par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. crim., 6 juillet 2011, 11-82861
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Cour de cassation, chambre commerciale
6 juillet 2011, 11-82.861

Cette décision est visée dans la définition :
Chose jugée




N° U 11-82.861 F-P+B

N° 4181



LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six juillet deux mille onze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller STRAEHLI et les conclusions de M. l'avocat général MAZARD ;

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formée par mémoire spécial reçu le 15 avril 2011 et présenté par :


- M. Saro X...,


à l'occasion de la requête en récusation présentée par lui au premier président de la Cour de cassation contre Mme Catherine Husson-Trochain, premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

"Les articles 669, 670, 671, 672 et 673 du code de procédure pénale portent-ils atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment :

- au droit à la liberté en général comme droit naturel de l'homme consacré par les articles 4 et 5 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, (ci-après "DDH")
- au droit à la justice et aux droits de la défense garantis par l'article 16 DDH ;
- au droit à la liberté d'expression garanti par l'article 11 DDH ;
- à l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 fixant, en partie, le domaine de la loi ;
- au principe d'égalité garanti par l'article 6 DDH et l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
- au principe de la légalité des délits et des peines consacré par les articles 7 et 8 DDH,

En ce qu'ils :

- désignent, en la personne du premier président de la cour d'appel, un organe juridictionnel inapte, au regard de l'exigence absolue d'impartialité du juge qu'implique nécessairement l'article 16 DDH, à juger de l'impartialité des membres de l'assemblée générale de ladite cour ;
- ne prévoient ni le principe d'un sursis à statuer accompagnant la présentation de la requête en récusation ni la possibilité de demander et d'obtenir ultérieurement l'annulation du jugement au cas où la récusation du juge est prononcée ;
- imposent le prononcé automatique d'une amende civile à l'encontre du demandeur en cas de rejet de la demande de récusation dont le montant peut varier, à la discrétion du premier président, de 75 à 750 euros, soit du simple au décuple, sans qu'aucun critère d'appréciation soit fixé par la loi (article 673 CPP) ;
-suppriment toutes voies de recours à l'encontre des décisions rendues par le premier président de la cour d'appel et le premier président de la Cour de cassation, sans qu'aucune raison impérieuse d'un intérêt général justifie une telle atteinte substantielle au droit d'accès à un tribunal garanti notamment par l'article 16 DDH ?".

Attendu que les dispositions critiquées sont applicables à la procédure ;

Attendu qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question ne portant pas sur une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas déjà eu l'occasion de faire application n'est pas nouvelle ;

Et attendu que la question posée ne présente pas, à l'évidence, un caractère sérieux, dès lors que, d'une part, les règles qui fixent, dans les articles 669 à 672 du code de procédure pénale, la procédure de récusation d'un juge ou d'un conseiller, sont de nature administrative et non juridictionnelle et répondent à l'objectif à valeur constitutionnelle d'une bonne administration de la justice, en l'espèce la prévention de demandes abusives de nature à paralyser le cours normal de la justice ; qu'il en va ainsi de la faculté laissée au premier président de la Cour de cassation ou de la cour d'appel d'apprécier, dans chaque cas, s'il y a lieu de surseoir à la continuation de l'information, des débats ou du prononcé du jugement, comme de l'absence de recours prévu contre la décision de ce magistrat ;

Que, d'autre part, la récusation étant une mesure d'administration judiciaire ne saurait avoir pour effet de remettre en cause la chose jugée ;

Qu'en outre, le seul fait que le premier président d'une cour d'appel appartienne à la même juridiction que le magistrat dont la récusation est demandée ne peut suffire à faire douter de son impartialité, s'agissant d'une compétence découlant de la responsabilité administrative qu'il exerce ;

Que, par ailleurs, si l'article 673 du même code impose au premier président de la Cour de cassation ou de la cour d'appel, lorsqu'il rejette une demande de récusation, de prononcer la condamnation du demandeur à une amende civile, ce texte lui donne le pouvoir d'en moduler le montant, de sorte qu'est garanti le principe de l'individualisation de la sanction ;

Qu'il n'est ainsi porté aucune atteinte aux principes des droits de la défense et du droit à un recours effectif, garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni aux principes de la légalité des délits et des peines et de la nécessité de ces dernières, garantis par l'article 8 de ce texte ;

Qu'enfin, le demandeur n'explicite pas en quoi les dispositions critiquées porteraient atteinte aux autres droits et libertés qu'il invoque ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

Par ces motifs :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Straehli conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;


En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;



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Cette décision est visée dans la définition :
Chose jugée


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