par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



ETAT CIVIL DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de État civil

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L'expression "Etat civil" désigne l'ensemble des éléments relatifs à la personne qui identifient un individu tels que les nom et prénoms, la date et le lieu de sa naissance, sa situation maritale. Par extension c'est l'appellation donnée aux services administratifs d'une Commune qui reçoivent les déclarations et qui conservent les registres concernant les naissances, les reconnaissances d'enfants naturels, les mariages et les décès. Relativement aux actes constatant le décès d'enfants nés sans vie, la Première Chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que la Loi ne subordonnait l'établissement d'un acte d'enfant sans vie, ni au poids du foetus, ni à la durée de la grossesse (1ère Civ. - 6 février 2008. (3 arrêts), BICC n°682 du 15 mai 2008). La note du Service de Documentation de la Cour de cassation, a précise que l'acte, qui est inscrit à sa date sur les registres de décès, permet notamment d'attribuer des prénoms à l'enfant, de désigner ses parents, de l'inscrire sur le livret de famille à titre de simple mention administrative, d'avoir accès à certains droits sociaux et autorise les parents à réclamer le corps de l'enfant afin d'organiser des obsèques. Voir ci-après la référence à l'article de M. Loiseau dans la Bibliographie ci-après;

Pour justifier une demande de rectification de la mention du sexe figurant dans un acte de naissance, la personne doit établir, au regard de ce qui est communément admis par la communauté scientifique, la réalité du syndrome transsexuel dont elle est atteinte ainsi que le caractère irréversible de la transformation de son apparence. Cette justification manque en fait lorsque la requérante a subi une mastectomie totale avec greffe des aréoles, lorsque le caractère irréversible du changement de sexe ne résulte pas des justifications produites et que la demanderesse a déclaré que par principe, elle refusait de se prêter à des opérations d'expertise en vue de faire cette démonstration. (1ère Chambre civile 7 juin 2012, deux arrêts : pourvois n°11-22490, et 10-26947, Juritravail 11 juin 2012, BICC n°771 du 15 novembre 2012 et Lexbase même date via Twitter et Legifrance). Les conclusions de l'avocat général sont parues dans la Gazette du Palais, no 172-173, 20-21 juin 2012, Jurisprudence, p. 8 à 13 : L'exigence de preuve de la réalité du syndrome transsexuel - le caractère irréversible de la transformation de l'apparence sexuée. Consulter aussi 1re Civ. - 13 février 2013, pourvoi n°12-11949, et 1re Civ. - même date N°11-14515, BICC n°783 du 1er juin 2013, BICC n°786 du 15 juillet 2013 et Legifrance et la note de Madame Inès Gallmeister référencée dans la Bibliographie ci-après.

Une personne a sollicité un jugement supplétif d'acte de naissance, faisant valoir qu'il disposait d'une identité certaine mais que son acte de naissance ne se trouvait ni dans les registres de l'état civil des Français nés et établis hors de France ni dans les registres de l'état civil du Bénin. Selon l'article 46 du code civil, lorsqu'il n'aura pas existé de registres, ou qu'ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titres que par témoins ; que, dans ces cas, les mariages, naissances et décès pourront être prouvés tant par les registres et papiers émanés des pères et mères décédés, que par témoins. La demande a été rejettée. La Cour d'appel a relèvé que les actes de naissance des enfants de M. L... comportent des mentions différentes s'agissant du père déclaré, que l'inscription sur les listes électorales de Paris et la délivrance d'une carte d'électeur ne sont pas de nature à établir son identité mais seulement une possession d'état de Français, sous réserve qu'il s'agisse bien de la même personne, que l'extrait du registre du commerce et des sociétés selon lequel l'intéressé aurait créé une société sous cette identité, les relevés de la Caisse nationale d'assurance vieillesse et l'avis d'impôt sur les revenus 2015 ne permettent pas d'établir la réalité de l'identité dont il se réclame et enfin, que l'absence de documents militaires français ne prouve pas la disparition du dossier le concernant mais seulement qu'il n'a jamais été appelé sous les drapeaux ou exempté comme il le prétend Ces énonciations et constatations, la cour d'appel, qui a analysé les éléments de preuve soumis à son examen, en a souverainement déduit que M. L... ne rapportait pas la preuve de sa date de naissance et de son identité exacte, de sorte qu'il ne remplissait pas les conditions pour obtenir un jugement supplétif d'acte de naissance (1ère Chambre civile 15 mai 2019, pourvoi n°18-18111, BICC n°910 du 1er novembre 2019 et Legifrance)

L'opposition du ministère public, en qualité de partie principale, confère à une procédure relative à une demande de rectification d'un acte d'état civil, normalement gracieuse, un caractère contentieux. Lorsque le Ministère public s'est opposé à cette rectification sollicitée par l'intéressé et que celle ci a été rejetée, cette contestation a conféré un caractère contentieux à la procédure. Etant devenu irrévocable, la décision de rejet a alors acquis l'autorité de la chose jugée, ce qui faisait obstacle à la recevabilité d'une nouvelle requête tendant aux mêmes fins. (1ère Chambre civile 16 décembre 2015, pourvoi n°14-26479, BICC n°841 du 1er mai 2016 et Legifrance).

L'Etat civil pris en tant que service public, est tenu en France comme dans les territoires et les départements d'outre-mer sous la responsabilité des maires. À l'étranger, les services diplomatiques et consulaires français tiennent des registres relatifs aux actes intéressant les français résidants ou de passage dans le pays de leur résidence. Les actes concernant les français nés à l'étranger ou qui sont nés dans les anciennes colonies et les anciens protectorats qui sont devenus des États indépendants sont conservés par un service situé à Nantes dénommé Service Central de l'État civil qui est placé sous le contrôle du Ministère des affaires étrangères.

Le 12 octobre 2000, le Comité Interministériel pour la Réforme de l'État (CIRE) a supprimé les fiches d'état civil, que se substituaient aux pièces justificatives de l 'identité, de la nationalité ou de la situation familiale, elles étaient réclamées pour de nombreuses démarches administratives (demandes d 'allocations familiales et d'aides sociales, immatriculation à un régime de Sécurité sociale, demandes d'aides au logement, inscription à l'examen du permis de conduire, inscription dans les écoles et établissements scolaires, etc.). Il suffit actuellement de produire, soit l'original, soit une copie lisible du livret de famille, du passeport, de la carte nationale d'identité ou du titre de séjour.

Le Décret 2004-1159 du 29 octobre 2004 pris en application de la Loi du 4 mars 2002 précise les modalités de déclaration du nom et du choix du nom de l'enfant devenu français (art.5), la manière dont est reçue la déclaration conjointe de changement de nom ou d'adjonction de nom, quel contrôle exerce à ces occasions l'Officier de l'Etat civil et les modifications aux dispositions réglementaires qu'entraînent ces nouvelles dispositions.

Les actes d'état civil des français et des étrangers drèssés en pays étranger et rédigés dans les formes usitées dans ce pays, font foi. Les copies ou extraits d'actes d'état civil établis à l'étranger doivent, selon la coutume internationale et sauf convention contraire, être légalisés (Cass. 1ère civ., 4 juin 2009, n°08-10962). La naissance d'un enfant né de parents français en pays étranger peut toujours être inscrite sur les registres de l'état civil français lorsqu'elle sera constatée par des documents réguliers émanant des autorités compétentes du lieu de naissance (Cour de cassation 1ère Chambre civile 17 décembre 2008, pourvoi n°07-20293, BICC n°701 du 1er mai 2009.).

La présomption qui s'attache aux actes de l'état civil dressés en pays étranger selon les formes usitées dans ce pays ne peut être détruite que par la preuve, faite par tous moyens, que l'acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. La régularité formelle de l'acte de naissance dressé à l'étranger doit être examinée au regard des conditions posées par la loi étrangère. Pour ce qui est, par exemple, d'un tel acte rédigé selon les formes usitées en Inde, un tel acte fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, . Ainsi un tel acte n'a pas été reconnu valable par la justice française, parce qu'il avait été enregistré quatre ans après la naissance d'un enfant, alors que d'après la loi indienne, il ne pouvait intervenir que sur décision de justice. En l'absence de mention d'une décision de justice dans l'acte ou de production d'une telle décision, la justice française n'avait pu en vérifier la régularité internationale. (Chambre civile 19 septembre 2019, pourvoi n°18-20782, BICC n°916 et Legifrance). Consulter la note de Madame Pascale Salvage-Gerest, JPC. éd. G., 28 octobre 2019, n°44-45, p.1113.).

La Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France pour violation de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH, 5e sect., 26 juin 2014, Mennesson c/ France, no 65192/11, et CEDH, 21 juillet 2016, Foulon et Bouvet c/ France, n° 9063/14 et 10410/14). Elle a considéré que le refus de transcription de l'acte de naissance des enfants nés d'un processus de GPA affectait significativement le droit au respect de leur vie privée et posait une question grave de compatibilité de cette situation avec l'intérêt supérieur de l'enfant. La Cour a estimé que cette analyse prenait un relief particulier lorsque l'un des parents d'intention était également le géniteur de l'enfant. Elle en a déduit qu'en faisant obstacle tant à la reconnaissance qu'à l'établissement en droit interne de leur lien de filiation à l'égard de leur père biologique, l'État était allé au-delà de ce que lui permettait sa marge d'appréciation. La réponse de la Cour de cassation 1. L'existence d'une convention de GPA ne fait pas nécessairement obstacle à la transcription de l'acte de naissance établi à l'étranger dès lors qu'il n'est ni irrégulier ni falsifié et que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité biologique. Elle a jugé qu'une convention de Gestation pour autrui (GPA) conclue entre les parents d'intention et la mère porteuse, ne fait plus obstacle en soi à la transcription de l'acte de naissance d'un enfant né à l'étranger issu d'une telle convention, dès lors que l'acte de naissance n'est ni irrégulier, ni falsifié et que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité au sens de l'article 47 du code civil (1ère Chambre civile 29 novembre 2017, pourvoi n°16-50061, et Assemblée plénière 4 octobre 2019, pourvoi n°10-19053, BICC n°917 du 1er mars 2020 avec une note du SDER et Legifrance) Consulter les note de MM. Frédéric Sudre, Semaine Juridique, éd. G. n°47, 18 novembre 2019, 1184, et Antoine Gouëzel, Rev. Jur. Pers. et Fam. 1er décembre 2019, n°12, p.27. Legifrance).

Par un arrêt de l"Assemblée pleinière du 5 octobre 2018, la Cour de cassation a adressée une demande d'avis consultatif à la Cour européenne des droits de l'homme en posant une question sur le fait qu'en refusant de transcrire sur les registres de l'état civil l'acte de naissance d'un enfant né à l'étranger à l'issue d'une gestation pour autrui (GPA) en ce qu'il désigne comme étant sa "mère légale" la "mère d'intention", alors que la transcription de l'acte a été admise en tant qu'il désigne le "père d'intention", père biologique de l'enfant. Il convenait donc de savoir si un Etat-partie excède-t-il la marge d'appréciation dont il dispose au regard de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ?. A cet égard, y avait-t-il lieu de distinguer selon que l'enfant avait été conçu ou non avec les gamètes de la "mère d'intention" ?. Dans l'hypothèse d'une réponse positive à l'une des deux questions précédentes, la possibilité pour la mère d'intention d'adopter l'enfant de son conjoint, père biologique, ce qui constitue un mode d'établissement de la filiation à son égard, permet-elle de respecter les exigences de l'article 8 de la Convention de sauvegard des droits de l'homme.

(Assemblée plénière, 5 octobre 2018, pourvoi n°10-19053, n BICC n°897 du 1er mars 2019 et Legifrance.)

La loi française ne permet pas de faire figurer, dans les actes de l'état civil, l'indication d'un sexe autre que masculin ou féminin. Si l'identité sexuelle d'une personne relève de la sphère protégée par l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la dualité des énonciations relatives au sexe dans les actes de l'état civil est nécessaire à l'organisation sociale et juridique, dont elle constitue un élément fondateur. La reconnaissance par le juge d'un " sexe neutre " aurait des répercussions profondes sur les règles du droit français construites à partir de la binarité des sexes et impliquerait de nombreuses modifications législatives de coordination. Une cour d'appel, qui a constaté que M. X... avait, aux yeux des tiers, l'apparence et le comportement social d'une personne de sexe masculin, conformément à l'indication portée dans son acte de naissance, a pu en déduire, sans être tenue de le suivre dans le détail de son argumentation, que l'atteinte au droit au respect de sa vie privée n'était pas disproportionnée au regard du but légitime poursuivi. (1ère Chambre civile 4 mai 2017, pourvoi n°16-17189, BICC n°870 du 1er novembre 2017 avec un commentaire du SDER et Légifrance). Consulter l'avis de l' Avocat général au JCP. 2017, éd. G. II, 696. et la note de M. Patrice Le Maigat, Gaz. Pal. 2017, n°19, p.21.

Sur le cas particulier de l'état civil des personnes qui font état de ce qu'elles auraient un sexe ne correspondant pas à celui qui est mentionné dans les registres et sur le fait de savoir si et dans quel cas, elles peuvent obtenir la modification de ces actes, consulter l'arrêt de la Première Chambre civile du 16 septembre 2020, pourvoi n°18-50080 ; 19-11251, Legifrance.

Consulter aussi les rubriques :

  • "Filiation"
  • Gestation pour autrui (GPA). < !i> a href="chose-jugee.php">Chose jugée.
  • Europe / Droit communautaire

    Textes

  • Code Civil, articles 34 et s.
  • Décret n°53-914 du 26 sept.1953 portant simplifications de formalités administratives,
  • Décret n°74-449 du 15 mai 1974 relatif au Livret de famille.
  • Instruction générale relative à l'état civil du 21 septembre 1955
  • Décret n°65-422 du 1er portant création du service central d'état civil.
  • Décret n°2000-1277 du 26 décembre 2000 portant simplification de formalités administratives et suppression de la fiche d'état civil.
  • Décret n°2003-748 du 31 juillet 2003 modifiant le Décret n°2000-1277 du 26 décembre 2000 portant simplification de formalités administratives et suppression de la fiche d'état civil.
  • Ordonnance n°1005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation et relatif au livret de famille et à la procédure en matière de filiation.
  • Décret n°2006-640 du 1er juin 2006 pris pour l'application de l'ordonnance n°2005-759 du 4 juillet 2005.
  • Décret n°2006-640 du 1er juin 2006 pris pour l'application de l'ordonnance n°2005-759 du 4 juillet 2005
  • Décret n°2008-800 du 20 août 2008 relatif à l'application du second alinéa de l'article 79-1 du Code civil. (enfants sans vie).
  • Décret n°2008-798 du 20 août 2008 modifiant le Décret n°74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille (inscription des enfants sans vie).
  • Arrêté du 28 octobre 2009 fixant les conditions de transmission électronique aux notaires, par le service central d'état civil, des données constituant les copies et extraits d'actes de l'état civil
  • Décret n°2011-167 du 10 février 2011 instituant une procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l'état civil.
  • Décret n° 2013-429 du 24 mai 2013 portant application de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe et modifiant diverses dispositions relatives à l'état civil et du code de procédure civile.
  • Arrêté du 24 mai 2013 modifiant l'arrêté du 29 juillet 2011 modifiant l'arrêté du 1er juin 2006 fixant le modèle de livret de famille.
  • Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.
  • Ordonnance n° 2019-724 du 10 juillet 2019 relative à l'expérimentation de la dématérialisation des actes de l'état civil établis par le ministère des affaires étrangères.
  • Décret n° 2020-446 du 18 avril 2020 relatif à l'établissement du certificat de décès.
  • Ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d'urgence sanitaire.
  • Décret n° 2020-732 du 15 juin 2020 relatif à la dématérialisation des justificatifs de domicile pour la délivrance des cartes nationales d'identité, passeports, permis de conduire et certificats d'immatriculation.
  • LOI n° 2021-641 du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion.
  • Loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle.
  • Bibliographie

  • Gallmeister (I.), Transsexualisme : conditions de rectification du sexe à l'état civil. Recueil Dalloz, n°8, 28 février 2013, Actualité / droit civil, p. 499, à propos de 1re Civ. - 13 février 2013.

  • Instruction générale relative à l'état civil du 21 septembre 1955., Ed. 1987. Réimpression 1988, Paris, Direction des Journaux officiels, 1988.
  • Loiseau (G.), L'établissement d'un acte d'enfant sans vie n'est plus conditionné par son niveau de développement, JCP, éd. G, 12 mars 2008, n°10045).
  • Loiseau (G.), observations sous 1ère Civ., 6 février 2008, Bull. 2008, I, n°41, La semaine juridique, éd. G. 12 mars 2008, n°11, p. 35-38. (Acte d'enfant sans vie -Établissement -).
  • Marquant (R.), L'état civil et l'état des personnes, Paris, Masson, 1977.
  • Murat (P.), observations sous 1ère Civ., 6 février 2008, Bull. 2008, I, no 41 à 43, Droit de la famille, mars 2008, no 3, p. 21-24 (Acte d'enfant sans vie -Établissement - Conditions).

  • Liste de toutes les définitions