par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 6 avril 2011, 09-66486
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
6 avril 2011, 09-66.486
Cette décision est visée dans la définition :
Gestation pour autrui (GPA)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Z... est né le 30 mai 2001, à Fosston (Minnesota, Etats-Unis), après qu'une personne eut accepté de porter l'embryon issu des gamètes de M. X... et de Mme Y..., son épouse ; qu'un jugement du 4 juin 2001 du tribunal de Beltrami (Minnesota) a prononcé l'adoption en leur faveur de l'enfant après avoir constaté par décision du même jour son abandon par sa mère ; que l'acte de naissance délivré le 6 juin 2001 à Fosston, mentionne les noms de M. X... et de Mme Y..., épouse X..., en qualité de père et mère de l'enfant ; que cet acte a été transcrit le 11 juillet 2003 sur les registres de l'état civil du consulat général de France à Chicago, puis enregistré par le service central de l'état civil de Nantes ; que sur assignation du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, qui avait limité sa demande à l'annulation de la transcription relative à la seule filiation maternelle de l'enfant, l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 26 février 2009) a dit que Mme Y... n'était pas la mère de Z... et a annulé dans la transcription de l'acte de naissance de l'enfant, la mention relative à Mme Y... ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré le ministère public recevable en son action, alors, selon le moyen :
1°/ que le ministère public n'est pas recevable à invoquer, pour voir annuler la transcription d'un acte étranger d'état civil, la contrariété à l'ordre public qu'il a lui-même troublé en procédant à ladite transcription ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le ministère public avait, dans un premier temps, autorisé la transcription de l'acte de l'état civil étranger, puis, dans un second temps, demandé l'annulation de cette transcription en ce qu'elle serait contraire à l'ordre public ; qu'en déclarant néanmoins le ministère public recevable à solliciter l'annulation de la transcription d'un acte d'état civil qu'il avait au préalable autorisée, la cour d'appel a violé l'article 423 du code de procédure civile ;
2°/ que pour déclarer recevable le ministère public en son action fondée sur l'hypothèse d'une fraude à la loi, les juges du fond sont tenus de constater l'existence d'une intention frauduleuse ; qu'en l'espèce, les époux X... faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel qu'ils n'avaient pas eu recours à une mère porteuse aux Etats-Unis dans le but de détourner la procédure d'adoption dès lors qu'ils avaient seulement demandé la transcription en France de l'acte de naissance américain régulièrement établi par les autorités américaines ; qu'en se bornant, pour déclarer le ministère public recevable à contester la filiation maternelle de l'enfant à retenir qu'il existait un doute sur la régularité de l'adoption prononcée aux Etats-Unis, sans constater l'intention frauduleuse des époux X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 336 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le ministère public contestait l'opposabilité en France, au regard de la conception française de l'ordre public international, des jugements étrangers validant une gestation pour le compte d'autrui, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il justifiait d'un intérêt à agir pour la défense de l'ordre public, en application de l'article 423 du code de procédure civile ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande, alors, selon le moyen :
1°/ que pour déclarer inopposable en France un jugement étranger, les juges du fond sont tenus de constater l'incompétence du juge étranger, la contrariété à l'ordre public international ou la fraude à la loi française ; que la conception française de l'ordre public international ne se confond pas avec celle de l'ordre public interne en ce qu'elle n'intervient que pour écarter l'application normale du droit étranger en cas d'incompatibilité avec certains principes fondamentaux ou valeurs considérées comme absolues par la société française ; qu'en se bornant, pour remettre en cause le lien de filiation maternelle établi par deux jugements américains d'abandon et d'adoption de l'enfant Z... et annuler la transcription de ces jugements dans le registre français d'état civil, à déduire de la contrariété à l'ordre public interne du recours à la gestation pour autrui, sur le fondement des articles 16-7 et 16-9 du code civil, la contrariété à la conception française de l'ordre public international, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
2°/ que le respect de la vie privée et de la vie familiale impose le maintien d'un lien de filiation établi depuis plusieurs années permettant le développement et l'intégration familiale de l'enfant ; qu'en conséquence, l'annulation de la transcription, dans le registre français, de l'acte d'état civil étranger établissant un lien de filiation maternelle plus de six ans après son autorisation initiale a pour conséquence de priver l'enfant de tout lien de filiation maternelle et est donc contraire au respect de la vie privée et familiale de l'enfant ; qu'en retenant, en l'espèce, que le statut d'enfant adultérin constituait une atteinte moins grave au respect dû à sa vie privée que celle obtenue par la falsification de son état, la cour d'appel a violé l'article 9 du code civil, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
3°/ qu'en retenant, dans un premier temps, que le respect de la vie privée et de la vie familiale impose la primauté de la transparence soit, en d'autres termes, la conformité de l'état civil avec les conditions dans lesquelles l'enfant est venu au monde, sur l'inscription de la filiation maternelle avec la mère d'intention et, dans un second temps, qu'il convenait d'annuler la transcription des jugements étrangers dans le registre français d'état civil, conférant ainsi à l'enfant issu d'une gestation pour autrui à laquelle ont eu recours deux époux, soit l'enfant génétique d'un couple marié, un statut d'enfant adultérin qui ne correspond pas avec la réalité de sa venue au monde, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires et a ainsi méconnu l'article 455 du code civil ;
4°/ que le principe de primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant, qui trouve son fondement dans l'article 3-1 de la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, impose au juge de rechercher concrètement si l'intérêt de l'enfant guide la mesure qu'il ordonne ; qu'en se bornant à affirmer que l'annulation de la transcription des jugements d'abandon et d'adoption étrangers dans les registres français d'état civil ne conduisaient pas à une méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision, ou, à tout le moins, s'est prononcée par des motifs insuffisants à justifier légalement sa décision et ainsi privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
5°/ qu'en tout état de cause, l'intérêt supérieur de l'enfant impose que le maintien d'un lien de filiation établi depuis plusieurs années permettant le développement et l'intégration familiale de l'enfant et, en conséquence, que sa filiation maternelle établie par deux jugements étrangers et transcrits dans le registre français d'état civil depuis plus de six ans ne soit pas remise en cause ; qu'en disant en 2007 que Mme X... n'est pas la mère de l'enfant Z... né en 2001 et en ordonnant la transcription de ces mentions dans les registres d'état civil, lui conférant ainsi en France le statut d'enfant adultérin, la cour d'appel a violé l'article 3-1 de la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
Mais attendu qu'est justifié le refus de transcription d'un acte de naissance établi en exécution d'une décision étrangère, fondé sur la contrariété à l'ordre public international français de cette décision, lorsque celle-ci comporte des dispositions qui heurtent des principes essentiels du droit français ; qu'en l'état du droit positif, il est contraire au principe de l'indisponibilité de l'état des personnes, principe essentiel du droit français, de faire produire effet, au regard de la filiation, à une convention portant sur la gestation pour le compte d'autrui, qui, fût-elle licite à l'étranger, est nulle d'une nullité d'ordre public aux termes des articles 16-7 et 16-9 du code civil ;
Que, dès lors, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que dans la mesure où ils donnaient effet à une convention de cette nature, les jugements "américains" du 4 juin 2001 étaient contraires à la conception française de l'ordre public international, en sorte que l'acte de naissance litigieux ayant été établi en application de ces décisions, sa transcription sur les registres d'état civil français devait être, dans les limites de la demande du ministère public, rectifiée par voie de suppression de la mention de Mme Y... en tant que mère ; qu'une telle rectification, qui ne prive pas l'enfant de sa filiation paternelle, ni de la filiation maternelle que le droit de l'Etat du Minnesota lui reconnaît, ni ne l'empêche de vivre avec les époux X... en France, ne porte pas atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale de cet enfant au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, non plus qu'à son intérêt supérieur garanti par l'article 3 §1 de la Convention internationale des droits de l'enfant ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour les époux X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré le ministère public recevable en son action tendant à voir constater que l'enfant Z... déclaré comme né le 30 mai 2001 à FUSSTON, USA, n'est pas le fils légitime de Mme Y... et ordonné que la transcription de son acte de naissance dans les registres du service central de l'état civil à NANTES, sera modifiée en ce sens ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE selon les dispositions de l'article 423 du code de procédure civile, le ministère public peut agir pour la défense de l'ordre public à l'occasion des faits qui portent atteinte à celui-ci ; qu'en l'espèce, le ministère public conteste, d'une part, l'opposabilité en France au regard de la conception française de l'ordre public international, de deux jugements américains qui ont eu pour effet, selon lui, de valider le recours par des Français à la gestation pour autrui et, d'autre part, la foi qui peut être accordée, au sens de l'article 47 du code civil, à l'acte de naissance de l'enfant, dressé par les services de l'état civil de l'Etat du Minnesota, conséquemment au prononcé de ces jugements ; que le ministère public est en conséquence recevable à agir, sans qu'il puisse être opposé qu'il a ordonné la transcription de l'acte de l'état civil étranger sur les registres français ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE c'est sur le fondement de l'article 423 du code de procédure civile qui dispose que le ministère public peut agir pour la défense de l'ordre public à l'occasion de faits qui portent atteinte à celui-ci ainsi qu'au vu des dispositions de l'article 336 du code civil qui prévoit la possibilité de contester la filiation légalement établie en cas de fraude à la loi que cette action a été diligentée ; qu'en l'espèce, le procureur de la République du tribunal de grande instance de NANTES a été averti par le consulat de France à CHICAGO des démarches entreprises par les époux X... pour faire enregistrer l'acte de naissance de l'enfant né aux Etats-Unis ; que la suspicion de mère porteuse qui l'accompagnait et le doute ainsi jeté sur la régularité de l'adoption et par conséquence sur les conditions d'établissement de l'acte de naissance justifient l'intérêt à agir du ministère public, lequel est toujours actuel, en dépit du temps écoulé ; qu'en effet la transcription étant intervenue le 11 juillet 2003, le trouble ainsi crée n'a pas cessé ;
ALORS, d'une part, QUE le ministère public n'est pas recevable à invoquer, pour voir annuler la transcription d'un acte étranger d'état civil, la contrariété à l'ordre public qu'il a lui-même troublé en procédant à ladite transcription ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le ministère public avait, dans un premier temps, autorisé la transcription de l'acte de l'état civil étranger, puis, dans un second temps, demandé l'annulation de cette transcription en ce qu'elle serait contraire à l'ordre public ; qu'en déclarant néanmoins le ministère public recevable à solliciter l'annulation de la transcription d'un acte d'état civil qu'il avait au préalable autorisée, la cour d'appel a violé l'article 423 du code de procédure civile ;
ALORS, d'autre part, QUE pour déclarer recevable le ministère public en son action fondée sur l'hypothèse d'une fraude à la loi, les juges du fond sont tenus de constater l'existence d'une intention frauduleuse ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel (pp. 7-10) qu'ils n'avaient pas eu recours à une mère porteuse aux Etats-Unis dans le but de détourner la procédure d'adoption dès lors qu'ils avaient seulement demandé la transcription en France de l'acte de naissance américain régulièrement établi par les autorités américaines ; qu'en se bornant, pour déclarer le ministère public recevable à contester la filiation maternelle de l'enfant à retenir qu'il existait un doute sur la régularité de l'adoption prononcée aux Etats-Unis, sans constater l'intention frauduleuse des époux X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 336 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Mme Y... n'est pas la mère de Z..., né le 30 mai 2001 à Fosston Compté de Polk Etat du Minnesota (Etats-Unis d'Amérique) issue de X... et d'avoir, en conséquence, annulé la mention dans la transcription de l'acte de naissance de l'enfant Z..., né le 30 mai 2001 à Fosston Compté de Polk Etat du Minnesota (Etats-Unis d'Amérique) de la mention « et de Mme Y..., née au Caire (Egypte) le 16 septembre 1954, son épouse » et ordonné l'apposition des dispositions du présent jugement en marge de l'acte de naissance de l'enfant Z...transcrit le 11 juillet 2003 sous le numéro 284 sur les registres du Consulat de France à Chicago ainsi que sous la référence CHICAGO 2003.OO284 sur les registres de l'Etat civil détenus par le service central de l'état civil du ministère des affaires étrangères à Nantes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'acte de naissance litigieux a été transcrit sur les registres français sur le vu de l'acte de naissance américain de l'enfant, dressé par les autorités compétentes de l'Etat du Minnesota, en considération des jugements d'abandon et d'adoption prononcés le 4 juin 2001 par la cour du district de Beltrami (Minnesota) et dont l'opposabilité en France est contestée par le ministère public ; que pour qu'une décision judiciaire prononcée par les juridictions d'un Etat, qui n'est lié par aucune convention internationale avec la France, puisse être reconnue sur le territoire national, il convient que trois conditions soient réunies : la compétence indirecte du juge étranger fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, l'absence de fraude à la loi et la conformité de la décision étrangère à l'ordre public de procédure et de fond ; qu'à ce dernier égard, il n'est pas contesté que Z... est issu d'une jeune femme dont l'identité est connue et qui a accepté de porter, au profit des époux X..., un embryon conçu de leurs gamètes, puis d'abandonner l'enfant ; que l'article 16-7 dont les dispositions sont, aux termes de l'article 16-9 du même code, d'ordre public, prohibe toute convention portant sur la procréation et sur la gestation pour le compte d'autrui, même sans contrepartie ; que dès lors, les jugements prononcés le 4 juin 2001 par la cour du district de Beltrami et qui ont eu pour effet de valider une telle convention, sont contraires à la conception française de l'ordre public international dont il ne peut être valablement soutenu qu'elle conduit à une méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la CEDH pas plus que de l'intérêt supérieur de l'enfant ; qu'en conséquence la transcription de l'acte de naissance de l'enfant effectuée sur les registres française de l'Etat civil, au vu de l'acte de naissance américain, lequel comporte l'indication du nom de Mme Y... épouse X... en qualité de mère, doit être rectifiée conformément à la demande du ministère public, ces mentions devant être annulées ainsi que l'ont fait les premiers juges ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte des pièces du dossier que c'est à la suite de problèmes graves de stérilité que M. et Mme X..., qui ne parvenaient pas à concevoir un enfant par les voies naturelles, ont pris contact avec l'Hôpital Markham Fertility Center à Toronto au Canada où des embryons ont pu être conçus ; que cependant Mme X... se trouvait dans l'impossibilité de porter un enfant à terme et que les médecins ont proposé au couple le recours à une mère porteuse ; que c'est dans ces conditions qu'est né le jeune Z..., aux USA, d'une américaine dont l'identité est connue ; que l'enfant a été déclaré issu de M. X... puis, après que la mère biologique a renoncé à ses droits, adopté par M. et Mme X... suivant un jugement prononcé le 4 juin 2001 par le tribunal du County de Beltrami ; que les époux X... ne contestent pas ces faits qu'ils ont reconnus ; qu'ils soutiennent qu'ils sont de parfaite bonne foi, ne désirant ni violer la loi ni détourner l'adoption de son but puisqu'il s'agit pour eux de leur enfant biologique ; mais qu'il résulte des dispositions de l'article 1128 du code civil que le corps humain est indisponible ; que ce principe, qui est, selon l'article 6 du même code, d'ordre public, s'oppose à toute convention relative tant au corps de la femme qui porte l'enfant qu'à celui de l'enfant ; qu'en application de ce principe, l'article 16-7 du code civil interdit toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui, même sans contrepartie ; que cette disposition est, en vertu de l'article 16-9 du même code, d'ordre public ; que l'interdiction frappe sans aucune distinction tant la conception et donc la mère génitrice que, comme en l'espèce, la grossesse et par conséquent le recours à une mère gestatrice ou mère porteuse ; qu'aucune alternative n'est prévue en dehors des techniques de procréation artificielle autorisées, étroitement encadrées par le législateur pour des raisons d'éthique s'agissant des droits fondamentaux de la personne humaine ; que contrairement à ce qui est soutenu, il n'existe pas de vide juridique puisque la législation en vigueur prohibe très clairement le recours à la gestation pour autrui ; que par ailleurs, en application du principe d'ordre public de l'indisponibilité de l'état, l'article 311-9 du code civil dispose que les actions relatives à la filiation ne peuvent faire l'objet d'une renonciation ; qu'à cet égard, l'accord intervenu entre une femme qui porte l'enfant génétique d'un couple et ce dernier a pour effet de faire renoncer cette femme à sa maternité et par conséquence à son état, mettant en échec le principe selon lequel la mère est celle qui a accouché de l'enfant, dorénavant inscrite dans l'article 325 alinéa 2 du code civil, tel qu'il résulte de l'ordonnance en date du 4 juillet 2005, portant réforme de la filiation, entrée en vigueur le 1er juillet 2006 ; que le recours à un tel procédé, qui a pour conséquence de disposition de son propre état comme de celui d'autrui, en altérant notamment la filiation d'un enfant, ne peut qu'être déclaré illicite ; qu'enfin, si l'adoption permet à une femme de déclarer pour sien un enfant qu'elle n'a pas porté, c'est dans la mesure où les principes ci-dessus exposés ne sont pas auparavant transgressés ; qu'en effet cette institution n'a pas pour but de créer des enfants pour qu'ils soient abandonnés mais de donner une famille à des enfants qui n'en n'ont pas ; que le recours à cette procédure à la suite des manoeuvres susvisées ne peut qu'être considéré comme un détournement ; que par ailleurs le droit à la famille de l'enfant ne peut mettre en échec le caractère illicite que constitue la convention sur le sort de l'enfant à naître ; que le respect auquel l'enfant a droit comme celui d'avoir une famille tel qu'il résulte des articles 8 et 12 de la Convention européenne des droits de l'Homme implique qu'il soit particulièrement veillé à sa protection et par conséquence observé une totale transparence dans les conditions de sa venue au monde ; qu'au surplus l'établissement de sa filiation ne doit pas, par ailleurs, résulter d'une transgression des principes fondamentaux, l'état d'enfant adultérin, conséquence de la régularisation de son acte de naissance, constituant une atteinte moins grave au respect dû à sa vie privée que celle obtenue par la falsification de son état autrement dressé ;
ALORS, de première part, QUE pour déclarer inopposable en France un jugement étranger, les juges du fond sont tenus de constater l'incompétence du juge étranger, la contrariété à l'ordre public international ou la fraude à la loi française ; que la conception française de l'ordre public international ne se confond pas avec celle de l'ordre public interne en ce qu'elle n'intervient que pour écarter l'application normale du droit étranger en cas d'incompatibilité avec certains principes fondamentaux ou valeurs considérées comme absolues par la société française ; qu'en se bornant, pour remettre en cause le lien de filiation maternelle établi par deux jugements américains d'abandon et d'adoption de l'enfant Z... et annuler la transcription de ces jugements dans le registre français d'état civil, à déduire de la contrariété à l'ordre public interne du recours à la gestation pour autrui, sur le fondement des articles 16-7 et 16-9 du code civil, la contrariété à la conception française de l'ordre public international, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
ALORS, de deuxième part, QUE le respect de la vie privée et de la vie familiale impose que le maintien d'un lien de filiation établi depuis plusieurs années permettant le développement et l'intégration familiale de l'enfant ; qu'en conséquence, l'annulation de la transcription, dans le registre français, de l'acte d'état civil étranger établissant un lien de filiation maternelle plus de six ans après son autorisation initiale a pour conséquence de priver l'enfant de tout lien de filiation maternelle et est donc contraire au respect de la vie privée et familiale de l'enfant ; qu'en retenant, en l'espèce, que le statut d'enfant adultérin constituait une atteinte moins grave au respect dû à sa vie privée que celle obtenue par la falsification de son état, la cour d'appel a violé l'article 9 du code civil, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
ALORS, de troisième part, QU'en retenant, dans un premier temps, que le respect de la vie privée et de la vie familiale impose la primauté de la transparence soit, en d'autres termes, la conformité de l'état civil avec les conditions dans lesquelles l'enfant est venu au monde, sur l'inscription de la filiation maternelle avec la mère d'intention et, dans un second temps, qu'il convenait d'annuler la transcription des jugements étrangers dans le registre français d'état civil, conférant ainsi à l'enfant issu d'une gestation pour autrui à laquelle ont eu recours deux époux, soit l'enfant génétique d'un couple marié, un statut d'enfant adultérin qui ne correspond pas avec la réalité de sa venue au monde, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires et a ainsi méconnu l'article 455 du code civil ;
ALORS, de quatrième part, QUE le principe de primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant, qui trouve son fondement dans l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, impose au juge de rechercher concrètement si l'intérêt de l'enfant guide la mesure qu'il ordonne ; qu'en se bornant à affirmer que l'annulation de la transcription des jugements d'abandon et d'adoption étrangers dans les registres français d'état civil ne conduisaient pas à une méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant, la cour d'appel n'a pas motivé s décision, ou, à tout le moins, s'est prononcée par des motifs insuffisants à justifier légalement sa décision et ainsi privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
ALORS, de cinquième part et en tout état de cause, QUE l'intérêt supérieur de l'enfant impose que le maintien d'un lien de filiation établi depuis plusieurs années permettant le développement et l'intégration familiale de l'enfant et, en conséquence, que sa filiation maternelle établi par deux jugements étrangers et transcrits dans le registre français d'état civil depuis plus de six ans ne soit pas remise en cause ; qu'en disant en 2007 que Mme X... n'est pas la mère de l'enfant Z... né en 2001 et en ordonnant la transcription de ces mentions dans les registres d'état civil, lui conférant ainsi en France le statut d'enfant adultérin, la cour d'appel a violé l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant.
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Gestation pour autrui (GPA)
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.