par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 25 juin 2014, 13-16529
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
25 juin 2014, 13-16.529

Cette décision est visée dans la définition :
Vente




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte unilatéral sous seing privé du 22 juillet 2005, Philippe X... a « déclaré vendre » à son frère, M. Jean-Marc X..., la moitié indivise d'immeubles qu'ils ont recueillie dans la succession de leur père Frédéric X... ; qu'il est décédé le 6 novembre 2005 en laissant à sa succession ses deux enfants, M. Thomas X... et Mme Y... ; que des difficultés se sont élevées entre eux quant au sort des biens litigieux, M. Jean-Marc X... prétendant en être entier propriétaire pour avoir acquis la part indivise de son frère ; que par un premier arrêt, non critiqué, la cour d'appel a dit que cet acte constituait une offre de vente qui n'avait pas été acceptée avant le décès de Philippe X... ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Jean-Marc X... fait grief à l'arrêt de dire que l'offre de vente du 22 juillet 2005 était caduque au décès de Philippe X... et de dire, en conséquence, que la maison et le bois situés à Pont de Navoy faisaient partie de l'actif de la succession de Frédéric X..., alors, selon le moyen :

1°/ qu'une offre de vente ne peut être considérée comme caduque du seul fait du décès de l'offrant ; qu'en jugeant néanmoins, pour dire que la maison et le bois sis à Pont de Navoy faisaient partie de l'actif de la succession, que l'offre de vente faite le 22 juillet 2005 à son frère par Philippe X... était devenue caduque au décès de ce dernier, la cour d'appel a violé les articles 1101, 1103 et 1134 du code civil ;

2°/ que le décès de l'offrant qui était engagé dans des pourparlers ne rend pas son offre caduque ; qu'en se bornant, pour dire que l'offre du 22 juillet 2005 était caduque, à se fonder sur la double circonstance déduite du décès de l'offrant et de l'intuitu personae de cette offre, sans rechercher si, dès lors que les parties s'étaient rapprochées après l'émission de l'offre, que le bénéficiaire avait cherché le financement de l'acquisition, que les pourparlers étaient engagés à un point tel qu'au mois d'octobre 2005 les pièces nécessaires à la rédaction de l'acte notarié de vente étaient demandées à ce dernier, le décès du pollicitant ne pouvait constituer une cause de caducité de son offre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1101, 1103 et 1134 du code civil ;

Mais attendu que l'offre qui n'est pas assortie d'un délai est caduque par le décès de celui dont elle émane avant qu'elle ait été acceptée ; qu'ayant relevé qu'aucun délai de validité de l'offre n'avait été fixé la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, en a, à bon droit déduit, que l'offre était caduque en raison du décès de Philippe X... ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Mais sur la première branche du second moyen :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande d'attribution préférentielle de M. Jean-Marc X..., l'arrêt retient qu'en l'état la valeur de l'immeuble objet de la demande n'est pas connue, ce qui ne permet pas d'estimer le montant de la soulte qui sera payable comptant, et que le demandeur, retraité âgé de 65 ans, ne fournit aucun justificatif relatif à ses revenus et ses disponibilités financières, ni explique de quelle manière il sera en mesure de régler cette soulte ;

Qu'en statuant ainsi sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande d'attribution préférentielle formée par M. Jean-Marc X..., l'arrêt rendu le 30 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne M. Thomas X... et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Thomas X... et Mme Y... à payer à la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. Jean-Marc X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
M. Jean-Marc X... fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'offre de vente du 22 juillet 2005 était caduque au décès de Philippe X..., le 6 novembre 2005 et d'avoir en conséquence dit que la maison et le bois situés à Pont de Navoy faisaient partie de l'actif de la succession ;
AUX MOTIFS QUE l'arrêt mixte rendu par la Cour le 25 mai 2011 revêt l'autorité de la chose jugée en ce qu'il a dit que l'acte établit le 22 juillet 2005 par Philippe X... n'était pas une promesse de vente, mais une offre de vente, et que cette offre n'avait pas été acceptée par Jean-Marc X... ; qu'il convient en premier lieu de déterminer si l'engagement pris par Philippe X... dans son offre du 22 juillet 2005 a été transmis à ses héritiers ; que l'arrêt du 25 mai 2011 a rappelé qu'il n'y avait pas eu d'échange de consentements, constitutif d'une véritable convention ; qu'en l'absence de fixation d'un délai pendant lequel son auteur s'engage à la maintenir, une offre peut être rétractée jusqu'à son acceptation ; que l'offre doit cependant être maintenue pendant le temps nécessaire pour l'examiner ; qu'en l'espèce, aucun délai de validité de l'offre n'a été fixé ; que Philippe X... est décédé le 6 novembre 2005, soit environ trois mois et demi après la date de l'offre de vente ; que Jean-Marc X... a donc eu un temps suffisant pour examiner l'offre avant le décès de son frère, mais ne l'a pas acceptée avant cet événement ; que le décès de l'offrant est une cause de caducité de l'offre ; qu'en outre, l'intuitu personae apparaît déterminant dans l'offre du 22 juillet 2005 ; qu'en effet cette offre a été faite par Philippe X... au profit de son frère et portait sur des biens dépendant de la succession de leur père, alors qu'ils étaient les deux seuls héritiers ; que cet intuitu personae s'oppose également à une transmission de l'engagement de Philippe X... à ses héritiers ; qu'au vu de ces éléments, il doit être jugé que l'offre de vente est devenue caduque au décès de Philippe X... ; que dès lors, les droits de Philippe X... sur les immeubles litigieux sis à Pont de Navoy font partie de l'actif de sa succession ; qu'il y a lieu de confirmer l'expertise ordonnée en première instance, y compris sur l'évaluation du mobilier, en prévoyant toutefois que l'évaluation de l'indemnité d'occupation depuis le 5 février 1999 se poursuivra au-delà du 22 juillet 2005 ; que l'affirmation de l'intimé, selon laquelle la maison n'aurait aucune valeur locative, ne peut être retenue sans une étude objective complète ; que le montant de l'éventuelle indemnité d'occupation sera fixé après expertise, lorsque la juridiction saisie disposera de toutes les informations nécessaires ; que l'expert devra en outre se prononcer sur la valeur actuelle de l'immeuble ;
1°) ALORS QU'une offre de vente ne peut être considérée comme caduque du seul fait du décès de l'offrant ; qu'en jugeant néanmoins, pour dire que la maison et le bois sis à Pont de Navoy faisaient partie de l'actif de la succession, que l'offre de vente faite le 22 juillet 2005 à son frère par Philippe X... était devenue caduque au décès de ce dernier, la cour d'appel a violé les articles 1101, 1103 et 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE le décès de l'offrant qui était engagé dans des pourparlers ne rend pas son offre caduque ; qu'en se bornant, pour dire que l'offre du 22 juillet 2005 était caduque, à se fonder sur la double circonstance déduite du décès de l'offrant et de l'intuitu personae de cette offre, sans rechercher si, dès lors que les parties s'étaient rapprochées après l'émission de l'offre, que le bénéficiaire avait cherché le financement de l'acquisition, que les pourparlers étaient engagés à un point tel qu'au mois d'octobre 2005 les pièces nécessaires à la rédaction de l'acte notarié de vente étaient demandées à ce dernier, le décès du pollicitant ne pouvait constituer une cause de caducité de son offre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1101, 1103 et 1134 du code civil.


SECOND MOYEN DE CASSATION

M. Jean-Marc X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande d'attribution préférentielle ;
AUX MOTIFS QUE l'article 831-2 autorise tout héritier copropriétaire à demander l'attribution préférentielle du local qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès, et du mobilier le garnissant ; que M. Jean-Marc X... produit des attestations tendant à démontrer qu'il habitait bien dans l'immeuble litigieux, ... à Pont de Navoy, au 5 février 1999, date du décès de son père ; que cependant l'attribution préférentielle est facultative ; qu'en l'état, la valeur de l'immeuble n'est pas connue, ce qui ne permet pas d'estimer le montant de la soulte ; que cette soulte sera payable comptant ; que M. Jean-Marc X..., retraité âgé de 65 ans ne fournit aucun justificatif relatif à ses revenus et à ses disponibilités financières ; qu'il n'explique pas en quelle manière il sera en mesure de régler cette soulte ; que dans ces circonstances, sa demande d'attribution préférentielle doit être rejetée ;
1°) ALORS QUE le juge doit observer, en toutes circonstances, le principe du contradictoire, qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel en relevant, pour débouter M. Jean-Marc X... de sa demande d'attribution préférentielle fondée sur l'article 831-2 du code civil, que ce dernier ne fournissait pas de justificatif relatif à ses revenus et à ses disponibilités financières lui permettant de régler la soulte et qu'elle ignorait la valeur de l'immeuble litigieux lui permettant de fixer cette soulte, s'est fondée d'office sur un moyen sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations dessus, et a ainsi méconnu le principe du contradictoire en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en tout état de cause, tout héritier copropriétaire peut demander l'attribution préférentielle de la propriété qui lui sert d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès ; qu'en se fondant, pour débouter M. Jean-Marc X... de sa demande en attribution préférentielle sur la circonstance inopérante que la valeur de l'immeuble étant inconnue et ce dernier ne justifiant pas de ses revenus, il ne prouvait pas pouvoir régler la soulte, sans vérifier s'il habitait l'immeuble en question au jour du décès de son père ni se prononcer sur les intérêts en présence, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 831-2 du code civil.



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Vente


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.