par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 30 mars 2017, 16-13227
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
30 mars 2017, 16-13.227

Cette décision est visée dans la définition :
Effet direct (Droit communautaire)




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 68 et 69 de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République algérienne démocratique et populaire, d'autre part, signé le 22 avril 2002 et la décision 2005/ 690/ CE du Conseil, du 18 juillet 2005, concernant la conclusion de cet accord euro-méditerranéen ;

Attendu qu'il se déduit de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJCE, 5 avril 1995, Krid, aff. C-103/ 94 ; CJCE, 15 janv. 1998, Babahenini, aff. C-113/ 97 ; CJCE (Ord.), 13 juin 2006, Echouikh, aff. C-336/ 05 ; CJCE (Ord.), 17 avril 2007, El Youssfi, aff. C-276/ 06) qu'en application de l'article 68 de l'accord euro-méditerranéen susvisé, d'effet direct, applicable aux prestations familiales en vertu des paragraphes 1 et 3, l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité dans le domaine d'application de l'accord implique qu'un ressortissant algérien résidant légalement dans un Etat membre soit traité de la même manière que les nationaux de l'Etat membre d'accueil, de sorte que la législation de cet État membre ne saurait soumettre l'octroi d'une prestation sociale à un tel ressortissant algérien à des conditions supplémentaires ou plus rigoureuses par rapport à celles applicables à ses propres ressortissants ; qu'il en résulte que les articles L. 512-2, D. 512-1 et D. 512-2 du code de la sécurité sociale qui, en ce qu'ils soumettent le bénéfice des allocations familiales à la production du certificat médical délivré par l'Office français de l'intégration et de l'immigration à l'issue de la procédure de regroupement familial, instituent une discrimination directement fondée sur la nationalité, devait être écartée en l'espèce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 9 juin 2011, la caisse d'allocations familiales du Val-de-Marne a rejeté la demande de prestations familiales présentée par M. X..., de nationalité algérienne, pour ses deux enfants nés en 1999 et 2001 en Algérie, entrés en France en même temps que lui, au motif que la famille, bien que résidant régulièrement en France, n'était pas en possession du certificat médical délivré par l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; que l'intéressé a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour débouter M. X... de son recours, l'arrêt énonce que depuis le 1er janvier 2005, date d'entrée en vigueur de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, le versement des prestations familiales est subordonné à la production d'un document de séjour personnel de l'enfant, clairement défini ; qu'il relève que celui-ci ne produit aucun des justificatifs énumérés par l'article D. 512-2 du code de la sécurité sociale, le document de circulation pour étranger mineur n'équivalant pas aux titres limitativement énumérés ; qu'il retient que les dispositions de l'article D. 512-2 sont objectivement et raisonnablement justifiées par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants et que l'obligation de fournir des documents spécifiques ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne constitue une discrimination prohibée par l'article 14 de la même Convention ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la caisse d'allocations familiales du Val-de-Marne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse d'allocations familiales du Val-de-Marne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. X...

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR confirmé le jugement ayant débouté l'exposant de son recours visant au bénéfice des prestations familiales à compter du 1er décembre 2010 ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de la Convention générale de sécurité sociale du 1er octobre 1980 conclue entre la France et l'Algérie les ressortissants algériens exerçant en France une activité salariée ou assimilée sont soumis aux législations de sécurité sociale énumérées à l'article 5, applicables en France, et en bénéficient, ainsi que leurs ayants droit, dans les mêmes conditions que les ressortissants français ; qu'il n'est pas contesté qu'en France sont comprises dans le champ d'application de cette Convention la législation fixant l'organisation de la sécurité sociale et celle relative aux prestations familiales ; que ces dispositions garantissent aux ressortissants des deux pays parties à la convention une égalité de traitement pour l'ouverture des droits aux prestations familiales ; que ladite convention subordonne le bénéfice des prestations à la justification par le demandeur de son statut de salarié ou assimilé en France et que M. Kamal X... n'établit pas avoir ce statut, les dispositions de la convention ne lui sont pas applicables ; qu'il résulte de l'article D 512-2 du code de la sécurité sociale que la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers non nés en France au titre desquels, celui les ayant à sa charge demande des prestations familiales, est justifiée notamment par la production, soit du certificat de contrôle médical de l'enfant délivré à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial, soit de l'attestation délivrée par l'autorité préfectorale précisant que l'enfant est entré en France au plus tard en même temps que l'un de ses parents admis au séjour sur le fondement du 7° de l'article L313. 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) ou du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; qu'ainsi depuis le 1er janvier 2006, date d'entrée en vigueur de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, le versement des prestations familiales est subordonné la production d'un document de séjour personnel à l'enfant, clairement défini ; que M. Kamal X... ne produit aucun des justificatifs énumérés par l'article D 512-2 précité ; que le document de circulation pour étranger mineur n'équivaut pas aux titres limitativement énumérés par l'article D 512-2 dont la production justifie la régularité de l'entrée et du séjour de l'enfant étranger et n'ouvre dés lors pas droit au bénéfice des prestations familiales ; que les dispositions de l'article D 512-2 sont objectivement et raisonnablement justifiées par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants ; que l'obligation de fournir des documents spécifiques ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne constitue pas une discrimination prohibée par l'article 14 de la même Convention ; que ces dispositions ne méconnaissent pas non plus l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant ; que dans ces conditions, il convient de confirmer la décision des premiers juges ;


ALORS QUE, en application de l'article 68 de l'accord d'association entre l'UE et l'Algérie signé le 22 avril 2002, d'effet direct, applicable aux prestations familiales en vertu des paragraphes 1 et 3, l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité dans le domaine d'application de l'accord implique qu'un ressortissant algérien résidant légalement dans un Etat membre soit traité de la même manière que les nationaux de l'Etat membre d'accueil, de sorte que la législation de cet État membre ne saurait soumettre l'octroi d'une prestation sociale à un tel ressortissant algérien à des conditions supplémentaires ou plus rigoureuses par rapport à celles applicables à ses propres ressortissants ; que l'exposant, salarié de la compagnie Air Algérie, faisait valoir qu'il séjournait ainsi que son épouse régulièrement en France et que ses enfants bénéficiaient d'un titre de circulation ; qu'en décidant que le versement des prestations familiales est subordonné à la production d'un document de séjour personnel à l'enfant, clairement défini, que M. Kamal X... ne produit aucun des justificatifs énumérés par, l'article D 512-2 du code de la sécurité sociale, que le document de circulation pour étranger mineur n'équivaut pas aux titres limitativement énumérés par l'article D 512-2 dont la production justifie la régularité de l'entrée et du séjour de l'enfant étranger et n'ouvre dés lors pas droit au bénéfice des prestations familiales, la cour d'appel a violé les textes susvisés.



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Cette décision est visée dans la définition :
Effet direct (Droit communautaire)


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.