par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. crim., 10 septembre 2003, 03-80932
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Cour de cassation, chambre criminelle
10 septembre 2003, 03-80.932

Cette décision est visée dans la définition :
Défaisance




AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL et les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA SOCIETE AU SERVICE DU DEVELOPPEMENT (SSD), partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 4 novembre 2002, qui a confirmé l'ordonnance portant refus d'informer sur sa plainte avec constitution de partie civile contre personne non dénommée du chef d'escroquerie ;

Vu le mémoire produit ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 1°, du Code de procédure pénale ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 199 et 591 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que les mentions contradictoires de l'arrêt attaqué qui ne permettent pas de connaître la date à laquelle il a été prononcé, laissent incertain le point de savoir s'il a bien été rendu en chambre du conseil ;

"alors qu'aux termes de l'article 199, alinéa 1er, du Code de procédure pénale les arrêts rendus par la chambre de l'instruction doivent être rendus en chambre du conseil ; qu'en l'espèce où l'arrêt mentionne en tête de ses énonciations qu'il a été prononcé en chambre du conseil le 30 septembre 2002 date des débats mais où par ailleurs, figure la date du 4 novembre 2002 à côté des signatures du Greffier et du Président portées à la fin de cette décision, rien ne permet de savoir dans quelles conditions ledit arrêt a été prononcé" ;

Attendu que le moyen qui se fonde sur des mentions de l'arrêt qui ont, par arrêt du 27 janvier 2003, fait l'objet d'une rectification d'erreur matérielle, est inopérant ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-6 et 313-1 du Code pénal, 6, 8, 86, 190 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance d'irrecevabilité de la constitution de partie civile entreprise ;

"aux motifs propres à la Cour qu'il résulte de l'ordonnance de non-lieu rendue dans la précédente information, que la société EIA a été créée en 1994 pour servir de structure de défaisance au Comptoir des Entrepreneurs, qu'elle a donc dû obtenir l'agrément comme établissement de crédit ; qu'après examen de sa demande par le Comité des établissements de crédit, il lui a accordé l'agrément le 20 janvier 1994 ce qui a permis à la société EIA d'acquérir non seulement un certain nombre d'actifs à caractère immobilier du Comptoir des Entrepreneurs et, des créances échues dont celles sur la SSD ;

que, dès lors, la société EIA ne peut être une entreprise fictive ;

que les indications de la plainte, notamment quant au capital social de la société EIA et à ses actionnaires, ne font que confirmer les éléments recueillis au cours de la précédente information ; qu'en aucun cas, une entreprise ne saurait être considérée comme fictive aux seuls motifs que son siège social serait installé dans les mêmes locaux que ceux d'autres sociétés du même groupe et qu'ayant recours à des prestataires de services, elle n'aurait pas de salarié ;

que les faits dénoncés dans la présente plainte, à savoir l'absence de qualité de la société EIA à poursuivre en justice le recouvrement de prêts dont la réalité n'est pas contestée, sont identiques à ceux, objet de la précédente information, ayant abouti à une ordonnance de non-lieu ; que c'est donc à juste titre que, en application de l'article 190 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction a refusé d'informer sur cette nouvelle plainte portant sur les mêmes faits et visant la même personne ;

qu'au surplus les faits dénoncés par la plainte, n'apparaissent pas susceptibles d'une qualification pénale puisque la fausse entreprise n'est punissable qu'autant qu'elle constitue une manoeuvre frauduleuse déterminant la remise des fonds ;

qu'en l'espèce la société SSD qui ne conteste pas la réalité des prêts dont le remboursement est sollicité, qui ne prétend ni que ce remboursement lui serait également réclamé par une autre entité juridique ni que la société SSD aurait présenté des faux de nature à tromper la juridiction commerciale, se borne à soutenir que la société EIA serait une société fictive pour lui contester sa qualité à agir en justice ;

qu'il s'agit en réalité d'une fin de non-recevoir qu'il lui incombait de soulever devant la juridiction commerciale et que seule cette juridiction a pour mission d'apprécier ;

qu'en conséquence l'ordonnance entreprise qui a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la société SSD et donc refusé d'informer, doit être confirmée ;

"et au motif adopté du magistrat instructeur que M. X... tente par un nouvel artifice juridique de dénoncer des faits sur lesquels il a déjà été statué par une ordonnance de non-lieu, cette ordonnance ayant non seulement déclaré non fondée l'argumentation de la partie civile, les faits invoqués n'ayant pas de caractère pénal, mais considéré que toute action pénale était en tout état de cause largement prescrite, la cession litigieuse de créance remontant au 20 janvier 1994 ;

"alors que, d'une part, la partie civile ayant dans son mémoire d'appel, expliqué que la société EIA était une entreprise partiellement fausse constituant de ce fait une manoeuvre frauduleuse parce qu'elle ne disposait pas d'un siège social distinct de celui d'autres entités, n'avait aucun effectif propre, que son activité était gérée par une autre entité et ne disposait d'aucun moyen propre puisqu'elle était entièrement financée par une autre structure, la chambre de l'instruction qui, sans qu'aucune investigation n'ait été ordonnée pour vérifier la réalité de ces allégations, a cru pouvoir invoquer exclusivement l'agrément à cette société par le Comité des Etablissements de Crédit pour en déduire que celle-ci ne pouvait être une entreprise fictive, a violé les articles 86 du Code de procédure pénale et 313-1 du Code pénal en invoquant un tel élément tiré d'une procédure antérieure à la plainte pour refuser ainsi d'informer sur la plainte ;

"alors que, d'autre part, la partie civile ayant longuement expliqué dans son mémoire d'appel que sa première plainte pour obtention indue du statut d'établissement de crédit reposait sur des faits distincts de ceux qu'elle invoquait à l'appui de sa plainte pour escroquerie, la chambre de l'instruction qui ne s'est pas expliquée sur la nature des faits visés dans ces deux plaintes, n'a pas justifié sa décision de refus d'informer au regard des dispositions de l'article 190 du Code de procédure pénale qu'elle a cru néanmoins pouvoir invoquer ;

"alors qu'en outre l'entreprise partiellement fictive qui fait usage de sa qualité de cessionnaire d'une créance pour réclamer le remboursement de sa créance se rend coupable d'une escroquerie au préjudice du débiteur même si la réalité de la dette n'est pas contestée en sorte que la chambre de l'instruction a violé l'article 313-1 du Code pénal en prétendant, pour refuser d'informer sur de tels faits, que ceux-ci n'apparaissent pas susceptibles d'une qualification pénale ;

"alors que, de plus, la partie civile ayant dans son mémoire d'appel, expliqué que l'article 5 du Code de procédure pénale était inapplicable en l'espèce, la chambre de l'instruction, qui n'a pas prétendu que la partie civile avait saisi la juridiction civile d'une exception tirée du défaut de qualité à agir de la société EIA avant de porter plainte pour escroquerie, a violé le texte précité en refusant d'informer sous prétexte que les faits sur lesquels repose la plainte constitueraient en réalité une fin de non-recevoir qu'il incombait à la partie civile de soulever devant la juridiction commerciale ;

"alors qu'enfin en confirmant l'ordonnance de refus d'informer sans rechercher si, comme le soutenait la partie civile, la société EIA existant toujours et ayant toujours un litige pendant avec elle, la prescription ne pouvait être opposée à son action, la chambre de l'instruction a une nouvelle fois entaché sa décision d'un défaut de motifs par omission de réponse à une articulation essentielle du mémoire de la société SSD" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction portant refus d'informer sur les faits dénoncés par la partie civile, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a retenu, à bon droit, qu'ils ne pouvaient admettre aucune qualification pénale ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.