par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 14 janvier 2016, 14-23100
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
14 janvier 2016, 14-23.100

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Bâtonner
Notaire




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après une inspection occasionnelle nationale de l'étude dans laquelle elle exerçait ses fonctions de notaire et sur l'action disciplinaire exercée par le ministère public conformément à l'article 10 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, Mme A... a été condamnée par le tribunal de grande instance à la peine disciplinaire d'interdiction pour une durée de six mois ainsi qu'à la peine complémentaire d'inéligibilité, pendant cinq ans, aux chambres, organismes et conseils professionnels ;

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Attendu que Mme A... fait grief à l'arrêt de déclarer régulière la procédure disciplinaire, alors, selon le moyen, que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil ; que les droits de la défense doivent être garantis dès le début de la procédure disciplinaire ; qu'en statuant au vu d'un rapport d'inspection établi par deux personnes désignées, à la demande du ministère public ayant initié la procédure disciplinaire, par le Conseil supérieur du notariat, et disposant de pouvoirs exorbitants leur permettant non seulement d'examiner des actes établis par le notaire et couverts par le secret professionnel mais encore d'interroger le personnel de l'étude ou de se faire communiquer des renseignements concernant la situation des comptes bancaires personnels du notaire, sans que soient respectés les droits élémentaires de la défense et notamment celui d'être assisté d'un avocat, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'assistance d'un défenseur n'est pas requise pour l'inspection prévue par le décret n° 74-737 du 12 août 1974, qui constitue une phase administrative préalable concernant des droits et obligations de caractère civil, sous la condition, remplie en l'espèce, que les poursuites disciplinaires fondées sur le rapport d'inspection soient soumises à un recours ultérieur de pleine juridiction ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais, sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt mentionne qu'à l'audience, des réquisitions ont été formulées pour le parquet général et que le procureur général a requis la confirmation du jugement ;

Qu'en procédant ainsi, sans préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l'audience et, si tel avait été le cas, sans constater qu e le professionnel poursuivi en avait reçu communication afin de pouvoir y répondre utilement, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour Mme A....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré la procédure disciplinaire suivie contre Maître Christine A... régulière et, constatant qu'elle a commis des fautes professionnelles, prononcé contre elle la peine disciplinaire de l'interdiction temporaire d'exercer pendant une durée de six mois ainsi que la peine d'inéligibilité temporaire pendant cinq ans aux chambres, organismes et conseils professionnels et commis un notaire salarié afin de la remplacer dans ses fonctions ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme A... soutient en premier lieu que le jugement entrepris n'a pas fait application des règles relatives à la question prioritaire de constitutionnalité dès lors qu'il a tranché la question de fond avant celle portant sur la transmission de deux questions prioritaires de constitutionnalité ; que, cependant, cette argumentation est sans emport, dès lors que dans ses arrêts précédents, la cour a statué sur les différentes questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par Mme A... ; que cette dernière n'est pas fondée à soutenir qu'elle fait l'objet de nouvelles poursuites pour les faits qui avaient donné lieu à poursuite devant la chambre de discipline et à invoquer une atteinte au principe « non bis in idem », dès lors que les faits qui ont donné lieu à la sanction disciplinaire de la censure simple ont été commis alors qu'elle exerçait comme notaire associé à Hauteville-Lompnes et que les faits qui ont donné lieu à l'assignation devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse statuant disciplinairement ont été commis alors qu'elle exerçait en qualité de notaire à Pont-d'Ain ; que les poursuites sont fondées sur l'inspection occasionnelle nationale ayant révélé des anomalies commises dans la tenue de l'office de Pont-d'Ain ; que la procédure disciplinaire telle qu'elle est organisée par l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juillet (lire : juin) 1945 et le décret n° 73-1202 du 28 décembre 1976 relatifs à la discipline et au statut des officiers publics et ministériels n'est pas contraire aux articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; qu'il résulte de l'article 1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 que les notaires sont les officiers publics établis pour recevoir tous les actes et contrats auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d'authenticité attaché aux actes de l'autorité publique et pour en assurer la date, en conserver le dépôt, en délivrer des grosses et expéditions ; qu'ils sont à ce titre dépositaires d'une parcelle de l'autorité publique ; que le statut d'officier public et ministériel du notaire n'a pas été remis en cause par la Cour de Justice de l'Union Européenne ; qu'il est légitime que l'Etat soumette les notaires à une discipline rigoureuse et, lors de l'inspection de leurs études, à des règles exorbitantes du droit commun ; que les inspections des études ne s'inscrivent pas dans le cadre d'une instance disciplinaire ; qu'elles n'en constituent éventuellement que le préalable ; que les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme relatives au droit à un procès équitable n'ont pas vocation à s'appliquer à ces inspections ; que ces dispositions sont par ailleurs respectées au cours de la procédure disciplinaire qui garantit les droits de la défense, le caractère équitable et public du procès, et le respect de la présomption d'innocence ; que l'article 3-5 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 en ce qu'il ne prévoit pas la durée de l'interdiction temporaire n'est pas contraire aux articles 6 et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et ne méconnaît ni les principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité des peines, ni le droit au procès équitable, ni les droits de la défenses ; que la peine disciplinaire d'interdiction temporaire s'inscrit dans une échelle de peines disciplinaires dont la plus sévère est la destitution qui implique, pour la personne condamnée, l'interdiction définitive d'exercer ; qu'il n'existe pas d'inadéquation entre la peine disciplinaire encourue et les obligations dont elle tend à réprimer la méconnaissance ; que les conclusions du rapport d'inspection nationale, sur lequel sont fondées les poursuites, sont les suivantes : « Depuis son installation à Pont-d'Ain, Maître A... n'a pas corrigé sa manière de travailler par rapport à son exercice au sein de la Scp A... à Hauteville Lompnes, cette méthode entraînant de graves dysfonctionnements sur la sécurité et l'authenticité des actes. Rédaction des actes en recto verso avec paraphes uniquement sur le recto, de nombreux blancs, des renvois non paraphés figurent fréquemment sur le verso,- Mentions finales (renvois, mots nuls, etc...) non arrêtées ou arrêtées avec des tirets ou des chiffres qui sont parfois surchargés,- D'une manière générale certains aspects juridiques ne sont pas maîtrisés, voire même ignorés pour des raisons de facilité et de rapidité.- Les règles de base de l'authenticité ne sont pas respectées telles que : * répertoire non tenu à jour puisque lors de notre arrivée il avait un an de retard, * défaut de signature du notaire, voire même parfois des parties dans les actes, * modification des actes et de la mention finale après signature avec grattage et surcharge.- Il semble qu'aucun contrôle d'ensemble des dossiers et des actes ne soient effectués (sic) avant et après signature ce qui aurait évité beaucoup d'anomalies que nous avons pu constater.- Ces nombreuses anomalies et prise de risque entraîneront la responsabilité pécuniaire de Maître A...et par conséquence de la profession ". Que Mme A..., qui fait plaider sa relaxe, admet néanmoins au cours des débats, la réalité d'une partie des irrégularités relevées, en particulier l'existence de blancs qu'elle qualifie de peu fréquents, ainsi que l'absence de certaines signatures sur les actes ; qu'après avoir procédé au contrôle des actes par sondage, les inspecteurs ont, à titre d'exemple, relevé les irrégularités suivantes : «- Prêt Lyonnaise de Banque/ B...du 02 janvier 2012 : manque un paraphe pour les mots nuls, mots nuls en chiffre, procuration de l'intervenant non certifiée.- vente Berny lmmobilier/ C...du 03 janvier 2012 : titre de propriété du vendeur non publié, * pas état hypothécaire * Fonds remis néanmoins le jour de la signature au vendeur * Prix de vente dans l'acte 80. 000 euros, payé comptant par la comptabilité mais il apparaît en comptabilité qu'une somme de 4. 000 euros a été payée hors comptabilité, que le vendeur n'a reçu de l'étude que 76. 000 euros-Procuration D...du 05 janvier 2012 : * Personne âgée de 95 ans. Ne fallait-il pas un certificat médical ? * Paraphe recto et mention manuscrite verso d'une écriture différente de la signature
-Vente E.../ F...du 05 janvier 2012 : * Procuration pour constituer une servitude non légalisée-Cession de fonds G.../ H...du 06 janvier 2012 : * Pas de carte de séjour * Chiffre d'affaires et bénéfices commerciaux 2011 non renseignés * Pas de constitution de séquestre dans l'acte * Défaut de provision pour régler les droits d'enregistrement et les formalités-Prêt Crédit Mutuel/ GAEC des Prés D'Allement du 10 janvier 2012 : * Blancs dans l'acte (dates d'échéances et mandataires de la banque)- Vente I.../ J...du 11 janvier 2012 : * Paraphes recto * Fin de partie normalisée en verso non paraphée avec blanc non bâtonné sur une grande partie de la page-Donation partage Carcelut du 26 février 2011 : * Modification des valeurs des biens donnés en partage * Versos non paraphés * Mention finale en chiffres modifiée * Annexe non signée par le notaire-Inventaire Fischer du 06 septembre 2011 : * Prisée manuscrite non paraphée au verso et surtout sans aucune évaluation * Mention finale en chiffres * Absence dans l'intitulé d'inventaire de la mention du défunt (état civil, date et lieu de décès, régime matrimonial...) * Maître A...est constituée gardien des objets inventoriés qui sont en dépôt dans le coffre de l'étude mais qui n'ont pas fait l'objet de la production d'un reçu valeur-Pacs X...du 21 septembre 2011 : * Non porté au répertoire brouillon le jour de l'inspection (répertoire officiel étant arrêté au 31 décembre 2010)
- Changement de régime matrimonial K...du 27 septembre 2011 :- non porté au répertoire brouillon le jour de l'inspection (répertoire officiel étant arrêté au 31 décembre 2010)- Certificat de propriété L...du 30 septembre 2011 : * non porté au répertoire brouillon le jour de l'inspection (répertoire officiel étant arrêté au 31 décembre 2010)- Vente de fonds de commerce M... N...du 25 octobre 2010 : * Vente par le liquidateur * Pas de constitution de séquestre dans l'acte * Prix remis au liquidateur le 26 octobre 2010 sans autres formalités (notamment sur la purge des inscriptions)- Notoriété et attestation de propriété Y...André du 24 novembre 2009 : * Mention finale non complétée-Procuration O...(en brevet) du 24 novembre 2009 : * Acte non porté au répertoire-Notoriété et partage P... du 23 novembre 2009 : * Acte non signé par le notaire-Donation Z...du 28 juin 2010 : * Mention finale non complétée. D'autre part une procuration générale sous seing privé à été signée (sic) par Madame Fernande Z...le 24 octobre 2010, certifiée par Maître A... le 26 octobre 2010 (soit deux jours après !), les signatures ainsi que les paraphes de Madame Z...Fernande sur ces deux actes nous paraissent semblables ; En revanche un acte de donation daté du 12 janvier 2012 dont la donatrice est également Madame Fernande Z...fait apparaître des paraphes et une signature qui nous semblent différents des deux actes précités » ; que le premier juge a exactement considéré que l'absence de paraphe sur le verso ne constitue pas une faute professionnelle ; que le Président de la Chambre de discipline confirme que si chaque feuille doit être signée, la pratique consiste à ne faire parapher que le recto ; que la signature du notaire et des parties constitue une formalité essentielle de l'acte authentique ; que Mme A... admet l'absence de signature du notaire sur la dernière page de l'acte de notoriété et de partage P... ; que ne sont pas admissibles les modifications de mentions comme l'existence de blanc dans des actes, ainsi que l'absence de mentions des actes au répertoire ; que, sur ce dernier point, les inspecteurs ont constaté à leur arrivée que le répertoire n'était pas tenu depuis un an, alors qu'il doit l'être au jour le jour, pour garantir l'authenticité des actes, ainsi que pour des raisons fiscales ; que le répertoire brouillon, édité par trimestre avec une numérotation repartant au numéro 1 à chaque trimestre, n'est pas fiable, car il peut être modifié à tout moment aussi bien par son contenu que par sa numérotation, ce que les inspecteurs ont constaté dans plusieurs cas ; que les manquements aux règles professionnelles essentielles reprochés à Mme A... sont ainsi démontrés ; qu'ils traduisent un manque de rigueur et un « laisser-aller » de nature à mettre en péril la sécurité et l'authenticité des actes ; que compte tenu de leur nombre et de leur répétition, ils ne peuvent être considérés comme des erreurs isolées ; que Mme A... a déjà fait l'objet d'une sanction disciplinaire de la censure simple prononcée par la Chambre Régionale de discipline pour des faits commis précédemment dans la tenue de son office de Hauteville-Lompnes ; que le renouvellement des manquements, objet de la présente procédure, traduit le refus de Mme A... d'améliorer sa pratique professionnelle ; qu'il est ainsi justifié de prononcer à son égard l'interdiction temporaire d'exercer pendant une durée de six mois, ainsi que la peine d'inéligibilité temporaire pendant cinq ans aux chambres, organismes et conseils professionnels ; que le premier juge n'a pas statué « ultra petita » en désignant un administrateur, dès lors que l'article 20 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 impose cette mesure » (arrêt, p. 4 à 7) ;

ET AUX MOTIFS SUPPOSES ADOPTES QUE (...) sur l'inconventionnalité du décret n° 74-737 du 12 août 1974 et plus précisément de l'article 11, Maître A... soutient que les pouvoirs exorbitants d'enquête, de réquisition de personnes et de pièces et d'interrogatoires, donnés aux inspecteurs qui ne sont pas des officiers de police judiciaire mais qui sont des personnes privées qui tiennent leurs pouvoirs de l'autorité réglementaire et ne sont pas encadrés par le juge judiciaire, tombent sous le coup de la jurisprudence du conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l'homme qui protège le domicile privé et professionnel des personnes physiques ou morales à travers l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Selon cette disposition : « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » « il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ». Il est de droit constant que ces dispositions protègent les locaux professionnels ou des personnes morales comme le domicile privé. Maître A... se plaint de l'intrusion des inspecteurs dans sa vie privée, par les réquisitions de documents bancaires ou relatifs à son patrimoine personnel comme à celui de son conjoint avec lequel elle est mariée sous le régime de la séparation de biens. Les inspecteurs ont agi en vertu des dispositions de l'article 11 du décret du 12 août 1974 qui leur donne « les droits de recherche, de communication et de vérification les plus étendus sur les minutes, répertoires. Le notaire inspecté doit déférer aux demandes des inspecteurs ». Cependant, ainsi que l'oppose monsieur le procureur de la République, ces inspecteurs agissent en vertu d'une mission de service public dévolue et imposée aux chambres des notaires par l'article 4-5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. En effet, contrairement à ce que soutient Maître A... à l'audience, par la voix de son conseil, à savoir que la fonction exercée par les notaires est ni plus ni moins que celle d'un prestataire de services, voire d'un banal commerçant, il résulte des dispositions de l'article 1 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 que les notaires sont des « officiers publics établis pour recevoir tous les actes ou les constats auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d'authenticité attaché aux actes de l'autorité publique et pour en assurer la date, en conserver le dépôt, en délivrer des grosses et des expéditions ». Une telle charge, exercée exclusivement par les notaires, les rend dépositaires d'une parcelle de l'autorité publique et il est parfaitement légitime qu'un Etat les soumette, notamment lors de l'inspection de leurs études à des règles exorbitantes du droit commun applicable aux simples particuliers, ainsi, les notaires dans l'exercice de leurs fonctions, ne peuvent se prévaloir des règles protectrices de la vie privée, des locaux professionnels ou des personnes morales. C'est ainsi que le décret n° 74-737 du 12 août 1974 ne saurait être déclaré inconventionnel alors que ses dispositions s'inscrivent parfaitement dans la jurisprudence de la cour européenne selon laquelle les Etats sont en droit de considérer que certaines circonstances puissent permettre de faire prévaloir leurs intérêts sur les intérêts individuels du requérant. Ce premier motif d'inconventionalité du décret n° 74-737 du 12 août 1974 doit en conséquence être rejeté. Maître A... soutient encore qu'à ces prérogatives exorbitantes ne correspond aucune garantie accordée au notaire inspecté pour rétablir l'égalité des armes : les règles de l'inspection méconnaissent la nécessité de la présence de l'avocat, le droit au silence et le droit à la présomption d'innocence.
Ainsi, elle prétend que les dispositions de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantissent la présomption d'innocence sont bafouées ainsi que le prouve le fait que les frais de l'inspection sont obligatoirement mis à la charge du notaire inspecté, avant même la tenue de l'audience disciplinaire, et que le rapport de l'inspection nationale du 17 avril 2012 présente comme établies les fautes prétendument commises par Maître A.... Mais l'article 6 § I de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, définit les règles du procès équitable : il s'ensuit que ses dispositions ne sont à l'évidence pas applicables aux inspections des études de notaires qui ne sont que le préalable d'une instance disciplinaire, qui sera elle, soumise aux règles de l'article 6 § 1 et un mode de preuve des fautes qui pourront être discutées contradictoirement, avec l'assistance d'un conseil, devant la juridiction disciplinaire qui se prononcera sur la culpabilité du notaire. Il y a lieu en conséquence, de rejeter la demande en déclaration d'inconventionalité du décret n° 74-787 du 12 août 1974 (jugement, p. 5, 6 et 7 § 1) ; (...) ;

1) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil ; que, notamment en matière disciplinaire, les jugements doivent comporter les mentions permettant d'établir que les droits de la défense et le principe de la contradiction ont été respectés ; que la Cour d'appel énonce que le Procureur Général a requis la confirmation du jugement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l'audience et, si tel avait été le cas, sans constater que Mme A... avait eu communication de ces conclusions afin de pouvoir y répondre utilement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil ; que les droits de la défense doivent être garantis dès le début de la procédure disciplinaire ; qu'en statuant au vu d'un rapport d'inspection établi par deux personnes désignées, à la demande du ministère public ayant initié la procédure disciplinaire, par le Conseil Supérieur du Notariat, et disposant de pouvoirs exorbitants leur permettant non seulement d'examiner des actes établis par le notaire et couverts par le secret professionnel mais encore d'interroger le personnel de l'étude ou de se faire communiquer des renseignements concernant la situation des comptes bancaires personnels du notaire, sans que soient respectés les droits élémentaires de la défense et notamment celui d'être assisté d'un avocat, la Cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
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Notaire


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.