par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 29 septembre 2015, 14-15619
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Cour de cassation, chambre commerciale
29 septembre 2015, 14-15.619
Cette décision est visée dans la définition :
Sauvegarde des entreprises
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Vu les articles L. 661-6, I, 1°, et L. 661-7 du code de commerce et les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que les jugements ou ordonnances relatifs à la nomination, notamment, des contrôleurs ne sont susceptibles que d'un appel du ministère public et que, selon le second, aucun recours en cassation ne peut être exercé contre les arrêts rendus en application de l'article L. 661-6, I, 1° ; qu'il n'est dérogé à cette règle, comme à toute autre règle interdisant ou différant un recours, qu'en cas d'excès de pouvoir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 13 février 2014) et les productions, que, le 11 mai 2012, la société Etablissements Gourault (la société EG) a été mise en liquidation judiciaire, M. X... étant désigné liquidateur ; que, le 28 septembre 2012, la société Groupama assurance crédit, créancière de la société EG, a été désignée contrôleur ; que, par ordonnance du 9 novembre 2012, le juge-commissaire a rejeté la demande de la société Espace France cheval (la société EFC), qui avait déclaré au passif une créance indemnitaire, tendant à être également désignée contrôleur ; que le recours de la société EFC contre cette ordonnance a été déclaré irrecevable par un jugement contre lequel la société EFC a relevé appel-nullité, tandis que le ministère public en a formé appel-réformation ;
Attendu qu'aucun des griefs du pourvoi ne caractérise un excès de pouvoir ; qu'en effet, le premier moyen n'allègue pas un tel excès et la méconnaissance de l'objet du litige, qu'invoque la cinquième branche du second moyen, ne caractérise pas, non plus, un excès de pouvoir ; que les première, deuxième et troisième branches du second moyen critiquent des motifs surabondants de l'arrêt ; qu'enfin, il résulte de l'article L. 621-10 du code de commerce que, contrairement à l'allégation de la quatrième branche du second moyen, si le juge-commissaire désigne un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui lui en font la demande, il n'est pas tenu de désigner tous ceux qui forment une telle demande, même s'ils ne sont pas plus de cinq ; que le refus de nomination de la société EFC en qualité de contrôleur ne caractérise donc pas davantage un excès de pouvoir ;
D'où il suit que, dirigé contre une décision qui n'est pas entachée d'excès de pouvoir et qui n'a pas consacré un tel excès, le pourvoi n'est pas recevable ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi ;
Condamne la société Espace France cheval aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Espace France cheval
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société ESPACE FRANCE CHEVAL tendant à sa désignation en qualité de contrôleur à la liquidation judiciaire de la société Etablissements GOURAULT ;
En l'état d'une cour composée « lors des débats et du délibéré : Monsieur Alain GARNIER, Conseiller ; Monsieur Thierry MONGE, Conseiller ; M. Eric BAZIN, vice-président placé auprès de la Première présidente, affecté à la Cour par ordonnance en date du 28 août 2013 ; DEBATS : A l'audience publique du 12 décembre 2013, à laquelle ont été entendus Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries » (arrêt p.2) ;
En étant signé par « Monsieur Alain GARNIER, Conseiller, faisant fonction de président de chambre et Madame Geneviève JAMAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire »
(arrêt p. 2 et 4) ;
Alors que le jugement est signé par le président et par le secrétaire ; qu'en cas d'empêchement du président, mention en est faite sur la minute qui est signée par l'un des juges qui ont en délibéré ; qu'au cas présent, l'arrêt mentionne qu'il est signé par M. GARNIER, « faisant fonction de Président de Chambre », le Président de Chambre étant M. RAFFEJEAUD, lequel n'était pas membre de la formation de jugement ; que l'arrêt contenant une telle mention, qui ne permet pas de considérer que l'arrêt a été signé par un conseiller en raison d'un empêchement du président, procède d'une violation de l'article 456 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société ESPACE FRANCE CHEVAL tendant à sa désignation en qualité de contrôleur à la liquidation judiciaire de la société Etablissements GOURAULT ;
Aux motifs que « selon l'article L. 621-10 du code de commerce, le juge-commissaire désigne un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui en font la demande ; que l'application de ce texte implique que le candidat contrôleur soit titulaire, à tout le moins, d'une créance paraissant fondée en son principe ; qu'en l'espèce, la créance invoquée par la société ESPACE FRANCE CHEVAL reste purement hypothétique puisqu'il s'agit d'une demande de dommages et intérêts de 4.327.833 € pour rupture abusive d'une relation commerciale établie pour laquelle la société reconnaît elle-même que le juge-commissaire ne dispose pas du pouvoir juridictionnel pour la fixer et dont l'assignation, ultérieure à la déclaration de créance, devant le tribunal de commerce de GRENOBLE, se limite à la reconnaissance de la responsabilité de la société Etablissements GOURAULT, sans formulation indemnitaire ; qu'en outre, si l'existence d'un lien d'instance entre les parties n'est pas un obstacle à la désignation, la mission générale d'un contrôleur de surveillance de la procédure et d'assistance du mandataire judiciaire et du juge-commissaire commande d'éliminer les créanciers présomptifs qui ne présenteraient pas des garanties suffisantes pour assurer leur mission dans des conditions irréprochables de sérénité ; que, compte tenu du caractère manifestement polémique des écritures de la société ESPACE FRANCE CHEVAL devant la présente cour et le tribunal de commerce de GRENOBLE, notamment à l'égard du liquidateur, il n'apparaît pas opportun de désigner cette société en qualité de contrôleur ; que la société ESPACE FRANCE CHEVAL supportera les dépens d'appel » (arrêt p. 3-4) ;
1° Alors qu'un créancier ayant déclaré sa créance à la procédure collective peut être désigné contrôleur tant que la créance n'a pas été rejetée par le juge-commissaire ; que la désignation du créancier en qualité de contrôleur serait seulement déclarée caduque si la créance devait finalement être rejetée ; qu'au cas présent, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que la société ESPACE FRANCE CHEVAL a déclaré à la procédure collective de la société ETABLISSEMENTS GOURAULT une créance d'un montant de 4.327.833 € (arrêt p. 3 § 7) ; que la cour d'appel a considéré que la société ESPACE FRANCE CHEVAL ne pouvait prétendre être désignée en qualité de contrôleur au motif que cette créance ne serait pas fondée en son principe, dès lors qu'il s'agissait d'une demande de dommages-intérêts sur laquelle il n'avait pas encore été statué ; qu'en se déterminant ainsi, cependant que seul un rejet de la créance déclarée par la société ESPACE FRANCE CHEVAL aurait pu faire obstacle à sa désignation en qualité de contrôleur, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article L. 621-10 du code de commerce ;
2° Alors que le juge-commissaire auquel il est demandé, pour statuer sur le sort d'une créance indemnitaire, d'apprécier l'existence d'une responsabilité du débiteur, ne peut rejeter la créance, mais peut seulement constater qu'elle ne relève pas de sa compétence ; qu'au cas présent, la cour d'appel a jugé que la société ESPACE FRANCE CHEVAL ne pouvait être désignée en qualité de contrôleur dans la mesure où elle reconnaissait elle-même que le juge-commissaire n'aurait pas eu le pouvoir de fixer sa créance indemnitaire ; qu'en se déterminant ainsi cependant que ce défaut de pouvoir du juge-commissaire, qui ne l'aurait pas conduit à rejeter la créance mais uniquement à constater qu'une instance est en cours ou que la contestation ne relève pas de sa compétence, ne pouvait faire obstacle à la désignation de la société ESPACE FRANCE CHEVAL en qualité de contrôleur, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation des articles L. 624-2 et L. 621-10 du code de commerce ;
3° Alors subsidiairement que l'ouverture d'une procédure collective interdit toute action d'un créancier tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent sur le fondement d'une créance ne relevant pas du privilège de l'article L. 622-17 ; que le créancier ne peut alors poursuivre le paiement de sa créance, mais peut uniquement déclarer sa créance à la procédure et introduire une action tendant à faire reconnaître le principe de cette créance ; qu'au cas présent, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que la société ESPACE FRANCE CHEVAL avait déclaré à la procédure collective de la société ETABLISSEMENTS GOURAULT une créance, notamment indemnitaire, pour rupture d'une relation commerciale établie et avait, postérieurement à l'ouverture de la procédure collective, introduit une action tendant à faire reconnaître le principe de la responsabilité de la société ETABLISSEMENTS GOURAULT (arrêt p. 3 § 7) ; que, plutôt que d'examiner le bien-fondé de la créance au regard de la déclaration de créances produite par l'exposante, la cour d'appel a considéré que la créance de la société ESPACE FRANCE CHEVAL n'aurait pas été fondée en son principe dès lors que l'assignation ne contenait pas de demande indemnitaire ; qu'en se déterminant ainsi, cependant qu'eu égard au principe de l'interdiction des poursuites, une telle demande ne pouvait être formulée, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article L. 621-10 ensemble l'article L. 622-21-I du code de commerce ;
4° Alors que l'article L. 621-10 du code de commerce dispose que le juge-commissaire « désigne » un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui en font la demande ; que ce texte ne pose comme condition de la désignation que le respect de causes d'incompatibilité limitativement énumérées tenant à des liens de parentés, d'alliance, ou à des liens capitalistiques avec le débiteur ; qu'ainsi, hors le cas où le nombre de demandes est supérieur à cinq, le juge est tenu de désigner en qualité de contrôleur les créanciers qui en font la demande, dès lors qu'ils n'entrent pas dans les cas d'incompatibilité prévus par le texte ; qu'au cas présent, pour rejeter la demande de la société ESPACE FRANCE CHEVAL tendant à être désignée en qualité de contrôleur, la cour d'appel a considéré qu'il ne paraissait pas « opportun » de la désigner en qualité de contrôleur (arrêt p. 4 § 1) ; qu'en s'octroyant ainsi un pouvoir d'appréciation dans la désignation des contrôleurs allant au-deà des seules incompatibilités prévues par le texte, sans constater que plus de cinq créanciers demandaient à être désignés contrôleurs, la cour d'appel a ajouté à la loi et excédé ses pouvoirs, en violation de l'article L. 621-10 du code de commerce ;
5° Alors en tout état de cause qu'il est constant que la créance de la société ESPACE FRANCE CHEVAL n'était pas uniquement indemnitaire et, en ce sens, soumise à fixation par le juge du fond, mais résultait également de documents émanant du débiteur lui-même (notamment des avoirs) ; qu'en considérant que la créance de l'exposante aurait été uniquement indemnitaire, et donc sujette à discussion, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile.
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Sauvegarde des entreprises
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.