par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 23 septembre 2014, 13-20399
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Cour de cassation, chambre commerciale
23 septembre 2014, 13-20.399

Cette décision est visée dans la définition :
Compensation




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1291 du code civil, ensemble l'article 463 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'une décision du 28 avril 2005 a condamné la société Sew, de droit belge, la société Entreprise Zolli frères et la Société d'armatures spéciales à se payer réciproquement diverses sommes au titre de créances et dettes nées de la réalisation de travaux de construction d'une station d'épuration ; que cet arrêt a, notamment, condamné la Société d'armatures spéciales, in solidum avec la société Entreprise Zolli frères, à payer aux co-curateurs de la faillite de la société Sew la somme de 33 077,73 euros correspondant au montant des sommes mises à sa charge en proportion de sa responsabilité au titre des malfaçons et des pénalités de retard et à garantir la société Entreprise Zolli frères à concurrence de cette somme ; qu'en exécution de cet arrêt, la Société d'armatures spéciales a, le 28 mai 2005, versé ladite somme à la société Sew ; que, sur requête de la société Entreprise Zolli frères en rectification d'erreur matérielle et en omission de statuer, la cour d'appel a, par arrêt du 26 janvier 2006, rectifié le montant de sa créance sur la société Sew au titre de factures impayées et ordonné la compensation entre les créances et dettes réciproques des trois sociétés ; qu'invoquant cette compensation, la société Entreprise Zolli frères a demandé l'annulation du commandement de payer avant saisie vente que lui a fait délivrer la Société d'armatures spéciales le 21 juillet 2011 pour obtenir le règlement de sa créance sur elle ;

Attendu que, pour débouter la société Entreprise Zolli frères, l'arrêt énonce que la décision réparatrice de l'omission, bien que s'incorporant à la décision réparée, est une décision constitutive qui ne saurait avoir d'effet rétroactif, sauf à porter atteinte au principe de sécurité juridique, puis retient que, dès lors, l'arrêt rendu le 26 janvier 2006 ne peut anéantir les effets du versement effectué à la société Sew par la Société d'armatures spéciales en 2005, lequel a réduit à néant la condamnation de cette dernière à garantir la société Entreprise Zolli frères du versement de cette somme et qu'il appartient donc à celle-ci de se retourner contre les organes de la procédure collective de la société Sew afin de voir réintégrer cette somme dans sa créance à son encontre ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'effet extinctif de la compensation judiciaire des créances réciproques connexes est réputé s'être produit au jour de l'exigibilité de la première d'entre elles, qu'elle soit ordonnée par le juge quand il arrête le montant de ces créances ou, ultérieurement, lorsqu'il répare une omission de statuer sur ce point, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;

Condamne la Société d'armatures spéciales aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Entreprise Zolli frères.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SAS ENTREPRISE ZOLLI FRERES de sa demande aux fins d'annulation du commandement de payer avant saisie-vente délivré à son encontre par la SA ARMATURES SPECIALES le 21 juillet 2011, pour la somme de 22.912,66 €, d'AVOIR dit que l'acte était régulier en la forme et valable sur le fond et d'AVOIR débouté la SAS ENTREPRISE ZOLLI FRERES de sa demande de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QU'« il est constant que la SA Société d'Armatures Spéciales, a réglé à la société Sew, en exécution des dispositions de l'arrêt de cette Cour du 28 avril 2005 la somme de 33.077,73 € le 25 mai 2005 ; qu'il est tout aussi constant que, par arrêt sur omission de statuer cette même Cour a ordonné la compensation des sommes dues entre elles par la société Sew et la société Entreprise Zolli Frères, compensation comprenant la somme de 33.077,23 € que devait verser la SA Entreprise Zolli Frères in solidum avec la SA Société d'Armatures Spéciales à la société Sew et versée antérieurement par la SA Société d'Armatures Spéciales ; que cette créance de la société Sew a donc été versée par la SA Société d'Armatures Spéciales et décomptée de la créance de la société Entreprise Zolli Frères ; qu'elle a donc été comptée deux fois ; que si la décision " réparatrice " de l'omission s'incorpore à la décisions "réparée", il n'en demeure pas moins qu'elle a une existence propre puisqu'elle donne ouverture à des voies de recours ; que la décision "réparatrice" est une décision constitutive plutôt que déclarative car elle résulte nécessairement de l'appréciation du juge qui la prend et qu'elle ne peut être considérée comme relevant simplement de l'appréciation du juge qui avait omis de statuer ; que, réparant une omission de statuer, elle n'a pas d'effet rétroactif car cela pourrait porter atteinte au principe de sécurité juridique ; que dès lors l'arrêt, rendu en janvier 2006, ne peut venir anéantir les effets du versement effectué par la SA Société d'Armatures Spéciales en 2005 à la société Sew ; que ce versement a pour effet de réduire à néant la condamnation de la SA d'Armatures Spéciales à garantir la société Entreprise Zolli Frères du versement de cette somme ; qu'il appartient à cette dernière et non à la SA Société d'Armatures Spéciales de se retourner contre les organes de la procédure collective de la société Sew afin de voir réintégrer cette somme dans sa créance à son encontre ; que le commandement de payer avant saisie-vente du 21 juillet 2011 émanant de la SA Société d'Armatures Spéciales est, par voie de conséquence, parfaitement régulier quant à la forme et quant au fond, pour la somme de 22.912,66 ¿, cette société étant créancière de la SAS Entreprise Zolli Frères à hauteur de la somme de 48.845,10 € TTC majorée des intérêts de retard au titre des factures impayées et ce suivant arrêt de cette Cour du 28 avril 2005 devenu définitif ; qu'il convient donc d'infirmer le jugement entrepris et de débouter la société Entreprise Zolli frères de sa demande tendant à voir déclarer nul le commandement de payer » ;

ALORS QUE la décision qui ordonne la compensation de deux créances réciproques connexes produit un effet rétroactif ; qu'en l'espèce, un arrêt de la Cour d'appel de Rouen du 28 avril 2005 a fixé les créances réciproques des sociétés SEW et ENTREPRISE ZOLLI FRERES ; qu'à cet égard, la Cour d'appel a dit que la société SEW était créancière de la société ENTREPRISE ZOLLI FRERES à concurrence de la somme de 57 771,50 €
(comprenant la somme de 33.077,23 €, due in solidum avec la société ARMATURES SPECIALES et pour laquelle cette société était tenue à garantie), et que la société ENTREPRISE ZOLLI FRERES était créancière de la société SEW à concurrence de la somme de 117 313,85 avec intérêts ; que par un arrêt rendu sur requête en omission de statuer en date du 26 janvier 2006, la Cour d'appel de Rouen a complété l'arrêt du 28 avril 2005 et ordonné la compensation des créances réciproques de ces deux sociétés au regard de leur caractère connexe ; qu'en suite de cette compensation, leurs dettes réciproques se sont éteintes à concurrence de la plus faible, opérant ainsi règlement de la somme de 33.077,23 € par la société ENTREPRISE ZOLLI FRERES, laquelle disposait d'un recours en garantie contre son sous-traitant à hauteur du même montant ; que pour écarter la demande aux fins d'annulation du commandement de payer du 21 juillet 2011 formée par la société ENTREPRISE ZOLLI FRERES, l'arrêt attaqué retient que la décision réparatrice du 26 janvier 2006 est une décision constitutive et non déclarative, privée d'effet rétroactif et ne pouvant réduire à néant le versement de la somme de 33.077 ¿ effectué le 25 mai 2005 par la société ARMATURES SPECIALES entre les mains des co-curateurs à la faillite SEW, en exécution de l'arrêt du 28 avril 2005 ; qu'en statuant ainsi, quand la rétroactivité attachée à la compensation des créances réciproques connexes ordonnée par la décision réparatrice avait nécessairement fait remonter l'effet extinctif de la compensation à la date de la décision complétée, en sorte que la société ENTREPRISE ZOLLI FRERES, qui avait payé à cette date, par compensation, la somme de 33.077, 23 € pour laquelle elle avait obtenu garantie de la société Armatures Spéciales, se trouvait finalement créancière à l'égard de celle-ci, ce qui privait de tout fondement le commandement de payer délivré à l'initiative de cette société, la Cour d'appel a violé les articles 1289 et 1291 du Code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Compensation


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.