par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



SUBROGATION DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Subrogation

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La "subrogation" est un mode de transmission des créances. C'est une opération juridique triangulaire. Le titulaire d'un droit de créance, appelé le subrogeant, transmet au bénéficiaire de la subrogation, appelé le subrogataire, la créance que le premier détient sur un tiers qui est son propre débiteur, dit le subrogé. Elle s'opère, soit du seul fait de la loi, soit en exécution d'un contrat. Lorsqu'elle est conventionnelle, elle doit être réalisée en même temps que le paiement. Les termes de la quittance doivent permettre de reconnaître que la subrogation a eu lieu en même temps que le paiement, sinon elle est nulle. Le consentement du subrogeant peut résulter d'un acte séparé rédigé avant l'intervention du règlement. Ainsi, la subrogation de l'assureur dans les droits de l'assuré doit résulter de la volonté expresse de ce dernier manifestée concomitamment ou antérieurement au versement reçu de l'assureur (Chambre commerciale 21 février 2012, pourvoi n°11-11145, BICC n°763 du 1er juin 2012 et Legifrance).

Le subrogataire, devient créancier du subrogé au lieu et place du créancier initial, le subrogeant. Le bénéficiaire de la subrogation peut exercer les droits et actions que par ce moyen, il a reçu du subrogeant et qu'il va exercer contre le débiteur de ce dernier. Ainsi, par exemple, si un assureur indemnise son client des conséquence d'un dégât des eaux venant d'un appartement situé à l'étage supérieur de l'immeuble qu'il habite, l'assuré recevant l'indemnité que son assureur lui verse, remettra à son assureur une quittance des sommes qu'il a reçues. Ce reçu ou quittance, est dite "subrogatif" ou encore "subrogatoire". Par le seul effet de cette quittance, la compagnie d'assurances, devient créancière de l'auteur du dommage. Elle va pouvoir réclamer à la personne responsable du dégâts des eaux le montant des sommes qu'elle a versées à son assuré, et éventuellement assigner la personne qui doit répondre des dommages qu'elle a indemnisés. Lorsque c'est le cas, le subrogataire bénéficie des sûretés qui sont attachées à la créance ainsi transportée. Mais pour que la subrogation consécutive au paiement produise ses effets, il est nécessaire qu'elle soit expresse et qu'elle soit faite en même temps que le paiement. Au visa de l'article 1250 - 1°du Code civil, la Cour de cassation rappelle qu'en raison de l'effet extinctif de la subrogation, elle n'est plus possible une fois le paiement effectué au subrogé (Cass. 1ère civ., 28 mai 2008, pourvoi n°07-13437, BICC n°689 du 15 octobre 2008 et Legifrance). Consulter aussi, 1ère Civ., 28 mai 2002, pourvoi n° 99-17733, Bull. 2002, I, n° 154 ;1ère Civ., 12 juillet 2006, pourvoi n° 04-16916, Bull. 2006, I, n°402. Il est jugé en raison du même principe, qu'après avoir été indemnisé, l'assuré n'a plus qualité pour agir contre le débiteur, il ne peut, sauf convention expresse ou tacite l'y habilitant, agir en justice à l'effet d'interrompre la prescription dans l'intérêt de l'assureur, subrogé dans ses droits (Chambre commerciale, 1er décembre 2009, pourvoi : 08-14203 08-14585, BICC n°722 du 15 mai 2010 et Legifrance). Consulter aussi la note de M. Guyader référencée dans la Bibliographie ci-après.

On trouve un autre exemple de subrogation dans les relations qui se forment entre le tiers responsable, la victime, et le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (FIVA). Il s'agit d'un cas de subrogation légale. Les relations en question sont régies par les règles propres au Fonds d'indemnisation qui sont relatives à un éventuel recours subrogatoire du fonds L'article 53 VI de la loi n°2000-1257 du 23 décembre 2000 prévoit que le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge desdites personnes (Voir aussi l'Avis de la Cour de cassation du 6 octobre 2008, BICC n°694 du 15 janvier 2009, Rapport de M. Adida-Canac Conseiller rapporteur et Observations de M. Lautru Avocat général). L'action en paiement fondée sur la subrogation ne peut tendre à l'octroi, en principal, d'un montant supérieur à celui que le subrogé a payée au subrogeant, ni à l'allocation d'intérêts autres que les intérêts produits par cette somme au taux légal (1ère CIV. - 15 février 2005, pourvoi n°03-11141, BICC n°620 du 1er juin 2005, Legifrance). La subrogation décrite ci-dessus est dite "subrogation personnelle"

Tel est aussi le cas, lorsqu'un contrat de transport entre des voyageurs et un transporteur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, c'est à bon droit qu'une Cour d'appel en a déduit que les voyageurs ayant été indemnisés pqr l'organisateur du voyage, il se trouvait fondé, aini que sa compagnie d'assurances, à exercer l'action subrogatoire contre le transporteur, sans être tenues de démontrer sa faute. (1ère Chambre civile 9 juillet 2015, pourvoi n° 14-13423, BICC n°834 du 15 janvier 2016 et Legifrance).

Aux termes de l'article 2314 du Code civil, la caution du débiteur est déchargée lorsque la subrogation aux droits du créancier ne peut plus s'opérer par le fait de ce dernier. La Cour de cassation a jugé ainsi que "le créancier qui, dans le même temps, se garantit par un cautionnement et constitue une sûreté provisoire s'oblige envers la caution à rendre cette sûreté définitive". (Chambre mixte de la Cour de cassation du 17 novembre 2006, BICC n°654 du 1er février 2007, Rapport de M. Cachelot Conseiller rapporteur, Avis de Mme Petit Premier avocat général). S'il omet de ce faire, les recours contre la caution sont perdus. Plus récemment il a été jugé dans le même sens que si la caution est déchargée de son obligation, lorsque la subrogation dans un droit préférentiel conférant un avantage particulier au créancier pour le recouvrement de sa créance ne peut plus, par le fait de celui-ci, s'opérer en faveur de la caution, pareil effet ne se produit que si cette dernière avait pu tirer un avantage effectif susceptible de lui être transmis par subrogation (Chambre commerciale 12 juillet 2011 pourvoi n°09-71113, Legifrance).

Par la subrogation personnelle dont il a été question ci-dessus, une indemnité remplace une créance ; la subrogation est dite "réelle", par exemple, lorsqu'une somme d'argent représente la valeur d'un bien matériel dans le patrimoine du subrogeant. Ainsi l'acquéreur d'un bien vendu avec réserve de propriété le revend, sans avoir payé l'intégralité du prix. La revente opère, une subrogation réelle dont l'effet est de transporter dans le patrimoine du vendeur initial, le prix ou la partie du prix impayé par le sous-acquéreur. Il en résulte que la revendication du prix s'exerce sur le solde du prix de revente du bien affecté de la clause de réserve de propriété restant dû au jour précité, à concurrence du prix tel que fixé lors de la convention conclue avec le vendeur initial. (Chambre commerciale, 16 juin 2009, pourvoi n°08-10241, Legifrance).

Attention, encore que les deux sens du mot aient le sens de remplacer ou de substituer, le mot "subrogé tuteur", à un sens qui reste étranger à la subrogation conventionnelle dont il vient d'être question. Le subrogé tuteur exerce un rôle de contrôleur des actes du tuteur, il agit en vertu des pouvoirs que lui confère la Loi.

Voir aussi la rubrique intervention à propos du paiement par intervention.

Textes

  • Code civil, articles 855 al.2, 860, 922, 1249 et s., 1406 al.2, 1434 et 1435, 1469, 1571, 2029, 2314.
  • Code de commerce, articles L525-5, L626-20, R143-15 et s., R143
  • Code des assurances, articles L121-12, L121-13.
  • Bibliographie

  • André (R.), Assurance et responsabilité des tiers : cumul d'indemnités, 1946, Editeur É. Bruylant.
  • Avena-Robardet (V.), Observations sous 1ère Civ., 3 avril 2007, Bull. 2007, I, pourvoi n° 06-12531, Dalloz, 26 avril 2007, n°17, p. 1136-1137. (Subrogation rendue impossible par le fait du créancier ayant omis d'inscrire son privilège de prêteur de deniers).
  • Bastin (J.), Le paiement de la dette d'autrui : la caution, la garantie, les fonds de garantie,1999, LGDJ.
  • Boskovic (O.), Recours conventionnel de l'affactureur contre le créancier en cas de subrogation consentie par le créancier, Note sous Com., 10 octobre 2000, Bull. 2000, IV, n°153, p.138, Sem. jur., 2001, n°21/22, p.1064.
  • Cosson, (Ph.), Les fonds de garantie, LGDJ, p.206 et s., n°209 à 221. (sur les recours subrogatoires).
  • Fernandez (J-M.)La subrogation : nature et régime juridique d'une fiction juridique, Petites Affiches 16 juillet 1997, n°85, p.4.
  • Guiho (P.), Les recours contre l'auteur d'un dommage ouvrant droit à une indemnité d'assurance, 1951, Éd. Domat Montchrestien.
  • Guyader (H.), Le subrogé est seul titulaire du droit d'agir, le subrogeant en étant dépossédé, L'assuré, qui, après avoir été indemnisé, n'a plus qualité pour agir contre le débiteur, ne peut, sauf convention expresse ou tacite l'y habilitant, agir en justice dans l'intérêt de l'assureur, subrogé dans ses droits. Revue Lamy droit des affaires, n°47, mars 2010, Actualités - éclairage, n°2754, p. 21 à 23, note à propos de Com. - 1er décembre 2009.
  • Houtcieff (D.), Contribution à une théorie du bénéfice de subrogation de la caution, RTC civ. 2006, pp.191 et suivantes.
  • Iscru (C.), Le transfert des créances en droit français et en droit anglais, Thèse Université de Lyon 3, 2011, Editeur Université Lyon3.
  • Lecuyer (G.), La faculté d'exercice d'un droit préférentiel et l'exception de non-subrogation, RTC, 2005, n°19.
  • Legeais (D.), Décharge de la caution lorsque le créancier gagiste n'a pas demandé l'attribution judiciaire du gage, JCP 2005, éd. E, n°29, 1088.
  • Legeais (D.), Observations sous Ch. mixte, 17 novembre 2006, Bull. 2006, Ch. mixte, n°10, p.30, RTC comm. janvier-mars 2007, n°1, p. 215-217. (Subrogation rendue impossible par le fait du créancier.).
  • Mestre (J.), La subrogation personnelle, Paris, LGDJ., 1979.
  • Mestre (J.) et Fages (B.), D'utiles précisions sur l'effet translatif de la subrogation personnelle, note sous Trib. confl., 6 mai 2002, Bull. 2002, Trib. Confl., n°9, p. 13 ; Civ., 1ère, 29 octobre 2002, Bull. 2002, I, n°257, p. 198 : Com., 26 novembre 2002, Bull. 2002, IV, n° 179, p. 205 ; Civ., 1ère, 21 janvier 2003, Bull. 2003, I, n°18, p. 13 et Civ. 1ère, 4 février 2003, Bull. 2003, I, n° 30 et 31, p. 25, RTC avril-juin 2003, n°2, pp. 298-299.
  • Ranouil (V.), La subrogation réelle en droit civil français, LGDJ., 1985.
  • Richard (A.), Le paiement de la dette d'autrui, Thèse Aix-Marseille 3, 2007, Presses universitaires d'Aix-Marseille.

  • Liste de toutes les définitions