par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 8 juillet 2010, 09-14280
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
8 juillet 2010, 09-14.280

Cette décision est visée dans la définition :
Principe d' Estoppel




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu que, par une convention du 27 mars 2001 contenant une clause compromissoire, la société France Quick a accordé à la société Marocaine de loisirs (MDL), dont M. Y... est le président du conseil d'administration, la franchise exclusive Quick sur le territoire marocain ; que deux contrats portant sur la création de restaurants ont été signés ; que, la société France Quick ayant résilié les contrats, la société MDL a mis en oeuvre la procédure d'arbitrage ; que, par une sentence finale du 9 juillet 2007, un tribunal arbitral a jugé que les contrats avaient été résiliés à bon droit par la société France Quick et a prononcé diverses condamnations contre la société MDL ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société MDL fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 9 octobre 2008) d'avoir rejeté le recours en annulation formé contre cette sentence, alors, selon le moyen, que la sentence peut être annulée lorsque sa reconnaissance ou son exécution heurte, de manière flagrante, effective et contraire, l'ordre public international ; que l'exécution d'une sentence est incompatible avec l'ordre public international procédural lorsqu'elle a prononcé la résiliation d'un contrat sans que l'un des cocontractants, partie à la convention d'arbitrage, ait été régulièrement appelé à l'instance pour faire valoir ses droits et moyens ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si M. Y... n'était pas personnellement partie au protocole d'accord du 27 mars 2001 contenant la clause compromissoire, ainsi qu'aux contrats de franchise des 20 novembre 2002 et 17 février 2005, dont la résiliation avait été prononcée par la sentence arbitrale sans qu'il ait préalablement été appelé à l'instance arbitrale et, par voie de conséquence, si l'exécution de cette sentence n'était pas incompatible avec l'ordre public international procédural, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1502-5° et 1504 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la société MDL, demanderesse à l'arbitrage par M. Y..., son président du conseil d'administration qui n'a pas jugé utile d'intervenir à la procédure à titre personnel, ne peut, sans se contredire au préjudice de la société défenderesse et violer ainsi le principe de la loyauté des débats, soutenir, devant le juge de l'annulation, que la reconnaissance et l'exécution de la sentence sont contraires à l'ordre public international du fait de l'absence de mise en cause de M. Y... ; que le grief est irrecevable ;

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société la Marocaine des loisirs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société la Marocaine des loisirs à payer à la société France Quick la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux conseils pour la société la Marocaine des loisirs

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours en annulation formé par la société La Marocaine des Loisirs contre la sentence arbitrale rendue le 9 juillet 2007 par le tribunal arbitral ad hoc composé de MM. X..., Z... et F... ;

AUX MOTIFS QUE la société MDL articule que l'acte de mission, signé le 15 septembre 2006 et rédigé par M. X..., président du tribunal arbitrai, M. F... arbitre désigné par elle et M. C... arbitre désigné par la société France Quick est nul au motif que son consentement a été vicié lors de sa signature par une erreur sur l'indépendance et l'impartialité de M. C... qui était l'avocat de la société France Quick en Algérie et qui a violé son obligation d'information en ne révélant que le 11 décembre 2006, sous la contrainte, ses liens avec cette société ; que son acceptation ultérieure de la désignation de M. Z... pour le remplacer, ne purge pas ce vice du consentement dans la mesure où la validité de son consentement s'apprécie au moment de la formation du contrat ; qu'elle ajoute que M. Z... a signé l'avenant à l'acte de mission acceptant de succéder à M. C..., le 29janvier 2007, et que la sentence partielle n'a pas été rendue postérieurement à sa désignation mais le même jour et conséquemment avec la participation de M. C... ; qu'elle dit que la méconnaissance du principe de collégialité par les arbitres dès lors que M. Z... n'a pas participé à l'instruction puis au délibéré a rendu nulle la sentence partielle et affecte également la sentence du 9 juillet 2007 qui entérine la sentence du 29 janvier 2007 ; qu'elle invoque ensuite une violation des droits de la défense et de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme. ; qu'elle dit que les trois contrats objets de la résiliation ont été conclus entre trois parties et non deux, les arbitres ayant occulté le fait que M. Y..., dirigeant de la société MDL était le cocontractant essentiel de France Quick, laquelle ne lui a adressé ni mise en demeure ni lettre de résiliation et a, par ses manoeuvres procédurales, dissimulé que ce dernier, bien que non partie à la procédure d'arbitrage est le troisième contractant des accords litigieux ;
qu'elle explique que l'absence de mise en demeure de M. Y... lai a causé un préjudice personnel puisque son cocontractant aurait pu remédier aux manquements formulés à son encontre par le franchiseur ; qu'elle dit que le tribunal arbitral ne pouvait déclarer effective et non abusive une résiliation non signifiée à M. Y... sans que ce dernier puisse faire état de ses moyens de défense et qu'il n'était pas dans la mission du tribunal arbitral de statuer sur ses droits en sa qualité de franchisé Quick ; qu'elle dit que la sentence viole de façon flagrante, effective et concrète l'ordre public international en consacrant une résiliation non effective car non signifiée à M. Y... et en méconnaissant ses droits ; qu'elle dénonce enfin les agissements frauduleux de la société France Quick, ayant produit de faux documents (plaintes de MM. D... et E..., plainte calomnieuse de M et G..., relevé comptable frauduleux) afin de tromper la religion du tribunal arbitral, qui constituent une cause d'annulation ; qu'elle précise que ces faits ont donné lien au dépôt de plaintes pénales au Maroc ; que le recours en annulation n'est ouvert que dans les seuls cas limitativement énumérées à l'article 1502 du code de procédure civile ; qu'aucun de ces cas d'ouverture n'envisage la nullité de l'acte de mission, dont il n'est pas prétendu par la société MDL qu'il serait en réalité la convention d'arbitrage, les liens contractuels établis avec M. C..., démissionnaire de ses fonctions le 20 décembre 2006, étant une question différente de celle de la validité de la convention d'arbitrage ; que la société MDL ne tire pas d'autres conclusions du fait que la sentence partielle ait été rendue par un tribunal arbitral comprenant un arbitre, M. Z..., dont la désignation est devenue effective le jour où la sentence a été rendue et qu'elle n'établit pas en quoi la méconnaissance alléguée par elle du principe de collégialité de l'instruction et du délibéré par le tribunal arbitral pour rendre sa sentence du partielle du 29 janvier 2007 affecterait la sentence finale du 9 juillet 2007 rendue par un tribunal arbitral composé notamment de M. Z..., arbitre désigné six mois plus tôt, aux termes d'un raisonnement et d'une motivation dont rien ne permet de dire qu'elle se borne à entériner la sentence partielle ; que la société MDL est irrecevable, en vertu de lu règle d l'estoppel, à venir solliciter devant la cour l'annulation de la sentence en raison de la méconnaissance du principe de collégialité et de la nullité de l'acte de mission alors qu'elle a elle-même saisi le tribunal arbitral en vertu de la clause compromissoire, signé l'avenant à l'acte de mission par acte du 29 janvier 2007 remplaçant M. C... par M. Z..., et a participé à l'arbitrage ; qu'enfin, la société MDL n'établit aucune violation de l'ordre public international de procédure avec des reproches concernant le jeu de la clause résolutoire des trois contrats à l'initiative de la société France Quick en mars 2006, lesquels touchent au fond dont le juge de l'annulation ne peut connaître ; qu'au demeurant, la sentence n'a prononcé aucune mesure à titre personnel contre M. Y... ; que ni les plaintes déposées auprès des autorités de poursuite marocaines concernant la dénonciation de la mauvaise qualité des produits et des prestations des restaurants Quick au Maroc ni l'arrêté de comptes produit par la société France Quick dans la procédure arbitrale ni enfin la plainte déposée par la société MDL le ler août 2008 contre la société France Quick pour délit d'inexécution du contrat et escroquerie ne permettent de conclure à la violation de l'ordre public international français de procédure ;

1°) ALORS, D'UNE PART, QUE la sentence peut être annulée lorsque sa reconnaissance ou son exécution heurte, de manière flagrante, effective et contraire, l'ordre public international ; que l'exécution d'une sentence est incompatible avec l'ordre public international procédural lorsqu'elle a prononcé la résiliation d'un contrat sans que l'un des cocontractants, partie à la convention d'arbitrage, ait été régulièrement appelé à l'instance pour faire valoir ses droits et moyens ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si M. Y... n'était pas personnellement partie au protocole d'accord du 27 mars 2001 contenant la clause compromissoire, ainsi qu'aux contrats de franchise des 20 novembre 2002 et 17 février 2005, dont la résiliation avait été prononcée par la sentence arbitrale sans qu'il ait préalablement été appelé à l'instance arbitrale et, par voie de conséquence, si l'exécution de cette sentence n'était pas incompatible avec l'ordre public international procédural, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1502-5° et 1504 du code de procédure civile ;


2°) ALORS, D'AUTRE PART, QUE la fraude procédurale peut être sanctionnée au regard de l'ordre public international de procédure ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sans rechercher si la société France Quick n'avait pas produit un relevé comptable frauduleux devant les arbitres, pour établir que la société La Marocaine des Loisirs était débitrice envers elle d'une certaine somme d'argent, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1502-5° et 1504 du code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Principe d' Estoppel


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.