par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 2, 1er juin 2017, 16-18212
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
1er juin 2017, 16-18.212
Cette décision est visée dans la définition :
Appel
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 avril 2016), que la société Elogie a interjeté appel du jugement d'un tribunal d'instance rendu dans un litige l'opposant à M. X... et à Mme Y... ; qu'elle a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant prononcé la caducité de la déclaration d'appel ;
Attendu que la société Elogie fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle avait prononcé la caducité de l'appel qu'elle avait interjeté le 1er juillet 2015 et de la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions alors, selon le moyen :
1°/ que la signification de la déclaration d'appel prévue à l'article 902 du code de procédure civile a pour objectif d'informer l'intimé de la procédure d'appel engagée contre lui et de l'obligation de constituer avocat pour qu'il puisse faire valoir sa défense dans les formes et délais requis par le code de procédure civile ; que la signification d'un acte, qu'il soit formellement ou non la déclaration d'appel déposée par l'appelant au greffe, dès lors qu'il contient toutes les informations utiles sur la déclaration d'appel pour mettre en mesure l'intimé de faire valablement valoir ses droits répond aux exigences de l'article 902 du code de procédure civile ; qu'en prononçant néanmoins la caducité de la déclaration d'appel au motif que l'acte signifié par la société Elogie intitulé "déclaration d'appel valant inscription au rôle", lequel mentionne le jugement attaqué, les coordonnées de l'appelant, son adresse, le nom et les coordonnées de son avocat, son barreau de rattachement et l'identité des intimés, ne s'assimilait pas et ne pouvait tenir lieu de déclaration d'appel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ que les vices de forme de l'acte signifié dans les délais par l'appelant en application de l'article 902 du code de procédure civile ne peuvent emporter la caducité de la déclaration d'appel sans justification d'un grief par l'intimé qui l'invoque ; qu'en prononçant la caducité de la déclaration d'appel au motif que l'acte signifié par l'appelante ne contenait ni la constitution de l'avocat, ni l'adresse des intimés sans caractériser en quoi l'omission de ces mentions, qui constitue un vice de forme, avait causé un grief aux intimés qui avaient immédiatement constitue un avocat et avaient pu déposer des conclusions, la cour d'appel a violé les articles 114, 117, 901, 902 et 58 du code de procédure civile ;
3°/ que l'acte signifié portant "déclaration d'appel valant inscription au rôle" mentionne que la société Elogie est "représentée par Me Z..., avocat au barreau de Paris, toque : E1432" ainsi que l'adresse de Me Z... "[...] " ; qu'en affirmant que le document signifié par la société Elogie ne contenait pas la constitution de l'avocat, c'est-à-dire les nom, prénom, adresse, barreau de rattachement de l'avocat, la cour d'appel a dénaturé ce document en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
4°/ que selon l'article 901, la déclaration d'appel indique, le cas échéant, les chefs du jugement auquel l'appel est limité ; que cette indication, non prescrite à peine de nullité, étant facultative, l'appelant qui ne donne aucune précision sur les chefs de jugement attaqués forme un appel général ; qu'en jugeant que le document signifié par la société Elogie ne pouvait tenir lieu de déclaration d'appel au motif qu'il ne précisait pas si l'appel était partiel ou total, la cour d'appel a violé les articles 901 et 902 du code de procédure civile ;
5°/ qu'aux termes de l'article 902, alinéa 4, à peine de nullité, l'acte de signification indique à l'intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s'expose à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que faute de conclure dans le délai mentionné à l'article 909, il s'expose à ce que ses écritures soient déclarées d'office irrecevables ; que les actes de significations remis à M. X... et à Mme Y..., régulièrement versés aux débats, reproduisent in extenso ces mentions ; qu'en prononçant néanmoins la caducité de la déclaration d'appel au motif éventuellement adopté que les mentions exigées par les articles 902 et 909 du code de procédure civile ne sont pas contenues, non dans l'acte de signification, mais dans l'acte signifié, la cour d'appel a violé les articles susvisés ;
6°/ que si le droit à un tribunal, dont le droit d'accès constitue un aspect particulier, se prête à des limitations notamment quant aux conditions d'exercice d'un recours, ces limitations ne se concilient avec l'article 6, § 1, de la convention européenne des droits de l'homme que si elles tendent à un but légitime et s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ; qu'en conséquence l'application par les juridictions internes de formalités à respecter pour former un recours est susceptible de violer le droit d'accès à un tribunal quand l'interprétation trop formaliste de la légalité ordinaire faite par une juridiction empêche effectivement l'examen au fond du recours exercé par l'intéressé ; qu'en l'espèce, la société Elogie a signifié aux intimés dans le délai d'un mois de l'avis du greffe un acte intitulé "déclaration d'appel valant inscription au rôle", adressé par le greffe, mentionnant le n° RG, la chambre à laquelle le dossier a été distribué, les références complètes du jugement attaqué, les coordonnées de l'appelant, le nom, les coordonnées complètes et le barreau de rattachement de son avocat ainsi que l'identité des intimés ; que les intimés ont été en mesure de constituer très rapidement un avocat ; qu'en prononçant néanmoins la caducité de l'appel aux motifs susvisés et notamment que l'acte signifié n'était pas formellement la déclaration d'appel, la cour d'appel a fait preuve d'un formalisme excessif et a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au tribunal de l'appelante violant ainsi l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'avait été signifié aux intimés l'avis de l'inscription au rôle de l'affaire adressé par le greffe à l'avocat de l'appelante, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si cette irrégularité avait causé un grief aux intimés dès lors que la caducité était encourue au titre, non pas d'un vice de forme de la déclaration d'appel, mais de l'absence de signification d'une déclaration d'appel au sens de l'article 902 du code de procédure civile et de l'article 10 de l'arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel et abstraction faite du grief inopérant de dénaturation en ce qu'il critique un motif surabondant, en a exactement déduit la caducité de la déclaration d'appel formée le 1er juin 2015 par la société Elogie ;
Et attendu que la caducité résultant de l'absence de la signification de la déclaration d'appel dans le délai imparti par la loi ne constitue pas une sanction disproportionnée au but poursuivi, qui est d'assurer la célérité et l'efficacité de la procédure d'appel avec représentation obligatoire, et n'est pas contraire aux exigences de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Elogie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Elogie ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Elogie
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle avait prononcé la caducité de l'appel interjeté par la société Elogie le 1er juillet 2015 et D'AVOIR débouté la société Elogie de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
AUX MOTIFS QUE sur le premier moyen invoqué par la société ELOGIE et tiré du fait qu'elle aurait notifié le seul document en sa possession, la consultation du réseau privé virtuel des avocats fait apparaitre que le greffe civil central a notifié à l'appelante le 8 juin 2015 à 11h42, un message comportant deux pièces jointes, valant récépissé de sa déclaration d'appel et récapitulatif de cette même déclaration d'appel au sens de l'article 10 de l'arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel ; que ce message et les pièces qui l'accompagnaient donnaient à l'appelante l'ensemble des éléments nécessaires pour lui permettre de procéder à la signification de sa déclaration d'appel en application des dispositions de l'article 902 du code de procédure civile ; que le premier moyen qui manque en fait ne pourra être accueilli ; que sur le deuxième moyen tiré du fait que le document signifié constituerait une déclaration d'appel et comporterait l'intégralité des mentions exigées par les articles 58, 901, 902, 909 et 911-2 du code de procédure civile, il apparait que l'avis de distribution adressé par le bureau d'ordre civil de la Cour intitulé « inscription au rôle » ne s'assimile pas et ne peut tenir lieu de déclaration d'appel, que le document signifié par l'appelante ne contient pas la constitution de l'avocat, c'est-à-dire les nom, prénom, adresse, barreau de rattachement de l'avocat ni l'adresse des intimés et ne précise pas si l'appel est partiel ou total, cette précision ne pouvant être présumée comme l'allègue l'appelante ; que le fait que l'acte de signification établi par huissier de justice reprenne certaines de ces mentions qui ne figurent pas sur le document signifié est inopérant, l'acte de signification ne pouvant se substituer au document signifié ni même à la déclaration d'appel qui n'a pas été signifiée en l'espèce, s'agissant de deux actes différents, que le deuxième moyen soulevé par la société Elogie sera en conséquence rejeté ; qu'enfin, le troisième moyen formé à titre subsidiaire et titré de l'absence de grief causé aux intimés par l'irrégularité de la signification est également inopérant du fait que l'acte signifié n'est pas la déclaration d'appel et ne peut être assimilé à une déclaration d'appel, de sorte que la signification opérée ne vaut pas signification au sens de l'article 902 du code de procédure civile et que nous ne sommes pas en présence d'une irrégularité de forme de la notification ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE le 16 juillet 2015, en ce qui concerne Monsieur Jacques X..., et le 27 juillet 2015, en ce qui concerne Mademoiselle Margaux Y..., la société Elogie leur a fait signifier, sur le fondement de l'article 902 du code de procédure civile, un acte intitulé « Déclaration d'appel valant inscription au rôle, DA n° 15/13685 du 1er juin 2015, RG 15/11376, Pôle 4 ‒ Chambre 3 » ; que si ce document a été signifié dans le délai d'un mois de l'avis du greffe, et s'il mentionne le jugement attaqué, les coordonnées de l'appelant, son adresse ainsi que le nom de son avocat, et précise l'identité des intimés, pour autant il ne contient pas certaines des mentions prescrites à peine de nullité par les articles 901 et 58 du code de procédure civile, à savoir la constitution de l'avocat de l'appelant, l'adresse des intimés et l'objet de l'appel, total ou limité ; que ce document ne comporte pas davantage le rappel des articles 902, 909 et 665-1-3° du code de procédure civile et ne précise donc pas que faute pour l'intimé de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la déclaration d'appel, il s'expose à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que, faute de conclure dans le délai mentionné à l'article 909, il s'expose à ce que ses écritures soient déclarées d'office irrecevables ; qu'à défaut de contenir les mentions susvisées exigées par les articles susvisés, le document signifié les 16 et 27 juillet 2015 par la société ELOGIE intitulé « inscription au rôle » et daté du 8 juin 2015 alors que la déclaration d'appel est du 1er juin 2015 n'est pas la déclaration d'appel dont la signification est requise par l'article 902 du code de procédure civile à peine de caducité de la déclaration d'appel ; que la demande des intimés tendant au prononcé de la caducité de la déclaration d'appel et non de la nullité de la déclaration d'appel, c'est en vain que l'appelante soutient, à titre subsidiaire, que les omissions ou irrégularités des mentions constituent un vice de forme au sens de l'article 114 du code de procédure civile et que les intimés ne justifient d'aucun grief ;
1°) ALORS QUE la signification de la déclaration d'appel prévue à l'article 902 du code de procédure civile a pour objectif d'informer l'intimé de la procédure d'appel engagée contre lui et de l'obligation de constituer avocat pour qu'il puisse faire valoir sa défense dans les formes et délais requis par le code de procédure civile ; que la signification d'un acte, qu'il soit formellement ou non la déclaration d'appel déposée par l'appelant au greffe, dès lors qu'il contient toutes les informations utiles sur la déclaration d'appel pour mettre en mesure l'intimé de faire valablement valoir ses droits répond aux exigences de l'article 902 du code de procédure civile ; qu'en prononçant néanmoins la caducité de la déclaration d'appel au motif que l'acte signifié par la société Elogie intitulé « déclaration d'appel valant inscription au rôle », lequel mentionne le jugement attaqué, les coordonnées de l'appelant, son adresse, le nom et les coordonnées de son avocat, son barreau de rattachement et l'identité des intimés, ne s'assimilait pas et ne pouvait tenir lieu de déclaration d'appel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°) ALORS QUE les vices de forme de l'acte signifié dans les délais par l'appelant en application de l'article 902 du code de procédure civile ne peuvent emporter la caducité de la déclaration d'appel sans justification d'un grief par l'intimé qui l'invoque ; qu'en prononçant la caducité de la déclaration d'appel au motif que l'acte signifié par l'appelante ne contenait ni la constitution de l'avocat, ni l'adresse des intimés sans caractériser en quoi l'omission de ces mentions, qui constitue un vice de forme, avait causé un grief aux intimés qui avaient immédiatement constitue un avocat et avaient pu déposer des conclusions, la cour d'appel a violé les articles 114, 117, 901, 902 et 58 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE l'acte signifié portant « déclaration d'appel valant inscription au rôle » mentionne que la société Elogie est « représentée par Maître Frédéric Z..., avocat au barreau de Paris, toque : E1432 » ainsi que l'adresse de Maître Z... « [...] » ;qu'en affirmant que le document signifié par la société Elogie ne contenait pas la constitution de l'avocat, c'est-à-dire les nom, prénom, adresse, barreau de rattachement de l'avocat, la cour d'appel a dénaturé ce document en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
4°) ALORS QUE selon l'article 901, la déclaration d'appel indique, le cas échéant, les chefs du jugement auquel l'appel est limité ; que cette indication, non prescrite à peine de nullité, étant facultative, l'appelant qui ne donne aucune précision sur les chefs de jugement attaqués forme un appel général ; qu'en jugeant que le document signifié par la société Elogie ne pouvait tenir lieu de déclaration d'appel au motif qu'il ne précisait pas si l'appel était partiel ou total, la cour d'appel a violé les articles 901 et 902 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QU'aux termes de l'article 902, alinéa 4, à peine de nullité, l'acte de signification indique à l'intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s'expose à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que faute de conclure dans le délai mentionné à l'article 909, il s'expose à ce que ses écritures soient déclarées d'office irrecevables ; que les actes de significations remis à M. X... et à Mme Y..., régulièrement versés aux débats, reproduisent in extenso ces mentions ; qu'en prononçant néanmoins la caducité de la déclaration d'appel au motif éventuellement adopté que les mentions exigées par les articles 902 et 909 du code de procédure civile ne sont pas contenues, non dans l'acte de signification, mais dans l'acte signifié, la cour d'appel a violé les articles susvisé ;
6°) ALORS QUE si le droit à un tribunal, dont le droit d'accès constitue un aspect particulier, se prête à des limitations notamment quant aux conditions d'exercice d'un recours, ces limitations ne se concilient avec l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme que si elles tendent à un but légitime et s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ; qu'en conséquence l'application par les juridictions internes de formalités à respecter pour former un recours est susceptible de violer le droit d'accès à un tribunal quand l'interprétation trop formaliste de la légalité ordinaire faite par une juridiction empêche effectivement l'examen au fond du recours exercé par l'intéressé ; qu'en l'espèce, la société Elogie a signifié aux intimés dans le délai d'un mois de l'avis du greffe un acte intitulé « déclaration d'appel valant inscription au rôle », adressé par le greffe, mentionnant le n° RG, la chambre à laquelle le dossier a été distribué, les références complètes du jugement attaqué, les coordonnées de l'appelant, le nom, les coordonnées complètes et le barreau de rattachement de son avocat ainsi que l'identité des intimés ; que les intimés ont été en mesure de constituer très rapidement un avocat ; qu'en prononçant néanmoins la caducité de l'appel aux motifs susvisés et notamment que l'acte signifié n'était pas formellement la déclaration d'appel, la cour d'appel a fait preuve d'un formalisme excessif et a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au tribunal de l'appelante violant ainsi l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme.
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Appel
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.