par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 26 octobre 2011, 11-10290
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Cour de cassation, chambre sociale
26 octobre 2011, 11-10.290

Cette décision est visée dans la définition :
Syndicat




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° N 11-10. 290 et Y 11-60. 003 ;

Sur le moyen unique commun aux pourvois :

Vu les articles L. 2324-4, L. 2324-22, L. 2121-1, L. 2122-1, L. 2122-3 et L. 2143-3 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, qu'après que l'employeur, par jugement devenu définitif, a été débouté de sa demande tendant à leur en faire interdiction, le syndicat CGT Renault Douai et le syndicat CGT confédéré de Renault Douai ont présenté, chacun, des listes de candidats dans les mêmes collèges au premier tour de l'élection des membres du comité d'établissement Renault Douai ; que par lettres du 8 novembre 2010, le syndicat CGT Renault Douai a procédé à la désignation de quatre délégués syndicaux d'établissement et de six représentants syndicaux conventionnels au sein de divers CHSCT ; que par lettres du 17 novembre 2010, le syndicat CGT confédéré de Renault Douai a procédé à un nombre identique de désignations portant sur d'autres salariés ;

Attendu qu'après avoir constaté que le syndicat CGT Renault Douai n'avait recueilli, tous collèges confondus, que 8, 72 % des suffrages exprimés, et le syndicat CGT confédéré de Renault Douai seulement 5, 69 %, le tribunal retient néanmoins que les deux syndicats totalisent, ensemble, 14, 41 % des suffrages exprimés et valide les désignations des délégués syndicaux opérées par le syndicat CGT Renault Douai comme étant les seules portant sur des candidats ayant obtenu au moins 10 % des suffrages ainsi que celles des représentants syndicaux aux CHSCT opérées par ce même syndicat comme étant chronologiquement les premières ;

Qu'en statuant ainsi alors, d'une part, que les syndicats CGT Renault Douai et CGT confédéré de Renault Douai ayant présenté chacun leur propre liste au premier tour de l'élection des membres titulaires du comité d'entreprise, il n'y avait pas lieu de procéder à la totalisation, au profit de l'un ou de l'autre, des suffrages recueillis en propre par chacun et alors, d'autre part, qu'ayant constaté que ni l'un ni l'autre de ces syndicats n'avait recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés, ce dont il résultait que ni l'un ni l'autre n'était représentatif au sein de l'établissement de Douai et ne pouvait dès lors procéder aux désignations contestées, le tribunal a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a validé les désignations en qualité de délégué syndical de MM. X..., Y..., Z... et A... opérées par le syndicat CGT Renault Douai par lettre du 8 novembre 2010 ainsi que les désignations en qualité de représentant conventionnel aux CHSCT de MM. B..., C..., D..., E..., F... et G... opérées par ce même syndicat par lettre du même jour, le jugement rendu le 29 décembre 2010, entre les parties, par le tribunal d'instance de Douai ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la cassation ;

Annule les désignations en qualité de délégué syndical de MM. X..., Y..., Z... et A... opérées par le syndicat CGT Renault Douai par lettre du 8 novembre 2010 ainsi que les désignations en qualité de représentant conventionnel aux CHSCT de MM. B..., C..., D..., E..., F... et G... opérées par ce même syndicat par lettre du même jour ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille onze.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen commun produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Renault, demanderesse aux pourvois n° N 11-10. 290 et Y 11-60. 003

Le pourvoi reproche au jugement attaqué d'AVOIR débouté la SAS RENAULT de sa demande d'annulation de la désignation de Messieurs I... X..., Denis Y..., Daniel Z... et Jacky A... en qualité de délégués syndicaux opérée par le syndicat CGT RENAULT DOUAI ; et d'AVOIR débouté la SAS RENAULT de sa demande d'annulation de la désignation de Messieurs Emilio B..., Samuel C..., Christian D... , Sadek E... , Gérald F... et David G... en qualité de représentants syndicaux aux CHSCT, opérée par le syndicat CGT RENAULT DOUAI ;

AUX MOTIFS QUE « 1) Sur les désignations de délégués syndicaux : selon l'article L. 2143-3 du code du travail ; chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement de cinquante salariés ou plus, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour les représenter auprès de l'employeur ; que les organisations syndicales affiliées à une même confédération représentative ne peuvent désigner ensemble un nombre de délégués syndicaux supérieur à celui prévu par la loi ; que les désignations des délégués syndicaux opérées par les syndicats affiliés à la même confédération nationale sont en effet considérées comme étant effectuées au nom de cette confédération ; qu'aux termes des dispositions combinées des articles L. 2121-1 et L. 2122-1 du code du travail, la représentativité des organisations syndicales au sein d'un établissement est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants : le respect des valeurs républicaines, l'indépendance, la transparence financière, une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant les niveaux de négociation et le recueil d'au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'établissement ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que tant le syndicat CGT RENAULT DOUAI qu ele syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI remplissent les quatre premières conditions ci-dessus énoncées ; qu'il résulte de la règle de l'unicité de désignation syndicale telle que ci-avant rappelée que l'audience de la CGT au sein de l'établissement Renault Douai doit s'apprécier au regard des résultats cumulés aux élections professionnelles des deux syndicats qui lui sont affiliés, la circonstance que ces derniers n'aient manifesté aucune volonté de s'associer par le biais de listes communes étant, à cet égard, inopérante ; qu'il est constant que ces deux syndicats ont obtenu ensemble 14, 41 % des suffrages exprimés tous collèges confondus lors des élections des titulaires au comité d'établissement ; que la condition relative à l'audience est par conséquent remplie en l'espèce, de sorte qu'il ne peut être fait droit à la demande d'annulation des désignations de délégués syndicaux présentée sur ce fondement par la SAS RENAULT ; qu'il a été précédemment exposé que l'article L. 2143-3 du code du travail fait obligation aux syndicats représentatifs de choisir, en priorité, les délégués syndicaux parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix ; qu'ainsi que le relève à juste titre le syndicat CGT RENAULT DOUAI, le candidat désigné en qualité de délégué syndical doit avoir recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés dans le seul collège où il est candidat dès lors qu'il ne peut en aucun cas être candidat dans plusieurs collèges ; qu'il ressort du procès-verbal des élections versé aux débats par la SAS RENAULT que seuls les candidats figurant sur la liste présentée par le syndicat CGT RENAULT DOUAI, remplissent cette condition légale puisqu'ils ont recueilli 10, 5 % des suffrages exprimés dans le premier collège, les candidats de la liste du syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI n'ayant quant à eux recueilli que 6, 8 %
desdits suffrages ; qu'il n'y a lieu, par conséquence, de ne procéder à l'annulation que des seules désignations de délégués syndicaux opérées par le syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELSDE RENAULT DOUAI ; 2) Sur les désignations des représentants syndicaux aux CHSCT : les organisations syndicales ne peuvent procéder aux désignations de représentants syndicaux légalement ou conventionnellement prévues que si elles sont représentatives dans l'entreprise ou l'établissement dans lesquels ces désignations doivent prendre effet ; qu'ainsi qu'il a été précédemment souligné, la représentativité de la CGT au sein de l'établissement RENAULT Douai, est, en l'espèce, caractérisée au regard des résultats cumulés aux dernières élections professionnelles des deux syndicats qui lui sont affiliés ; que dès lors que ces deux organisations ne peuvent désigner ensemble un nombre de représentants syndicaux aux CHSCT supérieur à celui prévu par la loi, il appartient au tribunal de trancher le conflit entre les deux syndicats affiliés à la même confédération en application des règles statutaires ou, à défaut de la règle chronologique ; que l'article 24 des statuts de la confédération, versés aux débats par le syndicat CGT RENAULT DOUAI, instaure une procédure de règlement des conflits qui peuvent survenir entre les organisations qui lui sont affiliées, consistant en un arbitrage confié à la confédération exécutive confédérale, la voie de l'appel étant ensuite ouverte aux parties en cause devant la CCN ou le congrès ; qu'en l'espèce, il n'est ni allégué, ni a fortiori démontré que les instances arbitrales de la confédération ont été sollicitées par l'une ou l'autre des organisations syndicales qui lui sont affiliées ; qu'il importe peu que l'union locale CGT de l'arrondissement de Douai et l'union départementale du département du Nord aient « pris partie » pour le syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI dès lors qu'il n'est nullement établi que ces instances locales disposent statutairement d'un pouvoir de légitimation d'un des deux syndicats en litige ; que compte tenu de l'absence de saisine par les parties intéressées des instances arbitrales de la confédération, le conflit qui les oppose ne peut en conséquence être réglé que par application de la règle de la chronologie ; que pour s'opposer à l'application de ladite règle, le syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI ne peut utilement se référer aux réserves qu'il a émises sur le procès-verbal des élections. S'il entendait contester la régularité de celles-ci, il lui appartenait en effet de saisir le tribunal à cette fin, ce qu'il n'a pas jugé opportun de faire ; que par ailleurs, les allégations de cette organisation sur la discrimination dont elle aurait fait l'objet de la part de la SAS RENAULT et sur la rupture d'égalité entre les syndicats qui en serait résulté ne sont étayées par la production d'aucune pièce ; qu'en tout état de cause, il convient de relever que plus de quatre mois se sont écoulés entre le jour du scrutin et l'envoi par le syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI de sa lettre de désignation de représentants au CHSCT. Aussi, à supposer que les griefs de l'organisation syndicale relatifs à l'absence de moyens matériels mis à sa disposition par l'employeur soient fondés, ils ne peuvent, à l'évidence, expliquer la longueur du délai écoulé entre ces deux dates ; qu'il ressort de l'examen des pièces produites par la demanderesse que le courrier recommandé de désignation de ses représentants par le syndicat CGT RENAULT DOUAI a été distribué à sa destinataire le 8 novembre 2010 alors que la lettre émanant du syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI n'a été expédiée que le 15 novembre 2010 ; qu'il s'en déduit que les seules désignations valides sont celles qui ont été effectuées par le syndicat CGT RENAULT DOUAI ; qu'il sera donc procédé à l'annulation des désignations opérées par le syndicat CGT CONFEDERE DES PERSONNELS DE RENAULT DOUAI » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le juge d'instance ayant constaté que la décision du 4 mai 2010 avait validé la présentation de listes rivales par la CGT RENAULT DOUAI et le syndicat CGT CONFEDERE au sein d'un même établissement, ne tire pas les conséquences de cette première décision le juge d'instance qui décide que nonobstant l'absence de liste commune, il y a lieu d'additionner les résultats obtenu par ces deux listes ayant obtenu respectivement moins de 10 % des suffrages, pour attribuer à l'une des organisations syndicales un prétendu pouvoir de désignation ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge d'instance a violé les articles L. 2121-1, L. 2122-1, L. 2122-3 et L. 2143-3 du code du travail ;


ALORS, D'AUTRE PART, QUE de surcroît, en estimant qu'il y avait lieu d'apprécier « l'audience de la CGT au sein de l'établissement RENAULT DOUAI » au regard des résultats cumulés des deux syndicats qui lui sont affiliés, le juge d'instance qui décide d'évaluer globalement l'audience de toutes les organisations affiliées à la CGT, en méconnaissance des termes de son précédent jugement, qui avait décidé que les deux syndicats en cause avaient « la liberté de proposer leur concurrence aux suffrages de leurs électeurs » et qui avait en conséquence validé les deux listes des syndicats CGT RENAULT DOUAI et Syndicat CGT CONFEDERE, viole l'article 1351 du Code civil ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE si en cas de pluralité d'entreprises au sein d'une Unité Economique et Sociale, ou en cas de désignation d'un délégué syndical central au sein d'une entreprise comportant plusieurs établissements, il y a lieu d'additionner la totalité des suffrages obtenus aux termes des différents scrutins organisés au sein de chaque entité par les syndicats affiliés à une même confédération, cette règle n'est pas transposable lorsqu'il s'agit d'apprécier la représentativité des syndicats, non au sein d'une UES, mais au sein d'un seul et même établissement, de sorte qu'en statuant comme il l'a fait, le juge d'instance a violé les articles L. 2121-1 et L. 2122-3 du code du travail et, par fausse application, l'article L. 2143-5 ;

ALORS, ENFIN, QU'en l'absence de désignation opérée par l'organisation à laquelle sont affiliés les syndicats concurrents, il n'y a pas lieu d'additionner leurs suffrages pour les investir d'un droit de désignation alors qu'aucun d'eux n'a atteint le seuil fixé par les législateur pour jouir d'une telle prérogative ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge d'instance a violé les articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2143-3 du Code du travail.



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