par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. soc., 18 mai 2011, 09-69175
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Cour de cassation, chambre sociale
18 mai 2011, 09-69.175
Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... a été engagé par la société John Deere en qualité de délégué régional le 6 novembre 2000 ; que le même jour il a été mis à disposition de la société John Deere crédit ; qu'ayant refusé une modification de sa rémunération, il a été réintégré au sein de la première société par lettre du 28 novembre 2006 ; qu'il a pris acte de la rupture du contrat de travail le 30 novembre 2006 et saisi la juridiction prud'homale pour faire juger que la prise d'acte produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et obtenir, entre autres, l'indemnisation des heures acquises depuis 2005 au titre du droit individuel à la formation et le paiement de sommes au titre du travail dissimulé et d'heures supplémentaires ;
Sur le premier moyen, qui est recevable :
Vu l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 1231-1 du code du travail ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié tendant à faire juger que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'augmentation du salaire de base en octobre 2006 (de 7%) permettait de compenser la baisse du taux des primes (de 6%) de sorte que la modification n'avait pas d'incidence sur le montant de la rémunération ; que le salarié avait d'ailleurs admis le principe de l'harmonisation avancée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant ni dans sa structure sans son accord, peu important que l'employeur prétende que le nouveau mode de rémunération est sans effet sur le montant global de la rémunération du salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le deuxième moyen :
Vu les articles L. 6323-1 et L. 6323-17 du code du travail ;
Attendu que le salarié, dont la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est justifiée et qui n'est pas tenu d'exécuter un préavis, a droit à être indemnisé de la perte de chance d'utiliser les droits qu'il a acquis au titre du droit individuel à la formation ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié tendant à obtenir le paiement par la société John Deere d'une somme au titre du droit individuel à formation l'arrêt retient que le salarié ne peut prétendre à une indemnisation des heures acquises au titre du DIF depuis 2005 alors qu'il n'a jamais formulé de demande à ce titre comme le suppose l'article L. 6323-10 du code du travail, ni à l'occasion de la prise d'acte de la rupture pour une éventuelle demande pendant le préavis ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen, qui est recevable :
Vu les articles L. 8231-1, L. 8241-1, L. 3121-22 et L. 3121-45, ce dernier dans sa rédaction alors applicable, du code du travail ;
Attendu, d'abord, que toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d'oeuvre est interdite ; que cette interdiction concerne également l'entreprise utilisatrice et que le caractère lucratif de l'opération peut résulter d'un accroissement de flexibilité dans la gestion du personnel et de l'économie de charges procurés à cette dernière ;
Attendu, ensuite, qu'est également interdit tout marchandage défini comme une opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application de dispositions légales ou de stipulations d'une convention ou d'un accord collectif de travail ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié de paiement par la société John Deere crédit d'une somme au titre du travail dissimulé et d'heures supplémentaires, l'arrêt retient qu'il ressort de l'ensemble des documents versés aux débats non contestés sur ce point, que la société John Deere ne retirait pas le moindre profit de l'opération de mise à disposition du salarié auprès de la société John Deere crédit, la rémunération de ce salarié étant refacturée au centime près à la société John Deere crédit ; que le salarié n'établit pas que la rémunération perçue pour un forfait- jours était moindre que celle qui lui aurait été allouée s'il avait relevé de la convention collective qu'il revendique ; qu'en effet dans une telle hypothèse, son salaire de base aurait été différent et le paiement d'heures supplémentaires éventuelles aurait été réglementé ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à soutenir que sa mise à disposition est illicite et qu'elle l'a privé du bénéfice d'une convention collective qui lui aurait ouvert droit à une meilleure rémunération au travers du paiement d'heures supplémentaires ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations, d'une part, que la société John Deere crédit ne supportait aucun frais de gestion de personnel hormis le strict remboursement du salaire et des charges sociales, et, d'autre part, qu'il avait été fait application au salarié d'une convention de forfait-jours illicite, faute pour la convention collective des sociétés financières qui lui était applicable, conformément à l'article L. 8241-2 du code du travail, de prévoir la possibilité d'y recourir, ce qui l'avait privé du paiement des heures supplémentaires effectuées, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne les sociétés John Deere et John Deere crédit aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté la demande de Monsieur X... tendant à faire constater que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts exclusifs de la société John DEERE et à obtenir, en conséquence, diverses indemnités ainsi qu'un rappel de primes et la remise de documents sociaux rectifiés AUX MOTIFS QUE M. X... a été embauché le 6 novembre 2000 en qualité de délégué régional, cadre II, de la C.C.N des ingénieurs et cadres de la métallurgie par la S.A.S JOHN DEERE qui fabrique et vend du matériel agricole ; que le jour même, était signée une lettre de mise à disposition du salarié pour trois ans au profit de la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT, société de financement dont les actions sont détenues à parts égales par une filiale du CRÉDIT AGRICOLE et par la SOCIÉTÉ JOHN DEERE BANK, et dont tout le personnel est détaché auprès d'elle soit par la S.A.S JOHN DEERE soit par le CRÉDIT AGRICOLE ; qu'à l'occasion du deuxième renouvellement triennal de cette mise à disposition, un désaccord a surgi entre M. X... et la S.A.S JOHN DEERE sur un rappel de primes et sur la rémunération, à la suite duquel la S.A.S JOHN DEERE a informé M. X... le 28 novembre 2006 de sa réintégration au sein de la S.A.S JOHN DEERE. M. X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 30 novembre 2006 et a saisi le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE de demandes à l'encontre de la S.A.S JOHN DEERE et de la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT ; que par jugement du 7 avril 2008, le Conseil a débouté le salarié tant de ses demandes liées à la rupture de son contrat de travail que de ses demandes en rappel de salaire ; sur le rappel de salaire et la rupture du contrat de travail : que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que les trois griefs invoqués par M. X... sont le refus de régularisation d'un arriéré de salaire, la tentative en vue de lui imposer une modification de rémunération, et enfin les modifications de fonctions, de. rémunération, de résidence résultant de la décision brutale de l'employeur de mettre un terme fin à la mise à disposition auprès de la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT ; * sur le rappel de salaire : qu'à la suite de réclamations effectuées courant 2006, M. X... a perçu en août 2006 un arriéré de salaire correspondant au montant de la participation qui était intégrée dans la base de calcul des sommes restant dues à M. X... au titre des salaires et primes alors qu'elle aurait dû s'y ajouter ; qu'il se prétend encore créancier d'un rappel de salaire de 19.634,78 qu'il calcule à partir de la lettre annuelle adressée par la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT à la S.A.S JOHN DEERE pour déterminer le solde dû à ce salarié au titre des salaires et primes ; que cette demande est mal fondée pour les motifs suivants : - pour les années 2002 à 2003 incluse, M. X... prétend au montant correspondant au total de l'année écoulée et de la prime pour l'année antérieure, mais omet de déduire dans les sommes perçues la prime qui lui a été versée au titre de l'année antérieure ; il s'ensuit que sa demande aboutirait à lui faire percevoir deux fois la même prime ; - pour les années 2004 à 2006, M. X... procède de la même manière, et en plus, fait figurer dans son décompte, au titre des salaires perçus, des montants moindres que ceux qui figurent sur la lettre annuelle de présentation des comptes de la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT, sans pour autant apporter de justification, et notamment ses bulletins de paie ; que sa demande ne peut donc qu'être rejetée. * sur la modification de la rémunération ; que le contrat de travail de M. X... prévoyait un salaire mensuel sur treize mois pour 217 jours travaillés ; que l'avenant de mise à disposition de M. X... auprès de la SAS JOHN DEERE CRÉDIT, dont le dernier prenait fin au 1er octobre 2006, prévoyait en outre une prime de 0 à 5% calculée sur les résultats financiers de la SAS JOHN DEERE CRÉDIT, et une prime de 0 à 5% calculée en fonction de ses objectifs individuels ; qu'à la suite de la première réclamation de M. X..., la SAS JOHN DEERE CRÉDIT lui a accordé un rappel de participation en se basant sur les lettres annuelles de présentation des comptes, tout en estimant que les sommes qui avaient été alors retenues étaient erronées ; qu'invoquant la nécessité d'harmoniser le calcul des primes de M. X... avec celle du reste du personnel, l'employeur lui a soumis à l'occasion du renouvellement de sa mise à disposition à effet au 2 octobre 2006, un avenant réduisant le montant de chacune des deux primes à un taux de 0 à 2 %, soit un total maximal de 4 % au lieu de 10 %, et une augmentation du salaire de base ; que contrairement à ce qui est soutenu, l'échange intervenu entre M. X... et la SAS JOHN DEERE CRÉDIT ne permet pas de faire ressortir un accord des parties sur les nouvelles modalités financières de mise à disposition ; qu'en effet, dans son courriel du 14 septembre 2006 tout comme dans son courrier recommandé du 4 octobre suivant, M. X... déclarait certes accepter les nouvelles modalités de rémunération en matière de primes, mais a conditionné sa signature de l'avenant à la suppression de la mention fixant le point de départ de l'augmentation de salaire de base en octobre 2006 ; qu'il soutenait en effet pouvoir prétendre à cette augmentation dès le début de l'année 2006. La SAS JOHN DEERE a refusé cette demande, de sorte qu'aucun avenant n'a été signé ; que cependant, d'une part M. X... ne démontre pas qu'il aurait pu prétendre à l'augmentation revendiquée dès avant octobre 2006 ; que d'autre part, ni la SAS JOHN DEERE ni la SAS JOHN DEERE CRÉDIT n'étaient tenues de renouveler le contrat de mise à disposition de M. X... en l'absence d'accord de ce dernier sur les nouvelles modalités proposées, et ce, quand bien même le poste allait rester non pourvu au sein de la SAS JOHN DEERE CRÉDIT ; qu'enfin, il n'est mis en évidence aucune déloyauté de l'employeur dans les nouvelles conditions proposées : ce dernier souligne que l'augmentation du salaire de base en octobre 2006 (de 7 %) permettait de compenser la baisse du taux des primes (de 6 %), de sorte que la modification n'avait pas d'incidence sur le montant de la rémunération ; M. X... avait d'ailleurs admis le principe de l'harmonisation avancée par la SAS JOHN DEERE ; * sur la modification du contrat de travail ; que M. X... ne peut soutenir que la SAS JOHN DEERE a brutalement décidé de mettre fin au détachement, alors qu'à la suite des nombreux échanges de courriels et courriers entre parties depuis le 1er septembre, la directrice des ressources humaines de la SAS JOHN DEERE a par courriel du 26 octobre 2006, attiré son attention sur la nécessité pour lui de prendre position au plus tard pour le 31 octobre 2006 en lui renvoyant, en cas d'accord, les deux exemplaires de l'avenant signés ; que ce qu'il n'a pas fait. La conséquence qu'en a tirée la S.A.S JOHN DEERE en réintégrant M. X... dans ses services le 28 novembre, soit quatre semaines plus tard, et alors que depuis deux mois, M. X... poursuivait son travail auprès de la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT dans des conditions non régularisées, ne caractérise pas une précipitation déloyale ; que la mise à disposition ayant pris fin, la modification du contrat de travail doit s'apprécier au regard du contrat de travail initial, sauf à tenir compte de l'évolution salariale acquise ; que le poste proposé était conforme au contrat : délégué régional cadre Il ; que la rémunération correspondait au montant acquis en 2006 (salaire brut de base intégrant les 10% de primes) ; que le lieu de travail était celui prévu au contrat de travail (ORMES, avec possibilité de devoir résider sur son secteur) ; qu'il était prévu une formation de six mois sur la gamme des matériels agricoles, avec prise en charge des frais de double résidence sur cette période ; qu'il ressort de cette analyse que la réintégration de M. X... dans son entreprise d'origine ne traduisait pas une modification unilatérale de son contrat de travail, la formation apparaissant justifiée par les fonctions confiées, au regard de l'évolution des produits à commercialiser ; qu'au surplus, la S.A.S JOHN DEERE produit les évolutions de carrière de collègues ayant eu un parcours similaire à M. X..., qui démontrent que sa nouvelle affectation ne traduisait aucune "mise au placard" ; qu'en conséquence, en l'absence de griefs établis, la prise d'acte par M. X... de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'une démission, et le jugement est confirmé en ce qu'il déboute l'intéressé de ses demandes contre la S.A.S JOHN DEERE ;
1°) ALORS QU'aux termes de la « lettre de mise à disposition » établie entre la société JOHN DEERE CREDIT (filiale de la société JOHN DEERE, société mère et employeur originaire de Monsieur X...) et Monsieur X..., la rémunération comprenait le salaire de base dont bénéficiait ce dernier au titre du contrat conclu avec la société JOHN DEERE, augmenté d'une prime annuelle calculée sur ses objectifs individuels et les résultats financiers de la société JOHN DEERE CREDIT, le versement de cette rémunération étant versé par la société mère; qu'il était constant que la société JOHN DEERE CREDIT annonçait, année après année, dans ses lettres de présentation des comptes les sommes dues en calculant les primes à partir du salaire de base de l'intéressé (, productions n° 7-1 à 7-5) ; qu'à l'appui de ses demandes de rappel de primes pour la période de 2002 à 2006, Monsieur X... avait scrupuleusement repris les sommes annoncées par la société JOHN DEERE CREDIT et les avait comparées aux sommes qui lui avaient effectivement été payées par la société JOHN DEERE CREDIT (cf. conclusions p. 9 et 15) ; qu'en retenant que le mode de calcul du salarié « aboutirait à lui faire percevoir deux fois la même prime », sans expliquer en quoi le montant total des sommes revendiquées par le salarié aurait été différent du montant annoncé par la société JOHN DEERE CREDIT dans les lettres de présentation des comptes et que devait lui verser la société JOHN DEERE, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et des articles L1232-1 et L 1232-5 du Code du travail ;
2°) ALORS QU'il appartient à l'employeur de prouver qu'il a payé au salarié l'intégralité des primes qui lui sont dues ; qu'en affirmant que le salarié faisait figurer, sur son décompte des sommes perçues, des montants moindres que ceux « qui figurent sur la lettre annuelle de présentation des comptes » de la société JOHN DEERE CREDIT, « sans pour autant apporter de justification », lorsqu'il appartenait à l'employeur de prouver que les éléments figurant dans la lettre de présentation des comptes avaient effectivement été versés au salarié, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil, ensemble les articles L1232-1 et L 1232-5 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE lorsqu'un salarié mis à la disposition d'une filiale de son employeur travaille en fait sous leur subordination conjointe, ces deux sociétés sont employeurs conjoints de l'intéressé; que toute modification du contrat de travail convenue avec l'un ou l'autre de ces co-employeurs est opposable à l'autre ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir qu'il avait été recruté par la société JOHN DEERE en vue d'une opération unique et exclusive, i.e. sa mise à disposition au profit de la société JOHN DEERE CREDIT (cf. concl. p.30) ; qu'il offrait de prouver, au moyen de différents courriers du directeur de la société JOHN DEERE CREDIT (production n° 12), que s'il avait continué à être payé directement par la société JOHN DEERE, son employeur initial, il avait néanmoins travaillé dès le premier jour de son embauche et pendant six années ininterrompues sous l'autorité directe de la société JOHN DEERE CREDIT, qui avait exercé à son égard une autorité directe pour déterminer ses tâches à accomplir, fixer les objectifs annuels à atteindre, contrôler l'exécution de ces missions, lui avait fourni les moyens d'exécution de la prestation de travail (cf. carte grise, production n° 13) et avait arrêté le montant d'une partie de sa rémunération année après année (conclusions p. 32 et suivantes), de sorte qu'elle devait se voir reconnaître la qualité d'employeur (conclusions p. 31) ; que l'exposant faisait ensuite valoir que la société JOHN DEERE ne pouvait modifier unilatéralement, à l'occasion de sa réintégration, les éléments de son contrat de travail tels qu'ils avaient été convenus avec la société JOHN DEERE CREDIT et portant sur le lieu de travail, sa qualification ainsi que sur son mode de rémunération ; qu'en retenant que la modification du contrat de travail devait s'apprécier « au regard du contrat de travail initial » au terme de la mise à disposition, pour en conclure que la réintégration d'autorité par la société JOHN DEERE des primes dans le salaire de base, la mutation de l'intéressé dans un autre secteur géographique ainsi que la modification alléguée de sa qualification ne pouvaient constituer une modification du contrat de travail imputable à faute de son employeur originaire, lorsqu'il lui fallait s'interroger sur le point de savoir si les deux sociétés ne s'étaient pas entendues pour recruter le salarié dans l'unique but d'une mise à disposition et n'étaient pas employeurs conjoints de Monsieur X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, et des articles L1232-1 et L 1232-5 du Code du travail ;
4°) ALORS QUE (subsidiaire) la clause du contrat conclu entre l'employeur utilisateur et le salarié mis à sa disposition qui reconnaît à ce dernier le droit à un élément de rémunération variable s'intègre nécessairement au contrat de travail qui le lie à son employeur dès lors, du moins, que ce dernier lui verse la totalité de sa rémunération ; qu'en l'espèce, il était constant que la société JOHN DEERE avait payé pendant six années les éléments de rémunération arrêtés par la société JOHN DEERE CREDIT, ce dont il résultait qu'ils s'étaient définitivement intégrés au contrat de travail de l'intéressé ; qu'en se bornant à retenir que la modification du contrat de travail devait s'apprécier au regard du « contrat initial » sauf à tenir compte de l'évolution salariale acquise, lorsque le paiement ininterrompu par la société JOHN DEERE pendant six années des éléments de rémunération litigieux avait eu pour effet de les intégrer au contrat de travail, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
5°) ALORS QUE la modification unilatérale par l'employeur du mode de rémunération justifie la prise d'acte de la rupture du contrat de travail, quels que soient les motifs du refus du salarié et l'incidence de cette modification sur le montant global de la rémunération; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a expressément admis que s'il déclarait « certes accepter les nouvelles modalités financières », il n'avait finalement pas signé l'avenant proposant une réduction du montant des deux primes (sur résultats financiers et sur objectifs individuels), faute de pouvoir obtenir l'augmentation du salaire de base dès avant le mois d'octobre 2006 ; qu'en retenant que le salarié avait « admis le principe de l'harmonisation avancée par la société John DEERE», que l'employeur utilisateur avait exclu toute « incidence sur le montant de la rémunération » et que Monsieur X... ne pouvait prétendre à l'augmentation revendiquée, pour exclure toute faute de l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
6°) ALORS QUE justifie la prise d'acte de la rupture l'abus commis par l'employeur dans la décision de mutation d'un salarié, qu'elle emporte ou non modification du contrat de travail ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir que sa mutation du secteur de la région de TOULOUSE (région MIDI PYRENEES), où était implantée la société JOHN DEERE CREDIT, dans le secteur géographique de la société JOHN DEERE (commune d'ORMES dans la région CENTRE) ne répondait à aucune nécessité, le poste qu'il occupait au sein de la société JOHN DEERE CREDIT n'étant nullement supprimé mais devant au contraire être pourvu par les soins de la société mère (cf. l'attestation de monsieur A... et les annonces des deux sociétés, productions n° 14 et 15) ; qu'en se bornant à relever, au regard de son état « initial », que le contrat de travail de Monsieur X... n'avait pas été modifié quant au lieu de travail, sans s'interroger sur le point de savoir si la mutation litigieuse, fût-elle conforme aux prévisions initiales du contrat de travail, ne caractérisait pas un abus du pouvoir de direction, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L1232-1 et L 1232-5 du Code du travail ;
7°) ALORS QUE les juges du fond doivent examiner tous les griefs invoqués par le salarié à l'appui de sa prise d'acte de la rupture ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait expressément valoir que la société JOHN DEERE lui avait unilatéralement imposé de travailler à domicile (conclusions p. 20) ; qu'en s'abstenant d'examiner ce grief qui était invoqué à l'appui de la prise d'acte de la rupture, la Cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté les demandes du salarié tendant à obtenir une somme de 1.938 euros au titre de son droit individuel à formation AUX MOTIFS QUE le salarié ne peut prétendre à l'indemnisation des heures acquises au titre du D.I.F depuis 2005 alors qu'il n'a jamais formulé de demande à ce titre comme le suppose l'article L 6323-10 du Code du travail, ni à l'occasion de la prise d'acte de la rupture, pour une éventuelle demande pendant le préavis ;
ALORS QUE sauf dispositions conventionnelles contraires, le salarié qui prend acte de la rupture du contrat de travail et cesse immédiatement le travail n'est pas tenu de formuler ses demandes au titre de son droit à formation dans une période de temps particulière avant de former une demande en justice de ce chef ; qu'en l'espèce, si l'accord d'entreprise du 20 juillet 2004 applicable à Monsieur X... impose aux salariés licenciés ou démissionnaires de demander à bénéficier des programmes de formation avant la fin de leur délai-congé (articles 21 et 23), il ne prévoit aucune condition particulière s'agissant des salariés qui quittent immédiatement leur entreprise après avoir pris acte de la rupture de leur contrat ; qu'en retenant que Monsieur X... ne pouvait prétendre à l'indemnisation des heures acquises au titre du DIF depuis 2005 du seul fait « qu'il n'a jamais formulé de demande à ce titre », « ni à l'occasion de la prise d'acte de la rupture, pour une éventuelle demande pendant le préavis », la Cour d'appel a violé les articles L 6323-1 et suivants du Code du travail, ensemble les dispositions de l'accord précité.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... tendant à voir condamner la société John DERRE CREDIT à lui payer une somme de 30.079,62 euros au titre du travail dissimulé et une somme de 30.000 euros à titre d'heures supplémentaires AUX MOTIFS QU'or, il ressort de l'ensemble des documents versés aux débats, non contestés sur ce point, que la S.A.S JOHN DEERE ne retirait pas le moindre profit de l'opération de mise à disposition de M. X... auprès de la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT, la rémunération de ce salarié étant refacturée au centime près à la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT. En outre, M. X... ne démontre pas que sa soumission à la convention collective dont relevait son employeur avait pour effet de faire réaliser des économies à la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT. ;l qu'or, on sait que la moitié des personnes travaillant au sein de cette société relevaient de la Convention collective des établissements financiers puisque salariées détachées du Crédit Agricole. M. X... ne démontre pas que sa rémunération était moindre que la leur, à poste égal, pas plus qu'il n'établit que la rémunération perçue pour un forfait -jours était moindre que celle qui lui aurait été allouée s'il avait relevé de la C.C.N qu'il revendique ; qu'en effet, dans une telle hypothèse, son salaire de base aurait été différent et le paiement d'heures supplémentaires éventuelles aurait été réglementé ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à soutenir que sa mise à disposition est illicite et qu'elle l'a privé du bénéfice d'une Convention collective qui lui aurait ouvert droit à une meilleure rémunération au travers du paiement d'heures supplémentaires. Pour le même motif, il ne peut soutenir que la S.A.S JOHN DEERE CRÉDIT a intentionnellement dissimulé ces heures et prétendre au paiement de l'indemnité prévue en cas de travail dissimulé ; que le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il le déboute de l'ensemble de ses prétentions.
1°) ALORS QUE le prêt de main d'oeuvre revêt un caractère lucratif pour l'utilisateur dès lors qu'il lui permet de réaliser une économie quelconque ; que revêt donc un tel caractère le prêt de main d'oeuvre qui transfère à l'utilisateur les attributs du lien de subordination et le dispense ainsi d'exécuter les obligations impératives attachées à la qualité d'employeur ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir qu'après avoir été recruté par la société JOHN DEERE, il avait été immédiatement mis à disposition de la société JOHN DEERE CREDIT, qui avait exercé à son égard pendant 6 années ininterrompues une autorité directe pour déterminer ses tâches à accomplir, fixer les objectifs annuels à atteindre, contrôler l'exécution de ces missions, avait fourni les moyens d'exécution de la prestation de travail et arrêté le montant de sa rémunération année après année, même si elle était versée par la société mère ; qu'il soulignait que la convention de mise à disposition avait pour objet exclusif la fourniture de sa propre main d'oeuvre et revêtait un caractère lucratif au profit de l'utilisateur, dès lors que ce dernier se soustrayait à l'exécution des obligations attachées à la qualité d'employeur (conclusions p. 32 et suivantes) ; qu'en se bornant à relever, d'une part, que la rémunération versée par la société mère à Monsieur X... était intégralement facturée à la société JOHN DEERE CREDIT, d'autre part, qu'il ne démontrait pas que cette rémunération procurait à la société utilisatrice des économies au regard de la propre grille conventionnelle qu'elle appliquait à ses propres salariés, pour exclure l'existence du délit de prêt de main d'oeuvre et de marchandage, sans rechercher si l'opération n'avait pas transféré à la société utilisatrice l'exercice de fait des attributs du lien de subordination juridique tout en lui permettant d'échapper au respect des obligations attachées à la qualité d'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8231-1, L. 8241-1 et L. 8241-2, ainsi que de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE le prêt de main d'oeuvre à titre lucratif caractérise le délit de marchandage dès lors qu'il a pour effet d'éluder l'application de dispositions conventionnelles ou légales du droit du travail dans les rapports entre l'utilisateur et le travailleur mis à sa disposition ; que se rend coupable d'une telle infraction l'utilisateur qui emploie, de fait, le salarié mis à sa disposition sous sa subordination juridique sans conclure de contrat de travail avec ce dernier, une telle opération ayant pour objet et pour effet d'éluder l'application des règles du droit du travail et du statut conventionnel applicable à cet employeur, peu important que ce statut soit ou non plus favorable que celui appliqué par son propre employeur ; qu'en se bornant à affirmer que le salarié n'établissait pas que « sa rémunération était moindre» que celle des salariés de la société JOHN DEERE CREDIT, ni qu'elle aurait été supérieure si elle avait été calculée selon les règles de la convention collective applicable à la société utilisatrice, sans à aucun moment recherché si la société JOHN DEERE CREDIT n'avait pas éludé les règles applicables au contrat de travail dans ses rapports avec Monsieur X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 8231-1 du Code du travail ;
3°) ALORS en tout état de cause QU'en vertu des dispositions combinées des articles L. 8241-2 et L. 1251-21 du Code du travail, dans toute opération de prêt de main d'oeuvre, qu'elle engendre ou non un lien de subordination entre eux, l'utilisateur doit appliquer au salarié mis à sa disposition les dispositions de la convention collective applicable à l'entreprise pour ce qui a trait à la durée du travail, au travail de nuit, au repos hebdomadaire et aux jours fériés, à la santé et à la sécurité au travail et au travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs ; que se rend donc coupable du délit de marchandage l'utilisateur de main d'oeuvre qui élude l'application de tout ou partie de ces dispositions conventionnelles ; qu'en l'espèce, il était constant que le salarié avait été soumis pendant toute la durée de sa mission au sein de la société JOHN DEERE CREDIT aux seules dispositions conventionnelles de la société JOHN DEERE (cf. arrêt attaqué p. 6, paragraphe 1), ainsi qu'en disposait l'article 4 de la « lettre de mise à disposition » conclue entre la société utilisatrice et le salarié (production n° 4-1 ) ; qu'en écartant l'infraction du délit de marchandage, lorsque la seule élision par la société utilisatrice des dispositions conventionnelles déterminées par les textes précités suffisait à consommer cette infraction, la Cour d'appel a violé les articles L. 8241-2, L. 1251-21 et L. 8231-1 du Code du travail ;
4°) ALORS QUE se rend coupable de l'infraction de travail dissimulé l'employeur qui emploie un travailleur, en exécution d'une convention de mise à disposition, dans des conditions caractéristiques du lien de subordination sans procéder aux formalités d'embauche ni délivrer de bulletins de paie à l'intéressé ; qu'en l'espèce, après avoir fait valoir qu'il avait travaillé sous la subordination juridique de la société JOHN DEERE CREDIT, Monsieur X... soutenait que cette société s'était abstenue de lui délivrer le moindre bulletin de paie et de procéder aux formalités de déclaration d'embauche ; qu'il réclamait en conséquence le paiement d'une indemnité minimale de 6 mois de salaires pour travail dissimulé et d'heures supplémentaires qui lui était dues sur le fondement de la convention collective applicable à la société JOHN DEERE CREDIT ; qu'en se bornant à retenir que le salarié ne pouvait alléguer la dissimulation d'heures supplémentaires de travail, faute d'établir que le paiement de ces heures aurait été plus avantageux que le paiement au forfait, lorsqu'il lui fallait rechercher si la société JOHN DEERE CREDIT ne s'était pas comportée comme un véritable employeur à l'égard de Monsieur X... et, partant, si l'absence de conclusion d'un contrat de travail, de déclaration d'embauche et de délivrance de bulletins de paie ne caractérisait pas le délit de dissimulation d'emploi salarié, ce qui fondait le salarié à demander le paiement d'une indemnité pour travail dissimulé et le paiement d'heures supplémentaires, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L 8223-1 du Code du travail ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Monsieur X... a travaillé dans la société JOHN DEERE CREDIT pendant 6 ans ; qu'en conséquence, le conseil est très surpris de la réaction tardive de Monsieur X... pour qualifier de « travail dissimulé et de prêt de main d'oeuvre illicite » sa prestation
5°) ALORS QUE le salarié qui fait l'objet pendant plusieurs années d'une convention de mise à disposition reste recevable à solliciter la condamnation de l'entrepreneur utilisateur pour les infractions de prêt de main d'oeuvre illicite, de délit de marchandage et de travail dissimulé ; qu'à supposer qu'elle ait retenu le contraire, par motifs adoptés, la Cour d'appel aurait violé les articles L 8231-1, L. 8241-1, L. 8241-2, L. 8221-5 et L 8223-1 du Code du travail
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Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.