par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 26 mai 2010, 09-60278
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Cour de cassation, chambre sociale
26 mai 2010, 09-60.278

Cette décision est visée dans la définition :
Section syndicale




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, qui est recevable :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Moulins, 19 juin 2009), que, par lettre du 25 mai 2009, le syndicat UNSA-FESSAD a notifié à la Caisse d'allocations familiales de l'Allier la désignation de Mme X... en qualité de représentante de la section syndicale ; que l'employeur a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de cette désignation ;

Attendu que la Caisse d'allocations familiales de l'Allier fait grief au jugement de la débouter de cette demande alors, selon le moyen :

1°) que pour constituer au sein d'une entreprise ou d'un établissement une section syndicale et désigner un représentant de ladite section, le syndicat doit justifier de «plusieurs adhérents dans l'entreprise ou dans l'établissement», et que tel n'est pas le cas du syndicat UNSA-FESSAD qui, à la date de la désignation de Mme X... effectuée le 25 mai 2009, ne justifiait, hormis cette dernière, que d'un seul adhérent en la personne de M. Y... ; qu'en décidant, pour valider la constitution de la section litigieuse, que le syndicat justifierait de trois adhésions avant la lettre de désignation du 25 mai 2009, le tribunal d'instance a dénaturé le bulletin d'adhésion de Mme Z... qui datait du 15 juin 2009, en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause et l'article 1134 du code civil ;

2°) qu'il résulte de la nature même de la mission du représentant de la section syndicale, qui est de faire vivre la section syndicale afin que le syndicat qui l'a désignée obtienne les 10 % nécessaires aux prochaines élections professionnelles, qu'un représentant de la section syndicale ne saurait remplir des mandats émanant d'autres organisations syndicales concurrentes ; de sorte qu'en approuvant l'exercice simultané par Mme X... des mandats de déléguée du personnel et de membre du comité d'entreprise sous l'étiquette CFDT, et de représentant de la section syndicale UNSA-FESSAD, le juge d'instance qui ne se prononce pas sur l'incompatibilité des missions concomitamment exercées au profit d'organisations concurrentes a violé les articles L. 2131-1, L. 2142-1, L. 2142-1-1, et L. 2141-4 du code du travail ;

3°) qu'il est constant que Mme X... avait été élue, sous l'étiquette CFDT, d'une part en qualité de déléguée du personnel et d'autre part en qualité de membre du comité d'entreprise ; qu'en l'espèce, dans sa lettre du 25 mai 2009, Mme X... avait seulement informé le représentant de la CFDT, M. A..., de ce «qu'elle n'entendait pas poursuivre l'exercice de ses mandats de représentante du personnel sous l'étiquette de CFDT» et de sa «démission du syndicat CFDT» ; que cette lettre ne pouvait donc concerner que le seul mandat de «délégué du personnel», ce qui ne faisait nullement disparaître l'incompatibilité dénoncée par la Caisse d'allocations familiales de l'Allier ; qu'en décidant nonobstant que la salariée avait valablement pu se faire désigner par l'UNSA-FESSAD, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2131-1, L. 2142-1, L. 2142-1-1, et L. 2141-4 du code du travail ;

4°) que c'est à la date de la désignation litigieuse qu'il convient de se placer pour en apprécier la régularité ; qu'il résultait du courrier du 25 mai 2009 adressé par Mme X... au représentant de la CFDT que celle-ci n'entendait mettre un terme à son affiliation à la CFDT qu'à compter du 31 mai 2009, ce dont il résultait que sa désignation par l'UNSA en date du 25 mai 2009 devait être invalidée ; qu'en décidant le contraire, le juge d'instance a de plus fort violé les articles L. 2131-1, L. 2142-1, L. 2142-1-1, et L. 2141-4 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'il résulte de l'article L. 2142-1 du code du travail que la section syndicale doit comporter au moins deux adhérents, l'un deux pouvant être désigné en qualité de représentant de la section syndicale ;

Attendu, ensuite, que le tribunal, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que Mme X... avait démissionné de ses mandats de représentante du personnel CFDT lors de sa désignation le 25 mai 2009 par le syndicat UNSA-FESSAD ;

Qu'il s'ensuit que le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Caisse d'allocations familiales de l'Allier à payer à la Fédération des syndicats de services activités diverses, tertiaires et connexes et Mme X... la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux conseils pour la caisse d'allocations familiales (CAF) de l'Allier ;

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR débouté la Caisse d'allocations familiales de l'ALLIER de sa demande tendant à l'annulation de la désignation de Madame X... en qualité de représentante d'une section syndicale, et D'AVOIR validé cette désignation ;

AUX MOTIFS QU' « il sera donné acte à la Caisse requérante qu'elle abandonne sa contestation sur le moyen tirée de la constitution de la section syndicale ; qu'il convient néanmoins d'examiner cette contestation sur le fond, dans la mesure où elle présente un lien avec le second point du litige ;
qu'ainsi que le rappellent les parties, l'article L.2142-1 du code du travail énonce que, dès lors qu'ils ont plusieurs adhérents dans l'entreprise, chaque syndicat qui y est représentatif, ou, entre autres, chaque organisation syndicale qui satisfait aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance, est légalement constituée depuis au moins deux ans, et dont le champ professionnel et géographique couvre l'entreprise concernée, peut constituer, au sein de l'entreprise ou de l'établissement, une section syndicale qui assure la représentation des intérêts matériels et moraux de ses membres, conformément à l'article L.2131-1 du même code ; que L'U.N.S.A.-F.E.S.S.A.D. déclare et justifie qu'elle est une union de syndicats, créée le 1" mars 1999 et adhérant à l'U.N.S.A. ; que la Caisse adverse ne conteste pas qu'elle constitue ainsi une union de syndicats, telle que prévue par les articles L.2133-1 et L.2133-2 du code du travail ; qu'elle peut dès lors exercer, conformément à l'article L. 2133-3, tous les droits reconnus aux syndicats eux-mêmes, y compris celui de constituer une section syndicale ; que la Caisse ne conteste pas que le Syndicat satisfait aux conditions de respect des valeurs, et de champ professionnel et géographique ci-avant rappelées ; que le Syndicat justifie d'ailleurs de l'adhésion de trois salariés de la Caisse, dont trois sont intervenue dès avant la lettre de désignation du 25 mai 2009 ; qu'il s'ensuit que, comme l'admet en définitive la Caisse requérante, toutes les conditions légales à la constitution de la section litigieuses sont remplies, et que cette constitution est régulière ; que selon l'article L. 2142-1-1 du code du travail, chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1, une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement de cinquante salariés ou plus, peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement ; que le représentant de la section syndicale bénéficie en principe des mêmes prérogatives que le délégué syndical (même article) ; et que lui sont applicables, entre autres, les dispositions des articles L. 2143-7 à -10 (article L. 21424-2) ; que la Caisse d'allocations familiales de l'Allier, entreprise de plus de cinquante salariés, et PU.N.S.A.-F.E.S.S.A.D., qui n'est pas un syndicat représentatif dans cette entreprise, se trouvent soumis à ces dispositions ; que la Caisse requérante critique en premier lieu la désignation de Mme X..., en ce qu'elle n'a pas été précédée de la création de la section syndicale, alors que le représentant d'une section syndicale ne peut être régulièrement investi que si cette section existe au préalable ; que cependant et comme le répliquent le Syndicat et Mme X..., la constitution d'une section syndicale, et l'information donnée de cette création à l'employeur, ne sont soumises à aucune forme ; que rien n'interdit à une section syndicale de faire connaître à l'employeur, par une même lettre, et sa création et la désignation de son représentant, qui peuvent être simultanées ; que tel apparaît avoir été le cas pour la constitution de la section syndicale et la désignation de Mme X..., intervenues l'une et l'autre le 25 mai 2009, le jour même où elles ont été portées à la connaissance de la Caisse ; que la désignation de Mme X... n'est donc pas entachée d'une irrégularité pour ce premier motif ; que la Caisse reproche ensuite à Mme X... d'exercer à la fois ses fonctions de représentante syndicale d'une part, et celles de déléguée du personnel et de représentante du personnel au comité d'entreprise d'autre part, alors qu'elle a été élue à ces dernières fonctions auxquelles sur une liste commune aux syndicats C.F.D.T., C.F.T.C. et C.G.T., communiquée à la direction le 20 février 2006 ; que ces dernières fonctions sont a priori compatibles, selon l'article L. 2143-9 du code du travail, avec celles de représentant de section syndicale ; que la Caisse soutient néanmoins que Mme X..., dès lors qu'elle exerce ses fonctions de déléguée du personnel, et de représentante du personnel au comité d'entreprise, sous l'étiquette d'un autre syndicat que (la C.F.D.T.), alors que ces deux syndicats n'ont pas des intérêts similaires, n'exécuterait pas loyalement ses différents mandats, en infraction à l'article 1134 alinéa 3 du code civil, selon lequel les obligations doivent s'exécuter de bonne foi ; que cependant l'article 1134 du code civil ne s'applique que dans les relations entre deux parties à un contrat, et dans l'intérêt de chacune d'elles ; que la Caisse n'est donc pas fondée à invoquer cet article à l'encontre de Mme X... et du Syndicat, puisque les mandats en cause ne sont donnés à Mme X... que par les salariés et par le syndicat, sans créer aucun lien contractuel entre la Caisse employeuse et Mme X... ; qu'au surplus, et à supposer que l'exercice simultané des dites fonctions, sous l'étiquette de deux syndicats différents, constitue une irrégularité pouvant affecter leur exercice, le Syndicat et Mme X... justifient que celle-ci, par une lettre qu'elle a envoyée à M. A... (membre du syndicat C.F.D.T.) le 25 mai 2009, donc le jour même de sa désignation comme représentante de section syndicale, lui a fait connaître qu'elle n'entendait pas poursuivre l'exercice de ses mandats de représentante" du personnel sous l'étiquette de la C.F.D.T ; que Mme X... a précisé à l'audience, par l'intermédiaire de son avocat, que par cette lettre elle avait informé M. A... non pas de sa démission de son mandat de déléguée du personnel, mais de sa démission du syndicat C.F.D.T. ; que ce faisant, Mme X... a mis fin, le jour même où elle a été désignée comme représentante syndicale, à l'irrégularité ou incompatibilité que lui reproche la Caisse employeuse ; et que l'éventuel manque de loyauté que lui reproche la Caisse employeuse, pour avoir été élue sur la liste présentée par un syndicat qu'elle quitté par la suite, ne cause le cas échéant de grief qu'aux salariés qui l'ont élue en 2006, mais non à l'employeur ; que la désignation de Mme X... aux fonctions de représentante de section syndicale n'apparaît donc pas non plus irrégulière pour ce second motif, la requête de la Caisse sera rejetée » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE pour constituer au sein d'une entreprise ou d'un établissement une section syndicale et désigner un représentant de ladite section, le syndicat doit justifier de « plusieurs adhérents dans l'entreprise ou dans l'établissement », et que tel n'est pas le cas du syndicat UNSA FESSAD qui, à la date de la désignation de Madame X... effectuée le 25 mai 2009, ne justifiait, hormis cette dernière, que d'un seul adhérent en la personne de Monsieur Y... ; qu'en décidant, pour valider la constitution de la section litigieuse, que le syndicat justifierait de trois adhésions avant la lettre de désignation du 25 mai 2009 (jugement, p.3, al.3), le tribunal d'instance a dénaturé le bulletin d'adhésion de Madame Z... qui datait du 15 juin 2009, en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause et l'article 1134 du Code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU' il résulte de la nature même de la mission du représentant de la section syndicale, qui est de faire vivre la section syndicale afin que le syndicat qui l'a désignée obtienne les 10% nécessaires aux prochaines élections professionnelle, qu'un représentant de la section syndicale ne saurait remplir des mandats émanant d'autres organisations syndicales concurrentes ; de sorte qu'en approuvant l'exercice simultané par Mme X... des mandats de déléguée du personnel et de membre du comité d'entreprise sous l'étiquette CFDT, et de représentant de la section syndicale UNSA FESSAD, le juge d'instance qui ne se prononce pas sur l'incompatibilité des missions concomitamment exercées au profit d'organisations concurrentes a violé les articles L.2131-1, L.2142-1, L.2142-1-1, et L.2141-4 du code du travail ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QU' il est constant que Madame X... avait été élue, sous l'étiquette CFDT, d'une part en qualité de déléguée du personnel et d'autre part en qualité de membre du comité d'entreprise ; qu'en l'espèce, dans sa lettre du 25 mai 2009, Madame X... avait seulement informé le représentant de la CFDT, M. A..., de ce «qu'elle n'entendait pas poursuivre l'exercice de ses mandats de représentante du personnel sous l'étiquette de CFDT» et de sa «démission du syndicat CFDT» (jugement, p.4, al.4) ; que cette lettre ne pouvait donc concerner que le seul mandat de « délégué du personnel », ce qui ne faisait nullement disparaître l'incompatibilité dénoncée par la Caisse d'allocations familiales de l'ALLIER ; qu'en décidant nonobstant que la salariée avait valablement pu se faire désigner par l'UNSA FESSAD, le tribunal d'instance a violé les articles L.2131-1, L.2142-1, L.2142-1-1, et L.2141-4 du code du travail ;

ALORS, ENFIN ET DE TOUTE FACON, QUE c'est à la date de la désignation litigieuse qu'il convient de se placer pour en apprécier la régularité ; qu'il résultait du courrier du 25 mai 2009 adressé par Madame X... au représentant de la CFDT que celle-ci n'entendait mettre un terme à son affiliation à la CFDT qu'à compter du 31 mai 2009, ce dont il résultait que sa désignation par l'UNSA en date du 25 mai 2009 devait être invalidée ; qu'en décidant le contraire, le juge d'instance a de plus fort violé les articles L.2131-1, L.2142-1, L.2142-1-1, et L 2141-4 du code du travail.



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Section syndicale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.