par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 16 septembre 2014, 13-16164
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
16 septembre 2014, 13-16.164
Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Droit de Retour
Succession
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 21 février 2013), que le 21 avril 1981, Mme X... a fait une donation-partage à ses deux filles, Nicole et Dominique Y... ; que Nicole est décédée le 11 décembre 1996 en laissant d'une part son mari, Franck Z..., donataire de la pleine propriété de ses biens, et leurs deux enfants, MM. Olivier et Dimitri Z..., lesquels ont renoncé à la succession de leur mère ; que Mme X... a revendiqué la propriété des biens objets de la donation-partage ; que l'instance s'est poursuivie après le décès de Franck Z... le 13 février 2006 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que MM. Olivier et Dimitri Z... font grief à l'arrêt d'accueillir la demande de Mme X... tendant à ce qu'il soit fait application de la clause de retour conventionnel, alors, selon le moyen, que le donateur peut stipuler le droit de retour des objets donnés, soit pour le cas du prédécès du donataire seul, soit pour le cas du prédécès du donataire et de ses descendants ; que la renonciation des descendants du donataire à la succession de ce dernier ne peut être assimilée à leur décès ; que pour ordonner qu'il soit fait application du droit de retour conventionnel prévu dans la donation partage au profit de la donatrice pour le cas où « les donataires ou l'une d'entre elles viendraient à décéder avant le donateur sans enfant ni descendant et pour le cas encore où les enfants et descendants desdits donataires ou de l'une d'elle viendraient eux-mêmes à décéder sans postérité avant le donateur », que « les descendants ayant perdu leur qualité d'héritier, il doit être considéré que le donataire n'a laissé aucune postérité pour lui succéder et qu'en cette hypothèse ils n'ont plus vocation à recevoir les biens donnés », la cour d'appel, qui a assimilé la renonciation à la succession du donateur par ses descendants au prédécès de ces derniers, a violé l'article 951 du code civil ;
Mais attendu que l'héritier renonçant est censé n'avoir jamais été héritier ; qu'il en résulte qu'un descendant renonçant ne peut faire obstacle au droit de retour qu'il soit légal ou convenu au cas de prédécès du donataire ; qu'après avoir estimé qu'en stipulant dans la donation-partage un droit de retour empruntant la seconde hypothèse de l'article 951 du code civil, Mme X... avait exprimé le souhait que les descendants puissent profiter de la libéralité en cas de prédécès de la donataire, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que les descendants ayant perdu leur qualité d'héritier, il devait être considéré que la donataire n'avait laissé aucune postérité pour lui succéder ; qu'en sa première branche le moyen n'est donc pas fondé ;
Et sur les deuxième et troisième branches du moyen unique, ci-après annexées :
Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. Olivier et Dimitri Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de MM. Olivier et Dimitri Z... et les condamne à payer à Mme X... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les consorts Z...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR accueilli la demande de Madame Y... tendant à ce qu'il soit fait application de la clause de retour conventionnel ;
AUX MOTIFS QUE « la cour constate que les conclusions déposées par les intimés le 20 novembre 2012 comportent les indications mentionnées à l'alinéa 2 de l'article 960 du code de procédure civile qui faisaient défaut dans les conclusions du 11mai 2012 de sorte qu'aucune irrecevabilité ne s'oppose à ce qu'elle statue sur les dernières conclusions qui lui sont soumises conformément à l'article 954 du code de procédure civile ; la donation-partage cumulative du 21 avril 1981 réunit en un seul acte la répartition des biens donnés par Mme Christiane X... et le surplus revenant à ses filles gratifiées Nicole Y... épouse Z... et Dominique Y... épouse A... pour leur provenir de la succession de Louis Y..., conjoint prédécédé de la donatrice ; il en résulte notamment que Nicole Y... épouse Z... a reçu en attribution la nue propriété de parcelles bâties et non bâties cadastrées lieudit La Chaume section B 231, B 232, B 233, B 234 et B 235 sur la commune de La Bastidonne (Vaucluse) ; cet acte stipule un droit de retour exprimant la volonté de la donatrice de retrouver son emprise au travers d'une clause qui emprunte la seconde hypothèse de l'article 951 du code civil où « les donataires ou l'une d'entre elles viendraient à décéder avant le donateur sans enfant ni descendant et pour le cas encore où les enfants el descendants desdits donataires ou de l'une d'elles viendraient eux-mêmes à décéder sans postérité avant le donateur » ; en subordonnant l'ouverture du retour au prédécès du donataire et de ses descendants, Madame Christiane X... a ainsi souhaité que les descendants puissent eux aussi profiter de la libéralité ; or, il ressert des termes d'un certificat d'héritier délivré le 30 octobre 1997 par le tribunal d'instance de Colmar que Franck Z... a reçu la pleine propriété des biens de la succession de son épouse Nicole Y... décédée le 11 décembre 1996 en exécution d'une donation entre époux expressément acceptée par les enfants de la défunte Messieurs Olivier Z... et Dimitri Z... qui ont renoncé à la succession de leur mère ; les descendants ayant perdu leur qualité d'héritier, il doit être considéré que le donataire n'a laissé aucune postérité pour lui succéder et qu'en cette hypothèse ils n'ont plus vocation à recevoir les biens donnés ; dans ce cas, le retour des biens dans le patrimoine de la donatrice ne permettait pas à Franck Z... de revendiquer un quelconque droit, en particulier de propriété, sur des biens qu'il n'a pas recueillis dans la succession de son épouse ; par ailleurs, l'anéantissement rétroactif de la donation s'opérant de plein droit, les enfants de Nicole Y... ne peuvent prétexter de leur qualité d'héritiers de Franck Z... pour prétendre que le voeu de conservation des biens dans la famille est respecté et faire obstacle au droit de retour conventionnel ; le jugement de première instance sera donc infirmé en ce qu'il n'a pas accordé à Madame Christiane X... veuve Y... le bénéfice de ce droit de retour, lequel s'exerce conformément à ses droits résultant de la donation-partage qui rappelle qu'elle a opté, en vertu de la donation entre époux du 10 décembre 1970, pour un quart en pleine propriété et trois quarts en usufruit des biens de la succession de Louis Y... » ;
ALORS QUE, le donateur peut stipuler le droit de retour des objets donnés, soit pour le cas du prédécès du donataire seul, soit pour le cas du prédécès du donataire et de ses descendants ; que la renonciation des descendants du donataire à la succession de ce dernier ne peut être assimilée à leur décès ; que pour ordonner qu'il soit fait application du droit de retour conventionnel prévu dans la donation partage au profit de la donatrice pour le cas où « les donataires ou l'une d'entre elles viendraient à décéder avant le donateur sans enfant ni descendant et pour le cas encore où les enfants et descendants desdits donataires ou de l'une d'elle viendraient eux-mêmes à décéder sans postérité avant le donateur », que « les descendants ayant perdu leur qualité d'héritier, il doit être considéré que le donataire n'a laissé aucune postérité pour lui succéder et qu'en cette hypothèse ils n'ont plus vocation à recevoir les biens donnés », la cour d'appel, qui a assimilé la renonciation à la succession du donateur par ses descendants au prédécès de ces derniers, a violé l'article 951 du code civil ;
ALORS QUE, subsidiairement, pour déterminer si une clause de retour conventionnel doit s'appliquer en cas de renonciation à la succession des descendants du donataire, lorsque cette hypothèse n'est pas prévue par la donation partage, les juges du fond doivent rechercher l'intention du donateur à cet égard ; qu'en affirmant de manière péremptoire, pour ordonner qu'il soit fait application du droit de retour conventionnel prévu dans la donation partage au profit de la donatrice en cas de prédécès du donataire décédé sans postérité ou de prédécès du donateur et de ses descendants, dès lors que la donataire était prédécédée à la donatrice et que ses enfants avaient renoncé à la succession, que « les descendants ayant perdu leur qualité d'héritier, il doit être considéré que le donataire n'a laissé aucune postérité pour lui succéder et qu'en cette hypothèse ils n'ont plus vocation à recevoir les biens donnés », sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si telle était l'intention de la donatrice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ALORS QUE tout aussi subsidiairement, les juges du fond doivent analyser, même sommairement, les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent ; qu'en énonçant, pour ordonner qu'il soit fait application du droit de retour conventionnel prévu dans la donation partage au profit de la donatrice en cas de prédécès du donataire décédé sans postérité ou de prédécès du donateur et de ses descendants, dès lors que la donataire était prédécédée à la donatrice et que ses enfants avaient renoncé à sa succession, que « les descendants ayant perdu leur qualité d'héritier, il doit être considéré que le donataire n'a laissé aucune postérité pour lui succéder et qu'en cette hypothèse ils n'ont plus vocation à recevoir les biens donnés », sans analyser, même sommairement le courrier du 28 mai 2002 de Maîtres B...et C..., notaires, selon lequel les biens faisant l'objet de la donation partage et du droit de retour conventionnel devaient revenir aux petits-enfants de la donatrice, Messieurs Dimitri et Olivier Z..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Droit de Retour
Succession
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.