par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 23 juin 2009, 07-42678
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Cour de cassation, chambre sociale
23 juin 2009, 07-42.678

Cette décision est visée dans la définition :
Grève




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la dernière branche du moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 29 mars 2007), que M. X..., salarié de la société Unicopa, à laquelle a succédé la société Nutrea en application de l'article L. 122-12 du code du travail, a fait grève le 16 mai 2005, qui était le lundi de Pentecôte fixé comme journée de solidarité ; qu'estimant avoir fait l'objet d'une mesure discriminatoire à la suite de la retenue effectuée sur son salaire de mai et non de juin selon l'usage dans l'entreprise et sur sa prime d'ancienneté, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement de dommages-intérêts ainsi que de rappel de prime ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer des dommages-intérêts et un rappel de prime alors, selon le moyen, qu'en cas de grève, le salaire, contrepartie de la prestation de travail, est suspendu prorata temporis, s'il n'en est disposé autrement par un accord collectif ; qu'en l'espèce, dès lors que ni la convention collective ni aucun accord d'entreprise ne prévoyait le maintien de la prime d'ancienneté en cas de suspension du contrat de travail sans maintien du salaire, l'employeur était en droit de réduire cette prime prorata temporis pour fait de grève ; qu'en affirmant au contraire que cette suspension était discriminatoire au prétexte que "les salariés absents, notamment pour maladie, continuent de percevoir leur prime d'ancienneté", sans rechercher si, à la différence de la grève, le maintien du salaire et des primes n'était pas expressément prévu en cas de maladie par la loi ou les dispositions conventionnelles applicables, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 521-1 et suivants du code du travail ;

Mais attendu que si l'employeur peut tenir compte des absences, même motivées par la grève, pour le paiement d'une prime, c'est à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution ;

Et attendu que la cour d'appel ayant constaté que les absences pour maladie n'entraînaient pas dans l'entreprise d'abattement de la prime d'ancienneté, elle a pu justement en déduire, s'agissant de périodes d'absence qui ne sont pas légalement assimilées à un temps de travail effectif, que le non-paiement de la prime pour absence pour fait de grève revêtait un caractère discriminatoire ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du moyen qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Nutrea aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Nutrea à payer à M. X... la somme de 1 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille neuf.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP VIER, BARTHELEMY et MATUCHANSKY, avocat aux Conseils pour la société Nutrea

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société NUTREA à payer à Monsieur X... les sommes de 7,07 à titre de rétablissement de la prime d'ancienneté avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, de 100 à titre de dommages et intérêts pour discrimination et celle de 50 pour frais irrépétibles ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... soutient avoir été victime de discrimination à la suite de la grève à laquelle ils ont participé le lundi 16 mai 2005 au motif d'une part que la retenue sur salaire a été effectuée dès le mois de mai et d'autre part que l'employeur a opéré une retenue non seulement sur son salaire de base mais sur la prime d'ancienneté alors que les incidences éventuelles sur la rémunération n'interviennent en règle générale que le mois suivant et que les primes continuent à être versées aux salariés absents ; en premier lieu que force est de constater : que les consignes du service du personnel adressées aux chefs de service et intitulées « saisie des données de gestion des temps » font apparaître très clairement que pour le mois de mai 2005 le recueil des données s'effectue du 18 avril au 15 mai 2005 et pour le mois de juin 2005 du 16 mai au 19 juin 2005, que le bulletin de paye de Monsieur X... du mois de mai 2005 mentionne expressément qu'ils sont établis « selon les éléments recueillis » du 18 avril au 15 mai 2005 alors que la grève a eu lieu le 16 mai, que les primes de nuit et d'astreinte relatives à la seconde quinzaine du mois de même que les congés payés pris au cours de cette seconde quinzaine n'apparaissent que sur les bulletins de paye du mois suivant, que les absences pour maladie dont fait état la société ne sont en réalité prises en compte que le mois suivant si le 1 er jour d'absence se situe dans la seconde quinzaine du mois et n'apparaissent sur le bulletin de salaire du mois en cours que lorsque les absences se prolongent et sont continues ; qu'il est ainsi établi que, comme ses collègues grévistes, Monsieur X... a subi un traitement différent de celui qui est appliqué dans l'entreprise aux autres salariés et lié à l'exercice du droit de grève ; en second lieu qu'il est constant et d'ailleurs non contesté que les salariés absents notamment pour maladie continuent à percevoir leur prime d'ancienneté ; que si l'employeur est en droit de tenir compte des absences même motivées par la grève, à l'occasion de l'attribution d'une prime d'ancienneté ou de chauffeur c'est à la condition que toutes les absences, autorisées ou non entraînent les mêmes conséquences ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que la retenue opérée à tort de ce chef constitue une sanction pécuniaire prohibée; que Monsieur X... est dès lors fondé à obtenir le remboursement de la somme qu'il réclame à ce titre ainsi que des dommages intérêts en réparation du préjudice moral et financier résultant de la mesure discriminatoire dont il a fait l'objet et qui est caractérisée, dont le montant sera fixé à la somme de 100 euros ;

ALORS QUE, D'UNE PART il n'y a pas traitement discriminatoire lorsqu'il est justifié que les retenues de salaire pour fait de grève interviennent, comme les retenues sur salaire pour maladie, au cours du mois durant lequel la suspension a eu lieu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait décider le contraire au prétexte que le bulletin de paie de Monsieur X... de mai 2005 mentionnait qu'il avait été établi, selon une note interne, en fonction des éléments recueillis du 18 avril au 15 mai 2005 alors que la grève avait eu lieu le 16 mai et que les primes de nuit et d'astreinte de la seconde quinzaine n'apparaissaient que sur les bulletins de paie du mois suivant, dès lors qu'elle constatait elle-même que les absences pour maladie apparaissaient bien sur le bulletin du mois en cours lorsque l'absence intervenait au cours de la seconde quinzaine du mois; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L 521-1 du code du travail;

ALORS QUE, D'AUTRE PART la société NUTREA avait fait valoir et démontré, par huit exemples correspondant à des absences pour maladie intervenues durant la seconde quinzaine des mois de janvier, mai, septembre 2003, mai et août 2004, février et mai 2005, que la retenue pour absence non rémunérée avait bien été opérée sur la paye du mois de l'absence, y compris lorsque celle-ci était intervenue en fin de mois; qu'en affirmant dès lors que « les absences pour maladie dont fait état la société ne sont en réalité prises en compte que le mois suivant si le 1 er jour d'absence se situe dans la seconde quinzaine du mois », la cour d'appel a dénaturé les conclusions et éléments de preuve régulièrement versés aux débats par la société NUTREA, et violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS QU'EN OUTRE, en cas de grève, le salaire, contrepartie de la prestation de travail, est suspendu prorata temporis, s'il n'en est disposé autrement par un accord collectif., qu'en l'espèce, dès lors que ni la convention collective ni aucun accord d'entreprise ne prévoyait le maintien de la prime d'ancienneté en cas de suspension du contrat de travail sans maintien du salaire, l'employeur était en droit de réduire cette prime prorata temporis pour fait de grève; qu'en affirmant au contraire que cette suspension était discriminatoire au prétexte que « les salariés absents, notamment pour maladie, continuent de percevoir leur prime d'ancienneté », sans rechercher si, à la différence de la grève, le maintien du salaire et des primes n'était pas expressément prévu en cas de maladie par la loi ou les dispositions conventionnelles applicables, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 521-1 et suivants du code du travail.



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Cette décision est visée dans la définition :
Grève


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.