par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 25 janvier 2017, 15-23547
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Cour de cassation, chambre commerciale
25 janvier 2017, 15-23.547

Cette décision est visée dans la définition :
Concurrence




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juillet 2015), que le ministre chargé de l'économie, reprochant à la société Galec-groupement d'achats des centres Leclerc (le Galec) d'avoir soumis des fournisseurs à des obligations créant un déséquilibre significatif à raison de certaines clauses du contrat-cadre ayant régi leurs relations en 2009 et 2010, relatives au versement d'une ristourne de fin d'année (la RFA) au bénéfice du distributeur, l'a assignée en annulation de ces clauses, répétition de l'indu et paiement d'une amende civile sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° et III du code de commerce ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le Galec fait grief à l'arrêt de retenir un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, de prononcer l'annulation des clauses prévoyant ces obligations dans les accords GALEC conclus en 2009 et 2010 avec les quarante-six fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, de le condamner à restituer les sommes perçues à ce titre et de prononcer à son encontre une amende civile alors, selon le moyen :

1°/ que les dispositions de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ne sanctionnent que le fait de soumettre un partenaire commercial à une « obligation » créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; que le simple fait d'obtenir une réduction de prix de la part de son cocontractant ne soumet ce dernier à aucune « obligation » au sens de ces dispositions ; qu'en considérant, pour condamner le Galec, que la RFA Galec, qui constitue une simple réduction du prix fournisseur, caractérisait une telle « obligation », la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

2°/ qu'il résulte de la décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011 du Conseil constitutionnel que l'incrimination prévue à l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce n'est conforme au principe de légalité des délits et des peines que dans la mesure où la notion de « déséquilibre significatif » renvoie à la notion, suffisamment définie par la jurisprudence, qui figure à l'article L. 132-1 du code de la consommation ; qu'en vertu de cet article, l'appréciation du « déséquilibre significatif » ne peut pas porter sur l'adéquation du prix au bien vendu ; qu'ainsi, le « déséquilibre significatif » au sens de l'article précité du code de commerce ne peut jamais résulter de l'inadéquation du prix au bien vendu ; qu'en jugeant pourtant que la loi avait entendu permettre un contrôle par l'administration du prix négocié par comparaison avec le tarif fournisseur, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

3°/ que, si l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce devait être interprété comme permettant de sanctionner le fait d'obtenir une simple réduction de prix, l'article L. 442-6, I, 4° du code de commerce, en ce qu'il sanctionne le fait d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, serait privé de tout effet utile ; qu'il en résulte nécessairement que le législateur n'a pas entendu permettre un contrôle par l'administration du prix négocié par comparaison avec le tarif fournisseur ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que, dans les rapports noués entre un fournisseur et un distributeur, le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties s'apprécie au regard de la convention écrite prévue par l'article L. 441-7 du code de commerce, laquelle précise les obligations auxquelles se sont engagées les parties et fixe, notamment, les conditions de l'opération de vente des produits ou des prestations de services, comprenant les réductions de prix, telles qu'elles résultent de la négociation commerciale qui s'opère dans le respect de l'article L. 441-6 de ce code ; qu'ayant constaté que l'annexe 2 des contrats-cadres stipulait que la ristourne litigieuse était prévue au titre des conditions de l'opération de vente, la cour d'appel en a justement déduit que les clauses litigieuses relevaient de l'article L. 442-6, I, 2° du même code ;

Et attendu, en deuxième lieu, que la similitude des notions de déséquilibre significatif prévues aux articles L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation et L. 442-6, I, 2° du code de commerce, relevée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011, n'exclut pas qu'il puisse exister entre elles des différences de régime tenant aux objectifs poursuivis par le législateur dans chacun de ces domaines, en particulier quant à la catégorie des personnes qu'il a entendu protéger et à la nature des contrats concernés ; qu'ainsi, l'article L. 442-6, I, 2° précité, qui figure dans le Livre quatrième du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et au Chapitre II du Titre IV, dédié aux pratiques restrictives de concurrence, n'exclut pas, contrairement à l'article L. 212-1 du code de la consommation, que le déséquilibre significatif puisse résulter d'une inadéquation du prix au bien vendu ; qu'en outre, la cour d'appel a exactement retenu que la loi du 4 août 2008, en exigeant une convention écrite qui indique le barème de prix tel qu'il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses conditions générales de vente, a entendu permettre une comparaison entre le prix arrêté par les parties et le tarif initialement proposé par le fournisseur ; qu'il suit de là que l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce autorise un contrôle judiciaire du prix, dès lors que celui-ci ne résulte pas d'une libre négociation et caractérise un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le Galec fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que la loi LME du 4 août 2008 a instauré le principe de libre négociabilité des tarifs et supprimé l'obligation de justifier toute réduction du prix fournisseur par une contrepartie ; que si l'article L. 441-7 du code de commerce dispose que la convention écrite conclue entre le fournisseur et le distributeur indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale et qu'elle fixe, notamment, les conditions de l'opérations de vente, y compris les réductions de prix, il n'en résulte pas pour autant que toute réduction de prix ne puisse intervenir qu'en contrepartie d'une obligation consentie par l'acheteur ; qu'en relevant pourtant, pour juger que la RFA Galec créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties aux contrats-cadres, que la loi LME n'avait pas supprimé la nécessité de contrepartie, que la réduction du prix accordée par le fournisseur devait avoir pour cause l'obligation prise par le distributeur à l'égard du fournisseur et qu'en l'espèce, la RFA Galec n'était compensée par aucune obligation réelle, la cour d'appel a violé les articles L. 441-6, L. 441-7 et L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

2°/ qu'en tout état de cause, à supposer que les dispositions de l'article L. 441-7 du code de commerce impliquent l'exigence d'une contrepartie à toute réduction du prix « fournisseur », l'éventuelle méconnaissance de cette exigence ne conduit pas nécessairement à un « déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ; qu'en se bornant à relever, pour juger que la RFA Galec créait un tel déséquilibre, que cette remise était dépourvue de contrepartie réelle et méconnaissait donc les dispositions de l'article L. 441-7 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 441-7 et L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

3°/ que la caractérisation de l'infraction prévue à l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce suppose, tout d'abord, que le juge ait mis en balance les droits et obligations des parties au contrat, en les appréciant de manière concrète, que l'obligation imposée au cocontractant ait créé un « déséquilibre » dans ces droits et obligations et, enfin, que ce déséquilibre soit « significatif » ; qu'à supposer que le juge puisse, sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, contrôler l'adéquation du prix au produit vendu, il lui appartiendrait alors d'évaluer le juste prix du produit et de rechercher si le tarif obtenu à la suite de la réduction du prix s'écarte significativement de ce juste prix ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a procédé à aucun examen, même sommaire, des produits en cause ou des différents taux de remises consentis ; qu'en se bornant à relever que la RFA Galec créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, sans rechercher si les tarifs obtenus à la suite de la réduction du prix s'écartaient significativement du juste prix des produits, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt rappelle que la loi du 4 août 2008, qui a posé le principe de la libre négociabilité des conditions de vente, et notamment des tarifs, a maintenu le principe selon lequel les conditions générales de vente constituent le socle de la négociation commerciale ; qu'il relève que la libre négociabilité tarifaire se traduit notamment, pour le fournisseur, par la possibilité, prévue à l'article L. 441-6 du code de commerce, de convenir avec le distributeur de conditions particulières de vente, mais que les obligations auxquelles les parties s'engagent en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale doivent néanmoins être formalisées dans une convention écrite ; qu'il en déduit que la formalisation des engagements des parties dans un document unique doit permettre à l'administration d'exercer un contrôle a posteriori sur la négociation commerciale et sur les engagements pris par les cocontractants ; que de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que le principe de la libre négociabilité n'est pas sans limite et que l'absence de contrepartie ou de justification aux obligations prises par les cocontractants, même lorsque ces obligations n'entrent pas dans la catégorie des services de coopération commerciale, peut être sanctionnée au titre de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, dès lors qu'elle procède d'une soumission ou tentative de soumission et conduit à un déséquilibre significatif ;

Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt relève que les clauses relatives à la RFA, insérées dans les cent dix-huit contrats-cadres examinés, prévoyaient le paiement de cette ristourne, soit en contrepartie de la constatation d'un chiffre d'affaires non chiffré ou d'un chiffre d'affaires inférieur de près de moitié à celui réalisé l'année précédente et l'année durant laquelle la RFA était due, soit sans aucune contrepartie et retient que les fournisseurs ont versé une RFA alors que le distributeur n'avait pris aucune obligation ou aucune réelle obligation à leur égard ; qu'il relève encore que les acomptes dus au titre de la RFA étaient calculés sur un chiffre d'affaires prévisionnel, proche de celui effectivement réalisé et très supérieur au montant du chiffre d'affaires sur lequel le Galec s'était engagé envers le fournisseur pour obtenir la réduction du prix et ajoute que l'article V du contrat-cadre permettait au distributeur d'obtenir le paiement des acomptes avant que le prix des marchandises ait été réglé et de bénéficier ainsi d'une avance de trésorerie aux frais du fournisseur ; qu'il relève enfin que le Galec n'allègue pas que d'autres stipulations contractuelles permettaient de rééquilibrer la convention ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu retenir que les clauses litigieuses créaient un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

Et attendu, en dernier lieu, qu'ayant fait ressortir, par les motifs précités, que le déséquilibre significatif reproché au Galec ne résultait pas du niveau des prix consentis mais du mécanisme de mise en oeuvre d'une ristourne de fin d'année, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée par la troisième branche, que ses appréciations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le Galec fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au ministre chargé de l'économie, agissant sur le fondement de l'article L. 442-6, III du code de commerce de prouver l'existence de la pratique restrictive de concurrence qu'il invoque ; que, pour établir l'existence d'une soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, la cour d'appel a relevé que la différence de taux de ristourne appliqué aux fournisseurs n'était pas la preuve d'une négociation et que le Galec n'offrait pas de démontrer l'existence de négociations ayant existé avec ses fournisseurs ; qu'en statuant ainsi, elle a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

2°/ que la preuve d'une soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ne peut résulter que d'éléments démontrant que le distributeur a exercé des pressions auxquelles les fournisseurs ne pouvaient résister ; qu'en se bornant à relever, pour considérer que l'existence d'une soumission était établie, que l'annexe 2 des contrats-cadres avait été pré-rédigée par le Galec puis signée par le fournisseurs sans modification, qu'il existait une contradiction entre cet annexe et l'article V des contrats-cadres quant au délai de paiement de la RFA et que le procès-verbal du 30 avril 2009 laissait penser que le Galec avait cherché à préserver ses marges malgré les nouvelles dispositions de la loi LME, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé que la loi du 4 août 2008 a posé le principe de la libre négociabilité des conditions de vente, tout en maintenant le principe selon lequel les conditions générales de vente constituent le socle de la négociation commerciale, l'arrêt constate que la ristourne litigieuse ne figure pas dans les conditions générales de vente des fournisseurs et qu'elle est prévue dans l'annexe 2 des contrats-cadres pré-rédigés par le Galec, en 2009 et 2010 ; qu'il relève que les cent dix-huit contrats-cadres et leurs annexes ont été paraphés et signés par tous les fournisseurs, et ce, alors même qu'existait une contradiction entre l'article V des contrats-cadres et l'annexe 2, concernant les délais de paiement de cette ristourne ; qu'il retient que la différence de taux de ristourne entre fournisseurs n'est pas la preuve d'une négociation, dès lors que les différents taux figurent dans l'annexe 2 pré-rédigée par le Galec, lequel n'offre pas de démontrer que des négociations avec les fournisseurs auraient eu lieu sur ce point ; qu'il en déduit que la ristourne a été imposée aux fournisseurs concernés par ces cent dix-huit contrats, qui ont dû signer les contrats-cadres sans pouvoir les modifier ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, faisant ressortir que les clauses litigieuses pré-rédigées par le Galec constituaient une composante intangible de tous les contrats examinés et n'avaient pu faire l'objet d'aucune négociation effective, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a caractérisé la soumission requise par l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que le Galec fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au Trésor public la somme de 61 288 677,84 euros correspondant aux sommes ayant été perçues au titre de la RFA, à charge pour le Trésor public de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, alors, selon le moyen, que la partie qui a indûment perçu des sommes de son cocontractant ne peut être condamnée qu'à restituer ces sommes au cocontractant lui-même ; qu'aucune disposition législative ne permet au juge de condamner cette partie à verser au Trésor public des sommes indûment perçues, quand bien même ce dernier serait chargé de restituer les sommes au cocontractant ; qu'en condamnant le Galec à verser au Trésor public des sommes perçues au titre de la RFA Galec, à charge pour celui-ci de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, III du code de commerce ;

Mais attendu que le ministre chargé de l'économie a été habilité par le législateur à demander à la juridiction saisie, sur le fondement de l'article L. 442-6, III du code de commerce, la répétition de l'indu dans le cadre d'une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence, à charge pour lui d'informer les parties au contrat de l'introduction de son action ; qu'ayant constaté que le ministre avait procédé à cette information et que la restitution des sommes indûment perçues au titre de la RFA s'opérerait entre les mains du Trésor public à charge pour ce dernier de les restituer aux fournisseurs visés dans une liste annexée, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article L. 442-6, III du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Galec-groupement d'achats des centres Leclerc aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au ministre chargé de l'économie la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour la société Galec-groupement d'achats des centres Leclerc


PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'obligation à la charge des fournisseurs de verser à la société GALEC les ristournes RFA GALEC calculées sur le chiffre d'affaires de l'année en cours, soit en contrepartie de la constatation d'un courant d'affaires non chiffré, soit en contrepartie de la constatation d'un chiffre d'affaires limité par rapport au chiffre d'affaires réalisé l'année précédente et sans commune mesure avec le chiffre d'affaires prévisionnel, soit sans aucune contrepartie, crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations au profit de la société coopérative GALEC et contrevient aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2°du code de commerce, d'avoir dit que l'obligation à la charge des fournisseurs de verser à la société coopérative GALEC des acomptes mensuels prévisionnels de ristournes avant le paiement des marchandises crée un déséquilibre significative dans les droits et obligations des parties au profit de la société GALEC, d'avoir prononcé l'annulation des clauses prévoyant ces obligations dans les accords GALEC conclus en 2009 et 2010 avec les 46 fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, d'avoir condamné la société GALEC à verser au Trésor public la somme de 61 288 677,84 euros correspondant aux sommes ayant été perçues au titre de la RFA GALEC, à charge pour le Trésor public de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt et d'avoir prononcé à l'encontre du GALEC une amende civile de 2 millions d'euros ;

AUX MOTIFS QUE, sur l'annulation de la ristourne de fin d'année, RFA GALEC, la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 dite LME a posé le principe de libre négociabilité des conditions de vente et notamment des tarifs en supprimant l'interdiction per se des discriminations tarifaires, mais a maintenu le principe selon lequel les conditions générales de vente (CGV) constituent le socle de la négociation commerciale ; que la libre négociabilité tarifaire se traduit notamment par la possibilité, prévue à l'article L. 441-6 du code de commerce, pour le fournisseur de convenir avec le distributeur des conditions particulières de vente (CPV) ; que toutefois, les obligations auxquelles les parties s'engagent en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale doivent être formalisées dans une convention écrite ; que cette formalisation dans un document unique doit permettre à l'administration d'exercer un contrôle a posteriori sur la négociation commerciale et sur les engagements pris par les cocontractants ; qu'en effet, le principe de libre négociabilité des conditions de vente et des tarifs, qui n'est pas sans limite, est encadré par les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce qui prohibent les pratiques restrictives de concurrence et notamment le fait « de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » ; qu'il résulte de l'alinéa 7 de l'article L. 441-7 précité que « les obligations relevant des 1° (les conditions de l'opération de vente) et 3° (les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale) concourent à la détermination du prix convenu » ; que l'annexe 2 des contrats-cadres stipule que la RFA GALEC constitue une ristourne prévue au titre des « conditions de l'opération de vente » ayant permis de fixer le prix d'achat des produits par le distributeur ; que si le juge judiciaire ne peut contrôler les prix qui relèvent de la négociation commerciale, il doit sanctionner les pratiques commerciales restrictives de concurrence et peut annuler les clauses contractuelles qui créent un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, même lorsque ces clauses sont relatives à la détermination du prix, et ce en application des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce qui sanctionne tout déséquilibre contractuel dès lors qu'il est significatif ; que l'article L. 441-7 du même code dispose que la convention écrite doit indiquer « les obligations auxquelles se sont engagées les parties... en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale » ; qu'il s'en déduit que la fixation du prix est le résultat des obligations réciproques prises par le fournisseur et le distributeur au cours de la négociation commerciale et que ces obligations doivent être décrites dans la convention ; que si la loi LME a instauré le principe de la libre négociabilité des conditions de vente et fait des CPV le siège de la négociation commerciale, la loi n'a pas supprimé la nécessité de contrepartie ou de justification aux obligations prises par les cocontractants, même lorsque ces obligations ne rentrent pas dans la catégorie des services de coopération commerciale ; que la réduction de prix accordée par le fournisseur doit avoir pour cause l'obligation prise par le distributeur à l'égard du fournisseur ; que de la référence expresse faite par les articles L. 441-6 et L. 442-6 du code de commerce, aux CGV du fournisseur (qui comprennent les conditions de vente, le barème des prix unitaires, les réductions de prix, les conditions de règlement) et à l'interdiction des pratiques restrictives de concurrence, ainsi que de l'exigence que la convention « indique le barème de prix tel qu'il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses CGV... » mentionnés à l'article L. 441-7 précité, il résulte que la loi a entendu permettre un contrôle par l'administration du prix négocié par comparaison avec le tarif du fournisseur et du respect de l'équilibre contractuel ; que l'article L. 441-3 du code de commerce distingue, pour la facturation, les réductions de prix acquises à la date de la vente, qui doivent figurer sur la facture, et celles qui ne sont pas acquises au moment de la vente car subordonnées à la réalisation d'une condition qui ne se réalisera que postérieurement à la vente, qui doivent figurer pour mémoire sur la facture ; que la distinction opérée par la loi entre les réductions existant au moment de la vente, dites inconditionnelles car non soumises à une condition, et celles non acquises au moment de la vente, dites conditionnelles car soumises à une condition, n'implique pas que les réductions inconditionnelles n'aient pas à être causées par une obligation spécifique à la charge du distributeur exécutée à la date de la vente ; qu'au surplus, la RFA GALEC est une remise conditionnelle puisque, dans la grande majorité des contrats-cadres 2009 et 2010, l'annexe 2 stipule que la ristourne est soumise à la réalisation d'un certain montant de chiffre d'affaires annuel ; que de façon générale la ristourne de fin d'année, dont le bénéfice n'est acquis au distributeur qu'après la réalisation d'une condition dans le courant de l'année qui suit la vente, ne peut être acquise au jour de la vente, faute d'accomplissement de la condition et ne peut donc être qualifiée de réduction inconditionnelle ; que le ministre produit notamment la copie des 70 contrats-cadres concernés sur l'année 2009 et les 48 contrats-cadres concernés sur l'année 2010, ainsi qu'un récapitulatif du montant de la RFA GALEC payé par chacun des fournisseurs ; qu'il résulte des pièces versées aux débats par le ministre que 9 contrats-cadres ne subordonnent le versement de la RFA GALEC à aucune obligation à la charge du distributeur, 22 contrats ne précisent pas l'obligation mise à la charge du GALEC, 29 contrats ne précisent pas le montant du chiffre d'affaires annuel minimum justifiant le versement de la RFA et 57 contrats fixent le montant du chiffre d'affaires minimum annuel à un montant inférieur de près de moitié à celui réalisé l'année précédente et l'année durant laquelle la RFA était due, en justifiant le montant retenu par l'existence d'une incertitude économique inexistante au moment de la conclusion du contrat ; que pour ces 118 contrats-cadres les fournisseurs concernés ont versé une RFA GALEC alors que le distributeur n'a pris aucune obligation ou aucune réelle obligation à leur égard ; que le GALEC n'allègue pas que d'autres stipulations permettent de rééquilibrer les obligations des parties ; que la RFA GALEC crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties aux contrats-cadres ; qu'il apparaît que le GALEC savait que « l'incertitude économique » qu'il invoquait avait un caractère fictif puisqu'il calculait les acomptes dus au titre de la RFA sur un chiffre d'affaires prévisionnel proche du chiffre d'affaires effectivement réalisé et très supérieur au montant du chiffre d'affaires sur lequel il s'était engagé envers le fournisseur pour obtenir la réduction de prix ; que l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties aux contrats-cadres est ainsi établi ; que bien que la RFA soit une ristourne conditionnelle dont le montant ne peut être déterminé qu'au début de l'année suivant celle pour laquelle elle est stipulée, lorsque la RFA est la contrepartie d'une obligation prise par le distributeur, il peut être prévu d'un commun accord entre les partenaires commerciaux que son paiement soit mensuel et anticipé, dès lors que les acomptes sont calculés sur un chiffre d'affaires prévisionnel aussi proche que possible du chiffre d'affaires annuel ; que cependant le versement des acomptes mensuels ne doit pas aboutir à permettre au distributeur de se constituer une avance de trésorerie aux frais du fournisseur en obtenant le paiement des acomptes avant que le prix des marchandises ait été payé ; qu'il résulte des pièces produites que le GALEC a fait application de l'article V des contrats-cadres et que de nombreux fournisseurs ont payé leur acompte de RFA avant que le distributeur ait réglé leurs marchandises ; que l'article V des contrats-cadres crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, peu important que les délais de paiement des marchandises soient ceux figurant dans les CGV des fournisseurs, que le GALEC n'ait pas sanctionné le non-respect des délais de paiement par les fournisseurs ou que l'annexe 2 prévoie un paiement à 30 jours ;

1°) ALORS QUE les dispositions de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ne sanctionnent que le fait de soumettre un partenaire commercial à une « obligation » créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; que le simple fait d'obtenir une réduction de prix de la part de son cocontractant ne soumet ce dernier à aucune « obligation » au sens de ces dispositions ; qu'en considérant, pour condamner le GALEC, que la RFA GALEC, qui constitue une simple réduction du prix fournisseur, caractérisait une telle « obligation », la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

2°) ALORS QU'il résulte de la décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011 du Conseil constitutionnel que l'incrimination prévue à l'article L. 442-6, I, 2°
du code de commerce n'est conforme au principe de légalité des délits et des peines que dans la mesure où la notion de « déséquilibre significatif »
renvoie à la notion, suffisamment définie par la jurisprudence, qui figure à l'article L. 132-1 du code de la consommation ; qu'en vertu de cet article, l'appréciation du « déséquilibre significatif » ne peut pas porter sur l'adéquation du prix au bien vendu ; qu'ainsi le « déséquilibre significatif » au sens de l'article précité du code de commerce ne peut jamais résulter de l'inadéquation du prix au bien vendu ; qu'en jugeant pourtant que la loi avait entendu permettre un contrôle par l'administration du prix négocié par comparaison avec le tarif fournisseur, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

3°) ALORS QUE, si l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce devait être interprété comme permettant de sanctionner le fait d'obtenir une simple réduction de prix, l'article L. 442-6, I, 4° du code de commerce, en ce qu'il sanctionne le fait d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, serait privé de tout effet utile ; qu'il en résulte nécessairement que le législateur n'a pas entendu permettre un contrôle par l'administration du prix négocié par comparaison avec le tarif fournisseur ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'obligation à la charge des fournisseurs de verser à la société GALEC les ristournes RFA GALEC calculées sur le chiffre d'affaires de l'année en cours, soit en contrepartie de la constatation d'un courant d'affaires non chiffré, soit en contrepartie de la constatation d'un chiffre d'affaires limité par rapport au chiffre d'affaires réalisé l'année précédente et sans commune mesure avec le chiffre d'affaires prévisionnel, soit sans aucune contrepartie, crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations au profit de la société coopérative GALEC et contrevient aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2°du code de commerce, d'avoir dit que l'obligation à la charge des fournisseurs de verser à la société coopérative GALEC des acomptes mensuels prévisionnels de ristournes avant le paiement des marchandises crée un déséquilibre significative dans les droits et obligations des parties au profit de la société GALEC, d'avoir prononcé l'annulation des clauses prévoyant ces obligations dans les accords GALEC conclus en 2009 et 2010 avec les 46 fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, d'avoir condamné la société GALEC à verser au Trésor public la somme de 61 288 677,84 euros correspondant aux sommes ayant été perçues au titre de la RFA GALEC, à charge pour le Trésor public de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt et d'avoir prononcé à l'encontre du GALEC une amende civile de 2 millions d'euros ;

AUX MOTIFS QUE, sur l'annulation de la ristourne de fin d'année, RFA GALEC, la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 dite LME a posé le principe de libre négociabilité des conditions de vente et notamment des tarifs en supprimant l'interdiction per se des discriminations tarifaires, mais a maintenu le principe selon lequel les conditions générales de vente (CGV) constituent le socle de la négociation commerciale ; que la libre négociabilité tarifaire se traduit notamment par la possibilité, prévue à l'article L. 441-6 du code de commerce, pour le fournisseur de convenir avec le distributeur des conditions particulières de vente (CPV) ; que toutefois, les obligations auxquelles les parties s'engagent en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale doivent être formalisées dans une convention écrite ; que cette formalisation dans un document unique doit permettre à l'administration d'exercer un contrôle a posteriori sur la négociation commerciale et sur les engagements pris par les cocontractants ; qu'en effet, le principe de libre négociabilité des conditions de vente et des tarifs, qui n'est pas sans limite, est encadré par les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce qui prohibent les pratiques restrictives de concurrence et notamment le fait « de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » ; qu'il résulte de l'alinéa 7 de l'article L. 441-7 précité que « les obligations relevant des 1° (les conditions de l'opération de vente) et 3° (les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale) concourent à la détermination du prix convenu » ; que l'annexe 2 des contrats-cadres stipule que la RFA GALEC constitue une ristourne prévue au titre des « conditions de l'opération de vente » ayant permis de fixer le prix d'achat des produits par le distributeur ; que si le juge judiciaire ne peut contrôler les prix qui relèvent de la négociation commerciale, il doit sanctionner les pratiques commerciales restrictives de concurrence et peut annuler les clauses contractuelles qui créent un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, même lorsque ces clauses sont relatives à la détermination du prix, et ce en application des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce qui sanctionne tout déséquilibre contractuel dès lors qu'il est significatif ; que l'article L. 441-7 du même code dispose que la convention écrite doit indiquer « les obligations auxquelles se sont engagées les parties... en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale » ; qu'il s'en déduit que la fixation du prix est le résultat des obligations réciproques prises par le fournisseur et le distributeur au cours de la négociation commerciale et que ces obligations doivent être décrites dans la convention ; que si la loi LME a instauré le principe de la libre négociabilité des conditions de vente et fait des CPV le siège de la négociation commerciale, la loi n'a pas supprimé la nécessité de contrepartie ou de justification aux obligations prises par les cocontractants, même lorsque ces obligations ne rentrent pas dans la catégorie des services de coopération commerciale ; que la réduction de prix accordée par le fournisseur doit avoir pour cause l'obligation prise par le distributeur à l'égard du fournisseur ; que de la référence expresse faite par les articles L. 441-6 et L. 442-6 du code de commerce, aux CGV du fournisseur (qui comprennent les conditions de vente, le barème des prix unitaires, les réductions de prix, les conditions de règlement) et à l'interdiction des pratiques restrictives de concurrence, ainsi que de l'exigence que la convention « indique le barème de prix tel qu'il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses CGV... » mentionnés à l'article L. 441-7 précité, il résulte que la loi a entendu permettre un contrôle par l'administration du prix négocié par comparaison avec le tarif du fournisseur et du respect de l'équilibre contractuel ; que l'article L. 441-3 du code de commerce distingue, pour la facturation, les réductions de prix acquises à la date de la vente, qui doivent figurer sur la facture, et celles qui ne sont pas acquises au moment de la vente car subordonnées à la réalisation d'une condition qui ne se réalisera que postérieurement à la vente, qui doivent figurer pour mémoire sur la facture ; que la distinction opérée par la loi entre les réductions existant au moment de la vente, dites inconditionnelles car non soumises à une condition, et celles non acquises au moment de la vente, dites conditionnelles car soumises à une condition, n'implique pas que les réductions inconditionnelles n'aient pas à être causées par une obligation spécifique à la charge du distributeur exécutée à la date de la vente ; qu'au surplus, la RFA GALEC est une remise conditionnelle puisque, dans la grande majorité des contrats-cadres 2009 et 2010, l'annexe 2 stipule que la ristourne est soumise à la réalisation d'un certain montant de chiffre d'affaires annuel ; que de façon générale la ristourne de fin d'année, dont le bénéfice n'est acquis au distributeur qu'après la réalisation d'une condition dans le courant de l'année qui suit la vente, ne peut être acquise au jour de la vente, faute d'accomplissement de la condition et ne peut donc être qualifiée de réduction inconditionnelle ; que le ministre produit notamment la copie des 70 contrats-cadres concernés sur l'année 2009 et les 48 contrats-cadres concernés sur l'année 2010, ainsi qu'un récapitulatif du montant de la RFA GALEC payé par chacun des fournisseurs ; qu'il résulte des pièces versées aux débats par le ministre que 9 contrats-cadres ne subordonnent le versement de la RFA GALEC à aucune obligation à la charge du distributeur, 22 contrats ne précisent pas l'obligation mise à la charge du GALEC, 29 contrats ne précisent pas le montant du chiffre d'affaires annuel minimum justifiant le versement de la RFA et 57 contrats fixent le montant du chiffre d'affaires minimum annuel à un montant inférieur de près de moitié à celui réalisé l'année précédente et l'année durant laquelle la RFA était due, en justifiant le montant retenu par l'existence d'une incertitude économique inexistante au moment de la conclusion du contrat ; que pour ces 118 contrats-cadres les fournisseurs concernés ont versé une RFA GALEC alors que le distributeur n'a pris aucune obligation ou aucune réelle obligation à leur égard ; que le GALEC n'allègue pas que d'autres stipulations permettent de rééquilibrer les obligations des parties ; que la RFA GALEC crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties aux contrats-cadres ; qu'il apparaît que le GALEC savait que « l'incertitude économique » qu'il invoquait avait un caractère fictif puisqu'il calculait les acomptes dus au titre de la RFA sur un chiffre d'affaires prévisionnel proche du chiffre d'affaires effectivement réalisé et très supérieur au montant du chiffre d'affaires sur lequel il s'était engagé envers le fournisseur pour obtenir la réduction de prix ; que l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties aux contrats-cadres est ainsi établi ; que bien que la RFA soit une ristourne conditionnelle dont le montant ne peut être déterminé qu'au début de l'année suivant celle pour laquelle elle est stipulée, lorsque la RFA est la contrepartie d'une obligation prise par le distributeur, il peut être prévu d'un commun accord entre les partenaires commerciaux que son paiement soit mensuel et anticipé, dès lors que les acomptes sont calculés sur un chiffre d'affaires prévisionnel aussi proche que possible du chiffre d'affaires annuel ; que cependant le versement des acomptes mensuels ne doit pas aboutir à permettre au distributeur de se constituer une avance de trésorerie aux frais du fournisseur en obtenant le paiement des acomptes avant que le prix des marchandises ait été payé ; qu'il résulte des pièces produites que le GALEC a fait application de l'article V des contrats-cadres et que de nombreux fournisseurs ont payé leur acompte de RFA avant que le distributeur ait réglé leurs marchandises ; que l'article V des contrats-cadres crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, peu important que les délais de paiement des marchandises soient ceux figurant dans les CGV des fournisseurs, que le GALEC n'ait pas sanctionné le non-respect des délais de paiement par les fournisseurs ou que l'annexe 2 prévoie un paiement à 30 jours ;

1°) ALORS QUE la loi LME du 4 août 2008 a instauré le principe de libre négociabilité des tarifs et supprimé l'obligation de justifier toute réduction du prix fournisseur par une contrepartie ; que si l'article L. 441-7 du code de commerce dispose que la convention écrite conclue entre le fournisseur et le distributeur indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale et qu'elle fixe, notamment, les conditions de l'opérations de vente, y compris les réductions de prix, il n'en résulte pas pour autant que toute réduction de prix ne puisse intervenir qu'en contrepartie d'une obligation consentie par l'acheteur ; qu'en relevant pourtant, pour juger que la RFA GALEC créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties aux contrats-cadres, que la loi LME n'avait pas supprimé la nécessité de contrepartie, que la réduction du prix accordée par le fournisseur devait avoir pour cause l'obligation prise par le distributeur à l'égard du fournisseur et qu'en l'espèce, la RFA GALEC n'était compensée par aucune obligation réelle, la cour d'appel a violé les articles L. 441-6, L. 441-7 et L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

2°) ALORS QU'en tout état de cause, à supposer que les dispositions de l'article L. 441-7 du code de commerce impliquent l'exigence d'une contrepartie à toute réduction du prix « fournisseur », l'éventuelle méconnaissance de cette exigence ne conduit pas nécessairement à un « déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ; qu'en se bornant à relever, pour juger que la RFA GALEC créait un tel déséquilibre, que cette remise était dépourvue de contrepartie réelle et méconnaissait donc les dispositions de l'article L. 441-7 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 441-7 et L. 442-6, I, 2° du code de commerce ;

3°) ALORS QUE la caractérisation de l'infraction prévue à l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce suppose, tout d'abord, que le juge ait mis en balance les droits et obligations des parties au contrat, en les appréciant de manière concrète, que l'obligation imposée au cocontractant ait créé un « déséquilibre » dans ces droits et obligations et, enfin, que ce déséquilibre soit « significatif » ; qu'à supposer que le juge puisse, sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, contrôler l'adéquation du prix au produit vendu, il lui appartiendrait alors d'évaluer le juste prix du produit et de rechercher si le tarif obtenu à la suite de la réduction du prix s'écarte significativement de ce juste prix ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a procédé à aucun examen, même sommaire, des produits en cause ou des différents taux de remises consentis ; qu'en se bornant à relever que la RFA GALEC créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, sans rechercher si les tarifs obtenus à la suite de la réduction du prix s'écartaient significativement du juste prix des produits, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce.


TROISIEME MOYEN DE CASSATION (sur la soumission)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'obligation à la charge des fournisseurs de verser à la société GALEC les ristournes RFA GALEC calculées sur le chiffre d'affaires de l'année en cours, soit en contrepartie de la constatation d'un courant d'affaires non chiffré, soit en contrepartie de la constatation d'un chiffre d'affaires limité par rapport au chiffre d'affaires réalisé l'année précédente et sans commune mesure avec le chiffre d'affaires prévisionnel, soit sans aucune contrepartie, crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations au profit de la société coopérative GALEC et contrevient aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2°du code de commerce, d'avoir dit que l'obligation à la charge des fournisseurs de verser à la société coopérative GALEC des acomptes mensuels prévisionnels de ristournes avant le paiement des marchandises crée un déséquilibre significative dans les droits et obligations des parties au profit de la société GALEC, d'avoir prononcé l'annulation des clauses prévoyant ces obligations dans les accords GALEC conclus en 2009 et 2010 avec les 46 fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, d'avoir condamné la société GALEC à verser au Trésor public la somme de 61 288 677,84 euros correspondant aux sommes ayant été perçues au titre de la RFA GALEC, à charge pour le Trésor public de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt et d'avoir prononcé à l'encontre du GALEC une amende civile de 2 millions d'euros ;

AUX MOTIFS QUE, sur la soumission, la RFA, qui ne figure pas dans les CGV des fournisseurs, est prévue dans l'annexe 2 des contrats-cadres prérédigés par le GALEC, en 2009 et 2010 ; que les 118 contrats-cadres et leurs annexes ont été parafés et signés par tous les fournisseurs sans y apporter de modification ; qu'ainsi, la contradiction flagrante existant entre l'article V des contrats-cadres et l'annexe 2 quant au délai de paiement de la RFA n'a fait l'objet d'aucune rectification, ni en 2009, ni en 2010, ce qui a permis au GALEC d'utiliser les deux délais prévus par ces stipulations contradictoires ; que la différence de taux de ristourne appliqué aux fournisseurs n'est pas la preuve d'une négociation dès lors que le taux a été mentionné dans l'annexe 2 pré-rédigée par le GALEC lui-même, lequel n'offre pas de démontrer l'existence de négociations ayant existé avec ses fournisseurs ; qu'il importe peu que la signature des contrats-cadres en 2009 n'était pas un préalable nécessaire à une entrée en relation d'affaires entre les parties aux contrats ; que le procès-verbal du 30 avril 2009, dont fait état le tribunal de commerce, laisse à penser que le GALEC a cherché à préserver ses marges malgré les nouvelles dispositions de la loi LME ; qu'il se déduit de ces constatations que la RFA GALEC, qui crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, a été imposée à tous les fournisseurs concernés par les 118 contrats en cause, qui ont dû signer les contrats-cadres sans pouvoir les modifier ; que l'existence d'une soumission au sens de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce est établie ;

1°) ALORS QU'il appartient au ministre chargé de l'économie, agissant sur le fondement de l'article L. 442-6, III du code de commerce de prouver l'existence de la pratique restrictive de concurrence qu'il invoque ; que, pour établir l'existence d'une soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, la cour d'appel a relevé que la différence de taux de ristourne appliqué aux fournisseurs n'était pas la preuve d'une négociation et que le GALEC n'offrait pas de démontrer l'existence de négociations ayant existé avec ses fournisseurs ; qu'en statuant ainsi, elle a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

2°) ALORS QUE la preuve d'une soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ne peut résulter que d'éléments démontrant que le distributeur a exercé des pressions auxquelles les fournisseurs ne pouvaient résister ; qu'en se bornant à relever, pour considérer que l'existence d'une soumission était établie, que l'annexe 2 des contrats-cadres avait été prérédigée par le GALEC puis signée par le fournisseurs sans modification, qu'il existait une contradiction entre cet annexe et l'article V des contrats-cadres quant au délai de paiement de la RFA et que le procès-verbal du 30 avril 2009 laissait penser que la GALEC avait cherché à préserver ses marges malgré les nouvelles dispositions de la loi LME, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce.


QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (sur le versement des sommes au Trésor public)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué condamné la société GALEC à verser au Trésor public la somme de 61 288 677,84 euros correspondant aux sommes ayant été perçues au titre de la RFA GALEC, à charge pour le Trésor public de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE la demande de répétition de l'indu formée par le ministre en application de l'article L. 442-6 III du code de commerce, conforme au but d'intérêt général qu'il poursuit, permet d'éviter que le GALEC conserve les sommes reçues au titre de la RFA et donc le bénéfice d'une ristourne illicite ; que le ministre a fourni un compte précis des sommes revenant à chacun des 48 fournisseurs concernés ; que, la remise des fonds au Trésor public en vue de leur restitution aux 48 fournisseurs est seule de nature à assurer l'exécution du présent arrêt ; que la demande du ministre sera accueillie ; qu'en raison des risques de pression existant à l'égard des fournisseurs afin de les contraindre à renoncer à réclamer la restitution des sommes leur revenant, comme cela a déjà été le cas, la demande du GALEC doit être rejetée ;


ALORS QUE la partie qui a indûment perçu des sommes de son cocontractant ne peut être condamnée qu'à restituer ces sommes au cocontractant lui-même ; qu'aucune disposition législative ne permet au juge de condamner cette partie à verser au Trésor public des sommes indûment perçues, quand bien même ce dernier serait chargé de restituer les sommes au cocontractant ; qu'en condamnant le GALEC à verser au Trésor public des sommes perçues au titre de la RFA GALEC, à charge pour celui-ci de les restituer aux fournisseurs visés dans la liste jointe à l'arrêt, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, III du code de commerce.



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Cette décision est visée dans la définition :
Concurrence


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.