par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 20 octobre 2010, 08-42805
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Cour de cassation, chambre sociale
20 octobre 2010, 08-42.805

Cette décision est visée dans la définition :
Droit du Travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche qui est recevable :

Vu les articles 1134 du code civil et L. 1231-1 du code du travail ;

Attendu selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de directeur de la télésurveillance par la société Penauille polysécurité aux droits de laquelle se trouve la société Derichebourg sécurité (la société) par contrat du 25 avril 2005 ; que le contrat prévoyait " une période d'essai de six mois, soit jusqu'au 25 octobre 2005, renouvelable une fois " ; que le 1er septembre 2005 un avenant au contrat de travail a été signé entre les parties modifiant les fonctions du salarié en celles de directeur du développement PPS-RM, avec " une période probatoire de trois mois, soit jusqu'au 30 novembre 2005 ", renouvelable un mois d'un commun accord entre les parties ; que cet avenant stipulait : " si au cours de cette période M. X... ne donnait pas entière satisfaction dans ses nouvelles fonctions (...), les parties conviennent que M. X... retrouverait les fonctions, la rémunération et les conditions de travail qu'il occupait précédemment et serait remis dans la même situation que celle existant avant le présent avenant " ; que par lettre du 12 septembre 2005, la société a notifié au salarié " le renouvellement de sa période d'essai " pour une nouvelle durée de six mois soit jusqu'au 25 avril 2006 ; que le 8 novembre 2005, elle l'a avisé qu'elle mettait fin " à la période d'essai prévue à l'article 2 de son contrat à durée indéterminée " ; que, contestant cette rupture, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à ce titre ;

Attendu que pour juger que le contrat de travail a été valablement rompu par l'employeur au cours de la période d'essai, l'arrêt retient que l'avenant du 1er septembre 2005 ne comprenant aucune stipulation relative à la période d'essai, la période probatoire, qui portait uniquement sur la nature des fonctions et le montant corrélatif de la rémunération du salarié, est venue se superposer à l'essai ; que cet avenant n'a pas rompu le contrat de travail du 25 avril 2005 et n'a pas modifié la situation d'essai de M. X... ; que l'employeur pouvait donc, sans méconnaître la loi contractuelle, reconduire la période d'essai le 12 septembre 2005 et la rompre sans abus le 8 novembre 2005 ;

Attendu, cependant, qu'en présence d'un avenant stipulant une période probatoire pour l'exercice de nouvelles fonctions, la période d'essai prévue dans le contrat de travail du salarié engagé pour occuper d'autres fonctions a nécessairement pris fin ;

Qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes en dommages-intérêts au titre de la rupture abusive, du non-respect de la procédure de licenciement et de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 15 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Derichebourg sécurité aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Derichebourg et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes tendant à voir déclarer la rupture de son contrat de travail par son employeur, la Société DERICHEBOURG SECURITE, venant aux droits de la Société PENAUILLE POLYSECURITE, et de l'avoir débouté en conséquence de ses demandes d'indemnité ;

AUX MOTIFS QUE selon Monsieur X..., l'avenant du 1er septembre 2005 a mis fin à la période d'essai indiquée au contrat initial à l'occasion d'un changement de fonctions assorti d'une période probatoire avec l'assurance de sa réintégration dans ses anciennes fonctions prévue au contrat en cas de rupture de cette période probatoire ; qu'il estime donc avoir été victime, non pas d'une rupture en période d'essai, mais d'un licenciement ; que la Société PENAUILLE POLYSECURITE répond que le contrat a été rompu pendant la période d'essai renouvelée ; que selon le contrat du 25 avril 2005, Monsieur X... a été embauché, à effet au même jour, en qualité de directeur de la télésurveillance, cadre III. A, coefficient 530, par la Société PENAUILLE POLYSECURITE ; que le contrat prévoyait une période d'essai de six mois renouvelable une fois, pendant laquelle le contrat pourrait être rompu sans préavis ; que le 1er septembre 2005 un avenant au contrat de travail du 25 avril 2005 a été signé entre les parties indiquant notamment : " Article I : Nouvelle fonction : A compter du 1er septembre 2005, Monsieur Jean-Jacques X... est nommé : Directeur du développement PPS-RM Cadre position III. A-coefficient 530. Dans le cadre de ses nouvelles fonctions, Monsieur Jean-Jacques X... percevra une rémunération mensuelle brute de 3600, 00 euros sur 12 mois. Article 2 : Période probatoire. Les nouvelles fonctions de Monsieur Jean-Jacques X... sont soumises à une période probatoire de 3 mois, éventuellement renouvelable un mois d'un commun accord entre les parties, qui prendra fin le 30 novembre 2005. Si au cours de cette période, Monsieur Jean-Jacques X... ne donnait pas entière satisfaction dans ses nouvelles fonctions ou si Monsieur Jean-Jacques X... ne souhaitait pas être confirmé dans ses nouvelles fonctions, les parties conviennent que Monsieur Jean-Jacques X... retrouverait les fonctions, la rémunération et les conditions de travail qu'il occupait précédemment et serait remis dans la même situation que celles existant avant le présent avenant. Article 3 Missions (...) Les autres termes du contrat de travail de Monsieur Jean Jacques X... demeurent inchangés " ; qu'il n'est produit aucune pièce à l'appui des affirmations de Monsieur X... selon lesquelles son consentement à cet avenant aurait été vicié par la contrainte économique exercée à son encontre par l'employeur ; que, par lettre du 12 septembre 2005, la Société PENAUILLE POLYSECURITE a notifié à Monsieur X... le renouvellement de sa période d'essai en ces termes : " Ainsi que nous avons déjà eu l'occasion de vous le préciser de vive voix, la période d'essai de 6 mois prévue par votre contrat, qui va venir à expiration le 25 octobre 2005, ne nous a pas permis de conclure avec certitude à votre aptitude à remplir les fonctions envisagées ; en conséquence, nous vous confirmons ici que nous sommes disposés à renouveler la période d'essai à sa date d'expiration le 25 octobre 2005 pour une nouvelle durée de 6 mois (dans la limite de l'essai initial et, le cas échéant du maximum fixé par la convention collective). Ce renouvellement sera fait aux conditions prévues par l'avenant n° 1 à votre contrat de travail, le préavis prévu en cas de rupture à notre initiative étant toutefois porté à 2 mois. Ce préavis de rupture pourra être notifié jusqu'au dernier jour inclus de la reconduction de l'essai et pourra éventuellement être remplacé par le paiement d'une indemnité correspondante " ; que par lettre remise en main propre le 8 novembre 2005, la Société PENAUILLE POLYSECURITE a avisé Monsieur X... qu'elle mettait fin à la période d'essai prévue à l'article 2 de son contrat à durée indéterminée et qu'elle le dispensait d'effectuer le préavis d'un mois prévu par l'article 9 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité qui régissait leurs rapports ; qu'elle précisait que néanmoins ce préavis lui serait payé, ce qui portait la fin des relations contractuelles au 8 décembre 2005 ; que l'avenant n° 1 au contrat de travail du 1er septembre 2005 ne comporte que trois articles concernant : les nouvelles fonctions et le salaire afférent, la période probatoire applicable à ces nouvelles fonctions et les missions confiées ; que pour le surplus, il indique que les autres termes du contrat de travail du 25 avril 2005 demeurent inchangés ; que le contrat de travail du 25 avril 2005 n'a donc pas été rompu par l'avenant n° 1, celui-ci confirmant expressément sa survie pour les clauses non modifiées ; que cet avenant ne constitue pas, par ailleurs, un nouveau contrat de travail distinct du contrat initial ; que lorsque l'avenant est intervenu, Monsieur X... était en période d'essai ; que l'avenant ne comprend aucune stipulation relative à la période d'essai et ne prévoit pas, en particulier, qu'elle est rompue ; que la période d'essai, prévue en début de contrat, qui peut donner lieu à la rupture de celui-ci, ne se confond pas avec la période probatoire imposée au salarié qui change de poste ou est promu en cours de contrat, période dont la rupture entraîne uniquement le retour aux fonctions initiales comme d'ailleurs le stipule l'avenant ; qu'il s'ensuit que l'avenant n'a pas modifié la situation d'essai de Monsieur X... au regard du contrat de travail, c'est-à-dire en ce qui concerne le lien contractuel ; que la période probatoire, qui est venue se superposer à l'essai, portait ainsi uniquement sur la nature des fonctions et le montant corrélatif de la rémunération du salarié ; que la Société PENAUILLE POLYSECURITE pouvait donc, sans méconnaître la loi contractuelle, reconduire la période d'essai le 12 septembre 2005, comme elle l'a fait par courrier notifié le même jour au salarié, lequel n'a manifesté alors aucune opposition au renouvellement ; qu'elle pouvait donc également pendant ce renouvellement, interrompre le contrat par l'envoi d'une lettre recommandée ainsi que le prévoyait l'article 2 du dit contrat ; que la période d'essai ayant pour objet de permettre une période d'observation réciproque pendant laquelle chacune des parties peut refuser de s'engager définitivement sans avoir à s'en expliquer ou à payer d'indemnité, la rupture pendant cette période n'est fautive que si elle est intervenue abusivement, brutalement ou de mauvaise foi ; que Monsieur X... ne verse aux débats aucune pièce permettant de dire que tel a été le cas en l'espèce ; que le contrat de travail a par conséquent été valablement rompu par l'employeur en cours de période d'essai, cette rupture n'est pas fautive et il ne s'agit pas d'un licenciement ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en présence de deux contrats de travail successifs ou en présence d'un avenant au premier contrat, la période d'essai stipulée dans le second contrat ou dans l'avenant ne peut être qu'une période probatoire dont la rupture a pour effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures dans les conditions prévues dans le contrat initial ; que tout en constatant que la période probatoire prévue dans l'avenant au contrat initial de Monsieur X... n'avait pas été rompue par la Société PENAUILLE POLYSECURITE, lorsqu'elle lui avait notifié une nouvelle période d'essai dans les conditions prévues à l'origine, ce qui induisait le caractère illégitime de cette nouvelle période d'essai, la Cour d'appel qui a cependant déclaré valide cette seconde période d'essai pour en déduire l'absence d'abus de la rupture du contrat de travail au cours de cette période d'essai, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article L. 122-4 (devenu L. 1231-1) du Code du travail qu'elle a ainsi violé ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE les contrats de travail et leurs avenants doivent être exécutés de bonne foi ; que tout en constatant que la Société PENAUILLE POLYSECURITE avait notifié à Monsieur X... une nouvelle période d'essai conformément aux prévisions du contrat de travail initial, et ce en cours d'exécution de la période probatoire prévue dans l'avenant au contrat initial et sans avoir procédé à sa rupture, la Cour d'appel qui a cependant écarté toute mauvaise foi de la Société PENAUILLE POLYSECURITE n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres observations et constatations au regard des articles L. 120-4 et L. 122-4 (devenus L. 1222-1 et L. 1231-1) du Code du travail qu'elle a ainsi violés.



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