CIB, société de droit trinidadien, avait fait preuve d'une légèreté blâmable en ne vérifiant pas elle-même l'efficacité de la sûreté consentie au regard du droit français, la cour d'appel a derechef violé l'article 1382 du code civil.

Moyen produit au pourvoi n° B 14-11. 028 par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils pour la société Y..., ès qualités, la société Batelière investissements, la société d'exploitation de la Batelière, la société Financière de gestion en patrimoine, la société Sofinpar, M. Z..., ès qualités et les consorts A....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'avoir débouté la société Y..., ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société Caraïbes Investissements, de sa demande aux fins d'annulation à son égard de la convention passée par devant Maître Serge X..., notaire associé de la SCP Henri et Serge X..., notaires à Fort-de-France (Martinique), en date du 22 novembre 2006 et d'avoir, en conséquence, débouté la société Y..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Caraïbes Investissements, de sa demande aux fins de mainlevée de la garantie hypothécaire souscrite par la société Caraïbes Investissements sur un immeuble bâti à usage hôtelier situé à Schoelcher (Martinique), comprenant un corps de bâtiment principal de trois étages sur rez-de-chaussée et sous-sol, et un corps de bâtiment annexe construit en 1977 sur rez-de-chaussée et deux étages (outre 10. 133. 078, 63 euros), cadastré section M numéros 485 et 606, et section N numéros 533 à 536, pour une contenance totale de 4ha 71 a 16ca et débouté la même de sa demande de dommages et intérêts dirigée contre la société Clico Investment Bank Ltd ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la Société d'Exploitation de la Batelière, qui ne conteste pas avoir reçu les fonds prêtés par la banque Clico lnvestment à la société Batelière lnvestment constituée par ses associés, les frères A..., est mal fondée à soutenir que M. Ralph A... n'a pas valablement engagé la Société d'Exploitation de la Batelière lors de la signature de l'acte de prêt le 16 novembre 2006 ; qu'en premier lieu parce que ce contrat de prêt n'a pas été contesté devant les juridictions du pays étranger { Trinidad et Tobago) où il a été passé ; qu'en second lieu parce que les fonds ayant été effectivement reçus par la Société d'Exploitation de la Batelière, le représentant de cette société a ratifié le mandat, au moins tacitement donné, à l'un de ses associés pour signer l'acte de prêt ; que l'acte de prêt du 16 novembre 2006 est donc opposable à la Société d'Exploitation de la Batelière ;... ; que par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont exactement retenu que la garantie hypothécaire souscrite par la société Caraïbes Investissements n'était pas contraire à son objet social et en ont justement déduit qu'il n'y avait pas lieu à annulation de la convention passée par elle devant MaÎtre Serge X..., notaire associé pour souscrire cette garantie » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« aux termes de l'article 1131 du Code civil " l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet " ; qu'en J'espèce, il est indiffèrent que la SA Caraïbes investissements soit dépourvue de lien structurel ou juridique avec l'emprunteur, Batelière Investment Ltd, dès lors que Je prêt accordé à cette société bénéficiait au groupe de sociétés auquel elle appartient en générai, et à sa propre trésorerie en particulier ; qu'en effet, il faut relever en premier lieu qu'étaient parties au contrat de prêt du 16 novembre 2006 tant Batelière lnvestment Ltd, l'emprunteur, que sa société mère, la Société d'Exploitation de la Batelière ; qu'or cette société détient également à 100 % la SA Caraïbes Investissements, caution hypothécaire, et l'activité de ces sociétés est centrée autour de l'exploitation de l'Hôtel de la Batelière ; que dans ces conditions, leur appartenance à un même groupe, notion qui peut se définir comme une entité économique et non juridique dans laquelle une des sociétés exerce un pouvoir de contrôle et de décision dans un intérêt commun, est caractérisée ; que plus largement, il n'est pas contestable que la Société d'Exploitation de la Batelière, et partant, ses filiales Batelière lnvestment Ud et SA Caraibes Investissements, appartiennent au groupe A... par le biais de la SAS MG Holding ; qu'en second lieu, il est constant que par le truchement d'une avance en compte courant consentie par la Société d'Exploitation de la Batelière, sa filiale SA Caraïbes Investissements a été mise en mesure de rembourser le compte courant détenu dans ses livres par la SA FRAM, associé cessionnaire ; qu'ainsi, en lui permettant de se libérer de cette dette, le prêt obtenu était, in fine, destiné à favoriser l'activité de la SA Caraïbes Investissements ; qu'en offrant son cautionnement hypothécaire, celle-ci bénéficiait donc d'une contrepartie certaine, expressément précisée dans l'acte de cautionnement du 22 novembre 2006, quoique obtenue de façon médiate par le biais de sa société mère ; que cette contrepartie constituait la cause directe de l'obligation souscrite par la SA Caraïbes Investissements ; qu'il ressort en définitive de ces éléments que l'intérêt social de la SA Caraibes Investissements résidait dans la possibilité, pour le groupe auquel elle appartient, d'obtenir un prêt, lequel allait personnellement lui bénéficier ; que le moyen tiré de la contrariété à l'intérêt social doit donc être écarté ;... ; que l'engagement de caution a été souscrit de façon régulière, sur autorisation spéciale de l'assemblée générale des actionnaires de la société en date du 22 novembre 2006, à l'unanimité des voix » ;

1°/ ALORS QUE l'absence de contestation de la validité d'un contrat par une partie n'établit pas son opposabilité à l'égard de cette dernière ; qu'en écartant le moyen soulevé par la Société d'Exploitation de la Batelière tiré de la nullité du contrat de prêt en relevant que celui-ci n'avait « pas été contesté » devant les juridictions du pays où il avait été passé, la Cour d'appel a statué par un motif impropre à établir sa validité et partant, l'opposabilité d'un tel contrat à l'égard de l'exposante, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;

2°/ ALORS QU'aux termes de la clause attributive de juridiction stipulée à l'article 20 du contrat de prêt litigieux, les parties avaient convenu que « les tribunaux et cours de Trinidad et Tobago seront compétents, de manière non-exclusive pour juger et trancher (i) les demandes d'octroi de mesures provisoires qui resteront en vigueur jusqu'au débat sur le fond tranché par les arbitres tel que défini par l'article 21..., (ii) les demandes de mainlevée ou de changement desdites ordonnances et (iii) les appels » ; que cette clause n'excluait donc pas la possibilité, pour les parties, de contester directement devant les juridictions de Fort-de-France la validité du contrat de prêt ; qu'en écartant cependant le moyen soulevé par la Société d'Exploitation de la Batelière tiré de la nullité du contrat de prêt litigieux motif pris que ce contrat n'avait pas été contesté « devant les juridictions du pays étranger (Trinidad et Tobago) où il avait été passé », la Cour d'appel a méconnu les termes de la clause attributive de juridiction qui réservait une compétence « non-exclusive » des tribunaux et cours de Trin id ad et Tobago, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;

3°/ ALORS QUE le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à s'en expliquer contradictoirement ; qu'en jugeant que la Société d'Exploitation de la Batelière était mal fondée à soutenir que Monsieur Ralph A... n'avait pas valablement engagé cette société lors de la signature de l'acte de prêt en relevant d'office le moyen tiré de l'existence d'une prétendue ratification, au moins tacite, du mandat donné par le représentant de cette société à Monsieur Ralph A..., sans avoir préalablement rouvert les débats pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;

4°/ ALORS QU'une sûreté consentie par une société en garantie d'un prêt contracté par une société tierce est nul dans la mesure où elle est contraire à son intérêt social ; que ni le consentement unanime des associés de la société garante, ni l'existence d'une communauté d'intérêts entre cette dernière et la société emprunteuse ne font échec à cette nullité ; qu'en retenant la validité du cautionnement hypothécaire consenti par la société Caraïbes Investissements en relevant qu'elle appartenait au groupe de sociétés bénéficiant du prêt litigieux et que ses actionnaires y avaient unanimement consenti, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du Code de commerce ;

5°/ ALORS QU'est contraire à l'intérêt social d'une société, et par conséquent non valable, la garantie consentie par cette dernière qui, nonobstant l'existence d'une contrepartie, grève si lourdement son patrimoine qu'elle expose la société, en cas de mise en oeuvre de la garantie, à sa disparition totale ; qu'en retenant la validité du cautionnement hypothécaire consenti par la société Caraïbes Investissements en relevant que le prêt garanti constituait la contrepartie de cet engagement, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait pourtant été invitée, si la garantie souscrite ne présentait pas une disproportion telle qu'elle était de nature à compromettre, lors de sa réalisation, l'existence même de cette société caractérisant ainsi sa contrariété à l'intérêt social de cette dernière, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du Code de commerce.



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Cette décision est visée dans la définition :
SARL (Sociétés à Responsabilité Limitée)


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.