par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 3 mai 2016, 14-24855
Dictionnaire Juridique
site réalisé avec Baumann Avocats Droit informatique |
Cour de cassation, chambre commerciale
3 mai 2016, 14-24.855
Cette décision est visée dans la définition :
Sauvegarde des entreprises
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 20 mai 2014), qu'une procédure de sauvegarde a été ouverte, le 22 juillet 2010, à l'égard de la société Transports Tardet ; qu'un jugement d'un conseil de prud'hommes du 6 septembre 2011 l'a condamnée à payer à M. X..., l'un de ses salariés, diverses sommes ; qu'après qu'un plan de sauvegarde eut été arrêté le 20 décembre 2011, M. X... a fait pratiquer, en exécution du jugement du 6 septembre 2011, une saisie-attribution, dont la société débitrice et les organes de sa procédure collective ont demandé la mainlevée ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'ordonner la mainlevée de la saisie-attribution alors, selon le moyen :
1°/ que si le jugement ouvrant la procédure de sauvegarde emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception du paiement par compensation de créances connexes, et interdiction de payer toute créance née après le jugement d'ouverture non mentionnée au I de l'article L. 622-17 du même code, ces interdictions ne sont pas applicables au paiement des créances alimentaires ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, M. X..., qui reprenait à son compte les motifs retenus par le premier juge pour dire valable la saisie-attribution litigieuse, invoquait expressément le caractère principalement alimentaire de la créance salariale dont il réclamait le paiement à son ancien employeur ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la saisie-attribution ne portait pas sur une créance, fût-ce pour partie, à caractère alimentaire, de sorte que bien qu'antérieure à l'ouverture de la procédure de sauvegarde, elle échappait par sa nature à l'interdiction de paiement et à celle, corollaire, de l'interdiction des poursuites et procédures d'exécution édictées par les articles L. 622-7-I et L. 622-21 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
2°/ que, dans ses conclusions d'appel, M. X... soutenait également qu'il résultait de l'article L. 625-8 du code de commerce que les créances salariales échappaient au sort commun et devaient être payées immédiatement sur les fonds disponibles ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pourtant de nature à justifier la saisie-attribution pratiquée en vue de recouvrer la créance salariale de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que les créances alimentaires soustraites à l'interdiction des paiements par l'article L. 622-7, I, alinéa 1er, du code de commerce sont celles qui sont issues d'une obligation alimentaire ; que les créances salariales, qui ne sont pas fondées sur une telle obligation de l'employeur, n'étant pas assimilables à des créances alimentaires au sens du texte précité, la cour d'appel n'avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par la première branche ;
Et attendu, d'autre part, que si l'article L. 625-8, alinéa 1er, du code de commerce prévoit le paiement, sur les fonds disponibles ou les premières rentrées de fonds, de certaines créances salariales dans les dix jours du prononcé du jugement d'ouverture de la procédure collective, un versement provisionnel immédiat d'un mois de salaire étant même prévu par l'alinéa 2 du texte avant tout établissement du montant des créances visées à l'alinéa 1er, ces différents paiements n'interviennent que sur décision du juge-commissaire ; que la cour d'appel n'était, dès lors, pas tenue de répondre aux conclusions invoquées par la deuxième branche qui, n'alléguant pas l'existence d'une telle décision, étaient inopérantes ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 9 avril 2013 entre les mains de la Caisse d'épargne ;
AUX MOTIFS QUE sur la règle de la suspension des poursuites individuelles : aux termes de l'article L. 622-21 du code de commerce : « I/ Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 du code de commerce et tendant à la condamnation du débiteur au paiement...II/ Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles... » ; que l'article L. 622-17 du code de commerce est ainsi rédigé : « I/ Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, son payées à leur échéance... » ; que l'objectif de protéger les intérêts de l'entreprise reste le même après l'adoption du plan de sauvegarde, que le fait que cette interdiction figure dans le chapitre du code de commerce sur la période d'observation s'explique par le fait que la mesure de sauvegarde débute par cette phase et que c'est le jugement de mise sous sauvegarde qui entraîne cette interdiction, que ni le texte ni son esprit ne justifient que la durée de cette interdiction soit limitée à la période d'observation, que l'interdiction dure le temps de la procédure collective et perdure donc à l'issue de la période d'observation et pendant le déroulement du plan de sauvegarde ; que la créance de M. X..., antérieure au jugement d'ouverture, est soumise aux dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, qu'aucune procédure d'exécution ne pouvait donc être diligentée pour en obtenir le paiement pendant le cours de la procédure collective ; or, attendu que M. X... a fait diligenter le 9 avril 2013, une mesure de saisie-attribution à l'encontre de la société Transports Tardet pour obtenir paiement de sa créance, que la société Transports Tardet a bénéficié d'un plan de sauvegarde par jugement du 20 décembre 2011 arrêté sur 10 ans, qu'à la date à laquelle a été effectuée la saisie-attribution, la société Transports Tardet bénéficiait donc d'une mesure de sauvegarde en cours, que dès lors la procédure de saisie attribution ne pouvait être exécutée ; que le débat portant sur le caractère privilégié des créances relève de la compétence du conseil des prud'hommes éventuellement saisi d'une contestation par le salarié en application de l'article L. 625-1 du code de commerce et est sans incidence sur la question de la validité de la saisie-attribution soumise à la cour ; qu'en conséquence il doit être ordonné mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 9 avril 2013, le jugement devant être infirmé en toutes des dispositions ;
1) ALORS QUE si le jugement ouvrant la procédure de sauvegarde emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception du paiement par compensation de créances connexes, et interdiction de payer toute créance née après le jugement d'ouverture non mentionnée au I de l'article L. 622-17 du même code, ces interdictions ne sont pas applicables au paiement des créances alimentaires ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, l'exposant, qui reprenait à son compte les motifs retenus par le premier juge pour dire valable la saisie-attribution litigieuse, invoquait expressément le caractère principalement alimentaire de la créance salariale dont il réclamait le paiement à son ancien employeur ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la saisie-attribution ne portait pas sur une créance, fût-ce pour partie, à caractère alimentaire, de sorte que bien qu'antérieure à l'ouverture de la procédure de sauvegarde, elle échappait par sa nature à l'interdiction de paiement et à celle, corollaire, de l'interdiction des poursuites et procédures d'exécution édictées par les articles L. 622-7-I et L. 622-21 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
2) ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QUE dans ses conclusions d'appel, l'exposant soutenait également qu'il résultait de l'article L. 625-8 du code de commerce que les créances salariales échappaient au sort commun et devaient être payées immédiatement sur les fonds disponibles ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pourtant de nature à justifier la saisie-attribution pratiquée en vue de recouvrer la créance salariale de l'exposant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
site réalisé avec Baumann Avocat Droit informatique |
Cette décision est visée dans la définition :
Sauvegarde des entreprises
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.