par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 6 juillet 2010, 09-67345
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Cour de cassation, chambre commerciale
6 juillet 2010, 09-67.345

Cette décision est visée dans la définition :
Sauvegarde des entreprises




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Besançon, 29 avril 2009), que par jugement du 3 octobre 2007, le tribunal a ouvert le redressement judiciaire de M. X..., médecin radiologue, sur assignation de l'URSSAF, désigné la SCP Lelerc-Masselon en qualité de mandataire judiciaire et l'ordre des médecins en qualité de contrôleur ; que le redressement judiciaire de M. X... a été converti en liquidation judiciaire, par jugement du 22 octobre 2008 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement ayant prononcé sa liquidation judiciaire alors, selon le moyen, que :

1°/ que lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, le tribunal statue sur la liquidation judiciaire, après avoir entendu ou dûment appelé, en chambre du conseil, l'ordre professionnel ou l'autorité compétente dont, le cas échéant, il relève; que cette formalité substantielle s'impose également à la cour d'appel saisie dans le cadre d'un recours contre le jugement prononçant la liquidation judiciaire ; qu'en se prononçant sur cette mesure à l'égard d'un médecin sans avoir entendu ou dûment appelé l'ordre des médecins, la cour d'appel a violé les articles L. 641-1, I et L. 621-1 du code de commerce ;

2°/que l'organisme professionnel désigné en qualité de contrôleur par le jugement d'ouverture, doit être entendu ou dûment appelé avant que le tribunal prononce la liquidation judiciaire si les conditions de l'article L. 640-1 sont réunies ; que cette formalité substantielle s'impose également à la cour d'appel saisie dans le cadre d'un recours contre le jugement prononçant la liquidation judiciaire; qu'en se prononçant sur cette mesure à l'égard d'un médecin sans avoir entendu ou dûment appelé l'ordre des médecins, la cour d'appel a violé l'article L. 622-10 du code de commerce ;

3°/ qu'après avoir constaté que le débiteur exerçait l'activité de médecin radiologue et que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire avait désigné l'ordre des médecins comme contrôleur, la cour d'appel devait rechercher, au besoin d'office, si l'organisme professionnel associé à la procédure comme contrôleur, avait été entendu ou dûment appelé avant que le tribunal ne statue ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 622-10 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, que les dispositions des articles L. 621-1 et L. 641-1 du code de commerce relatives à la convocation et à l'audition de l'ordre professionnel dont relève le débiteur qui exerce une profession libérale ne s'appliquent qu'à l'ouverture de la liquidation judiciaire et non à son prononcé au cours de la période d'observation ;

Attendu, d'autre part, que les dispositions des articles L. 622-10 et L. 631-15 du code de commerce relatives à la convocation et à l'audition de l'organisme professionnel désigné en qualité de contrôleur, préalablement au prononcé de la liquidation judiciaire, ne s'appliquent qu'à la procédure de première instance et ne concernent pas la procédure devant la cour d'appel ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel, qui statuait sur le recours formé par le débiteur contre le jugement ayant prononcé sa liquidation judiciaire au cours de la période d'observation, n'avait pas à effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1°/ que le prononcé de la liquidation judiciaire prévu par l'article L. 622-10 du code de commerce suppose, aux termes de l'article L. 640-1 du même code, que le redressement soit manifestement impossible ; qu'en l'absence de disposition légale fixant l'âge auquel un médecin libéral devrait être mis en retraite, n'est pas de nature à caractériser une telle impossibilité légale, la circonstance qu' eu égard à l'âge de 62 ans du débiteur, médecin libéral radiologue ayant proposé un plan d'apurement du passif mobilisant ses revenus professionnels, ses actifs propres non professionnels et une donation de son épouse, la durée du plan d'apurement proposée était excessive ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé L. 622-10 du code de commerce, ensemble l'article L. 640-1 du même code ;

2°/ qu'en s'abstenant de préciser les circonstances qui lui auraient permis, en fait, de considérer que M. X..., médecin libéral en redressement judiciaire aurait été dans l'impossibilité de continuer à exercer son activité professionnelle de radiologue entre 62 ans et 72 ans, pendant la durée du plan d'apurement du passif qu'il proposait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 622-10 du code de commerce, ensemble l'article L. 640-1 du même code ;

3°/ que le prononcé de la liquidation judiciaire prévu par l'article L. 622-10 du code de commerce suppose, aux termes de l'article L. 640-1 du même code, que le redressement soit manifestement impossible ; que le caractère difficilement réalisable du redressement ne saurait être assimilée à cette impossibilité légale ; qu' en se fondant encore sur le caractère difficilement réalisable du plan d'apurement proposé, la cour d'appel a violé L. 622-10 du code de commerce, ensemble l'article L. 640-1 du même code ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le passif déclaré au 18 novembre 2008 s'élevait à 1 410 829,38 euros, que M. X... avait réalisé en 2006 un chiffre d'affaires de 204 881 euros et un résultat de 65 837 euros et qu'il envisageait la possibilité de réaliser un chiffre d'affaires de 230 000 euros pour l'année 2008 sans communiquer les résultats de cet exercice et relevé que, même en tenant compte de l'actif non professionnel de M. X... évalué à 200 000 euros et de la proposition de son épouse d'affecter au règlement du passif la vente de deux immeubles lui appartenant en propre, estimés à 340.000 euros, il resterait un passif résiduel de l'ordre de 868 000 euros et que l'apurement de ce passif nécessiterait un règlement annuel de 86 800 euros, somme correspondant au bénéfice dégagé en 2007 avant impôt sur le revenu et prélèvements personnels, c'est par une appréciation souveraine que la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que l'effort financier proposé par M. X... paraissait difficilement réalisable au vu des données comptables et des possibilités de développement de son activité professionnelle et que son redressement était manifestement impossible et justifiait le prononcé de sa liquidation judiciaire, par application de l'article L. 631-15 II du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la cour d'appel de BESANCON d'avoir confirmé le jugement ayant prononcé la liquidation judiciaire de Monsieur Philippe X... ;

AUX MOTIFS QUE par un jugement du 3 octobre 2007, à la requête de L'URSSAF, le Tribunal de grande instance de DOLE a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de Monsieur Philippe X..., fixé à 6 mois la durée de la période d'observation et désigné l' Ordre des médecins comme contrôleur ; que par un jugement du 22 octobre 2008, le tribunal a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire;

1/ ALORS QUE lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou règlementaire ou dont le titre est protégé, le tribunal statue sur la liquidation judiciaire, après avoir entendu ou dûment appelé, en chambre du conseil, l'ordre professionnel ou l'autorité compétente dont, le cas échéant, il relève; que cette formalité substantielle s'impose également à la cour d'appel saisie dans le cadre d'un recours contre le jugement prononçant la liquidation judiciaire ; qu'en se prononçant sur cette mesure à l'égard d'un médecin sans avoir entendu ou dûment appelé l'ordre des médecins, la cour d'appel a violé les articles L. 641-1, I et L. 621-1 du code de commerce;

2/ ALORS QUE l'organisme professionnel désigné en qualité de contrôleur par le jugement d'ouverture, doit être entendu ou dûment appelé avant que le tribunal prononce la liquidation judiciaire si les conditions de l'article L. 640-1 sont réunies; que cette formalité substantielle s'impose également à la cour d'appel saisie dans le cadre d'un recours contre le jugement prononçant la liquidation judiciaire; qu'en se prononçant sur cette mesure à l'égard d'un médecin sans avoir entendu ou dûment appelé l'ordre des médecins, la cour d'appel a violé l'article L. 622-10 du code de commerce ;

3/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'après avoir constaté que le débiteur exerçait l'activité de médecin radiologue et que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire avait désigné l'ordre des médecins comme contrôleur, la cour d'appel devait rechercher, au besoin d'office, si l'organisme professionnel associé à la procédure comme contrôleur, avait été entendu ou dûment appelé avant que le tribunal ne statue ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 622-10 du Code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la cour d'appel de BESANCON d'avoir confirmé le jugement ayant prononcé la liquidation judiciaire de Monsieur Philippe X... ;

AUX MOTIFS QUE l'état succinct des créances au 19 novembre 2008 établi en application de l'article L. 624-1 du code de commerce fait apparaître un passif déclaré de 1 410 829,38 € dont 758 147,37 € à titre privilégié représentant 1, 2 millions d'euros de créances échues constitué principalement de dettes fiscales et sociales ; que selon les documents comptables et fiscaux visés par le mandataire judiciaire, Monsieur X... a réalisé en 2006 un chiffre d'affaires de 204.881 € et un résultat de 65.837 €; que Monsieur X... indique sans toutefois produire de comptabilité avoir réalisé un chiffre d'affaires de 211 404,56 € et de 299 725,07 € pour les dix premiers mois de l'année 2008 en envisageant la possibilité de réaliser un chiffre d'affaires total pour l'année 2008 de 230 000 € ; que les résultats de l'exercice 2008 ne sont pas communiqués; que si selon la lettre de l'URSSAF du Jura du 28 octobre 2008, communiquée par l'appelant, celui-ci semble être à jour de ses cotisations pour la période postérieure à l'ouverture de la procédure collective, il n'en demeure pas moins que subsiste l'arriéré au titre du passif déclaré (194 614,53 € uniquement pour l'URSSAF) ; que Monsieur X... avait proposé un plan de remboursement à raison du versement d'une annuité de 84 000 € pendant 10 ans, proposition ramenée à 6 000 € par mois dans l'attente de l'arrêté définitif du passif selon ses dernières conclusions ; que toutefois selon le mandataire judiciaire, l'apurement du passif nécessiterait un règlement annuel de 86 800 € correspondant au bénéfice dégagé en 2007 avant impôt sur le revenu et prélèvements personnels ; qu'en l'état des informations communiquées au mandataire judiciaire, l'actif non professionnel de Monsieur X... peut être évalué à 200 000 € ; que la proposition de Madame X... d'affecter au règlement du passif de la liquidation judiciaire la vente de deux immeubles lui appartenant en propre, estimés à 340.000 € qui ne constituent pas des actifs disponibles, ajoutée à l'actif non professionnel susmentionné permettrait seulement de dégager un apport de 540.000 € qui ne suffirait pas à combler le passif résiduel qui demeurerait de l'ordre de 868 000 €; qu'enfin la durée du plan de continuation proposée apparaît excessive dans la mesure où Monsieur X... est actuellement âgé de 62 ans ; qu'il résulte de ces éléments que l'effort financier proposé par l'appelant paraît difficilement réalisable au vu des données comptables et des possibilités de développement de son activité professionnelle et qu' ainsi les perspectives de redressement ne sont nullement établies;

1/ ALORS QUE le prononcé de la liquidation judiciaire prévu par l'article L. 622-10 du code de commerce suppose, aux termes de l'article L. 640-1 du même code, que le redressement soit manifestement impossible ; qu'en l'absence de disposition légale fixant l'âge auquel un médecin libéral devrait être mis en retraite, n'est pas de nature à caractériser une telle impossibilité légale, la circonstance qu' eu égard à l'âge de 62 ans du débiteur, médecin libéral radiologue ayant proposé un plan d'apurement du passif mobilisant ses revenus professionnels, ses actifs propres non professionnels et une donation de son épouse, la durée du plan d'apurement proposée était excessive ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé L. 622-10 du code de commerce, ensemble l'article L. 640-1 du même code;

2/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en s'abstenant de préciser les circonstances qui lui auraient permis, en fait, de considérer que M. X..., médecin libéral en redressement judiciaire aurait été dans l'impossibilité de continuer à exercer son activité professionnelle de radiologue entre 62 ans et 72 ans, pendant la durée du plan d'apurement du passif qu'il proposait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 622-10 du code de commerce, ensemble l'article L. 640-1 du même code.


3/ ET ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE le prononcé de la liquidation judiciaire prévu par l'article L. 622-10 du code de commerce suppose, aux termes de l'article L. 640-1 du même code, que le redressement soit manifestement impossible ; que le caractère difficilement réalisable du redressement ne saurait être assimilée à cette impossibilité légale ; qu' en se fondant encore sur le caractère difficilement réalisable du plan d'apurement proposé, la cour d'appel a violé L. 622-10 du code de commerce, ensemble l'article L. 640-1 du même code.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.