par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 1er février 2011, 10-11269
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Cour de cassation, chambre commerciale
1er février 2011, 10-11.269
Cette décision est visée dans la définition :
Garantie
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Blanchisserie industrielle catalane du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Groupe Volkswagen France ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 novembre 2009) que la société Blanchisserie industrielle catalane (la société BIC) a fait l'acquisition, auprès de la société Europe Auto, concessionnaire de la marque Volkswagen, d'une automobile qui, ayant parcouru 58 000 kilomètres, est tombée à deux reprises en panne et a fait l'objet de réparations effectuées par la société Europe Auto ; que la société BIC a assigné la société Europe Auto pour obtenir la résolution de la vente pour vices cachés et, subsidiairement, son annulation ; que la société Europe Auto a appelé en garantie la société Groupe Volkswagen France (la société Volkswagen) ;
Attendu que la société BIC fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que l'existence d'un vice caché s'apprécie au jour de la vente, l'acheteur ayant le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de la garder et de s'en faire remettre une partie du prix ; que la cour d'appel a elle-même constaté que le véhicule vendu n'avait fonctionné normalement qu'après qu'aient été remplacés divers boîtiers électroniques, les filtres à carburant, un turbo compresseur défectueux à l'origine de la panne du 7 avril 2006, outre une pompe tandem et les pompes électriques du réservoir dont la défectuosité avait été constatée en cours d'expertise et que l'expert indiquait en conclusion de son rapport ne pas être en mesure de garantir que d'autres défaillances ne se produisent à l'avenir et ne provoquent soit un arrêt du moteur, soit une mise en fonctionnement en mode dégradé ; qu'en déboutant l'acquéreur de son action en résolution sans rechercher si les vices grevant le véhicule, dont elle a elle-même constaté l'existence et qui ont conduit à son immobilisation pendant onze mois, n'étaient pas tels que l'acheteur ne l'aurait pas acquis ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641 et 1644 du code civil ;
2°/ que le vendeur professionnel est tenu de livrer des produits exempts de tout vice ou défaut de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens ; que la cour d'appel qui a constaté que le véhicule litigieux avait connu deux pannes de moteur intempestives et que l'expert indiquait en conclusion de son rapport ne pas être en mesure de garantir que d'autres défaillances ne se produisent à l'avenir et ne provoquent soit un arrêt du moteur, soit une mise en fonctionnement en mode dégradé ; qu'en déboutant néanmoins l'acquéreur de son action en résolution après avoir constaté que l'expert lui-même se refusait à garantir la sécurité du véhicule, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1641 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'acheteur d'une chose comportant un vice caché qui accepte que le vendeur procède à la remise en état de ce bien ne peut plus invoquer l'action en garantie dès lors que le vice originaire a disparu mais peut solliciter l'indemnisation du préjudice éventuellement subi du fait de ce vice ; qu'ayant souverainement retenu que les défectuosités du véhicule litigieux avaient été réparées et ne le rendaient plus impropre à l'usage auquel il était destiné, la cour d'appel a exactement décidé de rejeter la demande en résolution de la vente ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant estimé que le véhicule n'était plus impropre à l'usage auquel il était destiné, et en l'absence d'atteinte aux personnes ou à un bien autre que le produit défectueux lui-même, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que la troisième branche du moyen du pourvoi principal ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident éventuel :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Blanchisserie industrielle catalane aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Blanchisserie industrielle catalane.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la SA Blanchisserie Industrielle Catalane (société BIC) de ses demandes tendant à la résolution pour vice caché de la vente du véhicule qu'elle avait acquis et à la condamnation du vendeur à réparer les préjudices subis,
AUX MOTIFS QUE l'origine de la première panne survenue le 13 février 2006, qui s'est manifestée par un arrêt total du moteur, n'a pas été déterminée avec certitude, même si l'expert envisage comme possible, la cause avancée par la société Groupe Volkswagen France, liée à une pollution du carburant utilisé ; qu'en outre, il est constant que durant la période d'immobilisation du véhicule, consécutive à cette panne, soit du 13 février au 5 avril 2006, la société Europe Auto a procédé, avec l'assistance technique de l'importateur, au contrôle de l'ensemble des connexions électriques sur les circuits d'alimentation des appareils de commande moteur et antidémarrage, au remplacement de divers boîtiers électroniques pour un coût TTC de 4.312,98 euros pris en charge au titre de la garantie contractuelle et au changement des filtres à carburant ; que si l'expert déplore que le système de gestion électronique équipant le véhicule ne permet pas de déceler un colmatage des filtres à carburant, ni une insuffisance de pression du carburant en sortie de pompe, il ne peut pour autant être affirmé que le système de gestion, pour incomplet qu'il soit malgré sa sophistication, se trouve affecté d'un défaut de conformité de nature à altérer l'utilisation normale du véhicule ; que la panne partielle survenue le 7 avril 2006 procède d'une mise en fonctionnement du véhicule en mode « dégradé », le système de gestion électronique ayant décelé un dysfonctionnement du turbo compresseur de la rangée de cylindres n° 1 et limité la puissance du moteur afin d'éviter la survenance de désordres mécaniques importants ; que dans le cadre des opérations d'expertise, il a été procédé au remplacement des deux turbos compresseurs représentant un coût total de travaux de 3.572,81 euros TTC, directement pris en charge par la société Groupe Volkswagen France au titre de la garantie du constructeur ; qu'indépendamment des deux pannes survenues en février et avril 2006, monsieur X... a mis en évidence, lors de ses opérations, une détérioration de la pompe tandem, mettant en pression le carburant alimentant les injecteurs de la rangée de cylindres n° 1, dont le corps présente des rayures provenant de la circulation de particules abrasives dans le carburant, détérioration à l'origine d'une insuffisance de pression dans la pompe, calculée à 4,5 bars au lieu d'une valeur minimale de 7,5 bars ; que l'expert a également indiqué que l'origine première de la présence de ces particules abrasives dans le corps de pompe ne peut être déterminée ; que la pompe tandem défectueuse, qui n'est pas la cause des pannes du véhicule, a été remplacée en cours d'expertise par la société Europe Auto, qui a également effectué le nettoyage du circuit de carburant et le changement des pompes électriques de réservoir ; qu'il a été constaté, lors d'un essai effectué le 16 mars 2007, que la pompe tandem délivrait désormais à 1500 tr/mn une pression de 9 bars, supérieure à la valeur minimale fixée par le constructeur ; que l'expert a, par ailleurs, effectué entre le 19 et le 22 janvier 2007 un essai sur 1.055 kilomètres, qui n'a pas permis de déceler d'anomalie de fonctionnement sur le véhicule, hormis le fait qu'à la fin de l'essai le témoin d'ABS de couleur s'est allumé au tableau de bord, témoin qui était cependant éteint lors de la réunion de clôture du 12 mars 2007 ; qu'il a relevé à cet égard que la mémoire de défauts du système de gestion électronique avait effectivement enregistré un code 16955 P051 « contacteur de feu stop - signal non plausible sporadiquement », mais que ce message d'alerte pouvait être interprété comme un désordre bénin ayant affecté le contacteur de stop ; qu'il est de principe que l'action en garantie des vices cachés découlant des articles 1641 et suivants du code civil n'est ouverte que s'il est constaté l'existence de défauts persistants affectant la chose vendue, de nature à rendre celle-ci impropre à l'usage auquel elle est destinée ; qu'en l'occurrence, monsieur X... a constaté, à l'issue de ses opérations, que le véhicule fonctionnait normalement après qu'aient été remplacés divers boîtiers électroniques, les filtres à carburant, le turbo compresseur défectueux, à l'origine de la panne partielle du 7 avril 2006, ainsi que la pompe tandem dont la détérioration avait été constatée en cours d'expertise ; que même si l'expert indique, en conclusion de son rapport, ne pas être en mesure de garantir que d'autres défaillances ne se produisent à l'avenir et ne provoquent soit un arrêt du moteur, soit une mise en fonctionnement en mode « dégradé », il n'en demeure pas moins que les défectuosités du véhicule ont été réparées et ne le rendent plus impropre à l'usage auquel il était destiné ; que la société BIC a fait constater, par acte d'huissier de justice en date du février 2008, qu'après démarrage du moteur, divers messages d'alerte (« défaut électronique châssis atelier », « défaut des freins stop») continuaient à s'afficher sur le tableau de bord du véhicule ; que pour autant, il ne peut en être déduit que persistent certains défauts cachés du véhicule dès lors, d'une part, que les constatations faites par l'huissier ne permettent pas d'établir le diagnostic des messages d'alerte livrés par le système de gestion électronique et, d'autre part, que le véhicule se trouvait alors hors d'usage depuis un an, remisé dans les locaux de la société BIC et n'ayant parcouru entre le 22 janvier 2007 et le 5 février 2008 que 33 kilomètres ;
1° ALORS QUE l'existence d'un vice caché s'apprécie au jour de la vente, l'acheteur ayant le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de la rendre et de s'en faire remettre une partie du prix ; que la cour d'appel a elle-même constaté que le véhicule vendu n'avait fonctionné normalement qu'après qu'aient été remplacés divers boîtiers électroniques, les filtres à carburant, un turbo compresseur défectueux à l'origine de la panne du 7 avril 2006, outre une pompe tandem et les pompes électriques du réservoir dont la défectuosité avait été constatée en cours d'expertise et que l'expert indiquait en conclusion de son rapport ne pas être en mesure de garantir que d'autres défaillances ne se produisent à l'avenir et ne provoquent soit un arrêt du moteur, soit une mise en fonctionnement en mode dégradé ; qu'en déboutant l'acquéreur de son action en résolution sans rechercher si les vices grevant le véhicule, dont elle a elle-même constaté l'existence et qui ont conduit à son immobilisation pendant onze mois, n'étaient pas tels que l'acheteur ne l'aurait pas acquis ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641 et 1644 du Code civil ;
2° ALORS en toute hypothèse QUE le vendeur professionnel est tenu de livrer des produits exempts de tout vice ou défaut de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens ; que la cour d'appel qui a constaté que le véhicule litigieux avait connu deux pannes de moteur intempestives et que l'expert indiquait en conclusion de son rapport ne pas être en mesure de garantir que d'autres défaillances ne se produisent à l'avenir et ne provoquent soit un arrêt du moteur, soit une mise en fonctionnement en mode dégradé ; qu'en déboutant néanmoins l'acquéreur de son action en résolution après avoir constaté que l'expert lui-même se refusait à garantir la sécurité du véhicule, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1641 du Code civil ;
3° ALORS QUE l'acquéreur faisait expressément valoir qu'à raison des pannes successives auxquelles il avait eu à faire face et des termes mêmes du rapport d'expertise, le véhicule était devenu invendable ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'incertitude affectant le bon fonctionnement et la sécurité du véhicule n'était pas à elle seule de nature à caractériser un vice caché, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du Code civil
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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.