par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 12 octobre 2017, 15-27802
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
12 octobre 2017, 15-27.802

Cette décision est visée dans la définition :
Entreprise




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Constate la déchéance du pourvoi principal de la société Kad décor ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 septembre 2015), que M. X...et Mme Y... (les consorts X...-Y...), propriétaires de deux appartements situés sur le même palier, ont demandé à la société Kad décor, assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa), de les réunir ; qu'en cours de chantier, les consorts X...-Y... ont constaté l'existence de malfaçons et de non-façons, ont repris les clefs du logement à l'entreprise et y ont emménagé ; que les consorts X...-Y... ont, après expertise, assigné la société Kad décor et la société Axa en indemnisation de leurs préjudices ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident :

Vu l'article 1792-6 du code civil ;

Attendu que, pour refuser la réception judiciaire des travaux, l'arrêt retient que le prononcé de celle-ci suppose que les travaux soient en état d'être reçus mais aussi un refus abusif du maître d'ouvrage de prononcer une réception expresse sollicitée par le constructeur ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de réception amiable, la réception judiciaire peut être ordonnée si les travaux sont en état d'être reçus, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le second moyen du pourvoi incident :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation des dispositions relatives à la réception entraîne la cassation, par voie de conséquence, de la disposition rejetant les demandes des consorts X...-Y... contre la société Axa pour absence de réception ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement rejetant la demande de M. X...et Mme Y... tendant à voir prononcer la réception judiciaire des travaux et rejette leurs demandes contre la société Axa France IARD, l'arrêt rendu le 18 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD ; la condamne à payer une somme globale de 3 000 euros à M. X...et Mme Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. X...et de Mme Y..., demandeur au pourvoi incident,

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. X...et de Mme Y... tendant à voir prononcer la réception judiciaire du chantier litigieux au 30 novembre 2010 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE le prononcé de la réception judiciaire des travaux suppose d'une part que les travaux soient en état d'être reçus, mais aussi un refus abusif du maître de l'ouvrage de prononcer une réception expresse sollicitée par le constructeur ; qu'or en l'espèce aucune des parties, n'a manifesté la volonté de prononcer une quelconque réception, la mise en demeure du 17 décembre étant parfaitement explicite sur la volonté des consorts X...-Y... de ne pas accepter les travaux de ne pas les régler et d'obtenir le règlement de travaux de réparations ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE, sur la demande de réception judiciaire, que le prononcé de la réception judiciaire des travaux est subordonné à deux conditions :- les travaux doivent être en état d'être reçus, ce que permet de caractériser le fait que l'immeuble soit effectivement habitable, au moment de la prise de possession, ce qui ne signifie pas nécessairement qu'ils doivent être achevés,- la volonté manifeste du maître de l'ouvrage de recevoir ou le caractère abusif ou injustifié du refus de recevoir ; qu'en l'occurrence, les nombreuses malfaçons et défauts de finition ont privé les consorts X...-Y... de la possibilité d'habiter leur appartement dans des conditions décentes, notamment en raison de l'absence de plage et de joints au niveau de la baignoire, de l'impossibilité de s'installer et de défaire leurs cartons de déménagement stockés dans le séjour, étant rappelé qu'ils ont causé un dégât des eaux à leur voisin du dessous en raison d'un mauvais raccord de la baignoire et que les WC étaient inutilisables entre le mois d'avril et le mois de mai 2011 ; qu'au vu de ces éléments, l'expert relève qu'ils ont vécu dans des conditions inacceptables ; que nonobstant l'occupation effective du logement, ces éléments ne sauraient caractériser la condition d'habitabilité requise, de telle sorte que l'appartement n'était pas en état d'être reçu au 30 novembre 2010 ; que la demande tendant à voir prononcer la réception judiciaire au 30 novembre 2010 sera par conséquent rejetée ;

Alors 1°) que, la réception judiciaire doit être prononcée dès lors que l'ouvrage est en état d'être reçu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé l'occupation effective par M. X...et Mme Y... de leur logement, en dépit des malfaçons et des non-façons ; qu'en refusant de prononcer la réception judiciaire quand elle constatait que l'immeuble était habité, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations, a violé l'article 1792-6 du code civil ;

Alors 2°) que, la réception judiciaire doit être prononcée dès lors que l'ouvrage est en état d'être reçu ; qu'en se fondant, pour refuser de prononcer la réception judiciaire au 30 novembre 2010, sur l'existence de nombreuses malfaçons et défauts de finition ayant privé les consorts X...-Y... de la possibilité d'habiter leur appartement dans des conditions décentes et acceptables, notamment en raison de l'absence de plage et de joints au niveau de la baignoire, de l'impossibilité de s'installer et de défaire leurs cartons entreposés dans le salon et du caractère inutilisable des WC entre les mois d'avril et de mai 2011, sans rechercher, comme elle y était invitée (cf. les conclusions récapitulatives d'appel des exposants, p. 17), si l'immeuble n'était pas en état d'être reçu en 2011 par suite des travaux de plomberie réalisés par l'entreprise Enjolet qui avaient rendu fonctionnelles les toilettes et la salle de bains, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1792-6 du code civil ;

Alors 3°) que, la réception judiciaire n'est pas subordonnée à une demande préalable de réception amiable ; qu'en relevant, pour rejeter la demande de M. X...et de Mme Y... tendant à voir prononcer la réception judiciaire du chantier litigieux, qu'ils n'avaient pas manifesté une volonté de prononcer une quelconque réception avant de saisir le tribunal, la cour d'appel a violé l'article 1792-6 du code civil ;

Alors 4°) que, en relevant, pour rejeter la demande de M. X...et de Mme Y... tendant à voir prononcer la réception judiciaire du chantier litigieux, qu'ils n'ont pas manifesté une volonté de prononcer la réception des travaux avant de saisir le tribunal, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions récapitulatives d'appel, p. 5 et 6), si par son comportement, la société Kad décor ne les avait pas privés de la possibilité de l'obtenir amiablement, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1792-6 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X...et Mme Y... de toutes leurs demandes dirigées contre la société Axa France ;

AUX MOTIFS QUE, sur la garantie de la SA Axa France Iard, que la SARL Kad Décor a souscrit auprès de la SA Axa France Iard un contrat d'assurance BTPLUS comportant des garanties assurances dommages en cours de chantier (effondrement catastrophes naturelles ...), responsabilité pour dommages de nature décennale et responsabilité civile, après réception, connexe à celle pour dommages de nature décennale, qui ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce, aucun dommage de caractère décennal n'ayant été caractérisé et aucune réception n'ayant été prononcée ; qu'il a également été souscrit une assurance de responsabilité civile du chef d'entreprise avant ou après réception des travaux qui garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité de la SARL Kad Décor à raison de préjudices causés aux tiers notamment par le fait de ses travaux de construction ; que les consorts X...-Y... invoquent la clause 2. 17. 3. 5 relative à cette garantie (non contestée par la SA Axa France Iard) selon laquelle « par dérogation à l'exclusion figurant à l'article 2. 18. 15, la garantie est étendue aux conséquences pécuniaires de la responsabilité encourue par l'assuré en raison des dommages matériels affectant les travaux de construction réalisés par l'assuré ou ses sous-traitants, survenant après réception de ses travaux, alors même que ces travaux ne peuvent être considérés comme des ouvrages ou des éléments d'équipement d'ouvrage au sens des articles 1792, 1792-2 et 1792-3 du code civil » ; que cette garantie ne trouve pas plus à s'appliquer en l'absence de toute réception des travaux ; que la garantie responsabilité civile du chef d'entreprise avant réception des travaux est au surplus exclue, aux termes de l'article 2. 18 des conditions générales, pour les dommages affectant les travaux de l'assuré et pour le coût des prestations que l'assuré s'est engagé à fournir, comme il est usuel en matière d'assurance de responsabilité civile garantissant la responsabilité contractuelle du constructeur de sorte que la garantie de la SA Axa France Iard n'est pas acquise et que le jugement déféré doit en conséquence être réformé de ce chef ;

Alors que, la cassation d'un chef du dispositif d'un arrêt entraîne par voie de conséquence l'annulation d'un autre chef du dispositif qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen, en ce qu'il reproche à la cour d'avoir refusé de prononcer la réception judiciaire des travaux, entrainera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a débouté les consorts X...-Y... de leurs demandes contre la société Axa France Iard, assureur de la société Kad décor, en considération de l'absence de toute réception.



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Cette décision est visée dans la définition :
Entreprise


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.