par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 14 avril 2010, 09-60426
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Cour de cassation, chambre sociale
14 avril 2010, 09-60.426

Cette décision est visée dans la définition :
Syndicat




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Vu leur connexité, joint les pourvois n°s S 09-60.426 et V 09-60.429 ;

Donne acte à la Confédération française des travailleurs chrétiens CFTC de son intervention volontaire ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que par lettre du 7 septembre 2009, l'union départementale CGT-Force ouvrière du Finistère a notifié à la société SDMO Industries la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise ;

Sur le premier moyen du pourvoi de l'employeur et le moyen unique du pourvoi de l'Union départementale CFDT du Finistère :

Vu les articles 4 de la Convention n° 98 de l'organisation internationale du travail (OIT), 5 de la Convention n° 135 de l'OIT, 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 5 et 6 de la Charte sociale européenne, 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et L. 2122-1, L. 2122-2 du code du travail ;

Attendu que pour débouter l'employeur et l'Union départementale CFDT de leurs demandes en annulation de la désignation du salarié en qualité de délégué syndical, le tribunal retient que l'article L. 2143-3 du code du travail qui réserve le droit de désigner un délégué syndical aux syndicats intercatégoriels ayant obtenu au moins 10 % des voix sur l'ensemble des collèges lors des dernières élections du comité d'entreprise est contraire aux normes européennes et internationales susvisées, d'abord, en ce qu'il interdit aux syndicats qui n'ont pas obtenu un tel score lors des dernières élections de participer aux négociations dans l'entreprise, les privant ainsi d'un élément essentiel du droit syndical, ensuite, en ce qu'il affaiblit les représentants syndicaux au profit des représentants élus, enfin, en ce qu'il constitue une inégalité de traitement par rapport aux syndicats catégoriels qui ne doivent obtenir un tel pourcentage de voix que dans le seul collège visé par leurs statuts ; que le tribunal retient également que l'article L. 2143-3 du code du travail faisant obligation de choisir le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix est contraire au principe de la liberté syndicale et constitue une ingérence dans le fonctionnement syndical ;

Attendu cependant, d'abord, que si le droit de mener des négociations collectives est, en principe, devenu l'un des éléments essentiels du droit de fonder des syndicats et de s'affilier à des syndicats, pour la défense de ses intérêts, énoncé à l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les Etats demeurent libres de réserver ce droit aux syndicats représentatifs, ce que ne prohibent ni les articles 5 et 6 de la Charte sociale européenne ni l'article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni les conventions n° 98 et 135 de l'OIT ; que le fait pour les salariés, à l'occasion des élections professionnelles, de participer à la détermination des syndicats aptes à les représenter dans les négociations collectives n'a pas pour effet d'affaiblir les représentants syndicaux au profit des représentants élus, chacun conservant les attributions qui lui sont propres ;

Attendu, ensuite, que l'obligation faite aux syndicats représentatifs de choisir, en priorité, le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix ne heurte aucune prérogative inhérente à la liberté syndicale et que, tendant à assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l'entreprise et à conduire les négociations pour leur compte, elle ne constitue pas une ingérence arbitraire dans le fonctionnement syndical ;

Qu'en statuant comme il a fait, le tribunal a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen du pourvoi de l'employeur :

Vu l'article L. 2324-2 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que dans les entreprises employant au moins trois cents salariés, chaque organisation syndicale peut nommer un représentant au comité d'entreprise sous la seule condition d'avoir des élus dans cette institution ;

Attendu que le jugement déboute l'employeur et l'Union départementale CFDT du Finistère de leurs demandes tendant à l'annulation de la désignation de M. X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que la société SDMO Industrie employait au moins trois cents salariés et alors qu'il n'était pas contesté que le syndicat ayant procédé à la désignation de M. X... n'avait pas d'élus au comité d'entreprise, le tribunal a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile :

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs formulés par le premier moyen du pourvoi de l'employeur et le moyen unique du pourvoi de l'Union départementale CFDT du Finistère :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société SDMO Industries et l'Union départementale CFDT du Finistère des désignations de M. X... en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise notifiées par l'Union départementale CGT-Force ouvrière du Finistère le 7 septembre 2009 ; le jugement rendu le 27 octobre 2009, entre les parties, par le tribunal d'instance de Brest ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi des chefs de la cassation ;

Annule les désignations de M. X... en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise de la société SDMO Industrie notifiées par l'Union départementale CGT-Force-ouvrière du Finistère le 7 septembre 2009 ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi n° S 09-60.426 par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société SDMO Industries.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR déclaré « contraire au droit communautaire » les articles L.2324-2, L.2122-1, L.2143-3 et L.2143-
22 du Code du travail issus de la loi du 20 août 2008 et d'avoir en conséquence validé la désignation par le Syndicat FORCE OUVRIERE de Monsieur X... en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au Comité d'Entreprise ;

AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE «l'article 11 de la Convention de Sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, consacrant la liberté syndicale, interdit toute restriction à ce droit autre que celles nécessaires à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui» ; (p.6, al.3) (…) ; « et que de façon générale, la Cour Européenne retient sa compétence pour interpréter et appliquer les dispositions de la convention des droits de l'Homme d'une manière qui en rende les garanties concrètes et effectives ; A cette fin, elle prend en considération les principes établis par les textes de portée universelle (textes de droit international, interprétations qui en sont faites par les organes compétents, règles et principes acceptés par une grande majorité des états) ; qu'elle rappelle ainsi que l'article 11 de la convention a pour objectif essentiel de protéger l'individu contre les ingérences arbitraires dans l'exercice des droits consacrés par la convention, les états ayant l'obligation d'assurer la jouissance effective de ces droits ; il en est ainsi en ce qui concerne la liberté de défendre les intérêts professionnels des adhérents d'un syndicat par l'action collective» (p.6, al. 5 et 6) (…) ; «que l'obligation de recueillir au moins 10% les suffrages exprimés, tous collèges confondus, au premier tour des élections sur comité d'entreprise pour être considérée comme organisation représentative dans l'entreprise, alors qu'auparavant les organisations syndicales représentatives au plan national, bénéficiaient d'une présomption irréfragable a pour effet : (…) d'empêcher FO de participer à toute négociation au sein de l'entreprise, élément essentiel à l'exercice du droit syndical, qui n'est pas compensé par la possibilité de désigner un représentant syndical puisque ce dernier ne possède pas une telle compétence, alors qu'il s'agit d'une organisation syndicale représentative au niveau national, qu'elle représente 12 % des suffrages exprimés en ce qui concerne le premier collège et que cette restriction n'est pas nécessaire ; d'inciter, en conséquence, les électeurs à se détourner d'un syndicat dépourvu de tout pouvoir, d'empêcher tout syndicat de s'implanter dans une entreprise où il n'intervenait pas précédemment, en favorisant ainsi les situations acquises voire les monopoles ; - de réduire progressivement le nombre des organisations syndicales contrairement aux dispositions internationales susvisées qui tendent au contraire à favoriser la liberté d'expression, ce qui risque également d'avoir pour effet de détourner les salariés de toute adhésion à un quelconque syndicat alors qu'il est notoire que le taux de syndicalisation en France est très faible, qu'une forte syndicalisation est nécessaire à la défense des droits individuels des salariés dans un contexte de mondialisation et de crise économique, mais aussi que la culture de la négociation et du dialogue, imposée par la législation communautaire, est nécessaire au bon développement de l'économie» (p.7, al. 3, 4, 5 et 6)» ;

ALORS QUE la représentativité est inhérente à la fonction même du syndicat de représenter les travailleurs et que l'article 11 de la CEDH, tel qu'interprété par la Cour Européenne, s'il pose le principe que le droit de mener des négociations collectives avec l'employeur est, devenu l'un des éléments essentiels du « droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts », n'en laisse pas moins les Etats libres d'organiser leur système de manière à reconnaître, le cas échéant, un statut spécial aux syndicats représentatifs ; qu'en fixant un seuil de représentativité correspondant à 10% des suffrages exprimés, la loi du 20 août 2008 n'est nullement contraire à l'article 11 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme de sorte qu'en statuant comme il l'a fait, le Tribunal d'Instance de BREST a violé le texte susvisé et par refus d'application les articles L.2122-1, L.2143-3, L.2143-22 et L.2324-2 du Code du Travail ;

ALORS QUE la loi nouvelle, en instituant un représentant de section syndicale pour les organisations syndicales qui n'ont pas atteint le seuil de représentativité, loin d'empêcher l'implantation des syndicats dans les entreprises ou de réduire progressivement leur nombre, permet à tout syndicat de promouvoir son action afin de faire la preuve de sa représentativité à l'issue des élections suivantes ; qu'en décidant au contraire que les principes communautaires impliqueraient un pluralisme total permettant à tout syndicat légalement constitué de bénéficier des mêmes avantages que les organisations répondant à la condition de seuil, le juge d'instance a privé sa décision de toute base légale par rapport tant à l'article 11 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et 6 de la Charte Sociale Européenne, qu'à l'article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, lesquels n'instituent nullement le principe d'une égalité de traitement entre tous les syndicats ;

AUX MOTIFS, D'AUTRE PART, QUE «la CEDH n'accepte pas les restrictions non nécessaires qui affectent les éléments essentiels de la liberté syndicale sans lesquels le contenu de cette liberté serait vidé de son sens, à savoir (…) – le droit de négociation collective énoncé par la convention n°98 de l'Organisation internationale du travail, par l'article 6 de la Charte Sociale Européenne (qui reconnaît à tout travailleur comme à tout syndicat le droit de mener des négociations collectives faisant ainsi peser sur les pouvoirs publics, l'obligation correspondante de promouvoir une culture de dialogue et de la négociation dans l'économie), par l'article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne (p. 6, dernier alinéa (…) ; que l'obligation de recueillir au moins 10% les suffrages exprimés, tous collèges confondus, au premier tour des élections sur comité d'entreprise pour être considérée comme organisation représentative dans l'entreprise, alors qu'auparavant les organisations syndicales représentatives au plan national, bénéficiaient d'une présomption irréfragable a pour effet : - d'empêcher FO de participer à toute négociation au sein de l'entreprise, élément essentiel à l'exercice du droit syndical, qui n'est pas compensé par la possibilité de désigner un représentant syndical puisque ce dernier ne possède pas une telle compétence, alors qu'il s'agit d'une organisation syndicale représentative au niveau national, qu'elle représente 10% des suffrages exprimés en ce qui concerne le premier collège et que cette restriction n'est pas nécessaire (p.7, al. 3 et 4)» ;

ALORS QUE ni la Convention n° 98 de l'Organisation Internationale du Travail, ni l'article 6 de la Charte Sociale Européenne, ni l'article 28 de la Charte des Droits Fondamentaux de l'Union Européenne ne dispensent les organisations syndicales d'être représentatives pour participer à une négociation collective, de sorte que viole les textes susvisés le Tribunal d'Instance qui déduit du principe de la liberté syndicale le droit pour un syndicat d'exiger une négociation sans même atteindre un seuil d'effectif de travailleurs déterminé par la loi nationale ;

AUX MOTIFS, DE TROISIEME PART, QU' «en outre, le principe de l'égalité entre les syndicats mêmes, s'il n'est expressément visé par les textes communautaire et internationaux, précédemment cités, force est de constater qu'il est inéluctablement inclus dans les principes fondamentaux protégés par la Cour Européenne des droits de l'Homme ; qu'il résulte notamment du principe de la liberté syndicale ; qu'en l'espèce, les dispositions de la loi du 20 août 2008 qui permettent à la C.F.E. C.G.C. syndicat catégoriel affilié à une confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale, d'être représentative pour les salariés de la catégorie qu'elle représente en obtenant au moins 10% dans le seul collège où elle se présente, mais qui ne permet pas à un syndicat intercatégoriel, tel FO, qui a obtenu 12% des voix sur le collège où il a présenté une liste, d'être représentatif pour les salariés de ce collège, sont discriminatoires et violent les règles communautaires» (p.8, al. 1 et 2)» ;

ALORS QUE s'agissant d'organisations rivales que les scrutins ont pour objet de départager, le fait d'accorder des prérogatives à celles qui ont obtenu les meilleurs résultats ne constitue pas une rupture de l'égalité au détriment de celles qui ont été battues et qui ne se retrouvent pas de ce fait dans une situation identique à l'issue desdits scrutins ; qu'ainsi, la loi du 20 août 2008 en vertu de laquelle le syndicat catégoriel CFE-CGC aurait vocation à désigner un délégué syndical du fait qu'il aurait pu obtenir 10%
dans le seul collège où il aurait pu présenter des candidats, n'engendrerait pas d'inégalité par rapport au syndicat FORCE OUVRIERE qui ne se trouve pas objectivement dans la même situation du fait de son choix statutaire de s'adresser à toutes les catégories de personnel ;

AUX MOTIFS, DE QUATRIEME PART, QUE «l'article 5 de la convention n° 135 de l'organisation Internationale du travail dispose que lorsqu'une entreprise compte à la fois des représentants syndicaux et des représentants élus, des mesures appropriées doivent être prises pour garantir que la présence de représentants élus ne puissent servir à affaiblir la situation des syndicats ou de leurs représentants et pour encourager la coopération, sur toutes questions pertinentes, entre les représentants élus, d'une part, et les syndicats intéressés et leurs représentants ; que l'obligation de choisir le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10% est contraire au principe de la liberté syndicale et constitue une ingérence dans le fonctionnement syndical» (p.7, al. 1 et 2) (…) ; «et donne prépondérance aux représentants élus au détriment de la représentation désignée, contrairement aux dispositions susvisées qui sont destinées à contrebalancer les pressions susceptibles d'être exercées sur l'électorat au sein des entreprises» (p.7, dernier al.)» ;

ALORS QUE le plaideur qui invoque une exception de nonconventionalité à propos d'une disposition légale doit démontrer qu'un tel moyen est pertinent par rapport à ses prétentions et que la mise à l'écart de ces dispositions légales correspond à l'objet du litige ; qu'en l'occurrence FORCE OUVRIERE, qui n'avait pas atteint aux élections le seuil de 10%, n'était pas en mesure de désigner un quelconque délégué syndical et que dès lors sa prétention de faire juger que son pouvoir de désignation aurait été abusivement limité par l'article L.2143-3 du Code du travail, n'était pas pertinente ; qu'en statuant cependant sur celle-ci, le Tribunal d'Instance a violé ensemble les articles 4, 5, 30 et 31 du Code de Procédure Civile ;

ALORS QUE l'article 5 de la Convention n°135 de l'Organisation Internationale du Travail se borne à prévoir que des mesures appropriées devront être prises (chaque fois qu'il y a lieu) pour que la présence des élus ne serve pas à affaiblir la situation des syndicats, et que le fait de désigner les représentants du syndicat parmi les personnes qui ont été candidates aux élections en vertu de l'article L.2143-3 du Code du travail, ne caractérise nullement, sauf circonstances particulières non acquises en l'espèce, un affaiblissement dudit syndicat, et est de nature, au contraire, à faciliter la «coopération» entre les élus d'une part et les représentants désignés, d'autre part, comme le veut le texte susvisé ; qu'en statuant comme il l'a fait, le Tribunal d'Instance a violé les textes susvisés.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR déclaré «contraire au droit communautaire» l'article L.2324-2 du Code du travail issus de la loi du 20 août 2008 et d'avoir en conséquence validé la désignation par le Syndicat FORCE OUVRIERE de Monsieur X... en qualité de représentant syndical au Comité d'Entreprise ;

SANS MOTIFS

ALORS, D'UNE PART QU' en vertu de l'article L.2324-2 du code du travail seules les organisations syndicales ayant « des élus au comité d'entreprise » peuvent y nommer un représentant syndical, de sorte qu'en validant la désignation de Monsieur X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise sans vérifier, comme elle y était d'ailleurs invité (requête de la société SDMO, p.3, al.8 et suivants) si le syndicat FO disposait d'élus audit comité, le juge d'instance a violé ce texte ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU' en ne répondant pas à la requête en annulation de la société SDMO (p.3, dernier al.) qui soutenait sans être contredite que le syndicat FO ne disposait d'aucun élu au comité d'entreprise, et ne pouvait désigner Monsieur X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise, le Tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN, QUE faute d'indiquer en quoi l'article L.2324-2 du code du travail issu de la loi du 20 août 2008 serait contraire au droit international et plus spécialement en quoi il contreviendrait à la liberté syndicale consacrée par les textes internationaux, le juge d'instance n'a pas justifié sa décision de valider la désignation de Monsieur X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise en dehors des conditions prévues par ce texte ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge d'instance a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 11 de la CEDH, 6 de la Charte Sociale Européenne, 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, et de la convention n° 98 de l'Organisation Internationale du Travail.

Moyen produit au pourvoi n° V 09-60.429 par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour l'Union départementale CFDT du Finistère.

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que les dispositions des articles L. 2324-2, L. 2122 -1, L. 2143-3 et L. 2143-22 du Code du travail étaient contraires au droit communautaire et de l'AVOIR débouté de sa demande d'annulation de la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise du syndicat FO ;

AUX MOTIFS QU'il résulte de l'article L. 2143-3 du code du travail (loi n°2008 - 789 du 20 août 2008) que les syndicats représentatifs dans l'entreprise désignent leur délégué syndical parmi les candidats qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ; qu'en application de l'article L. 2122 -1 du Code du travail, les organisations dans l'entreprise sont celles qui ont recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au tour des dernières élections au comité d'entreprise ; qu'or, auparavant chaque syndicat représentatif désignait un ou plusieurs condition particulière et tout syndicat professionnel affilié à une organisation niveau national était considéré comme représentatif dans l'entreprise ; qu'il est donc constant, qu'en application des dispositions de la loi du 28 août 2008, Monsieur X..., qui était délégué syndical FO, ne peut plus être désigné, le syndicat FO n'ayant pas obtenu 10 % des suffrages exprimés, tous collèges confondus, au premier tour des élections au comité d'entreprise et Monsieur X... n'ayant pas recueilli 10 % des suffrages exprimés, alors que sous l'empire des textes précédents, FO qui bénéficiait d'une présomption irréfragable de représentativité aurait eu toute latitude pour le désigner ; que toutefois, le syndicat FO et Monsieur X... ne contestent pas les conditions d'application de ce texte mais demandent au tribunal de l'écarter comme étant contraire aux dispositions internationales et communautaires ; que sur le pouvoir du juge, certes le juge judiciaire n'est pas juge de la constitutionnalité d'un texte et il n'a pas compétence pour supprimer un texte qu'il estimerait contraire aux dispositions internationales ou aux règles communautaires ; que cependant, la Cour Européenne des droits de l'Homme, rappelant la primauté du droit communautaire, a invité le juge interne à la garantir en écartant l'application de la règle nationale contraire ; que s'agissant des textes communautaires et internationaux applicables, l'article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, consacrant la liberté syndicale, interdit toute restriction à ce droit autre que celles nécessaires à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui ; que l'article 6 de la Charte Sociale Européenne dispose qu'en vue d'assurer l'exercice effectif du droit de négociation collective, les parties s'engagent à promouvoir l'institution de procédures de négociation volontaire entre les employeurs et les organisations de travailleurs en vue de régler les conditions d'emploi par des conventions collectives ; que de façon générale, la Cour Européenne retient sa compétence pour interpréter et appliquer les dispositions de la Convention des droits de l'Homme d'une manière qui en rende les garanties concrètes et effectives ; qu'à cette fin, elle prend en considération les principes établies par les textes de portée universelle (textes de droit international, interprétations qui en sont faites par les organes compétents, règles et principes acceptés par une grande majorité des états) ; qu'elle rappelle ainsi que l'article 11 de la convention a pour objectif essentiel de protéger l'individu contre les ingérences arbitraires dans l'exercice des droits consacrés par la convention, les Etats ayant l'obligation d'assurer la jouissance effective de ces droits ; qu'il en est ainsi en ce qui concerne la liberté de défendre les intérêts professionnels des adhérents d'un syndicat par l'action collective ; qu'elle n'accepte pas les restrictions non nécessaires qui affectent les éléments de la liberté syndicale sans lesquels le contenu de cette liberté serait violé de son sens, à savoir : le droit de former un syndicat et de s'y affilier, l'interdiction des accords de monopole syndical, le droit pour un syndicat de chercher à persuader l'employeur, d' écouter ce qu'il a à dire, au nom de ses membres, le droit de négociation collective énoncé par la convention n°98 de l'Organisation Internationale du travail, par l'article 6 de la Charte Sociale Européenne (qui reconnaît à tout travailleur comme à tout syndicat de droit de mener des négociations collectives faisant ainsi peser sur les pouvoirs public, l'obligation correspondante de promouvoir une culture de dialogue et de la négociation dans l'économie), par l'article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ; l'article 5 de la convention n° 1 35 de l'organisation Internationale du travail dispose que lorsqu'une entreprise compte à la fois des représentants syndicaux et des représentants élus, des mesures appropriées doivent être prises pour garantir que la présence de représentants élus ne puisse servir à affaiblir la situation des syndicats ou de leurs représentants et pour encourager la coopération, sur toutes questions pertinentes, entre les représentants élus, d'une part, et les syndicats intéressés et leurs représentants, d'autre part ; qu'en l'espèce, l'obligation de choisir le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % est contraire au principe de la liberté syndicale et constitue une ingérence dans le fonctionnement syndical ; que l'obligation de recueillir au moins 1 0 % les suffrages exprimés, tous collèges confondus, au premier tour des élections sur comité d'entreprise pour être considérée comme organisation représentative dans l'entreprise, alors qu'auparavant les organisations syndicales représentatives au plan national, bénéficiaient d'une présomption irréfragable a pour effet : d'empêcher FO de participer à toute négociation au sein de l'entreprise, élément essentiel à l'exercice du droit syndicat qui n'est pas compensé par la possibilité de désigner un représentant syndical puisque ce dernier ne possède pas une telle compétence, alors qu'il s'agit d'une organisation syndicale représentative au niveau national, qu'elle représente 12 % des suffrages exprimés en ce qui concerne le premier collège et que cette restriction n'est pas nécessaire ; d'inciter, en conséquence, les électeurs à se détourner d'un syndicat dépourvu de tout pouvoir, d'empêcher tout syndicat de s'implanter dans une entreprise où il n'intervenait pas précédemment, en favorisant ainsi les situations acquises voire les monopoles ; de réduire progressivement le nombre des organisations syndicales contrairement aux dispositions internationales susvisées qui tendent au contraire à favoriser la liberté d'expression, ce qui risque également d'avoir pour effet de détourner les salariés de toute adhésion à un quelconque syndicat alors qu'il est notoire que le taux de syndicalisation en France est très faible, qu'une forte syndicalisation est nécessaire à la défense des droits individuels des salariés dans un contexte de mondialisation et de crise économique, mais aussi que la culture de la négociation et du dialogue, imposée par la législation communautaire, est nécessaire au bon développement de l'économie, de donner prépondérance aux représentants élus au détriment de la désignée, contrairement aux dispositions susvisées qui sont destinées à pressions susceptibles d'être exercées sur l'électorat au sein des entreprises ; qu'en outre, le principe de l'égalité entre les syndicats même, s'il n'est expressément visé par les textes communautaires et internationaux, précédemment cités, force est de constater qu'il est inéluctablement inclus dans les principes fondamentaux protégés par la Cour Européenne des droits de l'Homme ; qu'il résulte notamment du principe de la liberté syndicale ; qu'or, en l'espèce, les dispositions de la loi du 20 août 2008 qui permettent à la C. F. E. C.G.C. syndicat catégoriel affilié aune confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale, d'être représentative pour les salariés de la catégorie qu'elle représente en obtenant au moins 10 % dans le seul collège où elle se présente, mais, qui ne permet pas à un syndicat intercatégoriel, tel FO, qui a obtenu 12 % des voix sur le collège où il a présenté une liste, d'être représentatif pour les salariés de ce collège, sont discriminatoires et violent les règles communautaires ;

1/ ALORS QU'en jugeant, pour valider les désignations déférées les dispositions des articles L. 2324-2, L. 2122 -1, L. 2143-3 et L. 2143-22 du Code du travail contraires au droit communautaire, sans préciser quelles dispositions du droit communautaire fondaient cette conclusion, ce après avoir analysé des stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la Charte sociale européenne et des conventions n°98 et 135 de l'Organisation Internationale du Travail, et sans préciser sur quelles dispositions précises il fondait son raisonnement, en se contentant de dire généralement ces dispositions «contraires au principe de la liberté syndicale» et constitutifs d'une ingérence dans le fonctionnement syndical, le tribunal a statué par des motifs généraux et a privé se décision de motifs en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

SUR LE SEUIL DE 10% EN GENERAL

2/ ALORS QUE si le droit de mener des négociations collectives avec l'employeur est, en principe, l'un des éléments essentiels de la liberté syndicale garantie par l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les Etats demeurent libres d'en réserver l'exercice aux syndicats représentatifs ; que les critères déterminant leur représentativité doivent être raisonnables, clairs, préétablis, objectifs, imposés par la loi et donner lieu, le cas échéant, à un contrôle juridictionnel ; que le seuil de 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections au comité d'entreprise, tous collèges confondus, nécessaire à un syndicat pour être reconnu représentatif au niveau de l'entreprise est prévu par l'article L. 2122-1 du Code du travail ; qu'il basé sur les résultats d'élections professionnelles et peut être contrôlé par le juge judiciaire ; qu'il répond donc à l'ensemble de ces critères ; qu'en refusant néanmoins d'appliquer ce texte, le Tribunal a violé l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les articles 5 et 6 de la Charte sociale européenne, l'article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention n°98 de l'Organisation internationale du travail ;

3/ ALORS QU'eu égard à la nature sensible des questions sociales et politiques que soulève la recherche d'un juste équilibre entre les divers intérêts en présence et, en particulier, l'évaluation du caractère approprié de l'intervention de l'Etat en vue de limiter les mesures prises par le syndicat pour accroître la portée du système de négociation collective, et compte tenu des différences importantes que présentent les systèmes juridiques internes dans le domaine considéré, les Etats contractants bénéficient d'une ample marge d'appréciation quant à la manière d'assurer la liberté syndicale et d'organiser le système de négociation collective ; qu'en jugeant néanmoins non conventionnel le critère d'audience électorale requis pour la représentativité d'un syndicat dans l'entreprise au motif qu'il avait pour effet «d'inciter (…) les électeurs à se détourner d'un syndicat dépourvu de tout pouvoir», d'empêcher l'implantation de nouveaux syndicats, de favoriser « les situations acquises », les monopoles et de « réduire progressivement le nombre d'organisations syndicales », le Tribunal méconnu le libre choix donné aux Etats signataires pour organiser leur système interne de négociation collective et partant a violé l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 12 du Code de procédure civile ;

4/ ALORS QUE l'article 5 de la convention n°135 de l'OIT garantit que la présence de représentants élus ne puisse servir à affaiblir la situation des syndicats intéressés ou de leurs représentants ; que l'article L. 2122-1 du Code du travail n'a fait que modifier les critères de représentativité des syndicats mais n'a en rien changé les prérogatives des syndicats représentatifs qui conservent le monopole de la négociation collective dans l'entreprise lorsqu'ils y sont implantés ; qu'elle ne les a donc pas affaibli au bénéfice des représentants élus ; qu'en refusant néanmoins d'appliquer l'article L. 2122-1 du Code du travail, le Tribunal a violé le texte susvisé.

5/ ALORS QUE pour être compatible avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'ingérence doit être « prévue par la loi », viser un but légitime énuméré à l'article 11 § 2 et présenter un caractère de nécessité dans une société démocratique ; que l'obligation faite aux syndicats représentatifs dans l'entreprise de choisir leur délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise est prévue par l'article L. 2143-3 du Code du travail ; qu'elle a pour objectif d'accroître la protection des droits et libertés des travailleurs et répond à une nécessité dans une société démocratique, en ce qu'elle les fait indirectement participer aux choix de leur représentants syndicaux, renforce leur légitimité, et, par là même la démocratie sociale dans l'entreprise ; qu'en jugeant néanmoins que l'article L. 2122-1 du Code du travail portait atteinte à la liberté syndicale et constituait une ingérence illicite, le Tribunal a violé l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

SUR L'EGALITE AVEC LA CGC

6/ ALORS QUE le Tribunal qui a constaté qu'aucun syndicat CGC ne s'était présenté dans l'entreprise, mais a validé la désignation d'un délégué FORCE OUVRIERE au motif des droits éventuellement concédés par la loi à un syndicat catégoriel a statué par un motif inopérant, et n'a pas justifié sa décision au regard des articles L. 2324-2, L. 2122-2 et L. 2143-2 du Code du travail ;

7/ ALORS au demeurant QU' une organisation intercatégorielle se trouve dans une situation différente au regard de sa représentativité d'une organisation purement catégorielle ; qu'en disant néanmoins les articles L. 2122-1, L. 2143-3, 2143-22 et L. 2324-2 du Code du travail contraire au principe d'égalité à valeur constitutionnelle, le Tribunal a violé ledit principe et les articles 11 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8/ ALORS en tout état de cause QU'une différence de traitement peut être effectuée si elle repose sur une justification objective et raisonnable ; que la distinction opérée aux articles L. 2122-1 et L. 2122-2 du Code du travail entre les syndicats intercatégoriels et catégoriels présente une justification objective et raisonnable en ce que, d'une part, elle poursuit le but légitime de maintenir l'accès des syndicats catégoriels au statut de syndicats représentatifs, d'autre part, elle respecte un rapport de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé, dès lors que les syndicats intercatégoriels bénéficient de toutes les garanties pour présenter et faire élire librement leurs candidats dans l'ensemble des catégories professionnelles ; qu'en disant néanmoins les articles L. 2122-1, L. 2143-3, 2143-22 et L. 2324-2 du Code du travail discriminatoires et contraires au droit communautaire, le Tribunal a violé les articles 11 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.



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Cette décision est visée dans la définition :
Syndicat


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.