par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 24 septembre 2009, 08-16097
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
24 septembre 2009, 08-16.097

Cette décision est visée dans la définition :
Responsabilité civile




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu que Mme X..., qui avait été vaccinée contre l'hépatite B les 24 avril, 30 mai et 17 juillet 1992 et avait subi un rappel de vaccination le 27 septembre 1993 avec le vaccin Genhevac B fabriqué par la société Aventis Pasteur MSD, a présenté, en mars 1994, des symptômes qui ont abouti au diagnostic de la sclérose en plaques ; qu'elle a assigné, après expertise judiciaire, la société Aventis Pasteur MSD pour obtenir réparation de son préjudice ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnisation, alors, selon le moyen :

1°/ que la présentation du produit de santé doit mentionner les risques inhérents à celui ci ; qu'est défectueux le produit qui ne satisfait pas à cette exigence ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si la présentation du vaccin Genhevac B n'aurait pas dû mentionner l'existence du risque de survenue de sclérose en plaques, quand l'édition 1994 du dictionnaire Vidal signalait cet effet secondaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil interprété à la lumière de la directive n° 85 374 du 25 juillet 1985 ;

2°/ que l'existence du lien de causalité entre le défaut d'un produit et le dommage peut être établie au moyen de présomptions précises, graves et concordantes conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si l'absence chez Mme X... de tout antécédent personnel ou familial de cette pathologie ne constituait pas une présomption grave et concordante du lien de causalité entre le défaut du vaccin et le dommage subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 et 1382 du code civil ;

3°/ qu'après avoir relevé que Mme X... ne présentait aucun antécédent personnel ou familial en relation avec la sclérose en plaques, qu'elle n'avait effectué aucun voyage à l'étranger l'exposant au risque de contracter cette maladie, qu'elle était en bonne santé avant les injections et que la maladie n'avait été diagnostiquée que quelques mois après la vaccination, la cour d'appel qui a débouté Mme X... de sa demande au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve d'un lien causal entre le vaccin anti hépatite B et la sclérose en plaques diagnostiquée n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1382 du code civil interprété à la lumière de la directive n° 85 374 du 25 juillet 1985 ;

4°/ que l'existence du lien de causalité entre le défaut d'un produit et le dommage peut être établie au moyen de présomptions précises, graves et concordantes conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil ; en s'étant bornée à retenir que, prises isolément les unes des autres, ni la proximité temporelle entre la vaccination et le dommage, ni le bon état de santé de la victime avant les injections, ni les mentions du dictionnaire médical Vidal, ni la modification par le laboratoire de la notice du produit ne constituaient de telles présomptions, sans avoir recherché si ces circonstances réunies ne caractérisaient pas des présomptions graves et précises et concordantes du lien de causalité entre le défaut du vaccin et le dommage subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 et 1382 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a souverainement retenu que les données scientifiques et les présomptions invoquées ne constituaient pas la preuve d'un lien de causalité entre la vaccination et l'apparition de la maladie, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils, pour Mme X....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame X... de sa demande d'indemnisation des préjudices liés aux injections du vaccin contre l'hépatite B produit par la société Laboratoire Pasteur Meyrieux MSD, aux droits de laquelle se trouve désormais la société Sanofi Pasteur MSD ;

Aux motifs que Madame X..., qui ne présentait aucun antécédent personnel ou familial en relation avec la sclérose en plaques, n'a pas effectué de séjour à l'étranger l'exposant au risque de contracter cette maladie ; que les vaccinations du produit Genhevac B ont été effectuées les 24 avril, 30 mai et 17 juillet 1992, avec un rappel en octobre 1993 ; que les 5 et 23 novembre 1993, Madame X... a fait deux chutes, à l'occasion desquelles elle a signalé un épisode de fourmillement ; que le 30 mars 1994, elle a été victime d'une nouvelle chute suivie de douleurs diffuses sur l'ensemble du corps ; que la sclérose en plaques a été diagnostiquée au mois d'avril 1994 ; que les conclusions de l'expert, qui excluent l'existence d'un lien de causalité certain et direct entre la vaccination et la maladie, ne sont pas contredites par les documents postérieurs produits par Madame X... ; que les données scientifiques ne peuvent fournir à Madame X... la preuve qui lui incombe ; que la preuve par présomption ne peut davantage venir au soutien des demandes et prétentions de Madame X... ; qu'une telle présomption ne peut être tirée de ce qu'il est admis par l'expert judiciaire et les spécialistes de la matière que la possibilité d'un lien entre vaccination et maladie ne peut être radicalement éliminée, la preuve à fournir par le patient étant celle d'un lien causal certain et direct ; que la simple proximité temporelle entre la vaccination et le dommage, de même que le bon état de santé de la victime avant les injections, ne peuvent non plus se voir reconnaître le caractère d'une présomption grave, précise et concordante ; qu'une présomption conforme aux dispositions légales ne peut non plus être trouvée à partir des mentions figurant dans le dictionnaire Vidal, ni dans le fait que le laboratoire concerné ait modifié la notice accompagnant son produit pour faire apparaître qu'un risque faible de développer la sclérose en plaques ne peut être totalement éliminée chez certaines populations particulières, étant remarqué que en l'espèce il n'est pas allégué ni prouvé que Madame X... faisait partie d'une telle population à risques ; que la preuve d'une aptitude même faible du produit à engendrer le dommage n'étant pas rapportée, tant de façon générale que dans le cadre de ce litige, l'existence d'un défaut du produit ne peut dès lors être recherchée, ce défaut ne pouvait être déduit ou présumé à partir d'un seul dommage effectivement souffert par la victime ; que les critères énoncés par les dispositions concordantes du droit communautaire et du droit national pour voir qualifier un produit de défectueux – lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre compte tenu de toutes les circonstances, notamment de sa présentation, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation – n'impliquent pas qu'une telle qualification puisse être apportée à un produit du seul fait de la proximité de date entre l'apparition de la maladie et l'injection du vaccin ; que par suite l'obligation de sécurité de résultat existant à la charge du fabricant est regardée comme ne comportant pas une garantie de plein droit de tous les dommages pouvant résulter pour l'utilisateur de l'usage des produits concernés ;

Alors que 1°) la présentation du produit de santé doit mentionner les risques inhérents à celui-ci ; qu'est défectueux le produit qui ne satisfait pas à cette exigence ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si la présentation du vaccin Genhevac B n'aurait pas dû mentionner l'existence du risque de survenue de sclérose en plaques, quand l'édition 1994 du dictionnaire Vidal signalait cet effet secondaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil interprété à la lumière de la directive n° 85-374 du 25 juillet 1985 ;

Alors que 2°) l'existence du lien de causalité entre le défaut d'un produit et le dommage peut être établie au moyen de présomptions précises, graves et concordantes conformément aux dispositions de l'article 1353 du Code civil ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si l'absence chez Madame X... de tout antécédent personnel ou familial de cette pathologie ne constituait pas une présomption grave et concordante du lien de causalité entre le défaut du vaccin et le dommage subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 et 1382 du Code civil ;

Alors que 3°) après avoir relevé que Madame X... ne présentait aucun antécédent personnel ou familial en relation avec la sclérose en plaques, qu'elle n'avait effectué aucun voyage à l'étranger l'exposant au risque de contracter cette maladie, qu'elle était en bonne santé avant les injections et que la maladie n'avait été diagnostiquée que quelques mois après la vaccination, la cour d'appel qui a débouté Madame X... de sa demande au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve d'un lien causal entre le vaccin anti hépatite B et la sclérose en plaques diagnostiquée n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1382 du Code civil interprété à la lumière de la directive n° 85 374 du 25 juillet 1985 ;

Alors que 4°) l'existence du lien de causalité entre le défaut d'un produit et le dommage peut être établie au moyen de présomptions précises, graves et concordantes conformément aux dispositions de l'article 1353 du Code civil ; qu'en s'étant bornée à retenir que, prises isolément les unes des autres, ni la proximité temporelle entre la vaccination et le dommage, ni le bon état de santé de la victime avant les injections, ni les mentions du dictionnaire médical Vidal, ni la modification par le laboratoire de la notice du produit ne constituaient de telles présomptions, sans avoir recherché si ces circonstances réunies ne caractérisaient pas des présomptions graves et précises et concordantes du lien de causalité entre le défaut du vaccin et le dommage subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 et 1382 du Code civil.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.