par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 8 mars 2006, 03-20258
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
8 mars 2006, 03-20.258

Cette décision est visée dans la définition :
Déchéance




AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., agent de l'Etat, a été blessé le 12 octobre 1994 dans un accident de la circulation impliquant le véhicule de M. Y... assuré auprès de la MACIF ; que, par lettres reçues le 14 mai 1996, la MACIF a demandé à la direction du commissariat de la marine et à la Caisse des dépôts et consignations, qui avaient versé des prestations, le montant de leurs créances en leur indiquant que l'état de santé de M. X... était consolidé et leur a rappelé les dispositions des articles 14 et 15 de la loi du 5 juillet 1985 ;

que par lettres des 18 juillet et 20 août 1996, ces organismes ont indiqué qu'ils ne pouvaient satisfaire à cette demande, l'état de M. X... n'étant pas encore consolidé ; que, le 29 octobre 1998, une transaction a été conclue entre l'assureur et la victime ; que la Caisse des dépôts et consignations et l'agent judiciaire du Trésor, représentant la direction du commissariat de la marine, qui avaient réclamé le remboursement de leurs débours, se sont vu opposer par la MACIF la déchéance de leur créance prévue par l'article L. 211-11 du Code des assurances ; qu'ils ont assigné M. X..., M. Y... et son assureur devant le tribunal de grande instance afin d'obtenir le remboursement de leurs prestations ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y... et la MACIF font grief à l'arrêt d'avoir accueilli les demandes en paiement formulées par la Caisse des dépôts et consignations et l'agent judiciaire du Trésor et de les avoir condamnés à payer diverses sommes à ces organismes, alors, selon le moyen :

1 ) que le défaut de production des créances des tiers payeurs, dans le délai de quatre mois à compter de la demande émanant de l'assureur, entraîne déchéance de leurs droits à l'encontre de l'assureur et de l'auteur du dommage ; qu'ainsi que l'a constaté la cour d'appel, la Caisse des dépôts et consignations ainsi que l'agent judiciaire du Trésor auraient dû faire connaître le montant de leur créance à la MACIF le 15 septembre 1996, mais s'en sont abstenus ; qu'en admettant pourtant le recours de ces tiers payeurs, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 211-11 du Code des assurances ;

2 ) que le défaut de production des créances des tiers payeurs, dans le délai de quatre mois à compter de la demande émanant de l'assureur, entraîne déchéance de leurs droits à l'encontre de l'assureur et de l'auteur du dommage ; que le fait que les organismes sociaux aient estimé, contrairement aux deux experts médicaux ayant examiné la victime, que son état n'était pas consolidé le 2 avril 1996, lorsque la MACIF leur a adressé un courrier les informant de la consolidation de la victime et leur a demandé de lui faire connaître le montant de leurs créances ne les dispensait pas de faire connaître le montant de leurs débours, serait-ce à titre provisoire ; qu'en considérant toutefois que le fait que les organismes sociaux aient indiqué à l'assureur qu'ils estimaient que l'état de M. X... n'était pas consolidé les dispensait de faire connaître leur créance à l'assureur tenu de faire une offre légale d'indemnisation et les faisait échapper à la déchéance de leurs droits à l'encontre de l'assureur et du responsable de l'accident, la cour d'appel a violé l'article L. 211-11 du Code des assurances ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 211-11 du Code des assurances que la déchéance des droits des tiers payeurs à l'encontre de l'assureur de l'auteur du dommage, laquelle sanctionne le défaut de production de leurs créances dans le délai de quatre mois à compter de la demande de l'assureur de la personne tenue à réparation, ne leur est opposable que dans la mesure où les conditions et délais de la procédure d'indemnisation organisée par les articles L. 211-9 et suivants du Code des assurances ont été respectés par l'assureur ;

Et attendu que l'arrêt retient que, si la demande de production de leurs créances a été faite aux tiers payeurs par lettres reçues le 14 mai 1996, la première offre d'indemnisation est en date du 13 décembre 1997 et que celle qui a été acceptée a été proposée le 29 septembre 1998 ;

Que de ces constatations et énonciations, dont il ressort que les conditions et délais de la procédure d'indemnisation prévue par les textes précités n'avaient pas été respectés, la cour d'appel a exactement déduit que l'assureur ne pouvait opposer la déchéance de leurs créances à la direction du commissariat de la marine et à la Caisse des dépôts et consignations ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 211-17 du Code des assurances ;

Attendu que seule la victime peut prétendre au bénéfice d'intérêts majorés produits de plein droit sur sa créance en cas de non paiement par l'assureur, dans le délai d'un mois, des sommes convenues dans la transaction ;

Qu'en accordant à la Caisse des dépôts et consignations le bénéfice des intérêts majorés prévus par l'article L. 211-17 du Code des assurances, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'il y a lieu de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée, la date du point de départ des intérêts n'étant pas discutée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a condamné in solidum M. Y... et la MACIF à payer à la Caisse des dépôts et consignations les intérêts au taux majoré prévus par l'article L. 211-17 du Code des assurances à compter du 23 septembre 1999, l'arrêt rendu le 9 septembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DIT que la somme de 34 992,13 euros portera intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 1999 ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'agent judiciaire du Trésor public ; condamne M. Y... et la Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France in solidum à payer à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 1 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille six.



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Cette décision est visée dans la définition :
Déchéance


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.