par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. plen., 7 décembre 2015, 14-18435
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Cour de cassation, assemblée plénière
7 décembre 2015, 14-18.435

Cette décision est visée dans la définition :
Gage




Arrêt n° 627 P + B + R + I

Pourvoi n° C 14-18.435



LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société MJA, société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est 102 rue du Faubourg Saint-Denis, 75010 Paris, agissant en la personne de M. Jean-Claude X..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Recovco Affimet,

2°/ la société Recovco Affimet, société par actions simplifiée, dont le siège est 121 avenue des Champs-Elysées, 75008 Paris,

contre l'arrêt rendu le 27 février 2014 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige les opposant à la société Bank of London and The Middle East PLC, dont le siège est 165 Queen Victoria street, London EC4V 4DD (Royaume-Uni),

défenderesse à la cassation ;

La société MJA, agissant en la personne de M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Recovco Affimet, s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8) en date du 3 mai 2011 ;

Cet arrêt a été cassé le 19 février 2013 par la chambre commerciale de la Cour de cassation ;

La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée, qui, saisie de la même affaire, a statué par arrêt du 27 février 2014 (pôle 5, chambre 9) ;

Un pourvoi ayant été formé contre cet arrêt, la chambre commerciale a, par arrêt du 16 juin 2015, décidé le renvoi devant l'assemblée plénière ;

Les demanderesses invoquent, devant l'assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Ce moyen unique été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat des sociétés MJA et Recovco Affimet ;

Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat de la société Bank of London and the Middle East PLC ;

Le rapport écrit de Mme Planchon, conseiller, et l'avis écrit de M. Le Mesle, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;

Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 23 novembre 2015, où étaient présents : M. Louvel, premier président, M. Guérin, Mme Batut, M. Frouin, Mme Mouillard, M. Chauvin, présidents, M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Mas, Mme Riffault-Silk, M. Chollet, Mme Bignon, MM. Pers, Cadiot, Mme Vallée, MM. Matet, Bureau, Besson, Remeniéras, conseillers, M. Le Mesle, premier avocat général, Mme Marcadeux, directeur de greffe ;

Sur le rapport de Mme Planchon, conseiller, assistée de M. Michon, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Bénabent et Jéhannin, de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, l'avis de M. Le Mesle, premier avocat général, auquel les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 2333 du code civil et L. 527-1 du code de commerce, tels qu'ils résultent de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, ratifiée par la loi n° 2007-212 du 20 février 2007 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Com., 19 février 2013, pourvoi n° 11-21. 763), que la société Recovco Affimet (la société), mise en redressement judiciaire le 19 janvier 2009, a fait l'objet d'un plan de cession puis d'une liquidation judiciaire le 14 septembre 2009 ; que la Bank of London and The Middle East PLC (la banque), qui avait consenti à la société, par acte du 17 décembre 2007, un prêt garanti par un gage sans dépossession portant sur un stock de marchandises et comprenant un pacte commissoire, a résilié le contrat de crédit pour non-paiement des échéances le 9 janvier 2009, notifié à la société la réalisation de son gage le 16 janvier 2009, puis revendiqué le stock constituant l'assiette de son gage le 21 avril 2009 ; que, par ordonnance du 30 octobre 2009, le juge-commissaire a ordonné la restitution à la banque du stock existant à la date du 16 janvier 2009, ou de sa contre-valeur, et a " donné acte " à celle-ci de ce qu'elle était en droit de réclamer le paiement de celui consommé postérieurement à cette date ;

Attendu que, pour confirmer le jugement rejetant le recours contre l'ordonnance du juge-commissaire constatant que la banque était propriétaire des stocks tels que définis au contrat de gage, l'arrêt relève que les parties ont expressément choisi de se placer sous l'empire du gage de droit commun sans dépossession des articles 2333 et suivants du code civil, ce que n'interdit pas l'ordonnance du 23 mars 2006 ; qu'il retient que l'examen du texte ne permet pas d'affirmer la volonté du législateur d'exclure les banques prêtant sur stocks du bénéfice du gage sans dépossession de droit commun ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, s'agissant d'un gage portant sur des éléments visés à l'article L. 527-3 du code de commerce et conclu dans le cadre d'une opération de crédit, les parties, dont l'une est un établissement de crédit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meubles sans dépossession, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par fausse application, le second par refus d'application ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 février 2014, entre les parties par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la Bank of London and The Middle East PLC aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société MJA, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Recovco Affimet, et rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, et prononcé le sept décembre deux mille quinze par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Moyen annexé au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour les sociétés MJA et Revovco Affimet

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il avait rejeté le recours de Me X... et de Me Y..., ès qualités, et confirmé l'ordonnance du juge-commissaire rendue le 30 octobre 2009, qui avait donné acte à la BLME qu'elle était propriétaire des stocks tels que définis à l'article 1. 1 du « contrat de gage de biens meubles » en date du 17 décembre 2007 ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'« il est constant que les parties ont expressément choisi de se placer sous l'empire du gage de droit commun sans dépossession des articles 2333 et suivants (nouveaux) du code civil, issus de l'article 11 de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, la banque soutenant que l'article 2354 du code civil se borne à ne pas interdire la prise de sûretés en vertu de textes spéciaux sans pour autant dire expressément que les textes spéciaux écarteraient le droit commun des sûretés ;

Que, rappelant que la Bank of London est un établissement de crédit, le liquidateur judiciaire de la société Recovco fait valoir que, nonobstant la dénomination contractuelle de « contrat de gage de biens meubles », il s'agit d'un gage sur stocks relevant du régime spécial des articles L. 527-1 et suivants du code de commerce, issu de l'article 44 de l'ordonnance précitée, auquel, selon la Selafa MJA, les parties ne peuvent déroger ;

Que le liquidateur judiciaire soutient que l'impossibilité de choisir entre le régime de droit commun du code civil et le régime spécial du code de commerce résulterait, selon son analyse, de la volonté du législateur qui aurait voulu instaurer un régime protecteur spécifique aux entreprises « du fait de l'importance primordiale que représentent les stocks » pour la continuation de leurs activités ;

Qu'invoquant le principe d'interprétation selon lequel le texte spécial prime sur le texte général, il estime aussi que l'article 2348 du code civil, qui autorise le pacte commissoire, ne peut faire obstacle à la règle particulière de l'article L. 527-2 du code de commerce qui le prohibe en matière de stocks ;

Qu'en prévoyant à l'article 44 un régime propre à la garantie sur stocks consentie à un établissement de crédit par une personne dans le cadre de son activité professionnelle, le texte de l'ordonnance précitée du 23 mars 2006 n'interdit pas expressément de choisir de recourir au gage sans dépossession de droit commun prévu par l'article 11, étant observé que cette ordonnance, résultant de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 habilitant le gouvernement à réformer le droit des sûretés, ne se situe pas dans un contexte de difficultés des entreprises, le régime propre imaginé pour le gage sur stocks se situant dans le livre cinquième du code de commerce (« des effets de commerce et des garanties ») et non dans le livre sixième (« des difficultés des entreprises ») ;

Que, contrairement à ce qu'affirme le liquidateur judiciaire, l'examen du texte ne permet pas d'affirmer la volonté d'exclure les banques prêtant sur stocks du bénéfice du gage sans dépossession de droit commun accessible aux autres partenaires de l'entreprise, de sorte qu'il ne se déduit pas formellement du texte de l'ordonnance qu'après avoir défini le nouveau droit commun du gage sans dépossession à l'article 11, le législateur, aux termes de l'article 44, aurait été inspiré par la volonté d'instaurer parallèlement un régime protecteur spécifique aux entreprises, et qu'il convient dès lors d'appliquer le principe d'interprétation selon lequel le doute et le silence profitent au régime du droit commun, lequel en l'espèce a été rénové ;

Qu'aucune disposition n'interdisant aux parties de choisir l'application du droit commun du gage, issu de la réforme de 2006, pour garantir un crédit consenti par un établissement financier à une personne dans le cadre de son activité professionnelle, la société Recovco et la Bank of London ont pu valablement choisir, comme elles l'ont fait, de se référer aux dispositions des articles 2333 et suivants du code civil, comme étant, de leur point de vue, le régime le mieux adapté pour garantir leur opération principale de financement selon les principes islamiques (« Master Murabaha Facility agreement ») ;

Que la garantie ayant été placée sous le régime de droit commun du gage sans dépossession, les mentions prévues par les articles L. 527-1 et suivants du code de commerce n'avaient pas à s'appliquer ;

Que le liquidateur judiciaire soutient que le choix du gage de droit commun aurait eu « pour unique objet de contourner la prohibition du pacte commissoire » en constituant ainsi une fraude à la loi ;

Que, dès lors que le choix est permis par la loi, l'utilisation d'un moyen légal plutôt qu'un autre ne constitue pas une fraude, les parties se bornant à exercer le choix entre deux régimes prévus par la législation ;

Que, par ailleurs, le liquidateur judiciaire soutient subsidiairement que l'existence du pacte commissoire (autorisé par le nouveau droit commun du gage sans dépossession) constituerait une dation en paiement forcée, dont le mode de paiement serait anormal en période suspecte ;

Que si la réalisation d'une sûreté permet au créancier d'obtenir l'équivalent de sa créance, elle n'en est pas pour autant un véritable paiement au sens de l'article L. 632-1 du code de commerce qui ne vise que les paiements volontaires, étant au surplus observé qu'en l'espèce, si la réalisation du gage a été postérieure à la date retenue pour la cessation des paiements, la constitution de la sûreté a été concomitante à la dette, soit antérieurement à la période suspecte ;

Qu'enfin le liquidateur judiciaire prétend encore, plus subsidiairement, que la réalisation du pacte commissoire serait nulle comme ayant été exercée en période suspecte en pleine connaissance par le créancier garanti, de l'existence de l'état de cessation des paiements ;

Mais :

- d'une part, qu'en affirmant que la Bank of London est le créancier le plus important de la société Recovco, le liquidateur ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe ès qualités, de la connaissance alléguée de l'état de cessation des paiements au moment de l'exercice du pacte commissoire,
- d'autre part, qu'il ne ressort pas davantage de la lettre (en langue anglaise) de la banque du 15 janvier 2009 (également invoquée par le liquidateur judiciaire) que la Bank of London avait à cette date connaissance de l'état de cessation de paiements de sa débitrice, la référence aux paragraphes 8. 1. 6 (insolvency) et 8. 1. 7 (insolvency proceedings) du contrat, parmi d'autres paragraphes également visés concernant la liste contractuelle des défaillances envisagées par les parties lors de la passation du contrat, mais ne démontrant pas la connaissance spécifique par l'auteur de la lettre au jour de celle-ci, d'un actif disponible qui serait inférieur au passif exigible (hors la mise en oeuvre de la déchéance du terme du contrat de prêt, objet de la lettre) ;

Qu'en conséquence, le jugement du 25 juin 2010 du tribunal de commerce de Paris doit être confirmé » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« aux termes des articles 2333 et suivants du code civil, insérés dans le titre des sûretés réelles, chapitre II « du gage de meubles corporels », section I « du doit commun du gage » il est précisé que le gage est une convention par laquelle le constituant accorde au créancier le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers présents ou futurs, les créances garanties pouvant également être présentes ou futures, à condition d'être déterminables ;
Que l'article 2342 du code civil traite l'hypothèse du gage de choses fongibles, celles-ci pouvant être aliénées par le constituant si la convention le prévoit, à charge pour lui de les remplacer par la même quantité de choses équivalentes ;
Que le décret n° 2006-1804 du 23 décembre 2006 pris pour l'application de l'article 2338 du code civil relatif à la publicité du gage prévoit dans son article 1-4° que le bordereau adressé au greffe en vue de l'inscription du gage précise la désignation du bien gagé avec, lorsqu'il s'agit d'un ensemble de biens présents ou futurs, leur nature, qualité et quantité ;
Que l'arrêté du 1er février 2007 donnant la liste des biens sur lesquels peut être inscrit un gage sans dépossession comporte une dix-septième catégorie, intitulée « Autres » ;
Que les stocks sont des meubles corporels fongibles présents ou futurs mais déterminables qui répondent aux conditions posées par les articles 2333 et suivants du code civil et les textes d'application subséquents ;
Que les règles spéciales des articles L. 527-1 à L. 527-11 du code de commerce relatives au gage sur stocks permettent aux établissements de crédit de disposer d'une option entre les deux catégories de gage ;
Qu'il appartient aux parties de choisir la sûreté qui présente, suivant le cas d'espèce, le plus d'intérêt pratique ;
Que les parties doivent clairement préciser leur choix ;
Qu'il résulte des termes du contrat conclu entre BLME et Recovco le 17 décembre 2007, intitulé « gage de meubles corporels » soumis au tribunal, des éléments du dossier, des écritures des parties, des explications fournies au cours des débats que les parties ont entendu opter pour le gage de droit commun défini par le code civil dans ses articles 2333 et suivants ;
Que ce choix a été formulé clairement dès l'origine, au moment de la signature du contrat de gage qui précise en son article 2. 2 que « que les parties conviennent qu'étant donné la nature des obligations garanties, il est plus approprié de convenir d'un gage de biens meubles conformément aux articles 2333 et suivants du code civil et aux articles L. 521-1 et suivants du code de commerce plutôt que d'un gage de stocks au titre des articles L. 527-1 et suivants du code de commerce » ;
Que, en raison de ce choix et conformément aux dispositions de l'article 2348 du code civil, les parties ont pu valablement convenir que le créancier deviendra propriétaire du bien gagé en cas de défaillance du débiteur ;
Que les parties qui ont la possibilité d'opter pour le pacte commissoire, peuvent le prévoir dès l'origine, ou à tout moment de leur relation contractuelle ;
Que le paiement en nature a été convenu dès l'origine dans la convention des parties, soit le 17 décembre 2007 et ne saurait donc constituer une dation en paiement forcée non communément admise dans les relations d'affaires tombant sous le coup de la nullité de plein droit prévue par l'article L. 632-1- I-4° du code de commerce ;
Que le gage a été pris pour garantir une créance de BLME antérieure à la période suspecte ;
Que l'article L. 622-7 du code de commerce précise que le jugement ouvrant la procédure de sauvegarde fait obstacle à la conclusion et à la réalisation d'un pacte commissoire ;
Qu'en l'espèce la réalisation de la garantie, par mise en oeuvre du pacte commissoire est intervenue avant l'ouverture de la procédure collective de Recovco ;
Que, en ce qui concerne la valorisation des stocks, il appartiendra aux organes de la procédure collective de faire application des règles prévues par le contrat de gage ;
Que, sans qu'il soit nécessaire de suivre davantage les parties dans le détail de leur argumentation, il convient de retenir que la réalisation par BLME du gage au moyen du pacte commissoire est parfaitement régulière » ;

1/ ALORS QUE s'agissant d'un gage portant sur des éléments visés à l'article L. 527-3 du code de commerce, les parties, dont l'une est un établissement de crédit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meubles sans dépossession ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que le gage conclu le 17 décembre 2007 entre la BLME et la société Recovco Affimet relevait du régime impératif du gage de stocks dans la mesure où il était consenti au profit d'un établissement de crédit et portait sur les stocks de la société Recovco Affimet ; que le gage du 17 décembre 2007, ainsi que le pacte commissoire qu'il stipulait, étaient nuls, faute de contenir les mentions obligatoirement requises par l'article L. 527-1 du code de commerce, et d'avoir été publiés conformément aux exigences de l'article L. 527-4 du code de commerce ; que pour juger cependant que la société BLME avait régulièrement mis en oeuvre le pacte commissoire, la cour d'appel a décidé « qu'aucune disposition n'interdisant aux parties de choisir l'application du droit commun du gage, issu de la réforme de 2006, pour garantir un crédit consenti par un établissement financier à une personne dans le cadre de son activité professionnelle, la société Recovco et la Bank of London ont pu valablement choisir, comme elles l'ont fait, de se référer aux dispositions des articles 2333 et suivants du code civil » ; qu'en statuant ainsi, quand les parties ne pouvaient valablement soumettre leur contrat au droit commun du gage de meubles sans dépossession, la cour d'appel a violé l'article 2333 du code civil par fausse application et l'article L. 527-1 du code de commerce par refus d'application ;

2/ ALORS QUE le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; que cette obligation s'applique a fortiori lorsqu'en dépend l'application de dispositions d'ordre public ; que sont d'ordre public les dispositions des articles L. 527-1, alinéa 3, L. 527-2 et L. 527-4, alinéa 1er, du Code de commerce ; qu'en relevant que le contrat du 17 décembre 2007 emportait mise en gage sans dépossession d'éléments visés par l'article L. 527-3 du code de commerce par une personne morale de droit privé au profit d'un établissement de crédit, tout en refusant néanmoins de lui restituer son exacte qualification et en s'abstenant, en conséquence, de faire application des trois dispositions précitées au prétexte que les parties avaient choisi de soumettre leur convention au droit commun, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, et a violé les articles 12, alinéa 2, du code de procédure civile, 6 et 2354 du code civil, ensemble les articles L. 527-1, alinéa 3, L. 527-2 et L. 527-4, alinéa 1er, du code de commerce ;

3/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QUE la fraude à la loi est constituée par l'utilisation intentionnelle d'un moyen de droit, fût-il intrinsèquement licite, pour se soustraire à l'exécution d'une règle obligatoire ; que la fraude est notamment constituée lorsque les parties dont la convention relève objectivement du champ d'application du gage de stocks optent pour l'application du droit commun du gage, à supposer licite un tel choix, dans le seul but d'éluder la prohibition du pacte commissoire ; qu'en l'espèce, les parties ont prétendu soumettre leur gage au régime de droit commun, à l'exclusion du régime spécial de gage de stocks, tout en reconstituant, par le biais de clauses particulières, l'essentiel du régime du gage de stocks ; que la prétendue soumission du contrat de gage au droit commun constituait donc une fraude à la loi puisqu'elle avait pour unique but de mettre en place un gage soumis au régime du gage des stocks tout en échappant à la prohibition du pacte commissoire ; qu'en écartant pourtant la fraude au seul motif que « dès lors que le choix est permis par la loi, que l'utilisation d'un moyen légal plutôt qu'un autre ne constitue pas une fraude, les parties se bornant à exercer le choix entre deux régimes prévus par la législation », cependant que la fraude consiste précisément à user d'un moyen objectivement licite mais dans une intention illicite, la cour d'appel a violé par refus d'application la règle fraus omnia corrumpit, ensemble l'article L. 527-2 du code de commerce ;

4/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QU'est nul, lorsqu'il intervient pendant la période suspecte, tout paiement fait par un mode non communément admis dans les relations d'affaires ; que la mise en oeuvre d'un pacte commissoire constitue un paiement qui n'est pas communément admis dans les relations d'affaires ; qu'en conséquence, est nulle de plein droit la mise en oeuvre d'un pacte commissoire pendant la période suspecte ; qu'en l'espèce, le jugement du 10 juillet 2009 du tribunal de commerce de Paris a ouvert la procédure collective de la société Recovco Affimet et fixé la date de la cessation des paiements au 8 janvier 2009 ; que la BLME a réalisé le pacte commissoire le 16 janvier 2009, soit durant la période suspecte ; qu'en retenant cependant que la mise en oeuvre par la BLME du pacte commissoire pendant la période suspecte ne constituait pas un paiement non communément admis dans les relations d'affaires, la cour d'appel a violé l'article L. 632-1 du code de commerce.



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Gage


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