par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 28 juin 2017, 16-16746
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Cour de cassation, chambre commerciale
28 juin 2017, 16-16.746

Cette décision est visée dans la définition :
Sauvegarde des entreprises




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014, ensemble l'article 1200 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que chacun des codébiteurs solidaires s'engageant distinctement à l'égard du même créancier, le jugement qui étend à l'un la procédure collective ouverte à l'égard de l'autre fait courir au profit de ce créancier, à compter de sa date de publication, un nouveau délai pour déclarer sa créance quand bien même il l'a déjà déclarée au passif de la procédure initialement ouverte ; qu'il en résulte que ce créancier, lorsqu'il est titulaire d'une sûreté régulièrement publiée, doit être averti personnellement d'avoir à déclarer sa créance au passif de celui à qui la procédure a été étendue ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la procédure de redressement judiciaire ouverte le 10 septembre 2012 à l'égard de M. X... a été étendue le 21 juin 2013 à Mme X..., son épouse ; que la société BNP Paribas Personal finance qui, le 7 décembre 2012, avait déclaré au passif de la procédure de M. X... une créance au titre d'un prêt consenti à M. et Mme X... et garanti par une sûreté réelle, en limitant sa demande aux seuls intérêts à échoir, a déclaré, le 24 octobre 2013, au passif de Mme X... une créance à titre privilégié incluant le capital restant dû au titre de ce prêt ; que le mandataire judiciaire lui ayant opposé la tardiveté de sa déclaration, la banque a saisi le juge-commissaire aux fins de voir juger que le délai de deux mois n'avait pas couru contre elle, faute d'avoir été destinataire de l'avertissement prévu à l'article L. 622-24 du code de commerce ;

Attendu que pour déclarer la banque forclose, l'arrêt constate que le mandataire judiciaire a adressé, le 5 juillet 2013, un avertissement à la banque d'avoir à déclarer sa créance dans la procédure collective de M. X... et retient que cet avertissement a fait courir le délai de deux mois, peu important que cet avis ne mentionnât pas Mme X..., ni le jugement d'extension à l'égard de cette dernière, dès lors que la créance de la banque résultait d'un prêt consenti à M. et Mme X..., et que, par l'effet de l'extension de la procédure collective de M. X... à Mme X..., ces deux personnes se sont trouvées réunies en une procédure collective unique avec patrimoine commun et unicité d'actifs et de passif, pour en déduire que cet avertissement a suffi à informer la banque de ses droits et obligations ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne M. et Mme X..., M. Y..., en qualité de mandataire judiciaire de M. et Mme X..., et la SELARL FHB, en qualité de commissaire à l'exécution du plan de M. et Mme X..., aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas Personal finance.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance du juge commissaire ayant rejeté la requête en non forclusion déposée par la société ABBEY NATIONAL France, aux droits de laquelle vient la BNPPF, d'AVOIR condamné la BNP Paribas Personal Finance à payer aux époux X... la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR condamné la BNP Paribas Personal Finance à payer à Maître Y... la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

AUX MOTIFS QU' : « aux termes de l'article L. 622-24 du code de commerce, les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié sont avertis personnellement par le mandataire judiciaire, et le délai de déclaration de leur créance court à compter de la notification de cet avertissement ; que Y..., ès qualités, a adressé un tel avertissement à la banque le 5 juillet 2013 ; Que cet avertissement a fait courir, à l'égard de la banque, le délai de déclaration de sa créance, fixé à deux mois par l'article R. 622-24, qui expirait donc le 5 septembre 2013 ; Que la banque n'a pas respecté ce délai puisque ses déclarations de créance n'ont été adressées au mandataire judiciaire que le 24 octobre 2013 ; qu'elle critique l'avertissement du 5 juillet 2013, non parce qu'il aurait méconnu les dispositions de l'alinéa 3 de l'article R. 622-21 du code de commerce, mais en ce qu'il ne faisait pas mention de « Mme X..., de l'extension de la procédure collective et de la nécessité de déclarer la créance détenue à son égard » ; Que, toutefois, il est indifférent que cet avis mentionnât Mme X... et le jugement d'extension de la procédure collective à son égard, alors que, d'une part, la créance de la banque résultait d'un prêt consenti à M. et Mme X..., et d'autre part, par l'effet de l'extension de la procédure collective de M. X... à Mme X..., ces deux personnes se sont trouvées réunies en une procédure collective unique avec patrimoine commun et unicité d'actifs et de passif ; Que, dès lors, cet avis a suffi à informer la banque de ses droits et obligations ; Que n'ayant pas déclaré sa créance dans le délai légal, elle est forclose ; que c'est par une fausse appréciation que le premier juge a fait droit à la demande de la banque ; Que le jugement entrepris sera infirmé, et l'ordonnance du juge-commissaire qui a rejeté la requête en constat de non-forclusion, confirmée ; que la banque, qui succombe, sera condamnée à payer aux appelants et à Y..., ès qualités, la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et supportera les dépens de première instance et d'appel » ;

1°) ALORS D'UNE PART QUE l'extension d'une procédure collective à une seconde personne physique a pour effet d'ouvrir aux créanciers de cette dernière un délai de deux mois pour déclarer les créances détenues sur celle-ci ; que lorsqu'une procédure collective est ouverte contre un débiteur et étendue par la suite au codébiteur d'une même dette, le créancier qui aurait omis de déclarer cette dette au passif du premier débiteur peut déclarer la créance qu'il détient contre le codébiteur à l'égard duquel la procédure a été étendue (Com. 11 décembre 2001, n° 98-22.643) ; que dans ce cas, la créance déclarée est la créance détenue sur le codébiteur à l'égard duquel la procédure a été étendue ; que la déclaration doit, à l'égard de cette créance, respecter l'ensemble des conditions posées par la loi et la jurisprudence ; que, par ailleurs, lors de l'extension de la procédure collective, le mandataire doit, en application de l'article R 622-21 du code de commerce, adresser au créancier hypothécaire un avis l'invitant à déclarer sa créance au passif en l'informant clairement et sans aucune équivoque de l'extension de la procédure collective et de l'identité du débiteur à l'égard duquel la procédure a été étendue, et ce afin que le créancier puisse valablement déclarer la créance qu'il détenait contre ce dernier ; qu'en l'espèce, la BNPPF rappelait que le 10 septembre 2012 le Tribunal de commerce de Montpellier avait ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de Monsieur X..., et que, dans le cadre de cette procédure, elle avait déclaré, au titre d'un prêt accordé à ce dernier, une créance d'intérêts pour un montant de 246.975,60 euros ; qu'elle rappelait encore que l'état des créances avait été établi et que sa créance avait été définitivement admise ; qu'elle rappelait encore que le 21 juin 2013, le Tribunal de commerce de Montpellier avait étendu cette procédure collective à Madame X..., épouse de Monsieur X..., et que le mandataire s'était contenté de lui envoyer un avis qui faisait état de l'ouverture d'une procédure collective le 10 septembre 2012 à l'encontre de Monsieur X..., sans jamais faire mention de Madame X..., de l'extension de la procédure de redressement judiciaire et de la possibilité de déclarer la créance qu'elle détenait sur celle-ci; qu'elle en concluait que l'avis qui lui avait été communiqué, faute d'être complet, n'avait pu faire courir le délai de déclaration de la créance détenue sur Madame X... ; qu'en jugeant cependant que l'avis adressé par le mandataire à la banque avait tout de même eu pour effet de faire courir le délai de déclaration de la créance détenue par la banque au prétexte que la créance en cause résultait d'un prêt consenti à M. et Mme X... et que par l'effet de l'extension de la procédure collective les époux s'étaient trouvées réunis dans le cadre d'une procédure collective unique avec patrimoine commun et unicité d'actifs et de passif, cependant que la créance de Madame X... ayant une identité propre, l'avis délivré par le mandataire à la banque devait lui permettre de procéder, au regard des éléments communiqués, à une déclaration de créance à l'encontre de Madame X..., ce que ne permettait pas un simple avis l'informant de l'ouverture, près d'un an plus tôt, d'une procédure collective à l'encontre de Monsieur X... lui-même, procédure dans laquelle la banque avait déjà produit, la Cour d'appel a violé l'article L 622-24 du code de commerce, ensemble l'article R 622-21 du code de commerce ;

2°) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE même à dénier toute identité propre à la créance détenue par la banque sur Madame X..., il résulte de l'article R 622-21 du code de commerce que le mandataire doit aviser de façon certaine et non équivoque le titulaire d'une sûreté publiée de la possibilité de déclarer sa créance ; qu'il résulte des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la banque avait d'ores et déjà, près d'une année avant la notification de l'avis du mandataire, produit au passif de Monsieur X..., en sorte que du point de vue de la banque, le processus de déclaration de ses créances était, en ce qui concerne Monsieur X..., définitivement clos et ne pouvait être rouvert ; qu'en l'état, la banque devait, une fois la procédure étendue à Madame X..., être informée, de façon non équivoque, qu'il lui était possible de procéder à une nouvelle déclaration, en sus de celle à laquelle elle avait antérieurement procédé ; qu'en estimant que l'avis délivré par le mandataire permettait à la banque de procéder à la déclaration de créance litigieuse, peu important qu'il ne fasse mention ni de Madame X... ni de l'extension de la procédure à son encontre, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que cet avis ne permettait pas à la banque de savoir, de façon certaine, qu'il lui était possible de procéder à une nouvelle déclaration à la suite de l'extension à l'encontre d'un nouveau débiteur de la procédure initialement ouverte, la Cour d'appel a violé l'article L 622-24 du code de commerce, ensemble l'article R 622-21 du code de commerce ;


3°) ALORS QUE le créancier de deux débiteurs solidaires qui a déclaré sa créance au passif de l'un est en droit, pour préserver ses droits, de procéder à une nouvelle déclaration au passif de l'autre débiteur à l'égard duquel la procédure initiale a fait l'objet d'un jugement d'extension ; que l'exercice de ce droit suppose que ce créancier, lorsqu'il dispose d'une sûreté publiée, soit informé de cette extension ; qu'en jugeant que dès lors que la banque avait été informée par le mandataire judiciaire de la procédure ouverte contre Monsieur X..., il était indifférent qu'elle soit informée de ce que la procédure avait été étendue à Madame X..., la Cour d'appel a violé l'article L 622-24 du code de commerce, ensemble l'article R 622-21 du code de commerce.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.