par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 11 septembre 2013, 09-12442
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
11 septembre 2013, 09-12.442
Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Compétence
Compromis
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 décembre 2008), que la SNC Doumer, qui avait souscrit une police d'assurances auprès de la société Axa Corporate solutions assurance, a fait exécuter des travaux de rénovation d'un ensemble immobilier, y installant des groupes de climatisation ; que la société Refcomp, dont le siège est en Italie, a fabriqué les compresseurs assemblés par la société Climaveneta dans les groupes de climatisation fournis par la société Liebert, aux droits et obligations de laquelle se trouve la société Emerson Network Power, assurée auprès de la société Axa France IARD ; que des désordres étant survenus dans le système de climatisation, la société Axa Corporate solutions assurance, subrogée dans les droits de la SNC Doumer, a demandé réparation, après expertise, aux fabricant et fournisseur ; que, devant le juge de la mise en état, la société Climaveneta a invoqué une clause compromissoire figurant dans le contrat la liant à la société Emerson tandis que la société Refcomp se prévalait d'une clause attributive de compétence à une juridiction italienne contenue dans ses conditions générales de vente ; que, par arrêt du 17 novembre 2010 (1er Civ., n° 09-12.442), la première chambre civile a rejeté le pourvoi incident de la société Emerson, et, sur le pourvoi de la société Refcomp, a saisi la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;
Attendu que la société Refcomp fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'incompétence des juridictions françaises qu'elle avait soulevée alors, selon le moyen :
1°/ qu'une clause attributive de compétence, valable dans les rapports des parties au contrat initial et désignant un tribunal d'un Etat contractant, prime les compétences spéciales des articles 5 et 6 du règlement n° 44-2001 du 22 décembre 2000 et est opposable au tiers au contrat initial la contenant dès lors que, en vertu du droit national applicable, ce dernier succède à l'une des parties originaires dans ses droits et obligations ; qu'en déclarant non opposable à l'assureur subrogé dans les droits du sous-acquéreur la clause attributive de juridiction convenue entre le fabricant et le vendeur intermédiaire au prétexte que les règles communautaires de compétence spéciale en matière contractuelle ne s'appliquaient pas aux litiges opposant le sous-acquéreur d'une chose au fabricant qui n'était pas le vendeur, de tels litiges se rattachant à la matière délictuelle ou quasi délictuelle, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 23 du règlement n° 44-2001 du 22 décembre 2000 et, par fausse application, les articles 5-1 et 5-3 du même règlement ;
2°/ qu'une clause attributive de compétence, valable dans les rapports des parties au contrat originaire, est opposable au tiers à ce contrat ou à l'assureur subrogé dès lors que, en vertu du droit national applicable, le tiers a succédé au vendeur originaire dans ses droits et actions ; qu'en déclarant non opposable à l'assureur subrogé dans les droits du sous-acquéreur la clause attributive de compétence convenue entre les parties au contrat originaire pour la raison qu'il ne l'avait pas acceptée, la cour d'appel a violé l'article 23 du règlement n° 44-2001 du 22 décembre 2000, ensemble les articles 1165 et 1250 du code civil ;
Mais attendu que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit (CJUE,7 février 2013, C-543/10) que l'article 23 du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens qu'une clause attributive de juridiction convenue dans le contrat conclu entre le fabricant d'un bien et l'acquéreur de celui-ci ne peut pas être opposée au tiers sous-acquéreur qui, au terme d'une succession de contrats translatifs de propriété conclus entre des parties établies dans différents Etats membres, a acquis ce bien et veut engager une action en responsabilité à l'encontre du fabricant, sauf s'il est établi que ce tiers a donné son consentement effectif à l'égard de ladite clause dans les conditions énoncées à cet article ;
Et attendu qu'après avoir constaté que le litige opposait l'assureur subrogé dans les droits de la SNC Doumer, sous-acquéreur des compresseurs des groupes de climatisation, à la société Refcomp, leur fabricant, qui n'en était pas le vendeur, et que celle-là n'avait pas accepté la clause attributive de juridiction convenue entre le fabricant et le vendeur intermédiaire, la cour d'appel, qui a décidé que cette clause ne pouvait pas être opposée à l'assureur, la société Axa Corporate solutions assurance, de sorte que le tribunal de grande instance de Paris était compétent, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Refcomp aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Refcomp à payer à la société Axa Corporate solutions assurance la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour la société Refcomp SPA
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un fabricant (la société REFCOMP, l'exposante) de son exception d'incompétence des juridictions françaises au profit des juridiction italiennes, invoquée contre l'assureur (la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE) subrogé dans les droits du sous-acquéreur (la société DOUMER), en application d'une clause attributive de compétence convenue avec un fabricant intermédiaire (la société CLIMAVENETA) ;
AUX MOTIFS propres et éventuellement adoptés QUE la société de droit italien REFCOMP reprochait au juge de la mise en état d'avoir rejeté l'exception d'incompétence qu'elle avait soulevée en invoquant les conditions générales du contrat de vente passé entre la société CLIMAVENETA et elle-même, qui prévoyaient une attribution de compétence exclusive au profit du tribunal de Vicenza en Italie ; que, contrairement à ce qu'avait retenu le premier juge, en présence d'une clause attributive de juridiction, étaient inapplicables les dispositions de l'article 6 du règlement CE qui étaient primées par celles de l'article 23 du même règlement aux termes desquelles si les parties, dont l'une au moins avait son domicile sur le territoire d'un Etat membre, étaient convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou ces tribunaux de l'Etat membre étaient compétents et cette compétence était exclusive, sauf convention contraire des parties ; que l'article 5 du règlement CE disposait qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre pouvait être attraite dans un autre Etat membre 1° a) en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui servait de base à la demande avait été ou devait être exécutée, b) aux fins de l'application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation qui servait de base à la demande était, pour la vente de marchandises, le lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les marchandises avaient été ou auraient dû être livrées ; que, toutefois, pour l'application des règles de compétence en matière communautaire, l'article 5-1 du règlement CE prévoyant une compétence spéciale en matière contractuelle, ne s'appliquait pas aux litiges opposant le sous-acquéreur d'une chose au fabricant qui n'était pas le vendeur en raison des défauts de la chose vendue, l'article 5-3 du règlement aux termes duquel, en matière délictuelle et quasi délictuelle, le tribunal compétent était celui du lieu où le fait dommageable s'était produit s'appliquant et l'article 23 n'ayant alors plus vocation à intervenir puisque l'action n'avait pas un fondement contractuel ; que le fait dommageable s'étant produit en France, l'ordonnance du juge de la mise en état devait être confirmée en ce qu'elle avait rejeté comme non fondée l'exception de procédure soulevée par la société REFCOMP (arrêt attaqué, p. 5, deux derniers considérants ; p. 6, considérants 1 à 3) ; que la jurisprudence estimait que la clause attributive de compétence n'était opposable qu'à la partie qui en avait eu connaissance et l'avait acceptée au moment de la formation du contrat ; qu'en l'espèce, la société AXA CORPORATE S0LUTIONS, en sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de la société DOUMER, pouvait raisonnablement ignorer son existence, et ce d'autant que la cour de PARIS, par arrêt du 24 novembre 1992, avait retenu l'inopposabilité aux compagnies d'assurance subrogées dans les droits du chargeur contre le transporteur de la clause attributive de compétence internationale dérogatoire au droit commun (ordonnance entreprise, p. 6, dernier alinéa) ;
ALORS QUE, d'une part, une clause attributive de compétence, valable dans les rapports des parties au contrat initial et désignant un tribunal d'un Etat contractant, prime les compétences spéciales des articles 5 et 6 du règlement n° 44-2001 du 22 décembre 2000 et est opposable au tiers au contrat initial la contenant dès lors que, en vertu du droit national applicable, ce dernier succède à l'une des parties originaires dans ses droits et obligations ; qu'en déclarant non opposable à l'assureur subrogé dans les droits du sous-acquéreur la clause attributive de juridiction convenue entre le fabricant et le vendeur intermédiaire au prétexte que les règles communautaires de compétence spéciale en matière contractuelle ne s'appliquaient pas aux litiges opposant le sous-acquéreur d'une chose au fabricant qui n'était pas le vendeur, de tels litiges se rattachant à la matière délictuelle ou quasi délictuelle, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 23 du règlement n° 44-2001 du 22 décembre 2000 et, par fausse application, les articles 5-1 et 5-3 du même règlement ;
ALORS QUE, d'autre part, une clause attributive de compétence, valable dans les rapports des parties au contrat originaire, est opposable au tiers à ce contrat ou à l'assureur subrogé dès lors que, en vertu du droit national applicable, le tiers a succédé au vendeur originaire dans ses droits et actions ; qu'en déclarant non opposable à l'assureur subrogé dans les droits du sous-acquéreur la clause attributive de compétence convenue entre les parties au contrat originaire pour la raison qu'il ne l'avait pas acceptée, la cour d'appel a violé l'article 23 du règlement n° 44-2001 du 22 décembre 2000, ensemble les articles 1165 et 1250 du code civil.
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Compétence
Compromis
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.