par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 15 avril 2015, 13-22469
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Cour de cassation, chambre sociale
15 avril 2015, 13-22.469

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° s C 13-21. 306 et S 13-22. 469 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Mutuelle assurance de l'éducation en qualité d'attaché de direction, à compter du 29 septembre 2003 ; que le 11 octobre 2004, ce salarié a été désigné délégué syndical par la Fédération CFE-CGC de l'assurance ; que placé en arrêt de travail pour maladie le 7 décembre 2004 jusqu'à sa mise en invalidité le 7 décembre 2007, il a été licencié pour inaptitude définitive et impossibilité de reclassement le 28 octobre 2008, après autorisation de l'inspecteur du travail donnée le 15 octobre 2008 ; que contestant la validité de ce licenciement, M. X... a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir le paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen du pourvoi de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une somme au salarié à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :

1°/ que le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que le seul exercice par l'employeur de son pouvoir de direction ne peut caractériser un harcèlement moral en l'absence d'autres éléments ; qu'en considérant que la lettre du 26 novembre 2004 adressée au salarié et lui reprochant de ne pas accomplir les missions pour lesquelles il avait été employeur caractérisait un harcèlement moral, la cour d'appel a donc violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2°/ qu'un fait unique et isolé ne saurait constituer un harcèlement moral ; qu'en se fondant sur la seule et unique lettre de l'employeur du 26 novembre 2004 pour en déduire que M. X... faisait état de faits permettant de présumer qu'il avait été victime d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3°/ que le harcèlement moral suppose des agissements répétés et que la dégradation des conditions de travail soit provoquée par le comportement répétitif de l'employeur ou de l'un de ses subordonnés ; que les juges du fond doivent mettre en évidence le lien de causalité entre la faute invoquée et le dommage ; qu'en relevant que dans un certificat du 12 avril 2008, M. Y..., médecin psychiatre indiquait que M. X... le consultait régulièrement depuis janvier 2005 et que son patient présentait les signes cliniques évocateurs d'un état de stress post-traumatique et d'un état dépressif majeur, de profonde intensité et persistant dans le temps et qu'il était de nature à caractériser l'existence d'un lien entre l'état de santé du salarié et les agissements de l'employeur sans préciser en quoi l'employeur pouvait être l'origine de cette pathologie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

4°/ que le harcèlement moral suppose des agissements répétés et que la dégradation des conditions de travail soit provoquée par le comportement répétitif de l'employeur ou de l'un de ses subordonnés ; que les juges du fond doivent mettre en évidence le lien de causalité entre la faute invoquée et le dommage ; qu'en considérant que l'expertise effectuée par M. Z..., médecin, expert-psychiatre qui concluait que « M. X... présente depuis août 2004 un état dépressif sévère qu'il relie à un conflit professionnel ; il dit être victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur qui a porté plainte contre lui à l'époque » était de nature à caractériser l'existence d'un lien entre l'état de santé du salarié et les prétendus manquements fautifs de l'employeur quand celle-ci ne faisait que relater les dires de M. X... concernant la cause de son état dépressif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

5°/ que le harcèlement moral suppose des agissements répétés et que la dégradation des conditions de travail soit provoquée par le comportement répétitif de l'employeur ou de l'un de ses subordonnés ; que les juges du fond doivent mettre en évidence le lien de causalité entre la faute invoquée et le dommage ; que la cour d'appel a énoncé que l'inspecteur de travail soulignait dans sa décision du 15 octobre 2008 que « cette inaptitude peut s'expliquer par un litige ancien et non réglé sur le contrat de travail du salarié et que ce litige peut être à la source d'une situation de travail conflictuelle de nature à dégrader l'état de santé de M. X... » ; qu'en se fondant sur cette décision, laquelle se bornait à émettre une simple hypothèse concernant la cause de l'état de santé du salarié, pour en déduire l'existence d'un lien causal entre l'état de santé et les prétendus manquements de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

6°/ que le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en énonçant que les certificats médicaux et la décision de l'inspection du travail, dont elle a reproduit les termes, étaient de nature à démontrer l'existence d'un lien de causalité entre l'état de santé et les manquements prétendument imputés à l'employeur quand ni les certificats médicaux ni l'inspecteur du travail n'avaient reconnu un lien entre l'état de santé du salarié et le comportement de l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des documents précités et violé le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'au cours d'une réunion organisée le 24 novembre 2004, le président de la mutuelle avait demandé au salarié des explications sur son activité dans des conditions qui étaient apparues choquantes à l'un des participants, lequel évoquait une « exécution », que par une lettre du 26 novembre 2004, l'employeur avait, de façon injustifiée et exclusive d'un usage normal de son pouvoir de direction, reproché au salarié son absence totale d'exécution des tâches qui lui avaient été confiées depuis son embauche et enfin, que ce dernier avait dès le début du mois de novembre 2004 été écarté de la vie de l'entreprise, la cour d'appel, qui en a déduit, hors toute dénaturation, que le salarié avait été l'objet d'agissements répétés constitutifs de harcèlement moral, a légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen du même pourvoi :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une somme au salarié en exécution de la clause de garantie d'emploi, alors, selon le moyen, que la clause de garantie d'emploi suppose toujours, comme cause d'exception d'inexécution à l'obligation qu'elle comporte, les causes résultant du droit civil des contrats et reprises notamment par l'article 1134, alinéas 2 et 3 du code civil ; qu'il s'ensuit que l'employeur doit pouvoir se considérer comme affranchi de son obligation lorsque la rupture du contrat de travail est consécutive à l'inaptitude médicalement constatée du salarié laquelle constitue une cause de rupture qu'autorise la loi ; qu'en considérant qu'il y avait lieu de faire application de la clause de garantie stipulée au bénéfice du salarié au motif que l'employeur avait rompu le contrat avant l'expiration du délai de protection quand l'employeur s'était borné à rompre le contrat pour une cause que la loi autorise résultant de l'inaptitude médicalement constatée et de l'impossibilité de reclassement du salarié, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 2 ensemble l'article L. 1221-2 du code du travail ;

Mais attendu que le contrat comportant une clause de garantie d'emploi ne peut être rompu pendant la période couverte par la garantie qu'en cas d'accord des parties, de faute grave du salarié ou de force majeure ; qu'ayant constaté que l'inaptitude du salarié trouvait son origine dans la situation de harcèlement moral dont il avait été la victime, ce dont il résultait que la rupture ne procédait d'aucune de ces causes, l'arrêt n'encourt pas les griefs du moyen ;

Sur le troisième moyen de ce pourvoi :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une somme au salarié à titre de complément de rente invalidité, alors, selon le moyen :

1°/ qu'à défaut de précision sur l'obligation de maintien de la totalité du salaire brut en cas d'invalidité, l'employeur est autorisé à maintenir ni plus ni moins que le salaire net ; qu'en faisant droit à la demande du salarié, cependant qu'elle constatait que le calcul opéré par M. X... aboutissait à ce qu'il perçoive un revenu supérieur par rapport au salaire net perçu lorsqu'il était en activité, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ que le préjudice résultant de l'absence de pouvoir bénéficier d'un complément de rente invalidité en raison du manquement de l'employeur consiste en la perte de chance d'obtenir par une souscription individuelle à un contrat de prévoyance une garantie comparable ; que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; qu'en condamnant la MAE au paiement d'une somme de 151 159, 68 euros correspondant à la somme que le salarié aurait dû percevoir s'il avait bénéficié du contrat d'assurance groupe, quand ce préjudice consistait seulement en la perte d'une chance, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la mutuelle avait communiqué au salarié des informations erronées sur l'étendue de ses droits, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle devait l'indemniser pour le préjudice résultant pour lui de l'absence d'une garantie dont il croyait légitimement pouvoir bénéficier compte tenu des stipulations contractuelles ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le deuxième moyen du pourvoi du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de réduire à une certaine somme l'indemnité due au titre de la garantie d'emploi, alors, selon le moyen :

1°/ que la clause de garantie d'emploi, même assortie d'une indemnité forfaitaire stipulée par avance, ne peut être qualifiée de clause pénale dès lors qu'elle n'a pas pour objet d'indemniser le licenciement à proprement parler, mais la perte définitive, pour le salarié, du statut qui était le sien avant son embauche ou la perte de chance de retrouver un emploi équivalent en cas de licenciement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui a qualifié la clause de garantie d'emploi de clause pénale au seul motif qu'elle était assortie d'une indemnité forfaitaire, sans avoir recherché, comme M. X... le soutenait dans ses conclusions d'appel, si celle-ci n'avait pas été stipulée au contrat de travail en contrepartie du renoncement définitif du salarié à son activité libérale d'expert comptable et à l'impossibilité dans laquelle il aurait été, en cas de licenciement, de retrouver sa situation professionnelle antérieure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail, 1134 et 1147 du code civil ;

2°/ que l'exécution de la clause de garantie d'emploi, au même titre que l'ensemble des autres obligations essentielles des parties au contrat, est suspendue pendant toute la durée de la suspension du contrat de travail du salarié malade ; qu'en l'espèce, en refusant de prendre en compte, au titre de la garantie d'emploi restant à courir à compter du licenciement de M. X..., la période correspondant à la durée de la suspension de son contrat de travail pour maladie, au motif erroné qu'aucune stipulation n'avait été prévue en ce sens, quant il s'agissait là d'un simple effet de la suspension du contrat de travail sur l'exécution des obligations respectives des parties, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1226-1, L. 1226-2 du code du travail et 1134 du code civil ;

3°/ que lorsque la dégradation de l'état de santé du salarié est due à une faute de l'employeur, celui-ci ne saurait lui opposer la période de suspension du contrat de travail pour maladie, afin de réduire d'autant la période de garantie d'emploi ; qu'en refusant de prolonger la garantie d'emploi des périodes durant lesquels le contrat de travail de M. X... avait été suspendu en raison de la maladie, quand elle avait constaté que cette suspension du contrat de travail était due au harcèlement moral de la MAE, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail ;

4°/ que lorsque la clause de garantie d'emploi est assortie d'une clause pénale, le juge ne peut réduire le montant de l'indemnité contractuelle en dessous du minimum qui lui est dû de plein droit et qui correspond au paiement de l'ensemble des salaires qu'il aurait dû percevoir jusqu'à la fin de la garantie ; qu'en l'espèce, en réduisant à une somme de 300 000 euros, équivalant à vingt-huit mois de salaire, le montant de l'indemnité contractuelle due à M. X..., au motif de son caractère manifestement excessif, quand elle avait retenu qu'au jour de son licenciement, il restait trente-cinq mois jusqu'à la fin de la garantie, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations desquelles il résultait que le salarié ne pouvait percevoir une indemnité inférieure à trente-cinq mois de salaire, a violé les articles L. 1221-1 du code du travail, 1134 et 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'interprétant la clause contractuelle qui prévoyait le versement d'une indemnité forfaitaire en cas de violation de la garantie d'emploi, la cour d'appel, qui a fait ressortir que cette clause n'avait pas été stipulée pour tenir compte de la difficulté pour le salarié de retrouver sa situation antérieure d'expert comptable libéral, a pu décider qu'elle constituait une clause pénale qu'elle a réduite dans des proportions qu'elle a souverainement évaluées, après avoir constaté que l'indemnité convenue était manifestement excessive ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi du salarié :

Vu la loi des 16-24 août 1790 et les articles L. 2421-3, L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;

Attendu que pour se déclarer incompétente pour statuer sur la demande de nullité du licenciement du salarié, la cour d'appel énonce qu'en vertu du principe de séparation des pouvoirs, le juge judiciaire ne peut, lorsqu'une autorisation de licenciement a été accordée, apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement, qu'en l'espèce, l'autorisation administrative de licenciement pour inaptitude en date du 15 octobre 2008 n'a fait l'objet d'aucun recours devant le juge administratif, qu'ainsi, le salarié ne peut plus contester la validité de son licenciement en considérant que l'inaptitude prononcée a pour origine le harcèlement moral de son employeur ;

Attendu cependant que dans le cas où une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé est motivée par son inaptitude physique, il appartient à l'administration du travail de vérifier que l'inaptitude physique du salarié est réelle et justifie son licenciement ; qu'il ne lui appartient pas en revanche, dans l'exercice de ce contrôle, de rechercher la cause de cette inaptitude, y compris dans le cas où la faute invoquée résulte d'un harcèlement moral dont l'effet, selon les dispositions combinées des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 du code du travail, serait la nullité de la rupture du contrat de travail ; que, ce faisant, l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que conformément à l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen du pourvoi du salarié entraîne la cassation par voie de conséquence sur les troisième et quatrième moyens ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de nullité du licenciement fondée sur le harcèlement moral et en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes d'indemnité de préavis, de solde de treizième mois, de dommages-intérêts pour perte de droits à la retraite, pour perte d'une chance de percevoir le remboursement de ses frais de santé à venir et pour perte de salaire pendant sept ans, l'arrêt rendu le 4 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ces points la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société Mutuelle assurance de l'éducation aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mutuelle assurance de l'éducation à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze avril deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Mutuelle assurance de l'éducation, demanderesse au pourvoi n° C 13-21. 306.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Mutuelle Assurance l'Education (MAE) à payer à Monsieur Francis X... la somme de 30. 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif au harcèlement moral subi,

AUX MOTIFS QU'aux termes des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, " aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel " ; que lorsque le salarié établit des faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; sur les faits invoqués par le salarié ; que Monsieur Francis X... produit une note (pièce n° 199) dans laquelle il relate ses relations de travail d'octobre 2004 à décembre 2007, et en particulier l'attitude à son égard de Monsieur Edgard E... qui, selon le salarié, l'a mis à l'écart de la MAE après sa note d'étude sur les dysfonctionnements majeurs de la société, et s'est acharné sur lui par de multiples procédures judiciaires ; sur le comportement de l'employeur ; que Monsieur Francis X... était attaché de direction, auprès du directeur administratif et financier, Monsieur Marc B..., et avait notamment en charge (note du 25 août 2003 de ce dernier) l'application et la mise en oeuvre des objectifs relevant des domaines comptable et financier de l'entité MAE la détermination des moyens nécessaires à l'atteinte de ces objectifs ; le contrôle et le suivi des résultats au regard des objectifs fixés ; que son contrat de travail prévoyait une rémunération annuelle brute de 113. 940 ¿ (9. 495 ¿ brut par mois) pour un forfait de 199 jours de travail dans l'année, outre une prime de vacance et un treizième mois versés respectivement en juin et août, et que cette rémunération intégrait une reprise d'ancienneté de 22 ans prévue à la Convention d'Etablissement ; que le contrat prévoyait également une clause de garantie d'emploi pendant 8 ans, sauf en cas de rupture pour faute lourde, et le versement d'une indemnité contractuelle en cas de rupture pendant ce délai d'un montant net correspondant à celui des salaires bruts restant à percevoir jusqu'au terme de la période de garantie d'emploi stipulée ci-dessus ; que le président de la MAE a adressé à Monsieur Francis X... une lettre recommandée datée du 26 novembre 2004 contenant les termes suivants : " (...) A ce jour, nous n'avons obtenu de vous aucun résultat ni même aucune information écrite sur l'état d'avancement de vos travaux ; vous ne nous avez pas davantage alertés sur les éventuelles difficultés qui vous auraient empêché de mener à bien votre mission ; les commissaires aux comptes du groupe MAE nous ont écrit pour déplorer cet état de fait qui risque de mettre le conseil d'administration dans l'impossibilité de rendre compte de l'état financier et budgétaire du groupe lors de la prochaine assemblée générale ; la réunion que nous avons tenue avec vous au siège national à Paris en présence des commissaires aux comptes le 24 novembre au soir n'a rien apporté, hormis les arguties que vous avez jugées bon de développer au sujet de la définition du périmètre de la combinaison (...) " ; que cette lettre contenait ensuite un calendrier à respecter par le salarié pour l'exécution de certaines tâches ; que d'une part, cette seule et unique lettre de " rappel " adressée par Monsieur Edgard E... à Monsieur Francis X... affirme après plus d'un an de présence du salarié son absence totale d'exécution des tâches qui lui ont été confiées, alors même que les pièces produites par ce dernier établissent l'envoi régulier de notes d'étude et d'analyses sur différents aspects de ses fonctions ; qu'ainsi, et pour en citer quelque unes en matière de combinaison de comptes : un document du 15 novembre 2004 à destination de Monsieur Marc B... sur la combinaison des comptes MAE au 31 août 2004, un dossier consolidation 2002-2003 pour les commissaires aux comptes, comptes consolidés du groupe MAE au 31 août 2003 ; que Monsieur Francis X... a énuméré ses travaux ou les travaux auxquels il a participé dans une note récapitulative produite aux débats en justifiant à chaque fois de ceux-ci ; que la MAE ne formule devant la cour aucune observation sur leur existence ; qu'au demeurant, les auditions des commissaires aux comptes devant les services de police-dans le cadre de la procédure pénale pour abus de confiance et recel d'abus de confiance-indiquent qu'ils ont même félicité Monsieur Francis X... pour la mise en place d'un logiciel, et Monsieur Gonzague C..., salarié de la MAE, atteste que " le 18 mai 2004, lors d'une réunion avec le commissaire aux comptes de I'Umae, celui-ci a fait les éloges du dossier de consolidation des comptes 2003, dossier établi par Monsieur Francis X... " ; que d'autre part, cette lettre fait allusion à une réunion en date du 24 novembre 2004 où des explications avaient été demandées à Monsieur Francis X..., selon des méthodes peu acceptables puisqu'elles sont apparues choquantes à Monsieur Thierry D..., un des sous-directeurs de la société (et à l'époque directeur par intérim), présent à cette réunion, et qui adressait à Monsieur Edgard E... un courriel le soir même de celle-ci libellé comme suit : " Un directeur, ou même une personne assurent l'intérim de cette fonction, n'aurait pas accepté d'assister sans dire mot à l'exécution par le président et les commissaires aux comptes, de l'un de ses collaborateurs, ce dernier fût-il délégué syndical, comme je l'ai malheureusement fait ce soir ; je vous ai déjà entretenu de ma conception de la dignité professionnelle, celle qui, je le sais, entretient la confiance que les cadres de l'entreprise m'accordent depuis longtemps pour le bien de celle-ci ; je ne suis donc pas, je vous le répète car je vous l'ai déjà dit à plusieurs reprises, la personne de cette situation d'intérim " ; que d'ailleurs, Monsieur Francis X... aura son second arrêt de travail pour maladie à compter du 7 décembre 2004 ; qu'il est opportun de relever que quelques jours auparavant lors d'une réunion du conseil d'administration MAE et Umae en date du 5 octobre 2004, un désaccord avait eu lieu entre Messieurs Edgard E... et Marc B... sur un dossier particulier et après lui avoir demandé de sortir, Monsieur Edgard E... avait rappelé des dossiers " mal gérés " car non gérés en concertation avec les élus, et notamment " l'embauche de l'attaché de direction sans proposition du contrat de travail au président, avant signature ", précisant même " je n'écarte pas la découverte d'engagements non concertés et non souhaités " ; que d'ailleurs, quelques jours cette fois après l'envoi de la lettre du 26 novembre 2004, lors d'une réunion du conseil d'administration du 8 décembre 2004, " convoqué pour une décision à prendre concernant une action pénale à intenter dans l'intérêt de la Mutuelle Assurance de l'Education, Monsieur Edgard E... précisant alors que " le fond du problème repose sur le contrat de travail de l'attaché de direction signé par l'intéressé et le directeur avec inclusion de conditions financières exorbitantes le directeur ayant dans ce cas précis abusé de la confiance du président directeur général, l'attaché de direction pourrait, quant à lui être poursuivi pour recel d'abus de confiance " ; que le conseil d'administration votait le même jour l'autorisation demandée ; qu'enfin durant les semaines avant son second arrêt pour maladie, Monsieur Francis X... sera écarté de la vie de l'entreprise, en n'étant plus destinataire des notes et en se voyant refuser de présenter devant les instances de l'entreprise, les travaux la concernant ; que parallèlement, une procédure de licenciement de Monsieur Marc B... sera engagée, celui-ci indiquant dans une lettre adressée à l'inspection du travail et produite aux débats " avoir été licencié avec la plus extrême violence (y compris en subissant des vexations et tous autres procédés d'un autre âge) le 16 novembre 2004 pour faute grave et poursuivi pour abus de confiance ", et également avoir été informé de " pressions professionnelles à l'égard de trois de mes anciens collaborateurs, Messieurs F..., D..., et G... " ; que les pièces 130676/ MAM/ CBV produites établissent d'ailleurs pour les deux premiers des arrêts de travail pour maladie de plusieurs mois à compter de l'année 2005 ; que dès le 21 octobre 2004, la MAE a saisi le tribunal d'instance de Rouen d'une action tendant à l'annulation de la désignation syndicale de Monsieur Francis X... et a formé un pourvoi contre cette décision ; qu'entre-temps, un dépôt de plainte avec constitution de partie civile entre les mains du juge d'instruction de Rouen était adressé le 20 janvier 2005 par la MAE pour abus de confiance à l'encontre de Monsieur Marc B... et recel d'abus de confiance à l'encontre de Monsieur Francis X... que l'ordonnance de non-lieu sera frappée d'appel et l'arrêt confirmatif d'un pourvoi en cassation par la MAE ; que la multiplicité sur une même période des procédures dont une procédure pénale au cours desquelles étaient " réactivés " les reproches de l'employeur tendant à l'absence de tout travail de son salarié pouvaient, compte tenu du contexte très litigieux de la relation de travail, constituer une pression supplémentaire sur le salarié, lui-même alors en arrêt de travail pour maladie ; sur les éléments médicaux ; que dans un certificat du 12 avril 2008 le docteur Y..., médecin psychiatre indique que Monsieur Francis X... le consulte régulièrement depuis janvier 2005 et que son patient présente " les signes cliniques évocateurs d'un état de stress post-traumatique et d'un état dépressif majeur, de profonde intensité et persistant dans le temps " ; qu'une expertise effectuée par le docteur Z..., expert psychiatre conclut le 26 avril 2011 que " Monsieur Francis X... présente depuis août 2004 un état dépressif sévère qu'il relie à un conflit professionnel, il dit être victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur qui a porté plainte contre lui à l'époque ", et relève deux hospitalisations en août 2007 pour un état dépressif sévère à l'admission et en janvier 2004 pour risque imminent de passage à l'acte suicidaire ; que le certificat médical du docteur Y... en date du 14 décembre 2011 reprend le diagnostic d'état dépressif sévère et d'un stress post-traumatique consécutif à une souffrance au travail et mentionne que son patient présente toujours une souffrance morale et a toujours besoin d'un traitement ; que d'ailleurs, l'inspecteur de travail souligne dans sa décision du 15 octobre 2008 que cette inaptitude peut s'expliquer par un litige ancien et non réglé sur le contrat de travail du salarié et que ce litige peut être à la source d'une situation de travail conflictuelle de nature à dégrader l'état de santé de Monsieur Francis X... ; que ces éléments sont suffisants pour considérer que l'état de santé très dégradé de Monsieur Francis X... est en lien avec la situation professionnelle qui était la sienne à compter de l'automne 2004 et également durant son arrêt de travail pour maladie ; qu'en effet, les circonstances de l'envoi de la lettre du 27 novembre 2004 ne démontrent pas par la direction de la MAE une utilisation normale de son pouvoir de direction et de celui de demander des comptes à son salarié sur l'exécution de son travail, et ce d'autant que ces reproches infondés seront à chaque fois " réactivés " au cours des différentes procédures judiciaires ; qu'il convient ainsi de considérer que ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; sur les éléments justificatifs de l'employeur ; que pour justifier l'absence de tout harcèlement moral à l'encontre de son salarié la MAE fait valoir les éléments suivants : qu'en premier lieu, elle rappelle la liberté pour tout citoyen d'agir en justice et précise qu'elle n'avait pas le choix, ayant été découvert au moment de la désignation syndicale de Monsieur Francis X... les avantages exorbitants inclus dans son contrat de travail dont elle ignorait jusque-là le contenu ; que sur ce point, et comme d'ailleurs l'a souligné le conseil de prud'hommes, le droit d'agir en justice, incluant l'épuisement de toutes les voies de droit, rie peut être sanctionné qu'en cas de recours abusif à ce droit ; qu'en l'espèce, si Monsieur Edgard E... avait toute possibilité pour avoir connaissance des conditions dans lesquelles Monsieur Francis X... avait été embauché puisqu'il n'ignorait pas la décision de Monsieur Marc B... de le recruter, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas établi dans le cadre de cette procédure qu'il avait connaissance au moment où celui-ci a été signé du contenu de ce contrat ; qu'ainsi, étant tenu civilement de l'exécution de ce contrat de travail, il n'avait d'autre choix d'engager une procédure pénale pour abus de confiance ; que le fait que la procédure pénale se soit terminée par une décision de non-lieu est en soi insuffisante pour faire présumer que celle-ci avait un caractère abusif ; que l'introduction des procédures judiciaires contre Monsieur Francis X... ne peut être ainsi constitutif d'un harcèlement moral ; qu'en second lieu, elle estime qu'il ne peut lui être reproché d'exiger que son salarié exécute son travail et que les reproches justifiés ne constituent pas des agissements de harcèlement moral ; que toutefois, en écrivant par lettre recommandée à son salarié, " A ce jour, nous n'avons obtenu de vous aucun résultat ni même aucune information écrite sur l'état d'avancement de vos travaux ", la MAE ne peut soutenir, au vu des éléments produits par le salarié et rappelés ci-dessus, qu'il s'agit de reproches justifiés ; qu'elle indique ensuite que Monsieur Francis X... rendait compte de son travail à Monsieur Marc B... mais que ce dernier n'en référait pas ou presque pas au PDG de la MAE, " qui n'a fait le constat tout aussi accablant qu'objectif de l'inactivité de Monsieur X... qu'au moment où se sont révélées les difficultés conduisant au licenciement de Monsieur B... lui-même " ; que cependant, outre que la lettre litigieuse reproche directement au salarié son absence de travail, le salarié a listé les travaux accomplis dont certains approuvés par le conseil d'administration de la MAE ont été présentés à l'assemblée générale, d'autres ont été élaborés suite à des réunions avec des responsables d'entités départementales du groupe MAE ou les commissaires aux comptes ou les banquiers de la MAE ; qu'ainsi, la MAE ne peut soutenir qu'elle ne pouvait avoir connaissance du travail fourni par Monsieur Francis X... que par l'intermédiaire du seul Monsieur Marc B... ; qu'au demeurant, à supposer même que ce dernier n'ai jamais communiqué à Monsieur Edgard E... les travaux effectués par le premier, la MAE n'explique pas alors en quoi Monsieur Francis X... en serait responsable et explique encore moins la teneur de la lettre du 26 novembre 2004 ; qu'ainsi que les agissements relevés cidessus constitutifs de harcèlement moral ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail de Monsieur Francis X... susceptible, au vu des éléments médicaux versés aux débats, d'altérer sa santé mentale ; qu'il convient pour réparer le préjudice subi de lui allouer une somme de 30. 000 € titre de dommages et intérêts,

ALORS, D'UNE PART, QUE le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que le seul exercice par l'employeur de son pouvoir de direction ne peut caractériser un harcèlement moral en l'absence d'autres éléments ; qu'en considérant que la lettre du 26 novembre 2004 adressée au salarié et lui reprochant de ne pas accomplir les missions pour lesquelles il avait été employeur caractérisait un harcèlement moral, la cour d'appel a donc violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail,

ALORS, D'AUTRE PART, QU'un fait unique et isolé ne saurait constituer un harcèlement moral ; qu'en se fondant sur la seule et unique lettre de l'employeur du 26 novembre 2004 pour en déduire que Monsieur X... faisait état de faits permettant de présumer qu'il avait été victime d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail,

ALORS, EN OUTRE, QUE le harcèlement moral suppose des agissements répétés et que la dégradation des conditions de travail soit provoquée par le comportement répétitif de l'employeur ou de l'un de ses subordonnés ; que les juges du fond doivent mettre en évidence le lien de causalité entre la faute invoquée et le dommage ; qu'en relevant que dans un certificat du 12 avril 2008 le docteur Y..., médecin psychiatre indiquait que Monsieur Francis X... le consultait régulièrement depuis janvier 2005 et que son patient présentait les signes cliniques évocateurs d'un état de stress post-traumatique et d'un état dépressif majeur, de profonde intensité et persistant dans le temps et qu'il était de nature à caractériser l'existence d'un lien entre l'état de santé du salarié et les agissements de l'employeur sans préciser en quoi l'employeur pouvait être l'origine de cette pathologie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail,

ALORS, DE PLUS, QUE le harcèlement moral suppose des agissements répétés et que la dégradation des conditions de travail soit provoquée par le comportement répétitif de l'employeur ou de l'un de ses subordonnés ; que les juges du fond doivent mettre en évidence le lien de causalité entre la faute invoquée et le dommage ; qu'en considérant que l'expertise effectuée par le docteur Z..., expert psychiatre qui concluait que « Monsieur Francis X... présente depuis août 2004 un état dépressif sévère qu'il relie à un conflit professionnel ; il dit être victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur qui a porté plainte contre lui à l'époque » était de nature à caractériser l'existence d'un lien entre l'état de santé du salarié et les prétendus manquements fautifs de l'employeur quand celle-ci ne faisait que relater les dires de Monsieur X... concernant la cause de son état dépressif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail,

ALORS, PAR AILLEURS, QUE le harcèlement moral suppose des agissements répétés et que la dégradation des conditions de travail soit provoquée par le comportement répétitif de l'employeur ou de l'un de ses subordonnés ; que les juges du fond doivent mettre en évidence le lien de causalité entre la faute invoquée et le dommage ; que la cour d'appel a énoncé que l'inspecteur de travail soulignait dans sa décision du 15 octobre 2008 que « cette inaptitude peut s'expliquer par un litige ancien et non réglé sur le contrat de travail du salarié et que ce litige peut être à la source d'une situation de travail conflictuelle de nature à dégrader l'état de santé de Monsieur Francis X... » ; qu'en se fondant sur cette décision, laquelle se bornait à émettre une simple hypothèse concernant la cause de l'étant de santé du salarié, pour en déduire l'existence d'un lien causal entre l'état de santé et les prétendus manquements de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail,

ALORS, ENFIN, QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en énonçant que les certificats médicaux et la décision de l'inspection du travail, dont elle a reproduit les termes, étaient de nature à démontrer l'existence d'un lien de causalité entre l'état de santé et les manquements prétendument imputés à l'employeur quand ni les certificats médicaux ni l'inspecteur du travail n'avaient reconnu un lien entre l'état de santé du salarié et le comportement de l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des documents précités et violé le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Mutuelle Assurance l'Education (MAE) à payer à Monsieur Francis X... la somme de 300. 000 € au titre de l'indemnité fondée sur la clause de garantie d'emploi,

AUX MOTIFS PROPRES QUE le contrat de travail contient la clause suivante : " la Mutuelle Assurance de l'Education s'engage, sous réserve que la période d'essai se révèle satisfaisante, à vous garantir la stabilité de votre emploi pendant une période de huit ans courant à compter de votre entrée dans la société ; toutefois, au cas où le présent contrat viendrait à être rompu par la Mutuelle Assurance de l'Education ou par tout autre entité juridique s'y substituant et pour quelque cause que ce soit à l'exception d'une faute lourde qui vous serait imputable, (...), la Mutuelle Assurance de l'Education ou par tout autre entité juridique s'y substituant s'obligerait à vous verser, outre votre indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité contractuelle d'un montant net correspondant celui des salaires bruts restant à percevoir jusqu'au terme de la période de garantie d'emploi stipulée ci-dessus ; au cas où le présent contrat viendrait à être rompu pendant les trois dernières années de la période de garantie d'emploi par la Mutuelle Assurance de l'Education ou par tout autre entité s'y substituant, et pour quelque cause que ce soit à l'exception d'une faute lourde qui vous serait imputable, la Mutuelle Assurance de l'Education ou par tout autre entité s'y substituant, s'obligerait à vous verser, outre votre indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité contractuelle d'un montant net correspondant à trois années de rémunération brute " ; sur la validité de cette clause ; que la MAE estime la clause illicite au motif qu'elle met à néant toute possibilité pour l'employeur de licencier ; que la clause de garantie d'emploi est celle qui restreint pendant une durée déterminée le droit par l'employeur de résilier unilatéralement le contrat de travail, qu'une telle clause est licite sauf si l'employeur renonce purement et simplement au droit de résiliation lequel est d'ordre public ; qu'en l'occurrence, l'employeur n'est pas privé totalement de sa faculté de rompre le contrat de travail puisque la clause trouve sa limite dans la faute lourde du salarié et la restriction du droit de licencier est limitée dans le temps ; que la clause est donc licite et qu'ainsi, l'employeur, en rompant le contrat de travail avec l'expiration du délai de 8 ans-lequel expirait le 29 septembre 2011, a commis une faute contractuelle qui doit être indemnisée par le versement de l'indemnité contractuelle prévue au contrat ; que Monsieur Francis X... considère que la clause de garantie doit s'appliquer à compter du 28 octobre 2008 jusqu'à son licenciement le 29 septembre 2011 mais également pendant les périodes correspondant aux arrêts de travail pour maladies, soit du 7 décembre 2004 au 29 septembre 2011 après déduction de la période du 20 janvier 2008- un mois après la visite de reprise-au 30 octobre 2008, estimant que durant ces périodes, son contrat de travail était suspendu et par conséquence l'était aussi la période de garantie prévue par ladite clause ; que toutefois, la clause contractuelle de garantie ne contient aucune disposition particulière quant au prolongement du délai de garantie d'emploi en cas de suspension du contrat de travail pour maladie, et ne prend en compte que la date de la rupture du contrat par l'employeur, pour déterminer le délai restant à courir à partir duquel l'indemnité sera calculée ; qu'ainsi, la rupture du contrat étant intervenue le 28 octobre 2008 pendant les trois dernières années de la période de garantie d'emploi, soit du 29 septembre 2008 au 29 septembre 2011, Monsieur Francis X... peut prétendre à une somme de 386. 840, 16 € (36 mois x 10. 745, 58 €). Sur la réduction du montant de l'indemnité contractuelle ; que lorsque le montant de l'indemnité due par l'employeur en cas de violation de la clause de garantie d'emploi est précisé, l'indemnité constitue une clause pénale ; qu'en l'occurrence, les parties ont bien procédé à une évaluation préalable et forfaitaire de l'indemnité à laquelle donnerait lieu l'inexécution de la clause de garantie d'emploi stipulée en faveur du salarié ; qu'en outre, il n'est pas exact de dire, comme le soutient Monsieur Francis X... que l'indemnité n'a pas de caractère forfaitaire car elle prévoit des dommages et intérêts dégressifs dans le temps de huit années de salaire à zéro, puisque le second alinéa de la clause prévoit une indemnisation correspondant à 3 ans de salaires si le contrat a été rompu au cours des trois dernières années de la période de garantie d'emploi ; que l'indemnité contractuelle ne peut donc jamais être inférieure à 3 années de salaires ; que celle-ci a ainsi le caractère d'une clause pénale qui peut être modérée ou augmentée si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que la MAE l'estime excessive en ce qu'elle est exorbitante du droit commun, est attentatoire aux intérêts de la MAE et a été accordée lors de l'embauche de Monsieur Francis X... dans des conditions suspectes ; qu'il convient de rappeler que la procédure pénale pour recel d'abus de confiance contre Monsieur Francis X... s'est terminée par un arrêt de non-lieu ; que par ailleurs la MAE ne dit pas en quoi le montant de l'indemnité contractuelle serait attentatoire à ses intérêts et ne produit aucune pièce notamment financière à ce titre ; que cependant, si le fait que Monsieur Francis X... qui exerçait une activité libérale d'expert-comptable/commissaire aux comptes pendant 9 ans - avant d'être embauché par la MAE à l'âge de 48 ans pouvait justifier les clauses avantageuses incluses dans son contrat de travail, compte tenu des concessions effectuées notamment financières, il convient toutefois de relever que la garantie d'emploi d'une durée relativement longue et ne pouvant être remise en cause que par la faute lourde du salarié, laquelle implique l'intention de nuire è son employeur, combinée à une reprise d'ancienneté à 22 ans apparaît excessive compte tenu des concessions financières effectuées par le salarié ; qu'en effet, les pièces produites établissent qu'en 2002, la rémunération perçue par ce dernier était en 2002 de 8. 500 € brut mensuel et c'est seulement en 2003 que cette rémunération de 23. 280 € brut mensuel correspondait à plus du double du salaire accepté par le salarié ; qu'il convient ainsi de réduire l'indemnité manifestement excessive, à une somme de 300. 000 €,

ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE Monsieur X... rappelle que son contrat de travail comportait une clause lui garantissant une stabilité d'emploi d'une durée de 8 ans ; qu'il met en avant que cette clause prévoyait, au cas où son contrat de travail viendrait à être rompu par la MAE pour quelque cause que ce soit à l'exception d'une faute lourde, que la MAE s'obligerait à lui verser une indemnité nette contractuelle d'un montant correspondant à celui des salaires bruts restant à percevoir jusqu'au terme de la période de garantie d'emploi ; qu'il prétend donc au versement de l'indemnité contractuelle de la date de suspension de son contrat de travail pour maladie le 8 décembre 2004 jusqu'au 29 septembre 2011 ; que la MAE, de son côté, assure que Monsieur E..., président, n'a eu connaissance du contenu du contrat de travail, signé par son directeur, Monsieur B... et Monsieur X..., qu'en octobre 2004 ; qu'il a été mis devant le fait accompli, ce qui l'a amené à déposer le 20 janvier 2005 une plainte pénale contre Monsieur X... pour recel d'abus de confiance au tribunal de grande instance de Rouen ; qu'elle renvoie à la décision de non-lieu rendue le 24 janvier 2008 par le juge d'instruction du tribunal de grande instance où le juge relève que l'élément matériel de l'infraction existe et que la garantie d'emploi concédée à Monsieur X... est exorbitante (pièce 14) ; qu'elle souligne que la clause ne prévoit nullement le versement des salaires correspondants à la période restant à courir mais le versement d'une indemnité contractuelle ; qu'il s'agit d'une clause pénale au sens de l'article 1226 du code civil dont le montant de l'indemnité peut être réduit dès lors que la clause présente un caractère manifestement excessif, ce qui est le cas ; sur ce, le Conseil considère : que la clause de garantie d'emploi inscrite au contrat de travail de Monsieur X... est une clause pénale ; que cette clause pénale est excessive en tant qu'elle garantit à Monsieur X... une stabilité d'emploi d'une durée de 8 ans et le versement d'une indemnité contractuelle nette d'un montant correspondant à celui des salaires bruts restant à percevoir jusqu'au terme de la période de garantie d'emploi ; que les raisons énoncées par Monsieur X... et reprises en pages 47 et 48 de ses conclusions, pour justifier la durée et le montant de l'indemnité contractuelle, (abandon de son métier d'expert-comptable et commissaire aux comptes, cessation de l'activité indépendante au sein d'un cabinet prospère, renonciation à des revenus très largement supérieurs, prise d'un poste à risque compte tenu de ses attributions et de son âge), ne sauraient prospérer au motif qu'il ne démontre aucune contrainte de la part de la MAE altérant sa libre décision d'entrer à son service ; que le caractère excessif ou exorbitant de la clause de garantie d'emploi est souligné et jugé comme tel par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Rouen, dans sa décision rendue le 21 janvier 2008 (cote 5, pièce 14), où il dit que l'élément matériel de l'infraction existe et que la garantie d'emploi concédée à Monsieur X... est exorbitante ; que le juge d'instruction relève à ce titre : " la garantie d'emploi est la partie contestable du contrat de travail de Monsieur Francis X... d'autant que : cette garantie d'emploi se cumule avec la reprise de 22 ans d'ancienneté de ce dernier ; cette garantie d'emploi joue même en cas de faute grave (faute qui empêche le maintien du salarié dans l'entreprise), d'après ses propres déclarations, Monsieur Francis X... était demandeur d'un tel poste car fatigué de ses activités en libéral, Monsieur Francis X... n'apporte pas la preuve qu'il était rémunéré davantage avant de rejoindre la MAE ; qu'au contraire, il écrit que sa rémunération est dans la continuité de sa rémunération précédente lorsqu'il défend sa désignation comme délégué syndical ; et que pour ses revenus 2002, il déclare 125. 241 € " ; que la garantie d'emploi ne pourrait produire effet qu'à compter du 28 octobre 2008, date de notification du licenciement et non à partir du 7 décembre 2004, date de l'interruption du travail, comme le prétend à tort Monsieur X...,

ALORS QUE la clause de garantie d'emploi suppose toujours, comme cause d'exception d'inexécution à l'obligation qu'elle comporte, les causes résultant du droit civil des contrats et reprises notamment par l'article 1134, alinéas 2 et 3 du code civil ; qu'il s'ensuit que l'employeur doit pouvoir se considérer comme affranchi de son obligation lorsque la rupture du contrat de travail est consécutive à l'inaptitude médicalement constatée du salarié laquelle constitue une cause de rupture qu'autorise la loi ; qu'en considérant qu'il y avait lieu de faire application de la clause de garantie stipulée au bénéfice du salarié au motif que l'employeur avait rompu le contrat avant l'expiration du délai de protection quand l'employeur s'était borné à rompre le contrat pour une cause que la loi autorise résultant de l'inaptitude médicalement constatée et de l'impossibilité de reclassement du salarié, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 2 ensemble l'article L. 1221-2 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Mutuelle Assurance l'Education (MAE) à payer à Monsieur Francis X... la somme de 151. 169, 68 € au titre du complément rente invalidité,

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail du 22 septembre 2003 fait bénéficier à Monsieur Francis X... la couverture sociale du Bcac et une couverture prévoyance et santé complémentaire prise en charge par la société MAE, prévoyant notamment (régime BAC inclus) une rente annuelle égale à 100 % du salaire brut annuel sous déduction des prestations de la sécurité sociale en cas d'invalidité permanente (2 catégorie de la sécurité sociale) ; qu'il est constant que Monsieur Francis X... a été placé en invalidité catégorie 2 le 7 décembre 2007 et qu'il n'a pas perçu la rente prévue, la MAE indiquant n'avoir pu remplir ses obligations faute d'avoir obtenu les justificatifs des indemnités journalières perçues, et qu'au demeurant, n'étant pas informée de l'existence du contrat de travail, elle n'a pas souscrit l'adhésion à un contrat d'assurance spécifique ; que cependant, la société MAE dont la plainte avec constitution de partie civile pour abus de confiance s'est terminée par un non-lieu, est tenue des engagements souscrits en son nom, ce d'autant qu'elle n'a jamais remis en cause les compétences juridiques de Monsieur Marc B... pour signer un contrat de travail, que par ailleurs elle produit deux lettres de rappel adressées à Monsieur Francis X... des 23 mars et 13 mai 2005 qui concernent la prise en charge des indemnités journalières complémentaires lorsque le salarié était en arrêt de travail pour maladie, puisqu'à cette période, il n'était pas encore placé en invalidité ; qu'au demeurant elle ne justifie pas avoir répondu aux demandes d'indemnisation au titre du complément de rente invalidité faites par le salarié les 29 novembre 2007 et 29 mai 2008 ; qu'ainsi, en application des dispositions contractuelles, la MAE devait verser chaque année un complément de salaire pour garantir à son salarié une rente annuelle correspondant à 100 % du salaire brut annuel, et ce à compter de la décision du 7 décembre 2007 ; que le salaire de comparaison étant le salaire annuel brut, il y a lieu également de déduire les prestations sociales perçues par la CPAM également en brut ; qu'au vu des pièces produites et du décompte effectué par le salarié, le complément de salaire annuel doit être calculé comme suit : salaire annuel brut 128. 946, 74 € à déduire (8. 450, 94 € x 12) 101. 411, 28 € total : 27. 535, 46 € ; que le conseil de prud'hommes ne pouvait ainsi débouter le salarié en considérant qu'il percevrait un revenu supérieur par rapport au salaire perçu lorsqu'il était en activité alors que l'objet de la clause contractuelle est justement de lui garantir, alors qu'il est en invalidité, 100 % de son salaire perçu lorsqu'il était en activité ; que sa décision sera infirmée sur ce point ; qu'elle sera en revanche confirmée pour considérer que Monsieur Francis X... ne peut percevoir des droits non encore ouverts et qu'ainsi, les sommes allouées seront arrêtées à la date du présent arrêt (du 7 décembre 2007 au 4 juin 2013), et qu'il appartiendra à la MAE de respecter pour l'avenir ses engagements contractuels ; qu'il convient ainsi de condamner la MAE à payer à Monsieur Francis X... la somme de 151. 169, 68 € (27. 535, 46 € x 5, 49 années),

ALORS, D'UNE PART, QU'à défaut de précision sur l'obligation de maintien de la totalité du salaire brut en cas d'invalidité, l'employeur est autorisé à maintenir ni plus ni moins que le salaire net ; qu'en faisant droit à la demande du salarié, cependant qu'elle constatait que le calcul opéré par Monsieur X... aboutissait à ce qu'il perçoive un revenu supérieur par rapport au salaire net perçu lorsqu'il était en activité, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le préjudice résultant de l'absence de pouvoir bénéficier d'un complément de rente invalidité en raison du manquement de l'employeur consiste en la perte de chance d'obtenir par une souscription individuelle à un contrat de prévoyance une garantie comparable ; que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; qu'en condamnant la MAE au paiement d'une somme de 151. 159, 68 € correspondant à la somme que le salarié aurait dû percevoir s'il avait bénéficié du contrat d'assurance groupe, quand ce préjudice consistait seulement en la perte d'une chance, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi n° S 13-22. 469.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la cour d'appel de Rouen, de s'ETRE DECLAREE INCOMPETENTE pour statuer sur la demande de nullité du licenciement de M. X... en raison du harcèlement moral à l'origine de son inaptitude ;

AUX MOTIFS QU'« en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, le juge judiciaire ne peut, lorsqu'une autorisation de licenciement a été accordée, apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement, y compris le respect de l'obligation de reclassement, point qui est expressément vérifié par l'autorité administrative ; Que toutefois, si cette autorisation administrative ne permet plus au salarié de contester la cause ou la validité du licenciement en raison d'un harcèlement, elle ne le prive pas du droit de demander réparation du préjudice qui est résulté du harcèlement moral ; Qu'en l'espèce, il ressort des pièces produites que l'autorisation administrative de licencier Francis X... pour inaptitude en date du 15 octobre 2008 n'a fait l'objet d'aucun recours devant le juge administratif et que le licenciement prononcé pour inaptitude par la MAE se réfère à cette autorisation ; Qu'ainsi, le salarié ne peut plus contester la validité de son licenciement en considérant que l'inaptitude prononcée a pour origine le harcèlement moral de son employeur ; Qu'il ne peut plus également contester le caractère réel et sérieux de son licenciement en se fondant d'une part sur l'absence de saisine par l'employeur des délégués du personnel et non respect de son obligation de sécurité et d'autre part sur l'absence de recherches sérieuses de reclassement ; Qu'en effet, l'autorité administrative, en autorisant l'employeur à licencier pour inaptitude son salarié, a vérifié notamment la régularité de la procédure préalable à sa saisine et donc la nécessité de consulter les délégués du personnel ainsi que le respect par l'employeur de son obligation de reclassement ; Que sur le premier point, il convient en tout état de cause de préciser que cette consultation ne s'impose qu'en cas de maladie professionnelle ou d'accident, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, Francis X... ne justifiant pas avoir effectué une déclaration de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la Caisse d'assurance maladie ; Que Francis X... est en revanche recevable à invoquer la nullité de son licenciement pour défaut de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement, la régularité de cette dernière, postérieure à l'autorisation de licencier, ne pouvait ainsi être vérifiée par l'autorité administrative ; Qu'en conséquence et en définitive, il convient de se déclarer incompétent pour statuer sur la demande de nullité du licenciement pour harcèlement moral et la demande de contestation du motif réel et sérieux du licenciement ; Que sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral qui reste en revanche recevable sera examinée ci-après »
ALORS QUE l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations ; qu'en l'espèce, en se déclarant incompétente pour statuer sur la demande de M. X... visant à ce que son licenciement soit déclaré nul quand il soutenait que son inaptitude trouvait son origine dans le harcèlement moral dont il avait été victime, ce dont il résultait qu'il pouvait, malgré l'autorisation de l'inspecteur du travail, demander la nullité de son licenciement en raison de la faute de l'employeur qui en était à l'origine, la cour d'appel a violé, par fausse application, la loi des 16-24 août 1790 et les articles L. 2421-3, L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail et méconnu l'étendue de ses pourvois.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR réduit l'indemnité contractuelle de garantie d'emploi due à M. X... à la somme de 300. 000 euros,

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail contient la clause suivante : " la Mutuelle Assurance de l'Education s'engage, sous réserve que la période d'essai se révèle satisfaisante, à vous garantir la stabilité de votre emploi pendant une période de huit ans courant à compter de votre entrée dans la société. Toutefois, au cas où le présent contrat viendrait à être rompu par la Mutuelle Assurance de l'Education ou par tout autre entité juridique s'y substituant et pour quelque cause que ce soit à l'exception d'une faute lourde qui vous serait imputable, (...), la Mutuelle Assurance de l'Education ou tout autre entité juridique s'y substituant s'obligerait à vous verser, outre votre indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité contractuelle d'un montant net correspondant à celui des salaires bruts restant à percevoir jusqu'au terme de la période de garantie d'emploi stipulée ci-dessus. Au cas où le présent contrat viendrait à être rompu pendant les trois dernières années de la période de garantie d'emploi par la Mutuelle Assurance de l'Education ou tout autre entité s'y substituant, et pour quelque cause que ce soit à l'exception d'une faute lourde qui vous serait imputable, la Mutuelle Assurance de l'Education ou par tout autre entité s'y substituant, s'obligerait à vous verser, outre votre indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité contractuelle d'un montant net correspondant à trois années de rémunération brute " ; Sur la validité de cette clause : que la MAE estime la clause illicite au motif qu'elle met à néant toute possibilité pour l'employeur de licencier ; que la clause de garantie d'emploi est celle qui restreint pendant une durée déterminée le droit par l'employeur de résilier unilatéralement le contrat de travail, qu'une telle clause est licite sauf si l'employeur renonce purement et simplement au droit de résiliation lequel est d'ordre public ; qu'en l'occurrence, l'employeur n'est pas privé totalement de sa faculté de rompre le contrat de travail puisque la clause trouve sa limite dans la faute lourde du salarié et la restriction du droit de licencier est limitée dans le temps ; que la clause est donc licite et qu'ainsi, l'employeur, en rompant le contrat de travail avec l'expiration du délai de 8 ans-lequel expirait le 29 septembre 2011-, a commis une faute contractuelle qui doit être indemnisée par le versement de l'indemnité contractuelle prévue au contrat ; que Francis X... considère que la clause de garantie doit s'appliquer à compter du 28 octobre 2008 jusqu'à son licenciement le 29 septembre 2011 mais également pendant les périodes correspondant aux arrêts de travail pour maladies, soit du 7 décembre 2004 au 29 septembre 2011 après déduction de la période du 20 janvier 2008- un mois après la visite de reprise-au 30 octobre 2008, estimant que durant ces périodes, son contrat de travail était suspendu et par conséquence l'était aussi la période de garantie prévue par la dite clause ; que toutefois, la clause contractuelle de garantie ne contient aucune disposition particulière quant au prolongement du délai de garantie d'emploi en cas de suspension du contrat de travail pour maladie, et ne prend en compte que la date de la rupture du contrat par l'employeur, pour déterminer le délai restant à courir à partir duquel l'indemnité sera calculée ; qu'ainsi, la rupture du contrat étant intervenue le 28 octobre 2008 pendant les trois dernières années de la période de garantie d'emploi, soit du 29 septembre 2008 au 29 septembre 2011, Francis X... peut prétendre à une somme de 386 840, 16 € (36 mois x 10 745, 56 €) ; Sur la réduction du montant de l'indemnité contractuelle : que lorsque le montant de l'indemnité due par l'employeur en cas de violation de la clause de garantie d'emploi est précisé, l'indemnité constitue une clause pénale ; qu'en l'occurrence, les parties ont bien procédé à une évaluation préalable et forfaitaire de l'indemnité à laquelle donnerait lieu l'inexécution de la clause de garantie d'emploi stipulée en faveur du salarié ; qu'en outre, il n'est pas exact de dire, comme le soutient Francis X... que l'indemnité n'a pas de caractère forfaitaire car elle prévoit des dommages et intérêts dégressifs dans le temps de huit années de salaire à zéro, puisque le second alinéa de la clause prévoit une indemnisation correspondant à 3 ans de salaires si le contrat a été rompu au cours des trois dernières années de la période de garantie d'emploi ; que l'indemnité contractuelle ne peut donc jamais être inférieure à 3 années de salaires ; que celle-ci a ainsi le caractère d'une clause pénale qui peut être modérée ou augmentée si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que la MAE l'estime excessive en ce qu'elle est exorbitante du droit commun, est attentatoire aux intérêts de la MAE et a été accordée lors de l'embauche de Francis X... dans des conditions suspectes ; qu'il convient de rappeler que la procédure pénale pour recel d'abus de confiance contre Francis X... s'est terminée par un arrêt de non lieu ; que par ailleurs la MAE ne dit pas en quoi le montant de l'indemnité contractuelle serait attentatoire à ses intérêts et ne produit aucune pièce notamment financière à ce titre ; que cependant, si le fait que Francis X... qui exerçait une activité libérale d'expert comptable-commissaire aux comptes pendant 9 ans-avant d'être embauché par la MAE à l'âge de 48 ans pouvait justifier les clauses avantageuses incluses dans son contrat de travail, compte tenu des concessions effectuées notamment financières, il convient toutefois de relever que la garantie d'emploi d'une durée relativement longue et ne pouvant être remise en cause que par la faute lourde du salarie, laquelle implique l'intention de nuire à son employeur, combinée à une reprise d'ancienneté à 22 ans apparaît excessive compte tenu des concessions financières effectuées par le salarié ; qu'en effet, les pièces produites établissent qu'en 2002, la rémunération perçue par ce dernier était en 2002 de 8. 500 € brut mensuel et c'est seulement en 2003 que cette rémunération de 23. 280 € brut mensuel correspondait à plus du double du salaire accepté par le salarié ; qu'il convient ainsi de réduire l'indemnité contractuelle, manifestement excessive, à une somme de 300. 000 € ».

1°) ALORS QUE la clause de garantie d'emploi, même assortie d'une indemnité forfaitaire stipulée par avance, ne peut être qualifiée de clause pénale dès lors qu'elle n'a pas pour objet d'indemniser le licenciement à proprement parler, mais la perte définitive, pour le salarié, du statut qui était le sien avant son embauche ou la perte de chance de retrouver un emploi équivalent en cas de licenciement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui a qualifié la clause de garantie d'emploi de clause pénale au seul motif qu'elle était assortie d'une indemnité forfaitaire, sans avoir recherché, comme M. X... le soutenait dans ses conclusions d'appel, si celle-ci n'avait pas été stipulée au contrat de travail en contrepartie du renoncement définitif du salarié à son activité libérale d'expert comptable et à l'impossibilité dans laquelle il aurait été, en cas de licenciement, de retrouver sa situation professionnelle antérieure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail, 1134 et 1147 du code civil.

2°) ALORS QUE l'exécution de la clause de garantie d'emploi, au même titre que l'ensemble des autres obligations essentielles des parties au contrat, est suspendue pendant toute la durée de la suspension du contrat de travail du salarié malade ; qu'en l'espèce, en refusant de prendre en compte, au titre de la garantie d'emploi restant à courir à compter du licenciement de M. X..., la période correspondant à la durée de la suspension de son contrat de travail pour maladie, au motif erroné qu'aucune stipulation n'avait été prévue en ce sens, quant il s'agissait là d'un simple effet de la suspension du contrat de travail sur l'exécution des obligations respectives des parties, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1226-1, L. 1226-2 du code du travail et 1134 du Code civil.

3°) ALORS, à tout le moins, QUE lorsque la dégradation de l'état de santé du salarié est due à une faute de l'employeur, celui-ci ne saurait lui opposer la période de suspension du contrat de travail pour maladie, afin de réduire d'autant la période de garantie d'emploi ; qu'en refusant de prolonger la garantie d'emploi des périodes durant lesquels le contrat de travail de M. X... avait été suspendu en raison de la maladie, quand elle avait constaté que cette suspension du contrat de travail était due au harcèlement moral de la MAE, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail.

4°) ALORS, en tout état de cause, QUE lorsque la clause de garantie d'emploi est assortie d'une clause pénale, le juge ne peut réduire le montant de l'indemnité contractuelle en dessous du minimum qui lui est dû de plein droit et qui correspond au paiement de l'ensemble des salaires qu'il aurait dû percevoir jusqu'à la fin de la garantie ; qu'en l'espèce, en réduisant à une somme de 300. 000 euros, équivalant à 28 mois de salaire, le montant de l'indemnité contractuelle due à M. X..., au motif de son caractère manifestement excessif, quand elle avait retenu qu'au jour de son licenciement, il restait 35 mois jusqu'à la fin de la garantie, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations desquelles il résultait que le salarié ne pouvait percevoir une indemnité inférieure à trente-cinq mois de salaire, a violé les articles L. 1221-1 du code du travail, 1134 et 1147 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes en paiement d'une indemnité de préavis, d'un solde de treizième mois et des congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE « Francis X... rappelle que son préavis non exécuté n'a pas été payé et fonde sa demande en paiement sur le fait que l'inaptitude est exclusivement imputable à l'employeur ; que toutefois, les dispositions de l'article L. 1226-14 du Code du travail prévoient le versement d'une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis lorsque le licenciement est fondé sur une inaptitude consécutive à un accident de travail ou à une maladie professionnelle ; qu'en l'occurrence, ainsi qu'il l'a été relevé plus haut, Francis X... n'a fait aucune déclaration auprès de la CPAM afin de voir reconnaître le caractère professionnel de sa maladie, et qu'au demeurant le licenciement pour inaptitude qui a été autorisé pour une maladie non professionnelle ne peut plus être remis en cause devant le juge prud'homal ; qu'il convient ainsi de débouter le salarié de sa demande, et par voie de conséquence celle tendant aux congés payés sur préavis et également au paiement du solde du 13ème mois et congés payés y afférents sur les mois correspondant au préavis »

1°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen en ce qu'il fait grief à la cour d'appel de s'être déclarée incompétente pour apprécier la validité du licenciement de M. X... dont l'inaptitude était la conséquence du harcèlement moral qu'il avait subi, emportera par voie de conséquence et en application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt attaqué qui l'a débouté de sa demande d'indemnité de préavis et de complémentent de treizième mois sur préavis, outre les congés payés afférents.

2°) ALORS QUE l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations ; que lorsque l'inaptitude du salarié trouve sa cause dans le harcèlement moral qu'il a subi de la part de l'employeur, le salarié peut prétendre à l'ensemble des indemnités qui sont dues en cas d'inaptitude d'origine professionnelle ; qu'en déboutant le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité de préavis, d'un solde de treizième mois et des congés payés afférents sans avoir recherché si l'inaptitude du salarié n'aurait pas trouvé sa cause dans le harcèlement moral dont il avait été victime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, et des articles L. 2421-3, L. 1152-1, L. 1152-2, L. 1152-3 et L. 1226-2 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour perte des droits à la retraite, pour perte d'une chance de percevoir le remboursement des frais de santé à venir, et perte de salaire sur sept ans ;

AUX MOTIFS QUE « sur la demande de dommages-intérêts au titre de la perte des droits à la retraite : que Francis X... sollicite des dommages et intérêts pour compenser la perte des droits entre d'une part les retraites de base et complémentaire résultant de la mise à la retraite d'office à l'âge de 62 ans du fait de son invalidité, et d'autre part les retraites auxquelles il aurait pu prétendre s'il avait effectué une carrière complète jusqu'à 67 ans ; que toutefois, si la perte des droits à la retraite peut être considérée comme un préjudice consécutif au licenciement, force est toutefois de constater que le licenciement prononcé pour inaptitude a définitivement devant le juge judiciaire et donc prud'homal une cause réelle et sérieuse et n'a pas par ailleurs été prononcé pour une inaptitude d'origine professionnelle ; que l'employeur ne peut donc être tenu d'indemniser ce préjudice et il convient de débouter Francis X... de sa demande ; Sur la demande au titre de la couverture frais de soins futurs : que Francis X... estime que s'il était demeuré salarié de la MAE, ce coût aurait continué d'être entièrement pris en charge par la Mutuelle jusqu'à son départ en retraite à 67 ans ; que là encore, la rupture du contrat de travail et donc du bénéfice de la Mutuelle a définitivement devant le juge judiciaire et donc prud'homal une cause réelle et sérieuse et n'a pas par ailleurs été prononcée pour une inaptitude d'origine professionnelle ; qu'il convient de rejeter la demande ; Sur la demande au titre de la perte de revenus entre 62 et 67 ans : que Francis X... fonde sa demande sur la différence de rémunération résultant d'une retraite prononcé d'office à 62 ans du fait de son invalidité et d'une retraite à 67 ans du fait de son statut de salarié à la MAE ; que cette demande qui a le même fondement que celle au titre de la perte des droits à la retraite sera pour les mêmes motifs rejetée ».

1°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen en ce qu'il fait grief à la cour d'appel de s'être déclarée incompétente pour apprécier la validité du licenciement de M. X... dont l'inaptitude était la conséquence du harcèlement moral qu'il avait subi, emportera par voie de conséquence et en application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt attaqué qui l'ont débouté de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de la perte de droits à la retraite, de sa couverture santé et de sa rémunération pendant sept ans ;

2°) ALORS QUE l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations ; que le salarié dont le licenciement trouve sa cause dans un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles, peut prétendre à la réparation des préjudices spécifiques qui en sont résulté ; qu'en déboutant M. X... de ses demandes de dommages-intérêts en raison de la perte de ses droits à la retraite, de la perte de chance de bénéficier de la couverture des frais de soins futur et de la perte de rémunération pendant sept ans, sans avoir recherché si son inaptitude n'aurait pas trouvé sa cause dans le harcèlement moral dont il avait été victime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la Loi des 16-24 août 1790, et des articles L. 2421-3, L. 1152-1, L. 1152-2, L. 1152-3 du code du travail du code du travail et 1147 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.