par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. plen., 9 mai 2008, 05-87379
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Cour de cassation, assemblée plénière
9 mai 2008, 05-87.379

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Fonds d'indemnisation des victimes de l'Amiante
Réparation




LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1° / M. Jacques X...,

2° / M. Lionel X...,

contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2005 par la cour d'appel de Paris (12e chambre des appels correctionnels, section A), dans le litige l'opposant à Mme Ana Y..., domiciliée ..., 93700 Drancy, (aide juridictionnelle totale, admission du Bureau du 16 mai 2006),

défenderesse à la cassation ;


Les consorts X... se sont pourvus en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 28 novembre 2003 (12e chambre des appels correctionnels, section A) ;

Cet arrêt a été cassé le 16 novembre 2004 par la chambre criminelle de la Cour de cassation ;

La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, qui, saisie de la même affaire, a statué par arrêt du 26 octobre 2005, dans le même sens que l'arrêt du 28 novembre 2003 par des motifs qui sont en opposition avec la doctrine de l'arrêt de cassation ;

Un pourvoi ayant été formé contre l'arrêt du 26 octobre 2005, la chambre criminelle a, par arrêt du 20 novembre 2007, décidé le renvoi de l'affaire devant l'assemblée plénière ;

Les demandeurs invoquent devant l'assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat des consorts X... ;

Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de cassation par Me Rouvière, avocat de Mme Y... ;

Le rapport écrit de M. Terrier, conseiller, et l'avis écrit de M. Boccon-Gibod, avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;

Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 11 avril 2008, où étaient présents : M. Lamanda, premier président, M. Weber, Mmes Favre, Collomp, MM. Bargue, Gillet, présidents, M. Joly, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Terrier, conseiller rapporteur, M. Peyrat, Mmes Mazars, Garnier, MM. Pluyette, Le Gall, Farge, Mme Duvernier, MM. Bailly, Laurans, Potocki, Mme Kamara, conseillers, M. Boccon-Gibod, avocat général, Mme Tardi, directeur de greffe ;

Sur le rapport de M. Terrier, conseiller, assisté de M. Roublot, auditeur au service de documentation et d'études, les observations de la SCP Ancel et Couturier-Heller, de Me Rouvière, l'avis de M. Boccon-Gibod, avocat général, auquel les parties invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 2 et 3 du code de procédure pénale, ensemble l'article 731 du code civil ;

Attendu que toute personne victime d'un dommage, quelle qu'en soit la nature, a droit d'en obtenir réparation de celui qui l'a causé par sa faute ; que le droit à réparation du préjudice éprouvé par la victime avant son décès, étant né dans son patrimoine, se transmet à ses héritiers ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation, que MM. Jacques et Lionel X..., parties civiles, demandaient devant la cour d'appel saisie des seuls intérêts civils, en leur qualité d'héritiers de Antoine X..., la réparation des préjudices matériels et moraux causés par les faits de falsifications de chèques et usage dont leur auteur avait été victime ;

Attendu que pour déclarer cette demande irrecevable, après avoir dit constitués à la charge de Mme Ana Y..., renvoyée devant le tribunal correctionnel par ordonnance du juge d'instruction du 17 juin 2002, les éléments des infractions de falsifications de chèques et usage, l'arrêt retient que MM. Jacques et Lionel X... ne peuvent être considérés comme victimes directes de ces faits, alors même que leur auteur, bien qu'il en fût informé, n'avait jamais déposé plainte ni même manifesté l'intention de le faire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le droit à réparation des préjudices subis par Antoine X..., né dans son patrimoine, avait été transmis à ses héritiers qui étaient recevables à l'exercer devant la cour d'appel saisie des seuls intérêts civils, peu important que leur auteur n'ait pas introduit d'action à cette fin avant son décès, dès lors que le ministère public avait mis en mouvement l'action publique et que la victime n'avait pas renoncé à l'action civile, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré MM. Jacques et Lionel X... irrecevables en leur demande de réparation des préjudices subis par leur auteur, Antoine X..., par suite des faits de falsifications de chèques et d'usage, l'arrêt rendu le 26 octobre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;


Vu l'article 618-1 du code de procédure pénale, rejette la demande de MM. Jacques et Lionel X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, et prononcé par le premier président en son audience publique du neuf mai deux mille huit.

Moyen produit par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils, pour les consorts X....

Moyen annexé au présent arrêt


MOYEN UNIQUE DE CASSATION


VIOLATION des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble de l'article 731 du Code civil ;

EN CE QUE l'arrêt attaqué, après avoir dit que les infractions de falsification de chèques et usage commises au préjudice de M. Antoine X... avant son décès étaient constituées à l'encontre de Mme Y..., a déclaré MM. Jacques et Lionel X..., agissant en qualité d'héritiers, irrecevables en leur constitution de partie civile ;

AUX MOTIFS QUE « aux termes de l'article 2 du Code de procédure pénale, l'action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert de l'infraction ;

Qu'elle est recevable, en application de l'article 3 du même Code, pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux qui découleront des faits objet de la poursuite ;

Que Jacques et Lionel X... ne peuvent dès lors en leur seule qualité d'héritiers d'Antoine X... être considérés comme victimes directes des agissements délictueux constatés, alors même qu'au vu des éléments du dossier, il est constant qu'Antoine X..., bien qu'informé des faits, n'a jamais porté plainte contre Ana Y... ni même manifesté l'intention de le faire » ;

ALORS QUE le droit à réparation du préjudice éprouvé par la victime avant son décès étant né dans son patrimoine se transmet à ses héritiers ;

D'où il résulte que statuant sur renvoi après cassation sur la seule action civile, la Cour d'appel qui constatait que MM. X... agissaient en qualité d'héritiers de leur père décédé pour obtenir l'indemnisation du préjudice éprouvé par celui-ci avant son décès ne pouvait déclarer leur constitution de partie civile irrecevable.



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Fonds d'indemnisation des victimes de l'Amiante
Réparation


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