par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 10 septembre 2014, 12-28977
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
10 septembre 2014, 12-28.977

Cette décision est visée dans la définition :
Caution / Cautionnement




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 30 janvier 2012), que par acte du 30 novembre 2004, Mme X... s'est rendue caution solidaire d'un prêt d'un montant de 27 000 euros consenti par la Société guadeloupéenne de financement (la banque) à M. Y..., et destiné à financer l'achat d'un véhicule automobile ; qu'après défaillance de l'emprunteur, la banque a assigné M. Y... et Mme X... en remboursement dudit prêt ; qu'en cause d'appel, cette dernière a soutenu, sur le fondement de l'article L. 341-4 du code de la consommation, que la banque ne pouvait se prévaloir de son engagement de caution en raison de son caractère disproportionné à ses biens et revenus ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L. 341-4 du code de la consommation, qui dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation, n'est pas applicable aux opérations de crédit dont le montant est supérieur à la somme de 21 500 euros ; qu'en décidant néanmoins que cet article s'applique sans distinction à tous les cautionnements, pour en déduire que Mme X... pouvait se prévaloir de cette disposition, quelle qu'ait été la nature et l'ampleur du cautionnement qu'elle avait consenti, la cour d'appel a violé les articles L. 311-3 et L. 341-4 du code de la consommation ;

2°/ que la charge de la preuve du caractère disproportionné du cautionnement incombe à la caution ; qu'en décidant néanmoins que, dès lors qu'il ne résultait pas des éléments communiqués que Mme X... avait, au moment où elle a été appelée en qualité de caution, un patrimoine différent de celui déclaré lors de la souscription, la disproportion entre le montant de l'engagement de la caution et les biens et revenus de la caution devait être retenue, bien qu'il ait appartenu à celle-ci d'apporter la preuve du caractère disproportionné du cautionnement souscrit à la date à laquelle elle avait été appelée en garantie, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu , d'abord, qu'ayant constaté que l'engagement de caution avait été souscrit le 30 novembre 2004, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que l'article L. 341-4 du code de la consommation issu de la loi du 1er août 2003, lui était applicable ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte de la combinaison des articles 1315 du code civil et L. 341-4 du code de la consommation qu'il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d'établir qu'au moment où il l'appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation ; qu'ayant relevé, après avoir constaté la disproportion de l'engagement souscrit par Mme X..., qu'il ne ressortait pas des éléments communiqués qu' au moment où cette dernière avait été appelée en qualité de caution, elle avait un patrimoine différent de celui déclaré lors de la souscription de son engagement, c'est sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel a retenu que la caution n'était pas en mesure de faire face à son obligation ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société guadeloupéenne de financement aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Société guadeloupéenne de financement à payer la somme de 3 000 euros à la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; rejette la demande de la Société guadeloupéenne de financement ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la Société guadeloupéenne de financement

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la Société Guadeloupéenne de Financement (SOGUAFI) ne pouvait se prévaloir de l'acte de cautionnement signé le 30 novembre 2004 par Madame Sandra X... et de l'avoir, en conséquence, déboutée de sa demande tendant à voir condamner celle-ci à lui payer la somme de 23.540,36 euros, outre intérêts de droit;

AUX MOTIFS QUE selon contrat en date du 31 mai 2003, la SOGUAFI a financé l'achat par Monsieur Fabrice Y... d'un véhicule Seat, en lui prêtant la somme de 27.000 euros remboursable en 60 mensualités de 665,69 euros chacune ; que Monsieur Y... ne pouvant honorer ses engagements, la SOGUAFI a accepté une demande d'arrangement amiable selon contrat du 30 novembre 2004 ; que Madame Sandra X... s'est portée caution solidaire selon acte séparé du 30 novembre 2004, pour la somme de 40.841,29 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts, et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de 60 mois ; qu'il n'est pas contesté que le débiteur n'a pas honoré ses obligations, malgré sommation de payer du 7 octobre 2005, et qu'il reste devoir la somme de 23.540,36 euros, après la vente du véhicule automobile acheté à l'aide du crédit ; que devant la Cour d'appel, Madame X... soutient que l'article L 341-4 du Code de la consommation, qui dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permettent de faire face à ses obligations, lui est applicable ; que la SOGUAFI, qui lui a fait signer un acte de cautionnement pour un montant de 40.000 euros, alors même qu'elle a déclaré habiter chez ses parents, ne pas être propriétaire et percevoir un salaire de 989,30 €, ne peut se prévaloir de l'acte de caution ; que le titre IV du livre III du Code de la consommation, intitulé "CAUTIONNEMENT", comprenant les articles L 341-1 à L 341-6, s'appliquent dès lors qu'une personne physique s'est portée caution envers un créancier professionnel, y compris lorsque l'opération de crédit, objet du cautionnement, n'est pas soumise aux dispositions des articles L 311-1 à L 311-37 du même code ; qu'en l'espèce, il ressort des documents communiqués par la SOGUAFI et notamment du document intitulé "acte de caution solidaire", que lors de la signature de ce formulaire, le 30 novembre 2004, Madame Sandra X... a déclaré exercer la profession de secrétaire et percevoir un salaire mensuel de 989,30 euros ; que la rubrique concernant d'éventuels autres revenus n'est pas remplie ; que la caution solidaire a déclaré en outre résider chez ses parents et ne pas être propriétaire d'un bien immobilier ; que les revenus de Madame X..., qui consistent en tout et pour tout, lors de la rédaction de l'acte, en un salaire de 989,30 €, et alors même que l'appelante n'a déclaré la possession d'aucun bien immobilier, ne lui permettaient pas, à l'évidence, de faire face à une obligation de remboursement à hauteur d'une somme de 40.841,29 euros, ni même à hauteur de 30.056,38 euros, telle que réclamée par la suite ; que l'engagement souscrit est disproportionné à ses biens et revenus, au sens de l'article L 341-4 du Code de la consommation ; qu'en outre, il ne résulte pas des éléments communiqués, que Madame X..., au moment où elle a été appelée en qualité de caution, à payer la somme de 30.056,38 euros, soit le 7 octobre 2005, date de la sommation de payer délivrée tant à l'emprunteur qu'à la caution, avait un salaire ou un patrimoine différent de ceux déclarés quelques mois plus tôt ; qu'il s'ensuit que la SOGUAFI, qui ne peut se prévaloir du contrat de cautionnement souscrit en violation des dispositions légales précitées, doit être déboutée de toute demande en paiement dirigée contre Madame Sandra X... prise en qualité de caution ;

1°) ALORS QUE l'article L 341-4 du Code de la consommation, qui dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation, n'est pas applicable aux opérations de crédit dont le montant est supérieur à la somme de 21.500 euros ; qu'en décidant néanmoins que cet article s'applique sans distinction à tous les cautionnements, pour en déduire que Madame X... pouvait se prévaloir de cette disposition, quelle qu'ait été la nature et l'ampleur du cautionnement qu'elle avait consenti, la Cour d'appel a violé les articles L 311-3 et L 341-4 du Code de la consommation ;

2°) ALORS QUE subsidiairement, la charge de la preuve du caractère disproportionné du cautionnement incombe à la caution ; qu'en décidant néanmoins que, dès lors qu'il ne résultait pas des éléments communiqués que Madame X... avait, au moment où elle a été appelée en qualité de caution, un patrimoine différent de celui déclaré lors de la souscription, la disproportion entre le montant de l'engagement de la caution et les biens et revenus de la caution devait être retenue, bien qu'il ait appartenu à celle-ci d'apporter la preuve du caractère disproportionné du cautionnement souscrit à la date à laquelle elle avait été appelée en garantie, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Caution / Cautionnement


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.