par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 28 octobre 2009, 08-43251
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Cour de cassation, chambre sociale
28 octobre 2009, 08-43.251

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1231-1, L. 1232-2, ensemble les articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., embauchée en qualité de secrétaire depuis le 2 mai 1963 par la société Damade, a été en arrêt de travail pour maladie du 26 août 2002 au 11 juin 2005 ; qu'ayant demandé à l'employeur, le 16 septembre 2005, d'organiser une visite de reprise, celui ci lui a répondu qu'il organiserait une visite de reprise dès qu'elle aurait repris le travail ; que Mme X... a saisi la juridiction prud'homale pour demander que la rupture du contrat de travail soit prononcée aux torts de l'employeur et que la société soit condamnée à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaire, d'indemnités de rupture et de dommages intérêts ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de la salariée, l'arrêt énonce que seul l'examen pratiqué par le médecin du travail dont doit bénéficier le salarié à l'issue des périodes de suspension lors de la reprise du travail en application des alinéas 1 à 3 de l'article R. 241-51 du code du travail, met fin à la période de suspension du contrat de travail, que tant que la reprise effective du travail n'a pas eu lieu et que la visite de reprise n'a pas été effectuée au plus tard dans le délai de huit jours après la reprise du travail, le contrat de travail demeure suspendu, que Mme X... ayant informé son employeur de son intention de reprendre un poste de travail et ce dernier l'ayant assurée de l'organisation de la visite de reprise, conformément à sa demande légitime, dès la reprise effective du travail, seule l'absence de reprise du travail imputable à la salariée, et conditionnant l'organisation de la visite obligatoire, n'a pas permis de mettre fin à la suspension du contrat de travail ; que dès lors Mme X... doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail ;

Attendu, cependant, que selon les dispositions de l'article R. 4624-21 du code du travail, le salarié bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail après certaines absences pour raisons médicales ; que le classement d'un salarié en invalidité 2e catégorie par la sécurité sociale ne dispense pas de cette obligation ; qu'il en résulte que si, en cas de carence de l'employeur, le salarié peut solliciter lui-même la visite de reprise à condition d'en aviser au préalable l'employeur, l'initiative de la saisine du médecin du travail appartient normalement à l'employeur dès que le salarié qui remplit les conditions pour en bénéficier en fait la demande et se tient à sa disposition pour qu'il y soit procédé ; que le refus de l'employeur s'analyse en un licenciement ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait constaté que la salariée qui n'était plus couverte par des arrêts de travail depuis le 11 juin 2005 avait écrit à l'employeur, le 16 septembre 2005 pour lui demander d'organiser une visite de reprise et de lui attribuer un poste compatible avec son invalidité, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne la société Damade aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Damade à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt ;

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour Mme X... ;

Il est fait grief à la Cour d'appel d'AMIENS d'avoir débouté Madame X... de ses demandes tendant à faire constater la rupture du contrat de travail aux torts de la société DAMADE et à condamner celle-ci à lui payer diverses sommes à titre un rappel de salaires plus les congés payés y afférents, une indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par la convention de la métallurgie, des dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse et pour non respect de la procédure de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE le 2 mai 1963 Madame X... était embauchée en qualité de secrétaire par la société DAMADE ; que Madame Nicole X... devait connaître des problèmes de santé et se trouver en arrêt de travail du 26 août 2002 au 11 juin 2005 ; que le 14 juin 2005, elle informait son employeur de l'attribution d'une pension d'invalidité deuxième catégorie à compter du 1er mai 2005 ; que suite au refus de son employeur de la licencier au vu du seul avis d'admission au bénéfice d'une pension d'invalidité, Madame X... demandait à son employeur par lettre recommandée du 16 septembre 2005, d'organiser une visite de reprise auprès de l'AUMVT ; que par courrier du 22 septembre 2005, la société DAMADE répondait que le contrat de travail était suspendu et la salariée n'exprimait pas clairement son souhait d'être réinsérée dans l'entreprise, la visite de reprise ne pouvait être organisée ; que dans ce contexte, la salariée prenait l'initiative de se faire examiner par la médecine du travail le 3 octobre 2005 ; que celle-ci consignait avoir vu la salariée mais n'émettait aucun avis d'aptitude ; que par lettre recommandée du 4 octobre 2005, Madame X... demandait à son employeur de lui attribuer un poste compatible avec son invalidité ; que l'employeur lui proposait alors de reprendre effectivement son travail préalablement à l'organisation de la visite de reprise auprès de la médecine du travail lui rappelant par lettre du 20 octobre les dispositions de l'article R 241-51 du Code du travail ; que lorsqu'une modification de l'aptitude au travail est prévisible, il est loisible au salarié notamment, de solliciter un examen préalablement à la reprise du travail en vue de faciliter la recherche des mesures nécessaires , que cet examen constitue alors une visite de pré-reprise , que cette visite ne peut être considérée comme une visite de reprise que si elle conduit le médecin du travail à rendre un avis d'aptitude ; qu'au vu de l'avis rendu lors de la visite du 3 octobre 2005 effectuée à l'initiative de Madame X... cet examen ne constitue pas la visite de reprise exigée par l'article R 241-51 susvisée ; que seul l'examen pratiqué par le médecin du travail dont doit bénéficier le salarié à l'issue des périodes de suspension lors de la reprise du travail en application des al. 1 à 3 de l'article R 241-51 du Code du travail met fin à la période de suspension du contrat de travail ; que tant que la reprise effective du travail n'a pas eu lieu et que la visite de reprise n'a pas été effectuée, au plus tard dans le délai de huit jours après la reprise du travail, le contrat de travail demeure suspendu ; que Madame X... ayant informé son employeur de son intention de reprendre un poste de travail et ce dernier l'ayant assurée de l'organisation de la visite de reprise, conformément à sa demande légitime, dès la reprise effective du travail, seule l'absence de reprise du travail imputable à la salariée et conditionnant l'organisation de la visite obligatoire, n'a pas permis de mettre fin à la suspension du contrat de travail ;

1/ ALORS QUE le refus de l'employeur de faire procéder à une visite de reprise du travail d'un salarié qui remplit les conditions pour en bénéficier et en fait la demande, s'analyse en un licenciement ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la visite de reprise était obligatoire, que la salariée avait demandé à l'employeur par lettre recommandée de l'organiser, que l'employeur savait depuis plusieurs mois que la salariée remplissait les conditions pour en bénéficier mais qu' il avait exigé la reprise effective du travail avant d'organiser la visite de reprise ; qu'en cet état, la Cour d'appel devait retenir le licenciement ; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ensemble l'article R 4624-22 du même Code.

2/ ET ALORS QUE la reprise du travail ne peut conditionner l'organisation de la visite de reprise du travail lorsque celle-ci présente un caractère obligatoire ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la visite de reprise était obligatoire, que la salariée avait demandé à l'employeur par lettre recommandée de l'organiser, que l'employeur savait depuis plusieurs mois que la salariée remplissait les conditions pour en bénéficier mais qu' il avait exigé la reprise effective du travail avant d'organiser la visite de reprise ; qu'en érigeant, elle-même, la reprise effective du travail en condition de l'organisation de la visite de reprise, la Cour d'appel a violé l'article R 4624-22 du Code du travail.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.