par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 27 janvier 2010, 09-60103
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Cour de cassation, chambre sociale
27 janvier 2010, 09-60.103

Cette décision est visée dans la définition :
Syndicat




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon le jugement attaqué que le syndicat CFDT des transports centre francilien (le syndicat), et M. X... ont saisi le tribunal d'instance pour demander l'annulation des élections des membres du comité d'entreprise et des délégués du personnel intervenues le 13 février 2009 au sein de la société Aéropass (la société) ;

Sur le pourvoi incident de l'employeur qui est préalable :

Attendu que pour des motifs pris de la violation des articles 31 du code de procédure civile et L. 2132-3 du code du travail, la société Aéropass fait grief au jugement d'avoir déclaré recevable la requête en annulation des élections formée par le syndicat CFDT des transports francilien et M. X... ;

Mais attendu d'abord, que le moyen tiré de l'absence de constatation de la dissolution du syndicat général CFDT des transports 77 est nouveau, mélangé de fait et de droit, et donc irrecevable ;

Attendu ensuite, que le tribunal a constaté que le syndicat général CFDT des transports franciliens s'était substitué à compter du 1er janvier 1977 au syndicat général des transports 77 qui avait été invité à négocier le protocole préélectoral et que toute personne intéressée est recevable à contester le résultat des élections ;

D'où il suit que le moyen irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 2314-24 et L. 2324-22 du code du travail ;

Attendu que pour rejeter la demande d'annulation des élections, le tribunal retient que, si l'article 1 des statuts définit le SPEOCA comme une association régie par la loi de 1901 et non comme un syndicat, et que ses statuts ont été déposés à la préfecture et non à la mairie de son siège, et s'il ne justifie pas des critères de représentativité imposés par la loi, et notamment l'ancienneté, ce dont il résulte qu'il n'avait pas qualité pour présenter une liste de candidats aux élections du 13 février 2009, cette irrégularité n'est toutefois susceptible d'entraîner l'annulation des élections que dans la mesure où elle aurait une influence sur les résultats du scrutin ;

Attendu cependant que selon les articles L. 2314-24 et L. 2324-22 du code du travail, qui sont d'ordre public, seules des organisations syndicales peuvent présenter des candidats au premier tour des élections professionnelles dans l'entreprise, qu'il en résulte que la participation d'une personne morale qui n'a pas la qualité de syndicat au premier tour est une cause de nullité de l'élection, peu important son influence sur les résultats ;

Qu'en statuant comme il a fait, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 mars 2009, entre les parties, par le tribunal d'instance de Gonesse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Montmorency ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Aéropass à payer au syndicat général de transport CFDT et à M. X... la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X... et le syndiat général de transport CFDT.

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR rejeté la demande des exposants tendant à voir annuler les élections des membres du comité d'entreprise et des délégués du personnel qui ont eu lieu le 13 février 2009 à la société AEROPASS ;

AUX MOTIFS QUE, sur le dépôt de la liste CFDT, selon l'article L 2324-21 du Code du Travail, les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales représentatives ; cet accord respecte les principes généraux du droit électoral et les modalités sur lesquelles aucun accord n'a pu intervenir peuvent être fixées par une décision du juge judiciaire ; il résulte de ce texte qu'en l'absence d'accord, le recours au juge constitue une faculté et non une obligation et en conséquence, à défaut de saisine du juge par l'une l'autre des parties intéressées, il appartient à l'employeur de fixer les modalités du scrutin ; en l'espèce, la société AEROPASS conteste avoir été destinataire de la liste déposée par le syndicat CFDT par l'intermédiaire de Monsieur X... ; la charge de la preuve de la réalité du dépôt de la liste ainsi que du moment où elle est intervenue pèse sur le syndicat ; en l'espèce, le Syndicat Général CFDT des Transports Centre Francilien soutient que la liste des candidats a été déposée par voie électronique par Monsieur X... le 29 janvier 2009 à 12 h 03 ; à l'appui de cette affirmation, le syndicat produit la copie d'un courrier électronique adressé par Bruno X... à Olga Y... ; en l'absence de toute forme d'accusé de réception ou de lecture du message électronique, la copie produite est insuffisante à établir la réalité de l'envoi ainsi que sa date, la date et l'heure portées sur le message dépendant exclusivement du paramétrage de l'ordinateur de l'expéditeur du message ; de même, ce document n'établit pas la nature exacte de la pièce jointe, la liste n'étant pas contenue dans le corps du message lui-même ; en conséquence, le syndicat CFDT et Monsieur X..., ne prouvent pas la réalité du dépôt de la liste de candidatures de sorte que le débat sur le dépassement de délai et ses conséquences se trouve sans objet ; il n'y a donc pas lieu à annulation des élections de ce chef ;

AUX MOTIFS aussi QUE, sur la présence d'une liste déposée par le SPEOCA, selon les articles L 2324-21 et L 2324-22 du Code du Travail, l'accord préélectoral est négocié avec les organisations syndicales représentatives et au premier tour de scrutin chaque liste est également établie par les organisations syndicales représentatives ; les critères de représentativité fixés par l'article L2121-l du Code du travail issu de la loi du 20 août 2008 sont : 1 ° Le respect des valeurs républicaines ; 2° L'indépendance ; 3° La transparence financière ; 4° Une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation. Cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ; 5° L'audience établie selon les niveaux de négociation conformément aux articles L.2122-1, L. 2122-5, L. 2122-6 et L. 2122-9 ; 6° L'influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ; 7° Les effectifs d'adhérents et les cotisations ; en l'espèce, l'article 1 de ses statuts définit le SPEOCA comme une association régie par la loi de 1901 et non comme un syndicat et ses statuts ont été déposés à la préfecture de la Somme et non à la mairie du siège du syndicat ; en outre, le SPEOCA ne justifie pas des critères de représentativité imposés par la loi, notamment la conditions d'ancienneté, et il n'avait donc pas qualité pour présenter une liste de candidat aux élections du 13 février 2009 ; cependant, cette irrégularité n'est susceptible d'entraîner l'annulation des élections que dans la mesure où elle aurait eu une influence sur le résultat du scrutin ; en l'espèce, le SPEOCA n'a obtenu aucune voix au second collège et 40 voix au premier collège ; ont été élus lors des élections du 1er collèges des membres titulaires du comité d'entreprise les deux premiers candidats inscrits sur la liste CFTC qui a recueilli 327 voix et les deux premiers inscrits sur la liste FO qui en a recueilli 281 ; compte tenu du nombre de voix obtenu par les autres listes et notamment de l'écart séparant les deux listes CFTC, 327 voix, et FO, 281 voix ayant obtenus deux élus chacune, de la liste CGT venant immédiatement après avec 56 voix, le report des 40 voix de la SPEOCA, quelles qu'en soient les modalités, n'était pas susceptible de modifier le résultat final de l'élection ; il en est de même pour les élections des membres suppléants du comité d'entreprise avec 352 voix pour la CFTC, voix pour FO et 52 voix pour la CGT et 40 voix pour le SPEOCA ; pour les élections des délégués du personnel titulaires la CFTC a totalisé 502 voix, FO 429 voix, la CGT 78 voix et la SPEOCA, 54 voix et pour les suppléants, la CFTC 503 voix, FO 366 voix, CGT voix et SPEOCA, 48 voix ; en conséquence, aucun scénario de report de voix n'était susceptible de modifier les résultats de l'élection et d'avoir une influence quelconque sur la composition du comité d'entreprise ou l'élection des délégués du personnel ; dans ces conditions, l'annulation des élections n'est pas encourue ;

Et AUX MOTIFS QUE si le vote par correspondance doit conserver un caractère exceptionnel, la particularité d'une entreprise au sein de laquelle le travail est organisé en continue, justifie un recours plus important au vote par correspondance pour permettre aux salariés dont les horaires de travail et de repos n'impliquent pas la présence le jour du vote, de participer au scrutin ; en conséquence, le seul nombre de votants par correspondance est insuffisant à justifier l'annulation de l'élection ; en l'absence d'accord préélectoral et à défaut de saisine du juge l'employeur peut organiser unilatéralement le vote par correspondance ; en l'espèce, il est établi par le procès verbal de constat dressé le 03 février 2009 par Maître Z..., huissier de justice à GONESSE, que l'ensemble du matériel de vote, contrôlé par l'huissier, a été mis sous plis et adressé à tous les électeurs concernés par le vote par correspondance ; l'huissier a également constaté l'affranchissement et le dépôt à la poste de toutes les enveloppes le 03 février 2009 ; il appartient au syndicat et à Monsieur X..., qui soutiennent que le vote par correspondance est entaché d'irrégularité, de prouver les dites irrégularités ainsi que leur influence sur le résultat du vote ; en l'espèce, les demandeurs se contentent de soutenir qu'il y a un doute sur la réception par les électeurs du matériel de vote sans apporter le moindre élément sur le défaut de réception pas même l'attestation d'un seul salarié n'ayant pas reçu ledit matériel de vote ; Monsieur X... invoque des irrégularités dans les opérations de vote mais aucune réserve n'a été portée sur le procès verbal ; la CFDT produit diverses attestations de salariés ayant assisté aux opérations de dépouillement le soir de l'élection qui affirment que Monsieur X... n'a pas sollicité l'inscription de réserve ; s'il en avait empêché, il avait tout loisir de protester même à posteriori mais il ne produit aucun élément sur ce point ; les simples doutes invoqués par les requérants ne caractérisent pas non plus une irrégularité du scrutin pouvant entraîner son annulation ;

ALORS QUE la présentation d'une liste, au premier tour des élections, par une personne morale autre qu'une organisation syndicale remplissant les conditions posées par les articles L 2314-3 et L 2324-4 du Code du Travail, constitue une irrégularité qui doit nécessairement entraîner la nullité des élections ; que le Tribunal a constaté que le SPEOCA n'était pas un syndicat, mais une association, qu'il n'avait pas qualité pour présenter une liste de candidat aux élections mais qu'il en avait néanmoins présenté une et avait obtenu des suffrages ; que le Tribunal, qui a néanmoins refusé, par des motifs inopérants, d'annuler lesdites élections qui avaient donné lieu à un seul tour, a violé les articles L 2314-24 et L. 2324-22 du Code du Travail ;

ALORS subsidiairement QUE l'appréciation de l'influence des irrégularités sur les résultats doit être effectuée en fonction du quotient électoral calculé en tenant compte du nombre total des suffrages valablement exprimés ; que pour se prononcer, le Tribunal a tenu compte des voix obtenues par les différentes listes, y compris les votes qui n'avaient pas été valablement exprimés en faveur de la liste irrégulière présentée par le SPEOCA, sans préciser le quotient électoral ; qu'il a ainsi entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L 2314-24, L. 2324-22, R 2314-22 et R 2324-18 du Code du Travail ;


Et ALORS QU'en vertu des principes généraux du droit électoral, le vote par correspondance ne peut être utilisé que dans des circonstances exceptionnelles dont l'existence doit être constatée concrètement ; que le Tribunal a considéré que le seul nombre de votants par correspondance était insuffisant à justifier l'annulation de l'élection ; qu'en statuant comme il l'a fait sans constater concrètement l'existence de circonstances exceptionnelles justifiant le recours au vote par correspondance, le Tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L 2314-23 et L 2324-21 du Code du Travail (anciennement L 423-13 et L 433-9).



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.